B. Les révolutions sociales
Les révolutions sociales se caractérisent par de
vastes changements des hiérarchies sociales, ou de l'organisation de la
société, du fait d'un soulèvement de la population, ou
d'une partie de celle-ci, contre l'ordre établi. Le terme de
révolution sociale est cependant plus fluctuant, étant
utilisé pour caractériser des réformes perçues
comme radicales, mais ne s'accompagnant pas forcément d'un affrontement
politique violent. Les révolutions politiques, notamment celles se
réclamant du marxisme, ambitionnent souvent de s'accompagner de
révolutions sociales. Les révolutions sociales sont
déterminées par les lois objectives du développement
social et, en même temps, ont leur origine dans les contradictions
économiques, sociales, politiques internes au système
capitaliste. Lénine était convaincu que « les
révolutions ne se font pas sur commande, on ne peut pas les faire
coïncider avec tel ou tel moment, mais elles murissent dans le processus
de développement de l'histoire et éclatent à un moment
déterminé par des facteurs internes et externes84.
Cette intervention s'accompagne, dans certains cas, d'une
utilisation de la violence (ou à l'inverse il s'agit d'un conflit non
violent) : ce fut par exemple le cas lors des révolutions russes et
françaises (avec la « Terreur »). Elle est terminée non
seulement quand ses protagonistes ont quitté la scène politique,
mais lorsque leurs successeurs réussissent à imposer leur version
revue et corrigée de l'histoire. La révolution américaine
est ainsi un succès total sur le long terme, ayant amené à
la naissance des États-Unis en tant que nation. La révolution
française, s'étant imposée comme référence
nationale et ayant imposé la République comme forme politique en
France, peut être considérée comme une réussite sur
le long terme, malgré
83 Dictionnaire de la pensée politique, hommes
et idées, Op. Cit., p.667.
84 L.-E. RODRIGUEZ HERNANDEZ, lien Internet
déjà cité.
Idées politiques et révolutions au
Maghreb arabe. 44
la fin de la Première République
française. La Révolution russe a réussi sur le moyen
terme, en donnant naissance à l'Union soviétique. Sur le long
terme, cependant, la fin de ce régime en 1991 a conduit à
l'abandon de la référence au marxisme-léninisme, sans pour
autant que la Russie et les autres anciennes républiques
soviétiques abandonnent la forme républicaine. Le Risorgimento
demeure un point fondamental de l'histoire de l'Italie, bien que le Royaume
d'Italie qu'il ait contribué à édifier ait cessé
d'exister en 194685.
Pour réussir, d'après Riadh SIDAOUI, une
révolution doit regrouper trois facteurs : Le premier, la radicalisation
de l'opposition populaire, qui ne demande plus seulement des réformes
mais veut la tête de celui qui incarne le régime. Le
deuxième, une division au sein de l'élite du pouvoir, un esprit
de corps fragmenté. Le troisième, la neutralité de
l'armée ou sa trahison envers le régime. C'est en ce sens que
Léon TROTSKY, dans l'histoire de la révolution russe, formule des
critiques en disant que l'une des erreurs les plus grandes et les plus
dangereuses que commettaient les communistes, c'était de se figurer que
la révolution pouvait être accomplie par les mains des seuls
révolutionnaires. Or, pour assurer le succès de toute action
révolutionnaire sérieuse, il faut comprendre et savoir appliquer
pratiquement l'idée que les révolutionnaires ne peuvent jouer un
rôle que comme avant-garde de la classe réellement avancée
et viable86. L'avant-garde ne remplit sa mission que lorsqu'elle
sait ne pas se détacher de la masse qu'elle dirige, lorsqu'elle sait
véritablement faire progresser toute la masse.
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