Conclusion de la première partie
Notre quête des propriétés
sociohistoriques du discours nationalitaire, objet de la première partie
de notre travail de recherche nous a permis, par le biais de la
causalité rétrospective, de visiter de façon, on ne peut
plus neutre, la réalité empirique du fait ethnique. Dans une
double temporalité, nous avons exploré la colonie et la
précolonie, en analysant la dynamique du discours nationalitaire.
Primo, dans le chapitre premier, voué à
entreprendre une archéologie de l'ethnicité, qui est bien plus
qu'une historicité désincarnée, qui longtemps a
inhumée la réalité originelle de l'animal politique ; nous
avons exhumé donc les archives de l'humanité sociale, pour
établir les prolégomènes pour une théorie de
l'homo ethnicus, à l'aide des éléments empiriques
tels que l'étymologie et la généalogie de la
catégorie nation, en établissant ses homologies notamment, avec
le concept d'ethnie.
Ensuite, il nous a été donné de rappeler
l'universalité des ethnocentrismes, et les usages classificatoires des
ethnonymes pour libérer le fait nationalitaire des seules prisons
africaines dans lesquelles, certains ethnologues l'ont enfermé jadis,
pendant que la pensée africaine peine à s'en
émancipé, pour le déférer dans la conscience de
l'humanité entière. Freud enseignait que « le premier
être humain à avoir décroché à son ennemi une
insulte plutôt qu'une flèche est le fondateur de la civilisation
»193
Dans le second chapitre, il s'est agi, non pas de
dédouaner la colonie de la responsabilité de ses crimes
narcissiques et ethnocidaires, mais rétablir les conditions de
l'érection des disparités préexistante en
réalité substantielle. Si la genèse de l'ethnicité
est l'apanage de la précolonie, le manifeste de la colonie en porte des
« gènes ». Gène de l'ethnicité en effet, la
différence va y revêtir fallacieusement, une essence
génétique du fait du darwinisme social. Le darwinisme social qui
postule une hiérarchie des races, va servir à légitimer le
colonialisme. Non seulement, l'idéologie de la race va bouleverser les
fondements précoloniaux de la stratification sociale et des rapports
intercommunautaires pour introduire, de manière arbitraire une
hiérarchie entre les peuples autochtones. La notion d'«
évolué » est d'ailleurs tributaire de ces logiques de
dominations. La domination est effectivement l'idée sous-tendue par
le
193 S. Freud, « Sur les mécanismes psychiques des
phénomènes hystériques » In Gesammelte
(OEuvres complètes), S. fisher, tome 19, P.192.
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colonialisme, donc, l'idéologie de la hiérarchie
des races devient une stratégie permettant d'asseoir l'oeuvre
colonisatrice.
Gêne ensuite du fait des implications relatives à
l'application sur le terrain de cette idéologie, qui va diviser
l'Afrique, par le passage des frontières naturelles aux
frontières arbitraires de la colonisation lors de la conférence
de Berlin, entre 1884 et 1885. La Gêne est aussi celle de la
configuration bipolaire des villes coloniales et enfin la création
arbitraire des frontières qui vont tantôt séparer des
nations, dont les peuples avaient un destin commun, tantôt
rapproché d'autres qui s'opposaient farouchement dans la
précolonie. La nation moderne tient, de la définition de la
société entant que contrat social entre les individus, par
opposition à la nation précoloniale qui elle se rapporte
plutôt à la famille.
L'assimilation des autochtones garantit leur soumission et le
légitime par le biais de l'idéologie la supériorité
du colon. Le colonisé, l'évolué croit lui-même
à sa supériorité sur les autres et conforte donc celle du
colon.
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