2.3.2. Sur le plan
international
Nombreuses sont les institutions qui, sur le plan
international, agissent sur différents plans afin de maintenir
l'intégrité du système financier. Des institutions comme
le FMI, le GAFI, le Comité de Bâle sous l'égide de la
Banque des règlements internationaux, contribuent de façon
directe ou indirecte à la lutte contre la fuite des capitaux.
Leurs stratégies dépendent du caractère
licite ou illicite de cette fuite.
Ø Mesures de lutte contre les fuites licites
des capitaux
Les fuites licites de capitaux sont des sorties de capitaux
non-répressives par la loi en matière de flux de capitaux. Elles
regroupent des sorties de capitaux dues à des facteurs tels qu'une
incertitude, le besoin de diversification du portefeuille ainsi que les
activités des banques commerciales nationales qui visent à
étendre leurs avoirs à l'étranger, etc. Elles s'observent
en général lors des crises financières ou
économiques, ou encore suite à des problèmes
d'instabilité politique.
Dans ce cadre, les mesures prônées par des
institutions internationales telles que le FMI consistent le plus souvent en
des séries de réformes structurelles des institutions politiques,
économiques et financières. Ce fut le cas de plusieurs pays de la
zone Franc dans les années 80, qui face à la crise de la dette
qui sévissait dans leurs économies, ont dû souscrire aux
Plans d'Ajustement Structurel (PAS) soumis à eux par le FMI, pour
pouvoir être éligible à un rééchelonnement de
leur dette. Ces PAS prévoyaient entre autre des réformes dans les
systèmes financiers et monétaires des pays de la zone franc en
vue de le libéraliser et de permettre l'émergence d'un
marché financier, capable d'attirer les capitaux pour pallier aux
besoins de financement.
Ø Mesures de lutte contre les fuites illicites
des capitaux
L'article VII des statuts du FMI interdit l'exécution
de contrats de change contraire à la réglementation des changes
d'un autre Etat membre, en vue, précisément, de créer un
obstacle à la fuite illicite des capitaux. Pour passer inaperçus,
ces sorties illicites de capitaux se font à travers le mécanisme
de blanchiment d'argent. D'après
Cutajar(2012) , le blanchiment est ce processus qui permet
de faire disparaître l'origine illicite du produit de trafics interdits
en les réinjectant dans les circuits économiques légaux
pour leur donner l'apparence de capitaux légitimes. Il est souvent
utilisé pour camoufler le produit de la corruption et rendu difficile
à identifier par le secret bancaire.
Plusieurs initiatives peuvent être
recensées :
o La recommandation du Conseil de l'Europe du 27 juin
1980.
Cette recommandation a été adoptée par
le Comité des ministres du Conseil de l'Europe en proposant aux
États de mettre en place dans leur droit interne quatre obligations
à la charge des établissements financiers : la
vérification de l'identité des clients à laquelle la
recommandation consacrait une place essentielle en prévoyant qu'elle
devait être effectuée lors de l'ouverture d'un compte ou de la
constitution d'un dépôt, lors de la location d'un coffre et au
moment de l'exécution au comptant d'opérations portant sur des
sommes élevées ; la limitation de la location des coffres
forts à des personnes physiques ou morales avec lesquelles la banque se
trouve en relation d'affaires ou qu'elle considère comme dignes de
confiance ; la constitution de réserves de billets dont la
numérotation peut être signalée aux autorités en cas
d'utilisation à des fins criminelles ; une formation
adéquate du personnel bancaire de guichet, pour les contrôles
d'identité et le dépistage des comportements suspects.
o Le GAFI
Créé en 1989 lors du sommet du G7 à
Paris, Le Groupe d'Action Financière est un organisme
intergouvernemental dont l'objectif est de concevoir et de promouvoir des
stratégies de lutte contre le blanchiment de capitaux. Il regroupe 32
pays et deux organisations internationales, dont la Commission
européenne. L'action menée par cet organisme quant à la
lutte contre le blanchiment d'argent se trouve consignée dans son plan
d'action constitué par 40 recommandations. Les 20 premières
concernent les Banques et Etablissements financiers qui devront identifier tous
leurs clients et conserver les documents appropriés et déclarer
les transactions suspectes.
Les révisions faites en 2003 intègrent
l'évolution des techniques du blanchiment. Parmi les principaux
changements, on peut noter l'extension des mesures anti-blanchiments aux
entreprises et professions non financières telles que les casinos, les
agents immobiliers, les négociants en pierres ou métaux
précieux.
o La convention des Nations Unies contre la corruption
du 31 octobre 2003.
Ouverte à la signature depuis décembre 2003,
la Convention des Nations Unies contre la corruption, lutte contre le pillage
des biens publics des pays en développement. En effet, la
résolution 55/188 du 20 décembre 2000 de la convention, permet de
prévenir et de lutter contre les pratiques corrompues et le transfert
illégal de fonds ainsi que le rapatriement de ces fonds vers les pays
d'origine. Pour prévenir le blanchiment du produit de la corruption, la
Convention prévoit que les Etats adoptent des procédures d'examen
des transactions suspectes, d'analyse des informations financières et
d'échange d'informations, d'examen des opérations inhabituelles.
La question du recouvrement des avoirs étant essentielle, le chapitre V
de la résolution prévoit que les sommes ou les biens
confisqués provenant de la corruption issus de détournements de
fonds publics notamment soient restitués à l'Etat qui a
été spolié.
Dans la zone CEMAC, la lutte contre la
fuite des capitaux prend surtout la forme de lutte contre le blanchiment
d'argent issu d'activités répressibles par la loi tel que le
détournement de deniers publics, la corruption, le trafic de drogues,
stupéfiants et autres.
Le séminaire de sensibilisation sur la lutte contre
le blanchiment des capitaux dans les pays de la CEMAC, tenu à
Yaoundé en novembre 2000, comptait parmi les toutes premières
actions de lutte contre le blanchiment d'argent de la CEMAC. Il y avait
été relevé que l'organisation de la lutte contre le
blanchiment des capitaux dans la sous-région devrait s'articuler autour,
d'une part, de la création d'un groupe intergouvernemental d'action et
d'unités spécialisées de renseignement financier, et,
d'autre part, de l'élaboration d'un texte communautaire. Ceci
permettrait de combler le vide législatif existant en matière de
prévention et de répression du blanchiment de capitaux. C'est
ainsi qu'à la Conférence des chefs d'Etat de la CEMAC tenue vers
la fin de l'année 2000 a été adoptée une
déclaration de principe sur la lutte contre le blanchiment, et le Groupe
d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale (GABAC) a
été créé.
Toujours dans l'optique de la répression et de la
prévention du blanchiment d'argent, la BEAC a entrepris de combler le
vide juridique constaté en mettant en chantier un texte normatif sous la
forme d'un règlement CEMAC. C'est ainsi qu'un avant-projet de
règlement CEMAC qui regroupe en un seul texte, la lutte contre le
blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme a été
élaboré et examiné du 28 au 30 Octobre 2002 au
siège de la BEAC à Yaoundé. Il convient de noter que ces
entrevues ont aussi porté sur les questions de traitement des
renseignements financiers et la détection du blanchiment.
Les réflexions sur la manière dont devait
être menée cette lutte au niveau communautaire ont conduit au
règlement N°01/03 CEMAC/UMAC portant prévention et
répression du blanchiment des capitaux et du terrorisme en Afrique
Centrale qui voit finalement le jour le 28 mars 2003. En son article 25, ce
règlement porte création de l'Agence Nationale d'Investigation
Financière (ANIF) dans chaque Etat membre de la CEMAC.
Conformément à l'alinéa 1 de cet article, l'ANIF est
chargé de recevoir, de traiter et le cas échéant de
transmettre aux autorités judiciaires compétentes les
déclarations auxquelles sont tenues les organismes financiers et
personnes assujettis à ce règlement. En d'autres termes,
lorsqu'un organisme financier ou tout autre organisme compétent
détecte un flux d'argent de provenance douteuse celui-ci est tenu
conformément aux articles de le déclarer à l'ANIF, qui
mène l'investigation et saisit les autorités judiciaires en cas
de nécessité.
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