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Description des conséquences des violations de coutumes Luba-Kasai et leurs thérapies.

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par Augustin Mubiayi Mamba
Université de Kinshasa, RD Congo - Diplome d'Etudes Superieures (D.E.S.) en Psychologie  2015
  

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2.2. Les normes culturelles Luba et leurs applications

Au premier chapitre, nous avons effleuré que le peuple luba est très attaché aux coutumes et à la famille. Ces coutumes regorgent beaucoup d'interdits et/ou sacrilèges. Ceci constitue un code de bonne conduite culturelle et morale. La violation, la transgression ou la non observance de ces normes coutumières est passible des pénalités sociales (Tshibawu). Nous allons décrire les faits saillants de cette société conduisant à des sanctions culturelles qui peuvent se manifester sous forme de maladies psychosomatiques. Tous ces faits lorsqu'ils sont commis au sein d'une même famille, se regroupent autour d'un terme générique « Tshibindi ». Les faits sociaux rapportés ci-après, en rapport avec le tshibindi ont connu l'apport précieux de Benjamin Ngulungu Tshinyenye (1990).

Comme nous l'avons souligné, la culture luba s'articule autour de la famille, du clan, de la tribu, jusqu'à atteindre l'ethnie. Les prescriptions orales qui passent de bouche à oreille, de père en fils et de mère en fille relève de la discipline et le respect de la hiérarchie et d'autrui. Les sanctions qui surviennent de l'indiscipline ou le non respect relèvent de la désobéissance à Dieu et aux ancêtres ou aux anciens qui les représentent parmi les vivants.

La tradition ou la coutume établit les règles pour une vie harmonieuse entre les gens de même lignage, de même échelon ou de même alliance. Ces règles s'articulent autour des totems et tabous.

Il s'agit des normes que les ancêtres ont imposées afin d'avoir une vie harmonieuse et une conduite irréprochable au sein de la famille stable.

Notons que face à toutes ces situations d'impasse, l'agent causal de toutes ces sanctions, tel que Fartunat Mukendi (2003) le répète, n'est pas à rechercher de façon médicale, tant et si bien qu'il ne s'agit pas de ce qu'un médecin légiste peut repérer. Les membres de la famille s'en rendent seulement compte après introspection, si un devin ou vieil homme vient le leur révéler. C'est là que le psychologue clinicien trouve sa place de choix dans l'intervention au sein de notre société.

Les parents sont considérés chez les baluba comme des dieux sur terre. On leur doit respect et obéissance à tous égards. On ne peut pas découvrir la nudité des parents, ni avoir les relations intimes (sexualité) avec son père ou sa mère. On ne doit pas injurier les parents, leur parler avec grossièreté ni arrogance. Pour traduire le fait que les parents ou les anciens les plus sages et que l'on doit rester à leur écoute, un proverbe luba « makaya kaatu atamba nshingu, muana mulela katu watamba shandi » ce qui signifie « les épaules ne dépassent jamais le niveau du coup comme un enfant ne peut dépasser son père ». Bref, les enfants ne doivent en aucun cas défier les parents.

Il découle de ce respect et de cette discipline que toute indiscipline ou toute désobéissance signifie une violation aux préceptes coutumiers et sont passibles des sanctions sévères allant des troubles de comportement mineur à la mort, en passant par plusieurs formes de malédictions (milau ou mitshipu) qui peuvent aussi se manifester par des maladies somatiques, psychiques ou la combinaison de deux à la fois. Si les conséquences de ces violations ne sont pas diagnostiquées rapidement, il y a risque que cela se répande à travers plusieurs générations et on parle de mukiya (ou mikiya au pluriel) qui veut dire qu'il y a contentieux.

Le respect des parents s'étend également à tous ceux qui ont leur rang soit par alliance (comme les beaux-parents), soit par leur âge (ceci inclut les vieillards ou les personnes de troisième âge).

La coutume luba réglemente les relations entre les enfants ou les personnes ayant des liens de consanguinité. Il est formellement interdit aux enfants de même famille de se marier, d'avoir des rapports intimes (sexualité) entre eux, de partager les mêmes conjoints, d'avoir des querelles qui vont jusqu'à faire des parjures (nshiya).

Nous allons décrire quelques concepts saillants de la tradition luba ayant des conséquences génériques.

2.2.1. Inceste/Adultère.

La société traditionnelle Luba règlemente la vie de famille et de couple comme suit :

· dans un foyer, une femme mariée ne peut ni coucher avec un autre homme en dehors de son mari ni recevoir des cadeaux d'un ex-fiancé/amant. Elle ne peut en aucune façon exposer sa nudité devant les membres de sa belle famille. Il s'agit d'un problème de conscience et les conséquences sont multiples. Cet acte peut conduire à la mort de la femme lors d'accouchement, il peut bloquer l'accouchement, il peut conduire à l'infécondité de la femme, cela peut entrainer la mort du mari ou des enfants. Dans d'autres cas, la femme peut arriver à mettre au monde un bébé monstrueux.

· L'homme ne devrait pas coucher avec une autre femme sur son lit conjugal, que son épouse soit présente ou absente. Cet acte est préjudiciable à tout son foyer, c'est-à-dire il peut causer la mort de son épouse ou de ses enfants qu'il aura à engendrer de ce lit souillé avec une autre femme. Le lit conjugal est considéré comme sacré.

· Par respect des liens familiaux, l'homme ne devrait pas avoir des rapports intimes avec sa belle soeur et vice versa. Signalons ici que ceci n'est pas à confondre avec l'héritage ou le rite d'héritage (bumpianyi) qui est un acte réglementé avec des conditions d'application bien précises et qui intervient après la mort d'un des conjoints. Et même en matière d'héritage, il est impérieux de suivre les règles d'usage afin d'éviter les litiges (mikiya).

· La femme ne devrait en aucune circonstance frapper son mari. C'est un sacrilège. Une femme qui se donne à une telle pratique est exposée à des sanctions sociales de la part de membres de sa belle famille. Ceci en vertu du principe que l'homme est le chef de la famille. La femme, quelle que soit sa grande taille par rapport à son mari, lui doit obéissance et soumission. Il y a un proverbe qui dit à ce propos que « kalume kabaka mukaji » ce qui se traduit par « un homme si petit de taille soit-il épouse une femme », et non le contraire.

· La désertion du toit conjugal par une femme mariée, à l'issue d'une dispute, est une contravention aux coutumes si celle-ci est allée se refugier en dehors de la famille de son mari. Il est à noter que plusieurs considérations sont mises en jeu. Peut- être elle peut avoir eu des visites de ses ex-fiancés ou prétendants, elle peut s'exposer à des nouveaux prétendants etc. Alors si après conseils de ses parents, elle décide de regagner son foyer, le conseil familial devrait se réunir pour examiner le cas. Et dans l'entretemps, le soir, c'est tout le quartier que va crier sur elle en disant «  wakupanga mbuji » ce qui veut dire elle a manqué la chèvre, car pour réparer elle devrait payer des amendes auprès des ses belles soeurs qui varient entre l'argent et la chèvre selon le cas et lors de la cérémonie publique on chante «  X wakaya kuabo kabamulonda, x wakalua muele mabele mulu » ce qui signifie «  X était partie chez elle et on ne l'a jamais suivie, X est revenue seule avec ses seins en l'air. »

· Les parents devraient respecter leur lignage par rapport aux enfants. Un père ne devrait jamais avoir des relations intimes avec une fille du rang de ses enfants, de même pour la mère, c'est une perversion et une faute grave. Ceci s'applique aussi aux enfants entre eux. Agir ainsi, c'est briser le lien de sang. C'est incestueux. Les conséquences sont mortelles. C'est pourquoi on conseille aux enfants majeurs de ne pas jouer avec leurs mères et leurs soeurs surtout les jeux de mains. Un proverbe dit : « seketela wakabaka nyinandi » cela veut dire : « Seketela a fini par coucher avec sa mère. »

· Comme nous venions de le dire plus haut, la chambre des parents est sacrée. Les enfants ne devraient coucher avec leurs femmes dans les chambres des parents.

· Deux frères devraient éviter de sortir avec une même femme. La femme est réservée à un seul homme. Donc deux frères ne peuvent en aucun cas partager le lit avec une même femme. C'est comme se lier au même destin. Un proverbe luba dit : «  mukaji nkaseba ka kabunji, batu bakasomba kudi muntu umue » ce qui veut dire « la femme est comme une peau de renard, seul un homme convient de s'y asseoir. »

· Les parents sont considérés comme des représentants de Dieu Créateur sur terre. Les enfants leur doivent du respect tout azimut. Le manque de respect aux personnes du rang des parents est un sacrilège et sanctionné par la tradition luba. De ce fait, un enfant ne peut se permettre de frapper ni injurier un parent. Ceci apporte une malédiction.

· Le comportement sexuel indiscipliné des parents peuvent avoir une incidence pathologique sur le couple et sur les enfants. A ce propos, Fortunat Mukendi (2003, 91) dit : « Si l'adultère est sanctionné par des peines allant des amendes aux humiliations, voire même la mort en passant par le divorce chez les baluba du Kasaï, la non observance de certains codes de conduite communautaire entraine des malaises physiques soit chez l'enfant, soit chez la mère, soit encore chez son père. La guérison de ces malaises requiert des cérémonies appropriées ». On parle alors de nsanga. Nsanga est à la fois la conséquence de l'indiscipline sexuelle du père ou de la mère et aussi la pratique ou la technique thérapeutique employée pour guérir de ces conséquences. Le diagnostic chez l'enfant se manifeste par soit le refus du bébé de sortir du ventre de sa mère (blocage de l'accouchement), soit l'enfant naît mais n'augmente pas du poids, soit l'enfant tarde à marcher, soit l'enfant fait une forte diarrhée et un certain étourdissement.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon