1.7. Présentation et
analyse des résultats
1.7.1. Présentation et
analyse des résultats des estimations par le modèle probit
Le tableau ci-dessous résume les résultats des
estimations du modèle probit pour chacun des pays. Pour chaque pays, on
a fait deux estimations. Dans la première estimation (I), on a
utilisé comme variables explicatives le niveau de pauvreté, le
niveau d'éducation, la proximité avec le parti au pouvoir, la
confiance au président, l'appréciation de la situation
économique actuelle et la participation à des débats
politiques. Dans la seconde estimation (II), nous avons utilisé en plus
des variables du modèle (I) des variables démographiques
(âge, sexe, milieu de résidence).
Tableau 2 : Résultats de l'analyse
économétrique par le modèle probit
|
(I)
|
(II)
|
|
limitation du nombre de mandats
|
BURKINA FASO
|
BENIN
|
BURKINA FASO
|
BENIN
|
pauvreté
|
0.0621
|
0.0653
|
0.0816*
|
0.0763
|
|
(0.0418)
|
(0.0508)
|
(0.0432)
|
(0.0515)
|
éducation
|
0.112***
|
0.163***
|
0.110***
|
0.145***
|
|
(0.0360)
|
(0.0329)
|
(0.0415)
|
(0.0364)
|
parti_pouvoir
|
-0.316***
|
-0.0298
|
-0.309***
|
-0.0159
|
|
(0.0887)
|
(0.109)
|
(0.0908)
|
(0.110)
|
confiance au président
|
-0.302***
|
-0.0975**
|
-0.301***
|
-0.0989**
|
|
(0.0488)
|
(0.0452)
|
(0.0498)
|
(0.0458)
|
situation économique
|
-0.0690*
|
-0.187***
|
-0.0583
|
-0.189***
|
|
(0.0360)
|
(0.0407)
|
(0.0372)
|
(0.0413)
|
débats politiques
|
0.187***
|
0.107*
|
0.182***
|
0.0932
|
|
(0.0620)
|
(0.0645)
|
(0.0643)
|
(0.0679)
|
âge
|
|
|
0.103*
|
0.0630
|
|
|
|
(0.0576)
|
(0.0625)
|
sexe
|
|
|
-0.0460
|
-0.0616
|
|
|
|
(0.0933)
|
(0.0952)
|
milieu de résidence
|
|
|
-0.209*
|
-0.320***
|
|
|
|
(0.113)
|
(0.0927)
|
Constant
|
|
|
1.144***
|
1.525***
|
|
|
|
(0.358)
|
(0.331)
|
Nombre d'observations
|
960
|
1115
|
932
|
1107
|
Prob > chi2
|
0.000
|
0.000
|
0.000
|
0.000
|
Pseudo R2
|
0.0836
|
0.0617
|
0.0921
|
0.0714
|
*** : significatif à 1%, ** : significatif à 5%, *
: significatif à 10%. Les erreurs types sont entre parenthèses
Source : l'auteur
Nos estimations par le modèle probit, nous
révèle dans le modèle (I) qu'au Burkina Faso les variables
qui ont un effet significatif sur le choix des individus par ordre de
significativité sont le niveau d'éducation, la proximité
avec le parti au pouvoir, la confiance au président, la participation
aux débats politiques et l'appréciation de la situation
économique. Dans le cas du Bénin, les variables significatives
sont le niveau d'éducation, l'appréciation de la situation
économique, la confiance au président et la participation aux
débats politiques.
Dans le modèle (II), on note que les variables
significatives, dans le cas du
Burkina Faso, sont le niveau d'éducation, la
proximité avec le parti au pouvoir, la confiance au président, la
participation au débats politiques, le niveau de pauvreté,
l'âge et le milieu de résidence. On remarque donc que la variable
liée au niveau de pauvreté est devenue significative mais cette
significativité reste faible. Dans le cas du Bénin, les variables
significatives sont le niveau d'éducation, l'appréciation de la
situation économique, le milieu de résidence et la confiance au
président.
La pauvreté a un impact positif et faiblement
significatif au Burkina Faso dans le modèle (II). Dans le modèle
(I), cet effet est positif mais non significatif. On peut donc en
déduire que l'impact de la pauvreté est mitigé dans le cas
du Burkina Faso. Néanmoins en s'appuyant sur les résultats du
modèle (II), on peut affirmer que plus on est pauvre plus on est enclin
à la limitation du nombre de mandats présidentiels au Burkina
Faso. Ce résultat pourrait s'expliquer par le fait que les pauvres ont
tendances à penser que leur pauvreté résulte des
politiques menées par le gouvernement en place. En d'autres termes,
s'ils n'arrivent pas à satisfaire leur besoins fondamentaux, c'est parce
que le gouvernement en place ne mène pas des politiques pouvant leur
facilité l'accès à ces biens (eau, nourritures, soins
médicaux,..). C'est donc à juste titre qu'ils pensent que
limiter le mandat du président favoriserait le changement des instances
dirigeantes et par ricochet favoriserait l'avènement d'un nouveau
gouvernement qui pourrait résoudre leurs problèmes. La faiblesse
de la significativité nous conduit à être prudents quant
à l'interprétation que nous venons de faire de ces
résultats. Dans le cas du Bénin, l'effet est positif mais non
significatif dans les deux modèles. Le niveau de pauvreté n'agit
donc pas sur la position des individus quant à la limitation du nombre
de mandats présidentiels au Bénin.
L'éducation a un impact positif et très
significatif (seuil de significativité 1%) dans les deux modèles
des deux pays. Le niveau d'éducation est aussi la seule variable qui
garde une forte significativité quelque soit le pays et quelque soit le
modèle. Le niveau d'éducation semble être donc le meilleur
déterminant du choix de la limitation du nombre de mandats
présidentiels parmi nos variables. Ce résultat vient confirmer
celui révélé par le test de Chi deux. Ce résultat
traduit le fait que plus on a un niveau élevé d'éducation
plus on est favorable à la limitation du nombre de mandats
présidentiels. Nos résultats concordent avec ceux de Wantchekon
et al. (2006) qui avait montré que les individus plus instruits avaient
tendance à adopter une vision intrinsèque de la
démocratie. La limitation du nombre de mandats présidentiels est
donc un désir ardent pour ceux-là qui ont un niveau scolaire de
plus en plus élevé. L'influence de l'éducation est
compréhensible dans la mesure où les intellectuels comprennent
plus les avantages de la limitation des mandats. Ils ont en
général une culture politique plus accru qui est favorisé
par leur niveau d'information.
Au Burkina Faso, plus on est proche du parti au pouvoir moins
on est enclin à la limitation du nombre de mandats présidentiels.
Tandis qu'au Bénin cette variable n'a aucun effet significatif sur les
choix des individus. Cette différence de résultat entre les deux
pays pourrait se justifier par la maturité du peuple béninois en
termes de démocratie. En effet, comme nous l'avons souligné plus
haut les béninois sont habitués à l'alternance
démocratique à l'opposé des burkinabè. Il faut
souligner aussi qu'au Burkina Faso, quand on parle de limitation de mandat
présidentiel, les personnes proches du pouvoir majoritaire font un lien
direct avec le remplacement du président Blaise COMPAORE ce qui affecte
leur choix. En effet, depuis que le parti au pouvoir (CDP) a été
créé, son candidat aux élections présidentielles a
toujours été Blaise COMPAORE qui a d'ailleurs remporté
toutes ces élections. Il y a donc une confusion entre le parti en tant
qu'organisation et la personne du président.
La confiance au président a un effet négatif et
significatif sur le désir de limitation du nombre de mandats dans les
deux pays quelque soit le modèle. Plus les individus ont confiances en
leur président respectif, plus ils sont défavorables à une
quelconque limitation du nombre de mandats présidentiels. La confiance
au président apparaît donc comme un très bon
déterminant du choix des individus dans les deux pays.
Dans les deux pays, on note que l'appréciation de la
situation économique qui prévalait au moment de l'enquête a
un impact négatif sur la position des individus quant à la
limitation du nombre de mandats présidentiels. Cet effet est très
significatif dans le cas du Bénin quelque soit le modèle mais
dans le cas du Burkina Faso il est moins significatif ; il perd même sa
significativité lorsqu'on passe du modèle (I) au modèle
(II). Ainsi plus les individus sont satisfait de la situation
économique de leurs pays respectifs plus il est probable qu'ils soient
opposés à la limitation du nombre de mandats
présidentiels. Ce résultat ne paraît pas à priori
surprenant dans la mesure où « on ne change pas une équipe
qui gagne » selon une expression populaire.
Au Burkina Faso, on observe que la variable débats
politiques a un effet positif et très significatif sur la limitation. En
d'autres termes, plus l'individu mène des discussions en rapport avec
les questions politiques plus il est porté vers la limitation du nombre
de mandats présidentiels. Cela traduit le fait que les personnes qui
sont plus éveillés ou qui ont une maturité (un niveau
élevé d'information) en matière de questions politiques
sont d'avis que la limitation est nécessaire. Dans le cas du
Bénin, cet effet est positif mais il perd de sa significativité
lorsqu'on passe du modèle (I) au modèle (II).
La variable âge a un effet positif dans les deux pays.
Cependant il est faiblement significatif dans le cas du Burkina Faso et non
significatif dans le cas du Bénin. Au Burkina Faso, plus les individus
sont âgés plus ils sont favorables à une limitation du
nombre de mandats présidentiels. Ce résultat peut s'expliquer par
le fait que les adultes ont vécu plus l'expérience de l'absence
d'alternance au Burkina Faso et ont donc assisté ou assistent encore
à ses inconvénients.
Les individus résidant en milieu urbain sont plus
enclins à la limitation que ceux résidant en milieu rural. Loger
en milieu rural diminue donc la probabilité d'opter pour la limitation
du nombre de mandats présidentiels. Ce résultat pourrait
s'expliquer par le fait qu'en milieu rural, les individus sont dans un
environnement où la tradition domine. Le président de la
république est donc comme un « chef traditionnel», on ne
peut le remplacer de son vivant. En d'autres termes, on ne peut limiter le
nombre de mandat.
La variable genre n'a pas d'effet significatif sur le choix
des individus quant à la limitation du nombre de mandats
présidentiels. Le sexe de l'individu ne détermine donc pas son
choix.
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