2.1.2. Pauvreté
réelle-absolue-relative-subjective
En vue de présenter les différents concepts de
pauvreté relative, pauvreté absolue, pauvreté apparente et
pauvreté subjective, mettons d'abord en relief la notion de seuil de
pauvreté.
D'après Ayati et al (2005), le seuil de pauvreté
désigne le niveau de bien-être en deçà duquel un
individu sera considéré comme pauvre. Il représente le
niveau minimum de bien-être jugé nécessaire pour mener une
vie décente. Selon l'approche monétaire, c'est donc le niveau de
revenu ou de dépenses de consommation minimal requis pour atteindre ce
niveau de bien-être. Il représente donc la « frontière
de démarcation » entre les pauvres et les non pauvres. On parle
encore de ligne de pauvreté. Il existe différents types de seuil
de pauvreté.
25 Cité par Ravallion, (1996, page 6)
26 Ce fonctionnement décrit, selon Sen, les
différentes choses qu'une personne peut aspirer à être ou
faire, ses beings and doings (Voir Bertin, 2003, p.5)
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A) Pauvreté absolue, seuil de pauvreté
absolue
La notion de seuil de pauvreté absolue renvoie à
l'utilisation d'une ligne de pauvreté indépendante du niveau de
bien-être dans la population. Le seuil de pauvreté absolue
présente l'avantage de favoriser les comparaisons entre
différentes périodes et différents pays. Il existe
plusieurs méthodes de détermination d'un seuil de pauvreté
absolue. Nous relevons entre autres :
- L'approche nutritionnelle que Lachaud (1997) qualifie de
pragmatique. Elle consiste à déterminer le minimum calorifique
nécessaire pour une existence saine. Le niveau calorifique
utilisé en général dans les différentes
études est celui fourni par l'OMS27 (Organisation Mondiale de
la Santé) ou le FAO (Foods Agricultural Organisation), (cité par
Akoété et al, 2009). Le seuil de pauvreté ici est
déterminé, en estimant le revenu nécessaire pour
acquérir un panier d'aliments fournissant une valeur calorifique
supérieur au seuil (calorifique) retenu. Cependant Lachaud (1997)
souligne que l'utilisation de cette approche n'est pas indiquée pour des
comparaisons dans le temps et dans l'espace. En effet la relation entre les
dépenses et les besoins dans divers groupes est fonction du niveau
d'activité, des prix relatifs et des coûts.
- La méthode du coût des besoins essentiels.
D'après Ponty (1998), suivant cette méthode, en plus de
s'intéresser au seuil calorifique minimum, on s'intéresse aussi
à la satisfaction de certains besoins jugés essentiels. Le seuil
de pauvreté s'obtient en additionnant le montant des dépenses
nécessaire pour l'atteinte du seuil calorifique et celui
nécessaire pour acquérir certains biens vitaux. Le seuil
indiqué par la BM est de 1US$ par jour et par personne.
La pauvreté absolue est attachée à
l'utilisation d'un seuil absolue. Elle renvoie à une conception de la
pauvreté indépendamment de la distribution de revenu (ou de
l'indicateur de bien être), de la période, de la culture de la
population étudiée. Ce concept est fortement lié à
la pensée non utilitariste. En effet un seuil absolu représente
le minimum nécessaire pour acquérir certains biens et services de
base jugés primordiaux pour l'atteinte d'un certain niveau de vie. Ainsi
la pauvreté absolue est donc une insuffisance des ressources pour
satisfaire des besoins de premières nécessités.
27 OMS, (1995), « An evaluation of infant
growth, the use and interpretation of anthropometry in infants », bulletin
of the world health organization, 73, pages 165-174.
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Mémoire de Master II soutenu par : NGASSEU NOUPIE Elie
B) Pauvreté relative, seuil de pauvreté
relatif
On parle de pauvreté relative lorsque le seuil de
pauvreté est fonction de la distribution de bien-être (en
l'occurrence le revenu ou les dépenses de consommation). Ainsi, le seuil
de pauvreté varie dans le temps et dans l'espace. Il est alors dit
relatif. Dans la pratique on utilise souvent une fraction du revenu
médian ou moyen. On retrouve très souvent dans la
littérature les taux 50%28 de 60%29 de la
médiane comme seuil. On retrouve aussi d'autres seuils comme ceux
retenus par Grootaerd dans une étude sur la pauvreté en
Côte d'Ivoire (cité par Ponty, 1998) qui utilise le
troisième décile des dépenses de l'année 1985 pour
la mesure de la pauvreté et le premier décile pour mesurer
l'extrême pauvreté. De par sa définition, le seuil de
pauvreté relatif varie en fonction de la distribution de revenu. On note
qu'une augmentation de tous les revenus d'un même montant n'a pas d'effet
sur le niveau de pauvreté. L'utilisation d'un seuil relatif de
pauvreté monétaire est très fréquente pour les pays
développés. Le seuil de pauvreté renvoie donc à une
conception de la pauvreté appelée pauvreté relative. Selon
le concept de pauvreté relative, une personne est pauvre lorsque les
ressources dont elle dispose sont faibles comparativement à celle des
autres membres de la société.
C) Pauvreté Subjective
En nous inspirant de Ravallion (1996), la pauvreté
subjective est encore appelée approche participative. Cette
démarche consiste à définir le concept de pauvreté
en fonction des perceptions que les individus concernés ont de leur
situation. Il s'agit ici de ne plus laisser les populations à
l'écart du débat sur la pauvreté, mais plutôt
d'intégrer la vision qu'elles ont de celle-ci dans l'étude de ce
phénomène. Cette approche fait appel à la construction
d'un seuil de pauvreté subjectif. Les seuils de pauvreté selon
les individus auront tendance à croître en fonction de leur niveau
de richesse. Sur la figure 3.1 ci-dessous qui matérialise la
détermination d'un seuil de pauvreté subjectif Z, en dessous de
la première bissectrice, le revenu minimum subjectif est
inférieur au revenu effectif. Conséquemment, tous les individus
ou les ménages disposant d'un niveau de revenu inférieur au seuil
Z se perçoivent comme pauvres. Quant à ceux des ménages
possédant un revenu situé au-dessus de ce seuil de
pauvreté subjectif Z, ils se considèrent comme non pauvres car
ils estiment détenir une dotation de richesse suffisante.
28 Le taux de 50% de la médiane est très
utilisé en France, notamment dans les études menées par
l'INSEE.
29 Ce seuil est généralement
utilisé dans les études européennes.
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Mémoire de Master II soutenu par : NGASSEU NOUPIE Elie
Figure 3.1 : Détermination d'un seuil de
pauvreté subjectif
Revenu minimum subjectif
45°
Revenu effectif
Z
Source : (Ravallion,
1996)30
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