V.1.2. Interprétations économiques
De façon globale, les résultats du tableau (5.1)
montrent que même si les degrés d'efficience ne sont pas
très faibles, les services sociaux sanitaires ne sont pas efficients
dans l'ensemble de la Communauté Economique et Monétaire de
l'Afrique Centrale sur toute la période considérée.
En effet, il ressort de nos estimations que les pays de la
zone CEMAC affichent un degré d'efficience moyen de 0,713 soit 71,3% sur
toute la période. Ce résultat signifie que sur toute la
période des 18ans (1996-2013), 28,7% des ressources publiques de
santé ont été gaspillées et par conséquent
n'ont pas été allouées efficacement au financement des
services sociaux de santé ; ainsi, les pays de la zone CEMAC pris
globalement pouvaient réduire leurs dépenses de santé
d'environ 28,7% pour avoir les mêmes performances, plus
précisément le même niveau d'espérance de vie
à la naissance, le même niveau de taux de mortalité
infantile. En d'autres termes les gouvernements de ces pays dans l'ensemble
pouvaient allouer moins de ressources au secteur de la santé sans pour
autant dégrader leurs résultats sanitaires afin de financer
d'autres secteurs sociaux de l'économie à incidence positive sur
le bien-être de leur population. Ce résultat pourrait s'expliquer
d'une part, par une gestion perfectible des pouvoirs publics ne tenant pas
compte des règles de gestion saine nourries par un souci
d'efficacité. Et d'autre part à la faible adéquation entre
les activités qui sont inscrites dans les budgets et les besoins
réels de santé des populations. Néanmoins ces
résultats sont conformes à ceux obtenus par Hounsounon (2009) en
zone UEMOA, où les résultats sont encore plus décevant
dans le secteur de la santé ; car selon les estimations de l'auteur,
54,7% en moyenne (soit un score d'efficience moyen de 0,453) des
dépenses sociales de santé sont gaspillées et ne
contribuent pas efficacement au financement des services sociaux sanitaires de
l'espace UEMOA. Par ailleurs, ces résultats corroborent également
les résultats obtenus par Romdhane et Neticha (2006) qui ont
montré à l'aide du logiciel DEAP, que les pays en
développement sont seulement efficients à 30% dans la production
de tels services.
Le Cameroun et le Gabon viennent en tête avec
respectivement en moyenne sur toute la période un score d'efficience de
0,887 (soit 88,6%) pour le Cameroun et 0,837 (soit 83,7%) pour le Gabon.
Paradoxalement, ces deux pays bien qu'ils allouent au secteur sanitaire les
niveaux de ressources les plus faibles de la zone, présentent toutefois
les résultats les plus élevés, plus
précisément une espérance de vie après la naissance
la plus élevée et un taux de mortalité infantile le plus
faible de la sous-région. Ces résultats peuvent être dus
à l'importance du secteur de la santé dans ces pays, à
travers de meilleures pratiques d'approvisionnement, les campagnes de
vaccination courantes contre les maladies infantiles tel que la rougeole la
poliomyélite, les programmes de dépistage et de lutte contre les
maladies transmissibles de la mère à l'enfant, une optimisation
des incitations pour les prestataires ou une rationalisation des
procédures de financement et d'administration et des infrastitures
sanitaires dont ils disposent.
La RCA et la Guinée Equatoriale sont les pays les plus
inefficients de l'échantillon avec respectivement en moyenne un score
d'efficience de 0,634 et 0,64 sur toute la période. Ces résultats
signifient que les gouvernements de ces pays gaspillent
Mémoire rédigé par AJOULIGA DJOUFACK
Hermann Blondel 62
Efficience des dépenses publiques de santé et
croissance économique en zone CEMAC
respectivement près de 36,6% (pour la RCA) et 36% (pour
la Guinée E.) leurs ressources allouées au secteur de la
santé. Par ailleurs dans la zone CEMAC, la RCA et la Guinée E.
sont les pays qui présentent les dépenses publiques de
santé les plus élevées mais où le taux de
longévité après la naissance des enfants de 0 à 5
ans est le plus faible. Ce résultat peut être dû à la
faiblesse des infrastitures (formations sanitaires, centre de santé,
district de santé...) le manque d'équipements (dans la plupart
des cas en cas d'accouchements par voie césarienne) et de personnel
santé qualifié en particulier dans les zones rurales (Personnel
infirmier et sages-femmes pour 10 000 habitants), les procédures de
financement et de réglementation très longues, la faible
rémunération du personnel qui oblige ces derniers à
l'acceptation des pots de vin occultant l'accès des individus aux
services de santé dont ils ont besoin. D'autre part à de fortes
instabilités socio politique faisant croitre le taux de mortalité
(cas de la RCA).
En somme, même si les dépenses publiques de
santé en zone CEMAC sont très faibles en référence
à la norme internationale qui fixe à 15% la part des budgets des
gouvernements dans le secteur de la santé ; fort est de constater au
regard de nos estimations que malgré la faible part des ressources
allouées à ce secteur, les dépenses publiques de
santé sont inefficientes dans la zone ; plus précisément
28,7% de ces dépenses ont été gaspillées de
1996-2013 à cause de l'inefficience due à une gestion
déficiente de ces ressources. Ce qui infirme ainsi notre 1ere
hypothèse de travail.
Le tableau (5.2) présente le classement des pays de la
communauté selon leur score d'efficience moyen sur la période de
1996-2013.
Tableau 5.2 : Classement des pays de la zone
CEMAC selon leur degré d'efficience moyen dans le secteur sanitaire
Rang
|
Pays
|
Score d'efficience Moyen
|
1
|
Cameroun
|
0,887
|
2
|
Gabon
|
0,837
|
3
|
Tchad
|
0,714
|
4
|
Congo
|
0,704
|
5
|
Guinée Equatoriale
|
0,64
|
6
|
RCA
|
0,634
|
Source : Auteur à partir de nos
estimations.
|