SECTION.2. LES SCENARIO D'ISSUE EVENTUELLES POUR LA
CRISE UKRAINIENNE
§1. Scénario 1 - « Accord diplomatique
»
Un accord diplomatique entre l'Ukraine, l'Union
Européenne et la Russie serait l'issue la plus favorable. Si ce
scénario se vérifiait, les pertes pour les économies
européennes et plus singulièrement pour la zone euro seraient
marginales. En effet, il semblerait que depuis le début des
hostilités la croissance du PIB de la zone euro n'aurait subi une perte
que de seulement 0,1 point de pourcentage au cours de la première
moitié de l'année 2014.
§.2. Scénario 2 - « Statu quo »
Par « statu quo », il faut entendre une poursuite de
la situation actuelle, qui s'accompagnera ponctuellement d'un léger
renforcement des sanctions européennes et des représailles
russes. Ces sanctions et représailles annoncées de part et
d'autre, sans tomber dans une escalade totale, devraient avoir des implications
relativement limitées pour l'Union européenne d'un point de vue
économique et affecter de manière mesurée les flux
commerciaux et financiers avec ces zones.
La Russie serait davantage impactée avec notamment
l'abaissement des expositions de certaines entités européennes,
notamment les banques, au pays qui se traduira par des sorties de capitaux non
négligeables et donc un risque de refinancement extérieur plus
prononcé. Cette situation pèsera sur la devise locale, le rouble.
Toutefois, à court terme, cette situation ne serait pas dramatique pour
le pays. Premièrement, la position financière du pays demeure
solide (avec une dette externe ne représentant que 36% du PIB) et,
deuxièmement, la banque centrale russe dispose d'importantes
réserves de change (470 milliards de dollars) pour soutenir la devise
locale. À plus longue échéance, la baisse des
investissements étrangers et l'affaiblissement de la consommation
domestique résultant d'une devise plus faible et de salaires plus bas
auront un impact notable sur les perspectives de croissance de la Russie. Les
exportations russes devraient compenser en partie ces effets
négatifs59.
En réduisant leur exposition à la Russie, les
entités européennes exposées devraient cependant retrouver
peu à peu la confiance des investisseurs.
59
http://www.bcee-assetmanagement.lu/art.cit
58
§3. Scénario 3 - « Escalade du conflit
» .
Les récentes manoeuvres militaires aux
frontières russo-ukrainiennes font émerger un troisième
scénario potentiel, à savoir une escalade du conflit et plus
précisément une escalade militaire. Si ce scénario devait
se vérifier, celui-ci s'accompagnera nécessairement de sanctions
plus lourdes de l'Europe et des États-Unis à l'égard de la
Russie. La Russie, quant à elle, pourrait opter pour des
représailles plus conséquentes aux effets non négligeables
pour les économies européennes.
Toute escalade en termes de représailles et de
sanctions s'accompagnera inévitablement d'une crise de confiance
généralisée, d'une dégradation du commerce
international et d'un choc de prix essentiellement sur les biens
énergétiques et agricoles semblable aux deux chocs
pétroliers des années.
D'un point de vue économique, la Russie et l'Europe
centrale et orientale seraient les premières victimes de l'escalade du
conflit en raison de liens directs. À travers les différents
canaux de transmission évoqués troisième chapitre, la
crise s'installera peu à peu dans les autres pays européens et
impactera fortement leurs perspectives de croissance. L'affaiblissement des
économies européennes et de la Russie affectera fortement les
autres économies mondiales et surtout émergentes à travers
notamment les moindres investissements des entreprises, ainsi que les flux
financiers et commerciaux.
Notons que c'est surtout sur le front de l'énergie que
les répercussions seraient considérables à la fois pour la
Russie et pour l'Union européenne. « En effet, si les
représailles russes ciblaient l'approvisionnement
énergétique de l'Union européenne, ceci conduira à
une dégradation du budget fédéral russe, qui rappelons le
dépend en grande partie (50,2%) des recettes fiscales
générées par le secteur de l'énergie. Étant
donné la dépendance énergétique européenne
à l'égard de la Russie, toute menace sur l'approvisionnement en
ressources énergétiques russes et toute hausse des prix de
l'énergie impacterait fortement à court et moyen terme la plupart
des économies européennes. Certes, la Commission
européenne a mis en place une stratégie visant à
sécuriser les approvisionnements énergétiques
européens, mais ce ne sont que très peu de pays européens
qui se sont engagés dans un processus coûteux de diversification
des ressources et des sources en énergie60 ».
De plus, le processus de diversification s'annonce plus
difficile pour le gaz que pour le pétrole. Même si la Russie est
le troisième producteur mondial de pétrole (juste derrière
les
60
http://www.bcee-assetmanagement.lu/art.cit
59
Etats-Unis et l'Arabie Saoudite) et représente plus de
20% des importations européennes de pétrole, la profondeur du
marché du pétrole et la facilité de transport de cette
matière première font qu'il est plus facile de diversifier les
fournisseurs de cette ressource.
Pour le gaz, la solution est moins évidente. Une grande
partie du gaz importé en Europe provient de gazoducs dont la source est
principalement la Russie. Pour rappel, plus de 30% des importations de gaz
proviennent de Russie, dont le principal gazoduc traverse l'Ukraine et
contribue à hauteur de 50% des importations de gaz russe. Le gaz naturel
liquéfié (GNL), notamment en provenance d'Indonésie, du
Qatar et d'Algérie pourrait venir concurrencer le gaz russe, mais
l'internationalisation de ce marché n'est qu'à ses débuts
et le GNL reste encore une alternative trop coûteuse pour les pays
européens. Autrement dit, les économies européennes
devront par manque d'alternatives subir de plein fouet le choc de prix sur le
gaz résultant de l'escalade du conflit.
|