C. La franchise comme mode de gouvernance
Dans son travail « Architecture financière des
réseaux de franchise: apports de la théorie des ressources et de
la théorie des contrats incomplets (2007) » l'équipe
Perdreau F., Le Nadant A-L et Cliquet G ; apporte un éclairage
différent de la gouvernance, en axant son travail sur les réseaux
de franchises et insiste sur les notions de connaissances comme création
de valeur.
La franchise, souvent présentée comme un mode de
financement (Caves et Murphys 1976), peut aussi s'analyser comme un mode de
gouvernance.
L'analyse de Perdeau F. et al, sous l'angle de la
théorie fondée sur les ressources, présente alors que le
développement en mode franchise n'est pas seulement un moyen pour faire
croître la performance de la tête de réseau (le
franchiseur), mais comme « un acte fondateur d'une « entreprise
en réseau » dont les ressources sont « nourries » par les
apports des partenaires ». Les ressources, citées ici, sont
prises au sens large, actifs (matériel ou non) ainsi que les
compétences. Ces ressources, si elles sont rares, difficilement
imitables et non substituables, sont alors considérées comme
ressources stratégiques et sont alors à l'origine d'avantages
concurrentiels.
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Les auteurs (Perdreau F. et al.) présentent la
franchise comme un mode de croissance efficient, dans les environnements
pauvres en ressources, ou lorsque que les avantages au premier entrant sont
décisifs ou encore lorsque la « fenêtre d'opportunité
» est étroite.
Ils se basent sur la théorie positive de l'agence
(Jensen et Meckling, 1976), pour montrer que l'apport de fonds propres
réalisé par les franchisés, garantit des coûts de
contrôles et d'incitation plus faible pour le franchiseur que dans une
filiale ou une succursale.
Les auteurs soulignent que le fait pour une tête de
réseau de posséder aussi des unités en nom propre
(succursale) permet de créer de l'information, en offrant la
possibilité de découvrir et d'appliquer aux succursales des
procédures efficientes développées par le franchiseur.
Cette forme plurale (Franchise + Succursale) apporte au franchiseur, un moyen
de gérer plus efficacement le réseau et d'amener à un
apprentissage mutuel.
La franchise c'est aussi l'accès immédiat
à des ressources financières (droit d'entrée, redevance
directe), et des ressources managériales, présentant des
avantages par rapport un développement en propre. Le recrutement de
franchisés, motivés, impliqués et ayant une connaissance
du marché local, en fait une ressource difficilement imitable, sans
substitut, relativement rare, avec des qualités représentant une
valeur intrinsèque. Nous sommes donc proches ici de ressources
stratégiques.
Les auteurs (Perdreau F. et al.) se rapprochent des travaux de
Charreaux (gouvernance dans une perspective contractuelle partenariale (2002)),
pour présenter la franchise comme un mode de gouvernance d'un pool de
ressources immatérielles. Ils montrent que dans de nombreux secteurs,
les actifs inanimés ne représentent plus la source la plus
importante de valeur, mais que c'est le capital humain, avec sa valeur de
créativité, capacité à inventer, loyauté,
qualité de relations avec le client... sur lequel un actionnaire ne peut
s'en déclarer propriétaire. Or dans la franchise, les ressources
apportées par le franchiseur, le franchisé ou
créées en interne, deviennent des caractères «
animés ». La valeur de cette ressource dépend, surtout en
phase de démarrage et de croissance, de l'investissement du capital
humain des franchisés. Le franchiseur, si elles ne lui appartiennent
pas, doit en contrôler l'accès, en garantir la valeur, en retenant
dans le réseau les franchisés qui l'ont créée. Les
franchisés eux-mêmes sont concernés par cet actif, car ils
y participent et en bénéficient, sans en contrôler
l'accès.
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Il apparaît alors, dans ce mode de franchise, un enjeu
important. Le franchiseur, non propriétaire de cet actif, doit
créer une dépendance économique envers ses
franchisés, afin de retrouver un contrôle sur ces actifs «
animés ». Ici Perdreau et al. se basent sur les travaux de Rajan et
Zingales (2000), pour proposer 2 leviers : offrir aux franchisés
l'accès aux ressources du franchiseur (concept, méthodes,
résultats du réseau, informations, droit de décisions ou
regard sur les décisions stratégiques du groupe), et
l'accès à une partie de la rente créée. Le
franchiseur doit en revanche se prémunir du départ de ses
franchisés, une fois la clientèle et la réputation
établie. Cette garantie ne peut pas se faire sur ce qui est contractuel.
Elle peut, en revanche, se réaliser grâce à un
système d'information spécifique (innovant et créateur de
valeur pour le franchisé), ainsi que sur la fourniture de
matériaux, ameublement ou tout autre système qui, non
présents, feraient perdre de la valeur au point de vente.
L'exemple est ici illustré par un groupe « Avis
Immobilier » qui a su créer cette gouvernance, expliquant sa
réussite. (Nous l'aborderons plus tard pour étayer nos
propositions).
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