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Politique fiscale et croissance économique en zone CEMAC.

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par Addi HAMAN MAHAMAT
Université de Yaoundé II - Master II en Ingénierie Economique et Financière option Economie Mathématique et Econométrie 2013
  

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CHAPITRE I : CONTEXTE ET PROBLEMATIQUE

La politique fiscale désigne l'ensemble des mesures réglementaires et administratives (outils et mécanismes) permettant aux autorités politiques de collecter les impôts et taxes en vue de financer la production des biens collectifs et d'en assurer la distribution. Elle est contrainte par les recettes fiscales qui sont le plus souvent affectées par des chocs exogènes pesant sur les économies (Avom, 2011). Comme l'affirme Gurria1, l'amélioration de l'efficacité des systèmes fiscaux des pays en développement est la nouvelle frontière de la politique de développement. La fiscalité joue donc un rôle essentiel dans le programme d'action actuel pour le développement. Elle fournit un flux stable de recettes pour financer les objectifs de développement tels que la mise en place d'infrastructures matérielles. De plus, elle est imbriquée dans de nombreux autres domaines de politique publique, qui vont de la bonne gouvernance à l'intégration de l'activité économique dans le secteur formel en passant par la stimulation de la croissance. Cette dernière est entendue comme le fait majeur qui caractérise l'histoire économique du monde depuis les débuts de la révolution industrielle ; et est devenue, incontestablement, l'horizon unique que les pays industrialisés et ceux en voie de développement, ne cessent de pointer du doigt ; c'est l'élément principal d'appréciation économique dans le temps et dans tout pays (Crozet, 1995). Dans l'ensemble, la politique fiscale établit le cadre dans lequel s'effectuent les échanges et les investissements internationaux. Par conséquent, le principal défi des pays consiste à trouver l'équilibre optimal entre un système fiscal qui soit favorable à l'entreprise et à l'investissement, tout en dégageant suffisamment de recettes pour financer les investissements publics qui contribuent au développement local et à l'attractivité des économies.

Ce chapitre sera segmenté en deux sections : la première sera consacrée au contexte de notre étude, dont l'objectif sera de présenter le problème actuel de la fiscalité et les tentatives de solutions envisagées pour les économies Occidentales d'une part et celles de l'Afrique d'autre part. La seconde section quant à elle sera consacrée à la problématique. Elle débouche sur la question de recherche qui oriente le présent travail.

1 Secrétaire général de l'OCDE - Avril 2009

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SECTION I : CONTEXTE

La question de la fiscalité préoccupe en réalité tous les pays de la planète. Toutefois, le problème est différent selon qu'on soit en Afrique ou dans les pays Occidentaux.

I.1- Contexte de l'économie Occidentale

L'économie occidentale, connait aujourd'hui des problèmes d'évasions fiscales qui sont l'évitement de l'impôt en déplaçant tout ou partie d'un patrimoine ou d'une activité vers un autre pays, sans que le citoyen concerné s'expatrie lui-même. L'évaluation des montants est délicate et dépend fortement des hypothèses de l'évaluateur. En effet, les services fiscaux des États-Unis pensent qu'il y a un manque de l'ordre de 330 milliards de dollars par an2, soit 16 % des impôts fédéraux et 2 % du PIB, et l'Union européenne estime que le manque à gagner pour l'ensemble des pays de l'Union est de 2 à 2,5 % du PIB3. Selon Rompuy (2013), président du Conseil européen, l'évasion fiscale prive les pays de l'Union européenne de 1.000 milliards d'euros par an4. L'explication de ce phénomène dépend du modèle de l'Etat que l'on utilise pour comprendre les relations politiques entre les individus. On peut distinguer deux grands modèles : le modèle orthodoxe de l'Etat, héritier de la philosophie politique de Hobbes et Rousseau ainsi que de la tradition classique ; et le modèle de L'Etat Léviathan, apparenté à la philosophie de Locke et à l'analyse économique contemporaine des choix publics.

> Le modèle orthodoxe de l'Etat

Le modèle orthodoxe de l'Etat domine la théorie économique des finances publiques depuis plus de deux siècles. On part de l'idée que seule l'autorité politique peut satisfaire la demande de biens publics comme la sécurité publique et la défense nationale. Comme par hypothèse tout le monde profite automatiquement de ces services, chacun sera tenté de jouer le « passager clandestin » en refusant de payer sa part. La tentation de ce dernier explique l'évasion fiscale. Il en résulte une production sous optimale des biens publics et des impôts plus élevés pour ceux

2 Les paradis fiscaux:entre évasion fiscale, contournement des règles et inégalités mondiales [archive], L'Économie politique, n° 042 - avril 2009.

3 Les paradis fiscaux:entre évasion fiscale, contournement des règles et inégalités mondiales [archive], L'Économie politique, n° 042 - avril 2009.

4 Luke Baker, Julien Dury pour le service français, édité par Marc Angrand « L'évasion fiscale coûterait 1.000 milliards par an à l'UE » [archive] , Le nouvel Observateur avec l'agence Reuters, 12 avril 2013

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qui continuent de payer leur part. L'intérêt unanime des individus justifie donc des sanctions contre l'évasion fiscale. Dans ce modèle, l'Etat produit les biens publics demandés par ses membres. Le coût de cette production détermine le niveau nécessaire des prélèvements obligatoires. Tous profitant des biens publics, tous doivent contribuer à leur financement. La résistance fiscale est économiquement inefficace, c'est-à-dire entraine un faible niveau de croissance économique.

Le modèle orthodoxe de l'Etat prête flanc à plusieurs critiques : l'école des choix publics démontre comment les processus politiques et bureaucratiques sont incapables d'évaluer correctement les demandes des citoyens et de produire une quantité optimale des biens publics. Autant il existe des échecs du marché dans la production des biens publics, autant il existe des échecs de l'Etat. Le modèle ne rend pas bien compte de plusieurs observations empiriques, notamment : la croissance phénoménale de l'Etat moderne, notamment au cours du 20e siècle ; le niveau actuel des impôts qui représente globalement 50% environs de ce que produisent et gagnent les citoyens, alors qu'au 18e siècle, des impôts du dixième ou du vingtième suscitaient des résistances ; l'inégalité des impôts parmi les contribuables et le découplage entre les impôts payés et les avantages reçus ; l'insatisfaction montante de la population au fur et à mesure que l'Etat agrandit son domaine prétendument pour répondre à des demandes générales.

> L'Etat Léviathan

Développé par Hobbes (1651), ce modèle a été enrichi par des économistes et des politologues de notre époque. En effet, Buchanan et Brennan (1980), chefs de file de l'école des choix publics, modélisent l'Etat comme une institution cherchant à maximiser ses revenus. Au nom de la justice sociale ou pour le compte de ceux qui sont du bon côté du guichet, l'Etat (appelé ici Léviathan) ira chercher chez les contribuables le maximum qu'il peut en tirer sans risquer de tarir « la poule aux oeufs d'or » ou de provoquer une révolution. Les implications économiques de la théorie de l'Etat Léviathan sont fondamentales. Ce ne sont plus les dépenses publiques nécessaires qui déterminent l'impôt à lever ; tout au contraire, le Léviathan maximisera ses revenus et ajustera le niveau des dépenses selon ce qu'il réussit à confisquer. La croissance de l'Etat moderne s'explique par cette logique interne.

Dans cette perspective, l'opprobre sociale et morale qui s'attache à l'évasion fiscale relève de la propagande étatique. Car si l'Etat cherche à lever des impôts au maximum sans égard à la demande de biens publics, s'il exploite les contribuables au profit d'une minorité (ou d'une majorité) qui reçoit plus qu'elle ne paie, alors l'évasion fiscale (notamment au moyen du travail

clandestin et de l'économie souterraine) trouve une justification non seulement morale mais aussi économique.

L'évasion fiscale devient en effet un stabilisateur automatique à l'exploitation étatique. A mesure que le fardeau fiscal s'alourdit, des contribuables se réfugient dans l'économie souterraine. Loin d'augmenter le fardeau des autres contribuables, ceux qui évitent ainsi l'impôt freinent la capacité de l'Etat à fournir des biens publics profitant à tous ; ce qui est préjudiciable pour une croissance économique de long terme. C'est pourquoi, selon Demsetz (1982), l'Etat démocratique ne peut confisquer plus que la moitié de ce que la population produit et gagne : une fois atteint ce niveau de prélèvement, l'économie souterraine et l'évasion fiscale croissent en proportion des efforts de l'Etat pour prélever des impôts additionnels. On dira alors que trop d'impôt tue l'impôt. Ainsi, une cause de l'évasion fiscale résiderait dans le niveau spoliateur de la fiscalité. Même Smith (1776) en témoigne indirectement quand il écrit : « il ne fait pas doute qu'un impôt exorbitant, équivalent par exemple en temps de paix comme en temps de guerre, à la moitié ou même au cinquième de la nation, justifierait, comme tout abus caractérisé de pouvoir, la résistance du peuple. »

Face à ces fléaux d'évasions et de fraudes fiscales, plusieurs travaux en la matière ont été effectués pour apporter des tentatives de résolution. Notamment ceux de Coricelli et al. (2007) qui montrent qu'une politique menaçant de dénoncer publiquement les fraudeurs pourrait contribuer à réduire la fraude fiscale. Aussi, depuis 2010, les Etats Unis ont voté une loi5 visant à garantir le respect des obligations fiscales par tout ressortissant ou ayant droit américain détenteur de comptes dans des banques étrangères. L'entrée en vigueur de cette loi a été plusieurs fois reportée et est désormais fixée au 1er janvier 2014, avec une montée en puissance qui devrait s'étaler jusqu'en 2017. De plus, les grandes puissances du G8, lors de leur dernière réunion6, se sont engagées sur l'échange automatique d'informations fiscales qu'elles considèrent comme l'arme fatale contre les paradis fiscaux. Elles s'engagent également à faire de cet échange automatique le « nouveau standard mondial ».

Toutefois, bien que ce fléau touche tous les pays en général et ceux de l'Afrique en particulier, il est à noter pour ces derniers que d'autres phénomènes d'un tout autre ordre menacent le financement des leurs dépenses publiques.

5Il s'agit de la réglementation FATCA pour Foreign Account Tax Compliance Act 6 Elle s'est tenue à Lough Erne, en Irlande du nord les 17 et 18 Juin 2013.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle