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Dette extérieure et fuite des capitaux au Cameroun.( Télécharger le fichier original )par Yann Harold NOUNAMO Université de Yaoundé 2-SOA - Master 2015 |
1.2. Source des données, Explication des variables et justification des différents signes attendus1.2.1. Source des donnéesAfin d'analyser ces données, deux logiciels sont utilisés : la version 7 du logiciel EXCEL pour la constitution de notre base de données et la Version 9 du logiciel Eviews pour les estimations. Cette dernière version du logiciel Eviews présente un avantage essentiel pour notre modélisation; contrairement aux versions précédentes, c'est la seule version qui intègre directement l'estimateur ARDL48(*) ainsi que l'approche du « Bound Testing » (« test limite ») de Pesaran et al. (2001). 1.2.2. Explication des variables du modèle et signes attendus des coefficients des variables :Ø La fuite des capitaux réelle Dans la littérature économique, il existe différentes méthodes de mesures de la fuite des capitaux. Ces méthodes varient en fonction de la définition et de la conception attribuées à ce phénomène. C'est ainsi que nous pouvons classer avec Kant (1996) ces différentes méthodes de mesure en deux grands groupes : les méthodes directes et les méthodes indirectes. · Les méthodes de mesures directes Où FECC désigne les flux extérieurs de capitaux à court terme. · Les méthodes de mesures indirectes FCrit= ( ÄDETit+ INDEit) - (CCit+ÄRESit) (6) FCmit= (ÄDETit+ INDEit) - (CCit+ ÄRESit) ? ÄABDit (7) Toutefois, cette méthode admet quelques limites soulevées par des auteurs tels que Boyce et Ndikumana (2001). Ces derniers affirment que la méthode résiduelle est instable car elle ne tient pas compte de l'effet des fluctuations du taux de change sur la valeur en dollar américain du stock de la dette de fin d'année. Une autre limite relevée à cette méthode, est qu'elle ne tient pas compte des falsifications de transactions commerciales, qui proviennent souvent de la surfacturation ou la sous-facturation respectivement des importations et des exportations ( Roy, 1994). Plusieurs études portant sur la mesure de la fuite des capitaux ont utilisé cette méthode comme base tout en y apportant des ajustements. Ces études prennent en compte dans leurs calculs l'effet sur le montant de la fuite des capitaux, des facteurs tels que les fluctuations du taux de change, les falsifications de transactions commerciales, le taux d'inflation, les transferts de fonds des migrants, les abandons de créances et les revenus d'intérêt. Les variantes de cette méthode tiennent donc compte des ajustements à ces facteurs cités plus haut (Boyce et Ndikumana, 2001, 2002, 2012 ; Ndikumana et Boyce, 2013). · La méthode de Dooley Elle calcule la fuite des capitaux en faisant la différence entre les flux extérieurs totaux de capitaux et la variation du stock des avoirs extérieurs. Selon cette méthode, la fuite des capitaux d'un pays est égale à : FETCit= EEit+ INDEit- CCit? ÄRESit- EONit- BMFMIit (8) Où FETC est égal aux flux extérieurs totaux de capitaux ; EE est l'emprunt extérieur comme reporté dans les statistiques de la balance des paiements ; EON représente les erreurs et omissions nettes ; BMFMI indique la différence entre la variation de la dette extérieure reportée dans les statistiques de la Banque Mondiale et l'emprunt extérieur reporté dans les statistiques de la balance des paiements publiées par le FMI. Le stock des avoirs extérieurs, correspondant aux gains d'intérêt, est égal à :
Où AE désigne les avoirs extérieurs ; r est le taux d'intérêt sur les dépôts des Etats-Unis (supposé être un taux d'intérêt d'un marché international représentatif) ; GINT représente les gains d'intérêt. Ainsi, la fuite des capitaux, selon la méthode de Dooley (1986), est mesurée par : FCdit= FETCit? ÄAEit (10) D'après Hermes, Lensink et Murinde (2002a), la méthode de Dooley (1986) est conceptuellement fausse dans la mesure où la distinction entre flux sortants normaux et anormaux de capitaux est impossible sur le plan empirique. · La méthode de la banque de France Elle consiste à comparer le besoin de financement tel que relaté par la balance de paiement avec la variation de la dette extérieure relevée par la banque mondiale (1985), toutefois cette dernière valeur est corrigée des fluctuations du taux de change. La différence constitue alors la fuite des capitaux. Une limite de cette méthode relevée par Ameth Saloum Ndiaye réside dans le fait que cette méthode considère le seul emprunt extérieur comme source de capital pour le financement de l'économie. Après avoir passé en revue toute ces méthodes ainsi que leurs limites, celle retenue pour notre analyse, est la méthode de la Banque Mondiale, car elle est celle qui a le plus été réajustée, par plusieurs auteurs aux fins de rapprocher le plus possible les résultats obtenus des montants réels de fuite de capitaux. Plus précisément, nous utiliserons la méthode de la Banque Mondiale corrigée des ajustements de Boyce et Ndikumana (2012). Ces ajustements sont : Ajustement aux falsifications des transactions commerciales En nous intéressant à l'étude menée par Boyce et Ndikumana et Ndikumana et Boyce, les falsifications des transactions commerciales se calculent en comparant les données sur les importations et exportations d'un pays à celles de ses partenaires commerciaux. Le montant total de ses falsifications est égale à :
Où DEX est le différentiel d'exportation entre les pays de la ZF49(*) et les pays industrialisés ; DIM est le différentiel d'importation entre les pays de la ZF et les pays industrialisés ; PMEX est la part moyenne des pays industrialisés dans les exportations d'un pays de la ZF et PMIM est la part moyenne des pays industrialisés dans les importations d'un pays de la ZF. Ajustements aux transferts de fonds des migrants Plusieurs pays d'Afrique subsaharienne reçoivent d'importantes entrées de capitaux, provenant de transferts de fonds de leurs citoyens qui travaillent en Europe, aux États-Unis et dans d'autres pays industrialisés. D'après Ndikumana et Boyce(2013), ces flux sont souvent sous-estimés dans les statistiques officielles de la balance des paiements (BdP). Officiellement les envois de fonds sont enregistrés dans les statistiques de la balance des paiements principalement sous trois rubriques: « Les envois de fonds des travailleurs », « la rémunération des salariés », et « les transferts des migrants ». En conséquence, le volume de transferts de fonds non-déclarés sera estimé en comparant les flux estimés des pays industrialisés avec les entrées totales enregistrées dans la balance de paiement officielle des pays africains. Partant sur le principe que, ces dernières doivent être plus grandes, car elles sont destinées à inclure les transferts de fonds du monde entier et pas seulement en provenance des pays industrialisés, si la différence s'avère positive, alors cela peut être considéré comme une preuve solide de sous-déclaration. Les transferts non enregistrés sont calculés de la manière suivante : FCAit= FCit+ ETFit (12) FCA est la fuite des capitaux ajustée, FC est le montant de fuite des capitaux, ETF représente l'écart estimé de transfert de fonds. Ø Le taux de croissance du PIB La croissance du PIB réel domestique est normalement perçue comme un baromètre à partir duquel on évalue la performance économique des pays et par lequel on mesure aussi le taux de rendement réel de l'économie (Mikkelsen, 1991); il peut aussi être vu comme un indicateur favorable du climat des affaires et de l'investissement domestique. A cet effet, un PIB domestique élevé ou des taux de croissance positifs du PIB peuvent contribuer à la réduction du stock de fuite des capitaux et inversement (Ajayi, 1992). C'est une relation qui est d'ailleurs appuyée par de nombreux travaux (Hermes et Lensink, 1992 ; Hermes et al., 2002; Beja, 2006; Makochekanwa, 2007; Boyrie, 2010) mais qui peut être remise en cause dans un contexte où la croissance économique repose pour l'essentiel sur l'exploitation des ressources naturelles, minières et/ou pétrolières (Cooper et Hardt, 2000). Le signe attendu du coefficient de cette variable est négatif et significatif. Ø La rente totale provenant des ressources naturelles C'est la rente provenant des ressources naturelles rapportée au PIB. La littérature (Boyce et Ndikumana, 2012; BAD et GFI, 2013) sur la fuite des capitaux en Afrique suggère qu'en général, les pays fortement dotés en ressources naturelles sont également ceux qui enregistrent les montants les plus élevés en termes de fuite des capitaux. En outre, Kharat (2013) dans son étude réalisée sur un échantillon de 40 pays émergents, trouve que la rente pétrolière a un impact significatif et positif sur la fuite des capitaux. Ndiaye(2011) dans son étude sur un échantillon constitué des pays de la zone Franc, trouve que les exportations de pétrole ont un effet statistiquement significatif et positif sur la fuite des capitaux. Conformément aux résultats obtenus par ces auteurs, nous nous attendons à ce que le signe associé à cette variable soit significatif et positif. Ø L'ouverture commerciale C'est le degré d'ouverture commerciale qui peut être mesuré par plusieurs indicateurs mais le plus largement utilisé est le ratio des exportations et des importations au PIB. L'ouverture commerciale peut favoriser la fuite des capitaux dans la mesure où cela faciliterait la diversification du portefeuille des agents (Collier et al., 2001). Ainsi, le signe attendu est positif. Ø L'aide publique au développement C'est le ratio de l'aide publique au développement au PIB. Par définition, l'aide est un flux financier public géré dans le but principal de promouvoir le développement économique et le bien-être des pays en développement. Elle est de nature concessionnelle et comporte un élément don d'au moins 25%. Collier, Hoeffler et Patillo (2004) examinent les effets de l'aide publique au développement sur la fuite des capitaux. Leurs résultats suggèrent qu'à des niveaux élevés, l'aide tend à amplifier la fuite des capitaux. Ainsi, nous nous attendons à ce que le coefficient associé soit significatif et positif. Tableau 3.1 : Récapitulatif des différents signes attendus des variables
Source : Notre élaboration. * 48 Autoregressive-Distributed Lag * 49 ZF : Zone Franc, Boyce et Ndikumana observe que la différence entre les montants d'exportations et d'importations reportés au niveau des balance des paiements, s'observent plus dans les économies Subsaharienne. Ils ont considéré le cas des pays de la Zone franc, c'est-à-dire les pays qui utilisent le Franc CFA comme monnaie. |
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