Section IV. Les idées politiques de
l'époque contemporaine
Il est nécessaire de comprendre également que
l'époque contemporaine comprend trois siècles : le
XIXe, le XXe et le XXIe siècles.
§1. Les idées politiques du XIXème
siècle
Le libéralisme, le nationalisme et le socialisme ont
été des idéologies ayant émaillé le
XIXème siècle.
Idées politiques et révolutions au
Maghreb arabe. 31
Le libéralisme a été l'idéologie
de la classe bourgeoise issue de la révolution française.
René RÉMOND le considère comme étant à la
fois une philosophie globale, politique, sociale individualiste, de l'histoire
et enfin une philosophie de la connaissance et de la
vérité55. Une philosophie globale car, il arrive
souvent aujourd'hui qu'on le réduise au seul aspect économique
qui doit être replacé dans une perspective plus large et qui n'est
qu'un point d'application d'un système complet englobant tous les
aspects de la vie en société, et qui croit avoir réponse
à tous les problèmes posés par l'existence collective.
Philosophie politique car il est ordonné à l'idée de
liberté, selon laquelle la société politique doit
être fondée sur la liberté et trouver sa justification dans
la consécration de celle-ci. Il n'est de société viable -
et à plus forte raison légitime - que celle qui inscrit au
fronton de ses institutions la reconnaissance de la liberté,
estime-t-il. Philosophie sociale individualiste dans la mesure où elle
fait passer l'individu avant la raison d'État, les intérêts
du groupe, les exigences de la collectivité ; le libéralisme ne
connaît guère les groupes sociaux (...). Le libéralisme est
une philosophie de l'histoire, selon laquelle l'histoire est faite, non par les
forces collectives, mais par les individus. C'est enfin une philosophie de la
connaissance et de la vérité car il est en parfaite
réaction contre la méthode d'autorité et croit à la
découverte progressive de la vérité par la raison
individuelle.
Le nationalisme concerne les théories ou les doctrines
qui réfléchissent sur la nation56. Ernest RENAN a
été le premier à trouver l'idée de nation qui,
selon lui, est constituée des notions de l'égalité et de
la démocratie. Ni la race, ni la langue, ni la religion, ni même
le sol sur lequel on est né ou l'on vit sont impuissants de
définir la nation même si ils aident à former une nation ou
à forger une idée de nation57. Il dit que la nation :
« est une âme, un principe spirituel. Deux
éléments qui, à vrai dire, ne font qu'un, la constituent :
l'un est dans le passé, la possession en commun d'un riche legs, l'autre
est dans le présent, le consentement, le désir de vivre ensemble
». De façon brève, une nation est d'abord le passé
(résultat d'un héritage indivise), ensuite un présent (son
existence n'est ni acquise, ni donnée une fois pour toutes) et enfin le
futur (le vouloir vivre ensemble, avoir fait des grandes choses ensemble,
vouloir en faire encore d'autres ensemble dans l'avenir). Le nationalisme qui
désignait l'expression d'un sentiment national changea de nature. Il
devint conservateur et réactionnaire au point que les
55 R. REMOND, Introduction à l'histoire
de notre temps : le XIXe siècle (1815-1914), Paris, éditions
du Seuil, Tome 2, 1974, pp.23-24.
56 J.M. BAGALWA MAPATANO, Notes de cours de
théories et doctrines politiques et sociales, déjà
cité.
57 Idem.
Idées politiques et révolutions au
Maghreb arabe. 32
États puissants vont s'affronter pour la domination
mondiale : le nationalisme était devenu impérialiste. Ceci est en
parfaite liaison avec ce que Samuel Huntington théorisa dans le choc des
civilisations lorsqu'il dit que le XIXe siècle avait
été le siècle du conflit des nations58.
Le socialisme, quant à lui, est un système dans
lequel l'exploitation capitaliste n'existe pas ou a disparu. Cela signifiait
que le revenu national devrait être alloué aux citoyens
proportionnellement à la valeur du travail qu'ils
produiraient59. Certaines critiques furent formulées à
cet effet sur le socialisme dans ce sens de « chacun selon ses
capacités, à chacun selon son travail » en disant, sans
doute, que ce système serait beaucoup plus inégalitaire que ce
que beaucoup de socialistes souhaitent. Comme courant d'idées
contemporain, le socialisme est avant tout un antilibéralisme qui a le
sens d'une triple protestation morale, économique et
politique60. C'est d'abord une protestation morale, le refus des
maux que le libéralisme accepte quand il ne les provoque pas. Le
socialisme est ensuite une critique économique du libéralisme.
Celui-ci s'affirme être fondé sur la connaissance des lois
économiques ; la société conduite par des automatismes et
reposant sur un jeu des lois physiques, n'est pas modifiable au gré des
desseins des gouvernants. Le socialisme est enfin la révolte politique
car la révolution a peut être libéré l'homme des
pressions de l'église, brisé les vieilles entraves
médiévales, mais elle a laissé subsisté la
domination des riches sur les pauvres.
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