Section II : De la politique du Maroc pour
réintégrer
Le royaume du Maroc a longtemps élaboré un plan
d'action d'envergure dans le but d'accélérer son retour au sein
de l'UA. Le souverain chérifien, le roi Mohammed VI s'y est vivement
engagé depuis son intronisation en 1999. Pour ce faire, le Maroc s'est
de plus en plus focaliser sur une stratégie plus souple en se faisant de
nouveaux alliés plutôt qu'à tourner dos à tous ceux
qui n'était pas en phase sur la vision de la conception marocaine des
choses. Une raison de plus pour le royaume chérifien de se voir dans ce
contexte s'offrir un leadership efficace à son service
(Paragraphe I). De notre temps, le Maroc à
réorganiser ses objectifs vis-à-vis de l'Afrique au vue de sa
volonté de réadmission à l'Union Africaine Il aspire donc
à conquérir le sud du Sahara (Paragraphe II) qui
lui permettra de concrétiser aussi ses ambitions sous
régionale.
Paragraphe I : Un leadership efficace au service du
royaume
Au fil des siècles, malgré les vagues de
colonisation qu'a connues l'ensemble des pays africains, le royaume du Maroc a
su garder son système politique traditionnel qui repose sur la
royauté. En ce début du XXIe siècle, les
fondements de base de cette royauté n'ont toujours pas changé.
Au-delà de sauvegarder son système politique
43 Rapport d'enquête du cabinet financier Ernst & Young
en 2015 in Afrique Renouveau
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traditionnel, le royaume du Maroc compte faire aussi recours
à une politique tout à fait classique dans la poursuite de
l'atteinte de son objectif. Faut-il le constater, le royaume chérifien
est profondément attaché à la tradition et à la
culture marocaine. Une occasion pour le souverain marocain, le roi Mohammed VI
de faire usage de cette stratégie, touchant non seulement la culture
(B), mais avant tout la spiritualité
(A).
A- De la spiritualité marocaine
Le chemin d'une diplomatie efficace a longtemps
été vu sur un angle économique. Dans l'histoire des
relations internationales modernes, le système idéologique a pris
un pas sur le système religieux. Une situation considérée
comme une maxime aux nouvelles règles internationales depuis le
traité de Westphalie de 1648 séparant les affaires religieuses de
ceux politiques. Ce qui poussa à un délaissement partiel du
facteur religieux au détriment de celui économique en tant que
règle (presque immuable) dans les relations internationales.
Depuis le début de son règne, le roi Mohammed VI
a su mettre en place une véritable « diplomatie religieuse »
dans l'espoir de pouvoir conquérir de nouveaux pays. Un projet qui lui
permit, au-delà de toutes convergences idéologiques existantes
(religion), de faire engendrer des convergences politiques avec les Etats
bénéficiaires de tels projets. Au Sénégal, en
Tanzanie, au Madagascar ou encore en Côte d'Ivoire, le roi Mohammed VI
n'hésite pas à lancer des travaux de construction de
mosquées. Une initiative appréciée et saluée qui
s'accompagne de la formation des imams à travers l' « Institut
Mohammed VI de formation des imams, Mourchidines (prédicateurs) et
Mourchidates (prédicatrices) situé à Rabat au Maroc. Le
but d'une telle formation reste pour le Maroc, de prôner un « islam
modéré » vu que la « diplomatie religieuse
intègre aujourd'hui une nouvelle approche des conflits religieux par le
dialogue, la prévention et la concertation avec les acteurs religieux
»44. Une telle formation sera donc un rempart contre
l'extrémisme et la radicalisation puisque l' « islam marocain
» est perçu comme ouvert, tolérant et gage de
stabilité par de
44 Soura Rodriguez, Diplomatie religieuse : quelle place ?
Quel but ? Quelle paix ?, Interview de Ousa Aboutai, docteur en sciences
politiques, enseignante en relations internationales à
l'Université Jean Moulin Lyon III, réalisé par le Centre
International pour la Paix et les Droits de l'Homme (CIPADH)
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nombreux Etats africains accordant une large place à
l'ijtihad (effort d'interprétation et de jurisprudence). Et pour le
ministre marocain des Habous (patrimoines religieux), il « constitue une
condition sine qua non de développement économique ». La
mise en place de cet enseignement en faveur des imams est fondée sur la
doctrine châaribe, le rite malékite et le soufisme comme chemin
spirituel. Ce courant religieux prêché par le Maroc se voit
rencontrer de nombreuses adhésions « de la part des pays africains
qui sont confrontés à des vagues d'attentats » selon Pierre
Vermeren, maître de conférences et spécialiste de
l'histoire du Maghreb contemporain. L'exportation de l' « islam
modéré » du royaume chérifien ressort donc un partage
d'expérience en matière religieuse, mais aussi l'apparence d'un
« soft power » marocain en matière religieuse. De ce qui
précède, l'on peut comprendre que le Maroc cherche à
mettre fin, à travers ce programme, à la radicalisation et
à l'extrémisme religieux qui conduis et au déraillement de
certaines personnes étant à l'origine des attentats. En un mot,
le royaume chérifien essaye d'attaquer le terrorisme à sa source.
Comme l'a si bien souligné Malala « avec des armes vous pouvez tuer
des terrorismes, avec l'éduction, vous pouvez tuer le terrorisme
».
En outre, la mise en place d'une telle diplomatie favorise
également les rapports amicaux de confiance et économiques.
« Il y a une vraie complémentarité entre ces deux aspects de
la diplomatie, religieuse et économique. Le soft power religieux
marocain permet d'appuyer l'extension économique marocain »
déclare Pierre Vermeren. Elle représente aussi une
véritable porte d'entrée pour le Maroc en Afrique de l'ouest,
facilitant la signature des accords au regard des convergences
idéologiques avec les Etats.
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