DEDICACE
A mes parents, Jean-Marie MWAMB et Nathalie KAJ pour leur
amour et soutien ;
A mes oncles et tantes paternels Raphael TSHITOND et Nadine
KAWUNDJ, sans oublier Marie-Jeanne KATSHIAK, pour leur conseils et
encouragements; A mes frères et soeurs qui n'ont cessé de me
témoigner leur affection fraternelle.
Michael KAZAD CHIPUT
ii
REMERCIEMENTS
A la fin de ce travail, nous témoignons notre gratitude
envers tous ceux qui, de loin comme de près, nous ont apporté
leur aide pour l'accomplissement de cette oeuvre.
Nos remerciements s'adressent plus particulièrement au
professeur Matthieu TELOMONO BISANGAMANI qui, en dépit de ses
occupations multiples, disposait toujours de son temps pour diriger notre
travail avec beaucoup de rigueur et d'attention sans lesquelles ce travail ne
prendrait pas forme. A maitre NTUMBA NYANGWILE Freddy pour son soutien
indispensable. Nous leurs sommes infiniment reconnaissant.
Nous remercions nos oncles et tantes, KAJ Helene, KAZAD CHIPUT
et KAJ Jeanne, GATUEMBA Aimé et KAMWANJ Chantal et enfin KABOL Roy. Nos
frères et soeurs KAZAD Umberto et Bibiche MVETE, KALENGA KALY et KAWUNDJ
Suzy, KABEY Mijor, KAZAD Olivier, NSAASH Antha, KAWAL Christelle, KATSHIAK
Jeanne, Patrick, Fabrice, Collette, Denise, Sylvain et Maxime tous MWAMB ;
Elite, Sarah, Eric, Erneste, Ernesta et Helena tous TSHITOND.
Merci à nos amis LUAPANYA Craig, Beny NKANU, MIANDA
Rosette, KALEMA Felly, WANDJA Néhémie, EFOYA Ruth, KITUNGWA
Desmond, KALONJI Daniel, KAVESE Stéphanie, PINDI Deborah, MPWEKELA
Ornelly, VUMILIA Patience, KISHINDJA Marcel, MAVINGA James...pour leur
compassion.
Enfin, nos remerciements s'adressent s'adresse aussi à
nos camarades et condisciples pour leur assistance aussi modeste soit-elle.
iii
PRINCIPAUX SIGLES ET ABBRVIATIONS
> Adj : Adjudant
> Adj1cl : Adjudant de première classe
> Adjchef : Adjudant-chef
> Al : Alinéa
> A-R : Arrêté royal
> Art : Article
> Brux : Bruxelles
> Capt : Capitaine
> Cass : Cour de cassation
> Cfr : Confer
> CG app : Conseil de guerre d'application
> CGB : Conseil de guerre Belge
> CG pol kis : Conseil de guerre de police de Kisangani
> CJM : Code judiciaire militaire
> CLCB : Codes et lois du Congo-belge
> CM : Cour militaire
> CMO : Cours militaires opérationnelles
> COCJ : Code d'organisation et des compétences
judiciaires
> CPM : Code pénal militaire
> CPOL I : Code pénal ordinaire livre 1
> D-L : Décret-loi
> Ed prov : Edition provisoire
> Ed : Edition
> Elis : Elisabethville
> FARDC : Forces armées de la République
Démocratique du Congo
> HCM : Haute cour militaire
> JEL : Journées d'études de Lubumbashi
> J-O : Journal officiel
> JT : Jurisprudences des tribunaux
> Jur Congo : Jurisprudence Congolaise
> Jur Kat : Jurisprudence du Katanga
> Kat : Katanga
> Kin : Kinshasa
> L'shi : Lubumbashi
> Lt : Lieutenant
> Maj. : Major
> Mil : Militaire
iv
> MP : Ministère public
> N° : Numéro
> NU : Nations unies
> Op-cit : Opus cita tus (ouvrage cité)
> Ord-L : Ordonnance-loi
> PNC : Police nationale Congolaise
> PUZ : Presse universitaire du Zaïre
> PV : Procès-verbal
> QG : Quartier général
> R.I : Règlement Intérieur
> RDC : République Démocratique du Congo
> RJCB : Revue juridique du Congo-belge
> Slt : Sous-lieutenant
> SN : Service national
> T Ière inst coq : Tribunal de première
instance de Coquillatville
> T Ière inst Elis : Tribunal de première
instance d'Elisabethville
> T : Tome
> TGI : Tribunal des grandes instances
> TMG : Tribunal militaire de garnison
> TMP : Tribunal militaire de police
> UNIKIN : Université de Kinshasa
> Vol : Volume
1
INTRODUCTION
Notre étude porte sur les juridictions militaires et le
sort de leurs condamnés, coup d'oeil sur les violations des
règles minima de détention constatées dans la prison
militaire de N'dolo, s'agissant de l'introduction, nous allons commencer par
préciser la problématique puis l'intérêt du sujet,
la délimitation du sujet, les méthodes et techniques
utilisées et enfin un plan sommaire.
I. PROBLEMATIQUE
Dans la pratique, les infractions de droit commun sont souvent
confondues à des infractions à la discipline militaire et cela
s'exprime dans l'esprit des partisans de l'indépendance des juridictions
militaires à l'égard des celles de droit commun, d'où les
juges militaires, seuls compétents et aptes à apprécier
les fautes commises par les militaires, leurs paires. Ce qui justifie
même le principe « jugés par ses paires, jugés par ses
supérieurs ».
En effet, les juridictions militaires restent donc
compétentes uniquement à l'égard de l'action publique
née des actions purement militaires, mixtes, des infractions de droit
commun commises par les militaires ou par les personnes qui leurs sont
assimilées ; conformément à l'article 76 du code
judiciaire militaire qui dispose : « les juridictions militaires
connaissent sur le territoire de la République Démocratique du
Congo, des infractions d'ordre militaire en application des dispositions du
code pénal militaire.
Les juridictions militaires connaissent également les
infractions de toute nature commises par les militaires, punies
conformément au code pénal ordinaire.
2
Il sied donc de noter que la répartition des
compétences entre les juridictions militaires et les juridictions de
droit commun s'inscrit comme dans le cadre de la séparation des pouvoirs
entre l'Etat et les provinces décentralisées1.
Il nous sera donc important de chercher à savoir
quelles sont les peines susceptibles d'être infligées aux
condamnés militaires, ce qui en est de la vie du condamné
militaire ou assimilé après le prononcé de son jugement
par les cours et tribunaux militaires, si son traitement ne tendrait pas
à violer ses droits les plus fondamentaux en tant que détenu,
quand serait-il de son solde , de sa rééducation, de sa
réinsertion dans la société en général et
dans l'armée en particulier si jamais il a un espoir de recouvrer sa
liberté soit par une amnistie, une grâce présidentielle ou
carrément par l'écoulement de sa peine.
Faudrait-il chercher à savoir si leurs arrestations
sont arbitraires ? Mieux, cherchons plutôt à comprendre la
portée de leurs sanctions en étudiant les peines prévues
dans le code de justice militaire, savoir si leur traitement rencontre la
dignité humaine comme le demande les règles minima de
détention. « La discipline est la mère des armées
», ce principe peut être à la base de plusieurs arrestations
arbitraires, ce qui mettrait le détenu à l'ombre de
lui-même, avec des procédures judicaires longues, lentes, et
incertaines dues aux caprices de la justice. Les détenus ne sont donc
pas à l'abri des violations de leur droit entant que personne
physique.
II. INTERET DU SUJET
Il a fallu non seulement qu'on aspire à la justice
militaire, qu'on effectue un stage d'un mois au Tribunal Militaire de Garnison
de la Gombe, période pendant laquelle nous avons eu à assister
à des audiences foraines dans les
1 Articles 202, 203 et 204 de la constitution de la
RDC
Pour des raisons de proximité, notre étude
s'étend sur le sort ou le traitement des condamnés militaires de
la Prison Militaire de N'dolo, coup d'oeil
3
différentes prisons de la capitale notamment celle de
Makala et celle de N'dolo pour raison de manque de moyen d'escorte des
détenus dans les cours ou tribunaux, mais aussi qu'on rédige un
travail de fin de cycle parlant de la Prison Militaire de N'dolo pour porter
beaucoup plus d'intérêt à la vie des détenus en
général et de ceux de la Prison militaire de N'dolo en
particulier. Une façon pour nous d'exprimer mais par écrit ce que
nous avons ressenti en observant le traitement pénitentiaire Congolais.
Et aussi de compatir avec les détenus en général et des
innocents incarcérés injustement en particulier, personne
humaines maltraités s'il faut le dire ainsi.
Le temps passé dans ce cadre nous a poussé
à discuter avec certains détenus et militaires agents de l'Etat,
à l'issu de ces entretiens nous nous sommes résolu de ne pas
retenir nos larmes mais plutôt, de le verser sur écrit
étant donné que c'est l'arme la plus fiable que nous
possédons à ce stade. Notre souci serai de faire voir combien le
traitement pénitentiaire Congolais n'est pas conforme aux normes
internationales de détention et n'encourage en rien la
préservation des valeurs humaines ou la dignité humaine telle que
le préconise l'article 16 de la constitution du 18 Février
2006.
Avec espoir d'être entendu, nous voudrons donc lancer
cet appel à la sensibilisation tant à l'autorité
Congolaise qu'aux organisations non gouvernementales tant à
l'échelon nationales qu'internationales voire même l'opinion
publique.
III. DELIMITATION DU SUJET
4
aux violations des règles minima de détention
remarquées dans cette prison militaire de Kinshasa.
IV. METHODES ET TECHNIQUES
On ne peut aboutir à des constructions doctrinales
valables sans méthodes car toute discipline scientifique a un objet et
une méthode. La méthode est donc entendue comme étant la
démarche rationnelle à suivre pour arriver à la
connaissance ou à la démonstration du vrai ou de la
vérité2.
Nous utiliserons donc les méthodes suivantes :
V' La méthode historique nous permettra de
constater d'où est partie la création de la justice militaire,
les prisons en générale et celle militaire de N'dolo en
particulier et cela dans le temps et dans l'espace.
V' La méthode expérimentale nous aidera
de constater et de palper du doigt le traitement pénitentiaire
Congolais.
V' Les méthodes exégétique et
juridique nous permettrons de consulter différentes lois et autres
instruments juridiques question d'établir le sens du texte.
V' La méthode qualitative qui nous aide
à porter un bon choix sur la personne à interviewer.
Outre ces différentes méthodes, nous allons
également recourir à la technique d'interview pour
récolter les informations fiables et à la source et à la
technique documentaire qui va nous aider à consulter différents
ouvrages et écrits constituant la doctrine en la matière.
2 MBOKO D'JADIMA, Principes et
usages en matière de rédaction d'un travail universitaire,
Ed. CACIDEP-UNIAPAC/CONGO, Kinshasa 2004, p. 21.
5
V. PLAN SOMMAIRE
Hormis l'introduction et la conclusion, notre travail
s'articule en trois chapitres scindé chacun en deux sections et les
sections à leurs tours reparties en deux paragraphes.
Le premier chapitre porte donc sur les juridictions militaires
congolaises, le second chapitre aborde la présentation de la Prison
Militaire de N'dolo, et le troisième et dernier chapitre parle du
traitement pénitentiaire dans la Prison Militaire de N'dolo.
6
CHAPITRE I : LES JURIDICTIONS MILITAIRES CONGOLAISES
Cette justice a été créée
après qu'on ait constaté que les juges civiles ne pouvaient plus
être jugés ensemble avec les militaires, les policiers et les
personnes de services nationaux, les civils lorsqu'ils commettent les
infractions avec les armes de guerre, lorsqu'ils poussent et incitent les
militaires à commettre les infractions aux lois et règlements
militaires, lorsqu'ils commettent avec les militaires des infractions
prévues et punies par le code pénal militaire ; d'où le
principe « Jugés par ses paires, jugés par ses
supérieurs ».
C'est de la qualité et du grade de la personne
justiciable que dépend la compétence personnelle des cours et
tribunaux militaires.
Tout comme la justice de droit commun, la justice militaire
est organisée par une loi, celle n°023/2002 du 18 novembre 2002.
Dans les sections qui suivent, nous analyserons tour à
tour l'organisation et le fonctionnement des juridictions militaires
congolaises, puis les peines prévues par le code pénal
militaire.
SECTION I. L'ORGANISTION ET LE FONCTIONNEMENT DES
JURIDICTIONS MILITAIRES CONGOLAISES
La loi précitée divise les juridictions militaires
en pyramide de quatre
niveaux :
V' Au sommet la haute cour militaire (HCM)
V' Puis les cours militaires et la cour militaire
opérationnelle (CM et CO)
V' Les tribunaux militaires de garnison (TMG)
V' Enfin les tribunaux militaire de police (TMP)
7
§1. La haute cour militaire (HCM)
Elle est organisée par les articles 6 à 11, 82
et 83 de la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant
code judiciaire militaire. Il existe une seule Haute Cour Militaire sur toute
l'étendu de la République, et elle a son siège à
Kinshasa.
A. Composition de la Haute Cour Militaire
Elle est composée d'un premier président, d'un
ou plusieurs présidents et des conseillés. Ils sont nommés
et le cas échéant révoqués par le président
de la République conformément aux statuts de magistrats.
La HCM siège avec 5 membres, tous officiers
généraux ou supérieurs dont 2 magistrats de
carrière. Lorsqu'elle siège en appel, elle est composée de
5 membres dont 3 magistrats de carrière.
B. Personnes justiciables de la HCM
La HCM a la compétence de juger les officiers
généraux des FARDC, les membres de la police nationale congolaise
(PNC), les personnes de service national du même rang, les magistrats
militaires membres de cette cour, les magistrats militaires de l'auditorat
général, des cours militaires opérationnelles, des
auditorats militaires près ces cours et les membres non magistrats
militaires desdites juridictions. La HCM connait des recours en annulation
contre les arrêts et jugements rendus en dernier ressort par les cours et
tribunaux militaires excepté ceux de CMO qui ne connaissent pas des
recours.
8
§2. Les cours militaires (CM)
Elles sont prévues par les articles 12 à 17, 84 et
85 de la loi N°023/002
du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire. Il est
institué une cour
militaire dans chaque province et 2 dans la ville de Kinshasa
soit 12 cours
militaires au total. Les cours militaires existantes sont :
> Les cours militaires de Kinshasa/Gombe et de
Kinshasa/Matete
> La cour militaire de Bandundu
> La cour militaire de Matadi (Bas-Congo)
> La cour militaire de Kananga (Kasaï-Occidental)
> La cour militaire de Mbuji-Mayi (Kasaï-Oriental)
> La cour militaire de Lubumbashi (Katanga)
> La cour militaire de Kindu (Maniema)
> La cour militaire de Mbandaka (Equateur)
> La cour militaire de Kisangani (Province orientale)
> La cour militaire de Goma (Nord Kivu)
> La cour militaire de Bukavu (Sud Kivu)
A. Composition de la C.M.
Elle est aussi composée d'un premier président,
d'un ou plusieurs présidents et des conseillers.
Elle siège à 5 membres tous officiers
supérieurs au-moins dont 2 magistrats de carrière.
Le 1er président peut en cas de
nécessité requérir les services d'un magistrat civil en
vue de compléter le siège.
Préconisé par les articles 21, 22, 88 et 89 de
loi N°023 /2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire.
9
B. Les personnes justiciables de la C.M.
Cette cour est compétente pour juger les officiers
supérieurs des FARDC, de la P.N.C, et du service national de même
rang, les fonctionnaires de commandement du ministre de la défense, les
magistrats militaires des tribunaux de garnisons et ceux des auditorats
près ces tribunaux.
Les C.M. connaissent les recours en appel contre les
décisions des tribunaux militaires de garnison.
3) Les cours militaires opérationnelles (CMO)
Sont prévues par les articles 18 à 20,
86 et 87 de la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant code
judiciaire militaire.
Elles ne sont créées que par décret
présidentiel. Elles ne sont pas permanentes et ne sont établies
que dans certains cas, Par exemple en cas de guerre ou dans toute circonstance
exceptionnelle (rébellion ou insurrection militaire).
Il est établi dans les zones d'opération de
guerre des CMO qui accompagnent des fractions de l'armée en
opération. L'implantation de CMO est décidée par le
président de la République.
Le CMO n'ont pas des limites de compétence
territoriale. Elles sont compétentes pour connaître toutes les
infractions relevant des juridictions militaires qui leurs sont
déférées ou soumises.
Elles siègent avec 5 membres dont un magistrat au moins
et leurs décisions sont sans recours.
4) Tribunaux militaires de garnison (TMG)
10
Normalement il est prévu 1 ou 2 TMG dans le ressort d'un
district, d'une ville, d'une garnison ou d'une base militaire.
A. Composition du TMG
Le TMG est composé d'un président (officier
supérieur ou subalterne, magistrat de carrière) et 4 juges
assesseurs (OPJ à beaucoup d'expérience assimilé au juge
question de compléter le siège).
B. Personnes justiciables du TMG
Le TMG est compétent pour juger les officiers des FARDC,
de la PNC, des SN d'un grade inférieur à celui de major.
§5. Les tribunaux militaires de police (TMP)
Les TMP sont prévus par les articles 23 à 26, 90 et
91 de la loi N° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire
militaire.
A. Composition du TMP
Il est institué un ou plusieurs TMP dans le ressort d'un
TMG, ce sont les magistrats du TMG qui sont désignés pour
composer le TMP. Il siège avec 3 juges dont un magistrat de
carrière.
Ces magistrats sont désignés par le 1er
président de la CM.
B. Personnes justiciables
Ce tribunal est compétent pour juger les militaires des
FARDC ou assimilés d'un grade inférieur à celui de Major
qui se rendent coupables des infractions punies de 1 an de servitude
pénale au maximum.
Ainsi dans la section suivante, comme énoncé nous
allons analyser les peines prévues par le code pénal
militaire.
3 Art. 26 CJM
11
Section II : LES PEINES PREVUES PAR LE CODE PENAL
MILITAIRE
L'actuel code pénal militaire prévoit les peines
principales et les peines complémentaires.
§1. Les peines principales
Par rapport au code de justice militaire abrogé qui
prévoyait deux peines principales (la mort par les armes et
l'emprisonnement militaire), la loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant
Code Pénal Militaire en prévoit plutôt trois peines : la
mort par les armes, les travaux forcés ainsi que la servitude
pénale3. Dans une dynamique d'assainissement des
légiférassions, le législateur congolais s'est ressaisi en
plaçant le concept approprié dans la nomenclature des peines,
à savoir la servitude pénale en lieux et place de
l`emprisonnement militaire ; de même il a souscrit aux évidences
légales postérieures à l'ordonnance-loi n°72/060 du
25 septembre 1972 en intégrant dans la nomenclature actuelle la peine
des travaux forcés, lors même qu'il s'est refusé de la
maintenir dans le système répressif militaire. Nous ne pouvons
qu'apprécier ce double acte de correction et d'impérative
réactualisation, preuve d'une approche réaliste.
A. La peine de mort
Nous réitérons nos suffrages au maintien de
cette peine dans le système répressif national, et plus
spécialement en droit pénal militaire, en vue de parer
efficacement aux exigences de l'ordre public militaire sous-tendant à la
survie de l'Etat. Après un bref aperçu historique sur le
régime d'exécution, nous tenterons de dégager la
controverse sur la conformité ou non de la peine de mort à la
constitution congolaise et la position actuelle du législateur avant
d'aborder la procédure d'exécution de cette sanction.
12
1. Bref aperçu historique sur le régime
d'exécution
Peu avant la fin du 19ème siècle,
tout civil, auteur d'une incrimination réprimée de mort et
relevant de la compétence des juridictions militaires, était
soumis à la rigueur de la loi pénale militaire depuis
l'enquête primaire jusqu' à sa condamnation. Cependant, lorsque
cette condamnation se soldait par la peine de mort, le régime
d'exécution de cette dernière échappait aux rigoureuses
normes militaires pour tomber sous le coup de l'arrêté du
gouverneur général du 09 avril 1898. Ce texte dont le fondement
était l'article 6 du CPO LII, règlementait les exécutions
des peines capitales prononcées par les juridictions militaires. Selon
les prescrits de cet arrêté, les exécutions des peines
capitales s'effectuaient par pendaison pour les civils et par les armes pour
les militaires.
Mais cette option nous parait concevable dans un contexte
d'émergence embryonnaire de la loi pénale militaire. Sinon
dès lors qu'un individu se trouve embarqué sur la piste d'un
appareil judiciaire spécial, il doit être entièrement
soumis à la totalité des normes y afférentes jusqu'
à son ultime sort. C'est cette logique qui se dégage de l'option
actuelle du législateur.
2. Aperçu de la polémique sur la
conformité ou non de la peine de mort à la constitution
congolaise
Depuis la promulgation de la constitution congolaise du 18
février 2006, une vive controverse à vu le jour au sein de la
société congolaise entre les abolitionnistes et les
retenitionnistes de la peine de mort. Les abolitionnistes se fondent sur deux
dispositions constitutionnelles pour affirmer que la peine de mort est
déjà abrogée et que son application par les juridictions
militaires s'avère inconstitutionnelle. Il s'agit des articles 16 et 61
de la constitution.
13
Indépendamment des arguments traditionnels
avancés par les uns et les autres sur l'inutilité ou non de cette
peine, notre présente démarche tente de rencontrer la
volonté du constituant à travers ces deux dispositions
constitutionnelles.
a. De l'article 16 de la Constitution
Aux termes de cette disposition constitutionnelle :
« La personne humaine est sacrée. L'Etat a
l'obligation de la respecter et de la protéger.
Nul ne peut être tenu en esclavage ni dans une
condition analogue
Nul ne peut être soumis à un traitement
cruel, inhumain ou dégradant
Nul ne peut être astreint à un travail
forcé ou obligatoire ».
Cette disposition constitutionnelle n'est point une
innovation du constituant national. Car, un regard attentif sur le
passé nous permet d'observer simplement que les principes
dégagés par l'article 16 relèvent de la tradition
constitutionnelle de la R.D. Congo.
Du reste, il appert de l'exposé des motifs de cette
loi fondamentale que « Le constituant tient à réaffirmer
l'attachement de la République Démocratique du Congo aux Droits
humains et libertés fondamentales tels que proclamés par les
instruments juridiques internationaux auxquels elle a adhérée.
Aussi, a-t-elle intégré ces droits et
libertés dans le corps même de la constitution
»4.
b. De l'article 61 de la Constitution
Aux termes de cette disposition constitutionnelle :
4 Exposé des motifs de la constitution
nationale, in n° spécial, 47è année, Kinshasa 18
févr. 2006, p. 4.
14
« En aucun cas, et même lorsque l'état de
siège ou l'état d'urgence aura été proclamé
conformément aux articles 85 et 86 de la présente constitution,
il ne peut être dérogé aux droits et principes fondamentaux
énumérés ci-après :
1. Le droit à la vie ;
2. L'interdiction de la torture et des peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants ;
3. L'interdiction de l'esclavage et de servitude ;
4. Le principe de légalité des infractions et
des peines ;
5. Les droits de la défense et le droit de recours
;
6. L'interdiction de l'emprisonnement pour dettes ;
7. La liberté de pensée, de conscience et de
religion ».
1. La position actuelle du législateur
Depuis l'ordonnance-loi n°12/060 du 25 septembre portant
institution d'un code de justice militaire, le législateur a
définitivement réglé cette question. Car l'article 391
dudit code stipulait : « Tout condamné à la peine de mort
(...) sera fusillé... ». L'actuel code pénal militaire
abonde dans le même sens, parce qu'à l'article 28, alinéa
1er il est prescrit : « Tout condamné à mort en
vertu du présent code sera passé par les armes ».
Il n'y a point de doute que cette loi s'applique
indistinctement à toute personne condamnée par les juridictions
militaires, peu importe qu'elle soit militaire, assimilée ou même
civile. Il nous semble que le législateur pousse jusqu'au bout sa
logique de maintien de l'effet intimidateur. Aussi, le condamné à
mort contre lequel la dégradation ou la destitution n'a pu être
prononcée, peut
5 Art. 28 al2 du CPM
6 Art. 27 du CPM
15
porter, lors de son exécution, les insignes et
uniformes de son grade5, qu'il conserve du reste jusqu'à sa
dernière demeure.
Enfin, le législateur innove en prescrivant qu'à
défaut du prononcé de cette haute expression pénale, pour
tous le cas assortis de cette sanction mais dont les auteurs sont
condamnés seulement à la servitude pénale à
perpétuité ou à la servitude pénale principale, il
doit être précisé une durée minimale de
sureté incompressible, c'est-à-dire une période pendant
laquelle le condamné ne peut prétendre à aucune remise de
peine6. Il en appert la volonté réelle du
législateur d'endurcir la situation de tout coupable d'un fait
punissable de mort, mais dont la peine méritée est inferieure
à ce châtiment suprême. Que dire alors de la
procédure de son exécution ?
2. Procédure d'exécution de la peine
capitale
Les justiciables des juridictions militaires condamnés
à la peine de mort sont passés par les armes dans un lieu
désigné par l'autorité militaire (art. 352 al 2 du
CJM).
Sauf dérogation de l'Auditeur Général,
sont seuls admis à assister à l'exécution des jugements
prononçant la peine capitale :
1. Le président ou un juge militaire, magistrat de
carrière, un représentant du ministère public, le
magistrat instructeur et le greffier de la juridiction militaire du lieu
d'exécution ;
2. Le conseil du condamné ;
3. Un ministre de culte ;
4. Un médecin désigné par
l'autorité militaire ;
5. Les militaires du service d'ordre requis à cet
effet par le ministère public.
16
Aucune condamnation à mort ne peut être
exécutée le jour des fêtes nationales ou les dimanches,
sauf en temps de guerre ou lorsque l'intérêt supérieur de
la nation l'exige (art. 35 du CJM).
B. Les travaux forcés
La peine de travaux forcés est d'application
récente dans la législation congolaise, ou elle est devenue une
réalité irréfutable depuis la promulgation de la loi
n°73-017 du 5 janvier 1973. Cette sanction la privation de la
liberté, de même que le condamné se trouve astreint
à exécuter un ou plusieurs travaux réglementaires autres
que les travaux généralement confiés aux pensionnaires des
établissements pénitentiaires. Elle vise à assurer
à l'Etat une certaine compensation de la perte qu'il subit à la
suite de l'infraction de détournement des deniers publics7. A
cette fin, elle répond à une logique d'opportunité et
d'efficacité qui lui procure un effet bénéfique dans la
collectivité nationale.
Au fait, le législateur a voulu que la peine de travaux
forcés soit ferme tant au moment du prononcé du jugement que dans
son exécution, c'est-à-dire, dépourvu de toute mesure de
clémence : sursis, libération conditionnelle ; la loi
précise aussi que l'exécution de la peine de travaux
forcés ne peut être assimilée ni confondue avec la peines
de servitude pénale8. Mais jusqu'à ce jour les mesures
d'application qui devraient accompagner l'exécution de cette sanction
n'ont pas encore été déterminées. D'où
contrairement à la volonté légale, la pratique assimile
cette peine à celle de servitude pénale.
En droit pénal militaire, la peine de travaux
forcés a été introduite par l'ordonnance-loi n°
78-010 du 29 mars 1978 modifiait et complétait l'ordonnance-loi n°
72/060 du 25 septembre 1972 portant institution d'un code de justice
7 Exposé des motifs de la loi n°73-017 du
5 Janv. 1973, in J.O, éd prov du 15 févr. 1975,
n°4, p. 29.
8 BAYONA-ba-MEYA, cours de procédure
pénale, Faculté de droit, UNIKIN, 1982-1983, p.142-143
cité par MUTATA LUABA, Droit pénal militaire congolais,
Ed. Du SDEMJDH, Kinshasa 2012
17
militaire. Cette sanction fut obligatoirement attachée
à deux incriminations : celle d'incitation à commettre les actes
contraires au devoir ou à la discipline9 et celle de
violation des consignes10 et ce, en remplacement de la peine de
servitude pénale initialement prévue. Le législateur en
alourdissait même la durée d'emprisonnement et ce, jusqu'à
la réforme du 18 novembre 2002.
C. La servitude pénale
En reprenant cette peine dans la nomenclature des sanctions
principales, le législateur a remis la pendule à l'heure en
consacrant un concept exact, contrairement à « l'emprisonnement
militaire » que retenait l'ancien code de justice militaire.
La servitude pénale principale est une peine
d'emprisonnement de droit commun qui peut être temporaire ou
perpétuelle11, lorsqu'elle est temporaire, on parle de
servitude pénale principale à temps dont le taux maximum est
impérativement fixé à 20 ans. Lorsqu'elle est
perpétuelle, elle est qualifiée de servitude pénale
à perpétuité. La doctrine constate l'inefficacité
de cette sanction qui, ignorée de nos ancêtres, ne revêt
aucun caractère infamant ; le citoyen qui revient de la prison, sauf
peut-être le voleur, n'est pas l'objet de mépris. Car personne ne
s'inquiète de son passé judiciaire12. Cependant, le
concept « emprisonnement » étant d'usage dans le
système romano-germanique, il sied d'en élucider la portée
tant universelle que spécifique à certaines législations
du système romano-germanique.
9 Art. 457de l'ancien code de justice militaire
10 Art. 480 de la loi précitée
11 LIKULIA BOLONGO, droit et sciences
pénitentiaires, PUZ, Kinshasa 1981, p.21 cité par MUTATA
LUABA, op. cit, P103
12 BAYONA-ba-MEYA, op. cit. p. 143.
18
1. L'approche universelle du concept «
emprisonnement »13
Les instruments juridiques internationaux spécifient le
sens de ce concept par une étude comparative avec d'autres notions
voisines relatives à la privation de liberté, en l'occurrence :
l'arrestation et la détention.
a. L'arrestation
L'arrestation s'entend de tout acte qui consiste à
appréhender une personne du chef d'une prétendue infraction ou
par le fait d'une autorité quelconque.
Notion très proche du droit interne, elle
déborde le cadre judiciaire pour s'étendre à tout acte
posé par n'importe quel détenteur de l'autorité ou de la
puissance publique. Tel serait le cas de toute arrestation opérée
par les services de sécurités, les forces armées, les
autorités politico-administratives, etc.
b. La détention
La détention est conçue comme la condition d'une
personne privée de liberté individuelle, sauf à la suite
d'une condamnation pour une infraction.
Mais, cette approche nous semble insuffisante, et prête
à confusion avec le concept « arrestation » ; dans la mesure
où elle ne fait aucune allusion à l'endroit où l'individu
est retenu à son corps défendant. Et pourtant la personne
arrêtée c'est-à-dire privée de sa liberté
d'aller et de venir, devient détenu dès lors qu'elle est
placée à un endroit bien déterminé par la loi.
On parle alors de la détention préventive
justifiée par les poursuites judiciaires ou encore de la
détention découlant d'une décision judiciaire de
condamnation : tel est le cas de l'emprisonnement.
13 Extrait du code de conduite pour les responsables
de l'application des lois, annexé à la résolution 34/169
de l'assemblée générale des NU en date du 17
Décembre 1979, in droits de l'homme et application des lois, manuel de
formation à l'intention des services de police, NU, New York et
Genève,1997, p. 193, cité par Ibidem
19
c. L'emprisonnement
L'emprisonnement, c'est la condition de toute personne
privée de liberté individuelle à la suite d'une
condamnation pour une infraction. Notion judiciaire, l'emprisonnement se
relève ainsi comme un acte du seul juge de fond ayant statué sur
les faits articulés contre la personne emprisonnée,
c'est-à-dire gardée contre son gré en milieu
carcéral.
En droit congolais, le concept « emprisonnement » ne
peut revêtir qu'un seul usuel, celui de la mise en prison ou de
l'incarcération d'un individu poursuivi ou condamné pour une
infraction déterminée. La nature de la peine importe peu pour les
condamnés, il peu s'agir d'une servitude pénale principale ou des
travaux forcés.
§2. Les peines complémentaires applicables par
les juridictions militaires
Initialement, ces peines complémentaires constituaient
tout simplement des mesures disciplinaires qui ne pouvaient être
prononcées par les juridictions de jugement. Elles relevaient alors de
la compétence du commandement militaire.
L'arrêté royal du 04 février 1952, en son
article 35, prévoyait notamment les mesures disciplinaires
ci-après : La rétrogradation, la perte de grade et le renvoi de
la force publique14.
Le décret-loi du 09 juin 1965 portant règlement
de discipline des forces armées, a pris ces mesures.
C'est depuis l'ordonnance-loi n° 72/060 du 25 septembre
1972 que la plupart de ces mesures disciplinaires ont été
érigées en peines complémentaires, à
14 Consulter, CLCB, vol I, p. 44.
20
part le renvoi des forces armées qui n'acquiert cette
dimension qu'en cas de vol ou de détournement d'effets militaires.
A. La privation de grade ou de la
rétrogradation
Bien que reprises sur la même ligne par le
législateur, la privation de
grade et la dégradation ne sont pas synonymes. Chacune
d'elle renferme une acception précise, distincte de l'autre. C'est ce
que nous allons démontrer dans les lignes qui suivent.
1. La privation de grade
Autre fois connue sous la dénomination de « perte
de grade », la privation de grade est une peine complémentaire
temporaire pouvant être infligée au militaire de tout grade et qui
se voit replacé soldat de deuxième classe. L'agent qui subit
ainsi un retour à la case du départ, demeure tout de même
sous le drapeau. Il est tenu au respect de ses anciens subalternes, devenus ses
supérieurs en grade. Cette peine complémentaire peut-être
obligatoire15 ou facultative16. Et elle est
prononcée par toutes les juridictions de jugement.
Toutes ces notions doivent être précisées,
puisque leur application se heurte parfois aux écueils
d'interprétation. D'aucuns croient que la privation de grade
s'étend à la durée de la détention, mieux au taux
de la peine méritée. C'est ainsi qu'un sous-officier de
première classe ayant écopé de cette peine, s'est permis
de porter ses insignes de grades après avoir purgé
complètement sa peine de servitude pénale à temps.
Rappelé à l'ordre par son commandement, il rétorque que la
peine de privation de grade a pris fin dès l'instant ou il a
recouvré la liberté.
15 Art. 87 al 6 du CPM relatif à l'outrage au
drapeau ou à l'armée
16 Art. 29 du CPM « toute condamnation militaire
peut comporter la privation de grade ou rétrogradation » Art.84 du
CPM relatif aux actes commis par les médecins, chirurgiens, sages-femmes
ou autres professionnels de santé
21
C'est l'avis technique de l'officier du Ministère
public qui a convaincu finalement cet élément qui,
déçu, à déserté de
l'armée17.
Enfin, il faut noter que de par son origine disciplinaire,
cette peine s'applique généralement avec le concours du
commandement qui s'érige à l'occasion en témoin de
moralité de l'agent lors de sa mise en examen : « c'est un
élément dont les actes n'honorent pas son rang, châtiment
exemplaire à l'endroit de cet agent qui trahit son grade », etc.
2. La rétrogradation
La rétrogradation est une peine complémentaire
temporaire par laquelle un militaire est placé dans une position
hiérarchique inférieure à celle dans laquelle il se
trouvait avant sa condamnation18. La perte d'un grade est valable de
l'officier général ou sous-officier de première classe
(Adjudant) ; mais quant aux premiers sergents-majors et premier sergent, ils
sont rétrogradés au grade de sergent. Et la peine s'applique
normalement en dessous de ces sous-officiers de deuxième classe,
c'est-à-dire le sergent est remis au grade de caporal, le soldat de la
première classe est replacé soldat de deuxième
classe19.
Moins grave que la privation de grade, la
rétrogradation est infligée également avec le concours du
commandement, au condamné militaire ayant fait l'objet de punition ou
mesures disciplinaires répétées ou particulièrement
graves et le rendant partant indigne d'être maintenu dans le grade qu'il
occupe.
Le condamné peut toutefois reconquérir sa
position, si, pendant un certain délai, il fait preuve de bonne conduite
et se conduit en honnête homme en respectant les lois et
règlements qui les régissent.
17 CG Pol Kis 15 Mai 1988, inédit :
l'intéressé n'ayant pas interjeté son appel contre ce
jugement, il devait se contenter de son nouveau rang de soldat de
2ème classe, après avoir purgé sa peine de
prison
18 Art. 59 du décret-loi du 9 Juin 1965 portant
règlement de discipline des forces armées
19 Art.35 de l'A-R du 4 Févr. 1952 portant
mesures disciplinaires in CLCB, vol I p. 414.
22
Notons enfin qu'à l'instar de la privation de grade, la
rétrogradation peut-être prononcée à tous les
niveaux des juridictions de jugement. Car elle n'est point inhérente au
taux de la peine principale comme la dégradation.
B. La dégradation
L'article 30 du CPM dispose : « la dégradation
pourra aussi être prononcée contre les sous-officiers, ou
assimilés, condamnés à plus de cinq ans de servitude
pénale ».
Le législateur congolais reste muet sur la
définition de la dégradation, en détermine tout de
même les effets20 :
? La privation du grade et du droit d'en porter les insignes
et l'uniforme ;
? L'incapacité de servir dans l'armée à
quelque titre que ce soit ;
? L'interdiction de droit de ne porter des décorations
ou autres insignes de distinction honorifique militaire.
Il est sous entendu que la dégradation militaire
peut-être perçue comme une peine complémentaire
perpétuelle par laquelle le condamné, dont le grade est
inférieur à celui de sous-lieutenant, est déchu de sa
qualité de militaire, entrainant de jure son renvoi de
l'armée21.
La dégradation n'est prononcée que lorsque le
militaire est condamné d'une servitude principale de plus de cinq ans. A
cet égard, elle ne peut être prononcée par une juridiction
dont la compétence matérielle porte sur des infractions punies
d'un an maximum ou celle dont la peine méritée ne peut
dépassée un an. (Par ex : Tribunal Militaire de Police).
De plus, cette peine doit être consécutive
à un acte susceptible d'entamer gravement la crédibilité
des forces armées, lequel astreint l'auteur à une
20 Art.32 du CPM
21 C.G app., QG de TNE, 28 Oct. 1941, p. 104.
23
incapacité totale d'oeuvrer au sein de celle-ci, elle
s'applique en même temps que la peine principale.
Qu'adviendrait-il si l'agent bénéficie de la
grâce présidentielle ou de
l'amnistie ?
La solution, à notre avis, doit être
envisagée différemment selon qu'il s'agit de la grâce ou de
l'amnistie.
En ce qui concerne la grâce présidentielle, nous
somme d'avis qu'elle permet au bénéficiaire d'être
exempté de subir sa peine principale, sans pour autant « effacer la
condamnation, ni la trace qui en résulte 22». Par
conséquent, le militaire gracié ne peut aucunement recouvrer le
droit de servir sous le drapeau. Bien au contraire, la déchéance
subsiste à jamais.
Partant da la réhabilitation, le législateur
abonde dans ce sens en précisant que « la perte de grade, des
décorations nationales et des droits à la pension pour les
services antérieurs qui résultait de la condamnation subsiste
pour les militaires ou assimilés de tout grade ; mais ceux-ci peuvent,
s'ils sont intégrés dans l'armée, acquérir de
nouveaux grades, des nouvelles décorations et des nouveaux droits
à la pension23 ».
Quant à l'amnistie, elle est une mesure d'oubli d'une
infraction prise par le législateur, entrainant aussi bien l'extinction
de l'action publique que l'effacement d'une peine pour des cas bien
déterminés, nous affirmons que le bénéficiaire
peut-être restauré dans son droit de réintégrer
l'armée. Etant donné que le législateur se passe
totalement des actes répréhensibles ayant justifié la
décision de dégradation prise par le juge de fond. Qu'en est-il
de la destitution ?
22 CG belges, IIème, du 16 Avril. 1918, in
droit de guerre, p. 744, lire aussi JEL 1974, p. 7.
23 Cfr. Art. 25 du CPM
24
C. La destitution
L'article 31 du CPM dispose : « les juridictions
militaires pourront prononcer la peine de destitution contre tout officier
condamné à cinq ans de servitude ».
Il est à retenir que cette peine engendre les
mêmes effets que ceux de la dégradation. Et les
développements exposés sur la grâce présidentielle
et l'amnistie restent valables dans cette hypothèse aussi ; lors
même que le sens du concept « destitution » mérite
d'être précise.
Il appert que la destitution est, en principe, une peine
complémentaire perpétuelle infligée exclusivement aux
officiers de tout rang, condamnés à plus de cinq années de
prison, laquelle consiste dans la déchéance de la qualité
de militaire en entraînant de jure le renvoi de l'armée. En
majorant, tant pour la dégradation que pour la destitution, le taux de
la peine méritée au maximum de cinq ans de servitude
pénale principale, le législateur a pris toute la mesure de la
gravité de cette peine, qui peut résulter des humeurs
inhabituelles de juges de fond.
A l'instar de la dégradation, dont la différence
ne tient qu'au rang des militaires visés, la destitution est « une
sanction infamante, affective et
éliminatrice, et joue essentiellement un rôle
d'intimidation24 ». Elle vise
substantiellement à
sauvegarder l'image de marque des Forces Armées vis-à-vis des
populations civiles.
Par ailleurs, la destitution est aussi une peine
complémentaire obligatoire ou facultative.
Elle est obligatoire, par exemple, en cas d'outrage au
drapeau, à l'armée 25; ou en cas d'abandon d'un navire
ou aéronef militaire ou assimilé prévu par l'article 118
du CPM. Elle est facultative dans d'autres cas où le condamné
a
24 LIKULIA BOLONGO, p. 35 cité par MUTATA
LUABA, Droit pénal militaire congolais, Ed. Du SDEMJDH,
Kinshasa 2012
25 Art. 86 al. 6 du CPM
25
subi une peine principale de plus de cinq années de
prison, main sans admission des circonstances atténuantes.
A noter tout de même qu'au rebours du droit congolais,
le droit belge fait de la destitution une peine complémentaire
temporaire dont les effets peuvent cesser de courir par suite d'une grâce
royale. S'il désire regagner encore l'armée, le condamné
gracié sera réintégré dans son grade d'antan. Eu
égard aux conséquences ou combien désastreuses que ces
sanctions complémentaires peuvent occasionner non seulement pour
l'individu concerné, mais encore pour son cercle familial, leur
application se trouve assortie de quelques limitations légales.
1. Limitations à l'application des peines
complémentaires
Le législateur prévient qu'elles sont de deux
ordres: celles découlant de l'admission des circonstances
atténuantes par le juge et celles relatives à la qualité
de certains condamnés.
2. Limitations découlant des circonstances
atténuantes
D'abord, il sied de relever que les circonstances
atténuantes s'entendent d'un faisceau de fait accompagnant la
perpétration d'une infraction et qui, laissés à
l'appréciation souveraine du juge de fond, permettent la
réduction de la peine en dessous du taux habituel26.
Aussi l'article 35 du CPM stipule : « quand la peine
prévue est la destitution ou la dégradation, et si les
circonstances atténuantes ont été admises, la juridiction
applique la peine de privation de grade ».
L'interprétation stricte de cette disposition nous
amène à affirmer que si les circonstances atténuantes sont
admises pour une infraction ou le législateur prévoit
l'application de la dégradation ou de la destitution à titre
complémentaire, le juge est tenu de commuer l'une ou l'autre de ces
peines en privation de grade,
26 Art. 18 et 19 du CPOL II qui constitue le
siège de cette matière
26
quand bien même le taux de la peine principale est
supérieur à cinq années de servitude pénale
principale. Cependant, cette limitation n'est d'application absolue dans toutes
les hypothèses où le législateur prévoit
l'application de la peine de destitution. Car, par sa volonté
dérogatoire, en cas d'abandon d'un navire ou d'un aéronef
militaire ou assimilé, prévu par l'article 118 déjà
évoque, la destitution est impérativement prononcée, quel
que soit le taux de la peine.
De nombreuses décisions judiciaires pourtant assorties
des circonstances atténuantes, ont retenu la dégradation ou la
destitution au regard des articles 393 et 396 du Code de justice Militaire
abrogé, devenus articles 30 et 31 du CPM, alors que l'un ou l'autre de
ces articles devrait être combiné avec l'article 401 du Code de
justice Militaire, devenu article 35 du CPM.
3. Limitations relatives à la qualité de
certains condamnés
Elles visent les prisonniers de guerre et les personnes
étrangères à l'armée et portent sur les peines de
dégradation, de dentition ainsi que de privation de garde.
Aux termes de l'article 36 du CPM, il est prescrit : «
pour des prisonniers de guerre et les personnes étrangères
à l'armée, la destitution, la dégradation et la privation
de garde, prévus à titre principal ou complémentaire, sont
remplacées par une peine de servitude pénale subsidiaire d'un
à six mois ». Il nous semble que cette disposition est sujette a
caution : il relève de noter que même la destitution ne plus
exceptionnellement prévu à titre principal par le
législateur de la reforme. Elle devient totalement une peine
complémentaire à l'instar de la dégradation et de la
privation de grade.
En outre, les peines complémentaires s'appliquant en
même temps que les peines principales, c'est à bon droit que le
législateur de la réforme a remplacé
27 Art. 36 du CPM
27
l'une ou l'autre de celles-ci par une autre
complémentaires en l'occurrence : la servitude pénale
subsidiaire, d'un à six mois ; en lieu et place d'une sanction suis
generis « d'emprisonnement » que prévoyait l'ancien code de
justice militaire ; car le législateur entend simplement exclure les
prisonniers de guerre, de même
que toute autre personne étrangère à
l'armée du régime des peines
complémentaires
liées au grade , en l'occurrence : la destitution, la
dégradation, la privation de grade27 , et même la
rétrogradation non reprise par la loi.
D. L'interdiction de l'exercice des droits civiques,
politiques ou civils
L'article 33 CPM dispose : « les juridictions militaires
peuvent, dans certains cas prévus par la loi, interdire, pour un temps
déterminé, en tout ou en partie, l'exercice des droits civiques
ou politiques civils suivants :
1. De vote et d'élection ;
2. D'éligibilité ;
3. D'être nommé aux fonctions publiques ou aux
emplois de l'administration ou d'exercer ces fonctions ou emplois ;
4. Du port d'armes ;
5. D' être tuteur, curateur, si ce n'est de ses enfants
et sur l'avis seulement de la famille ;
6. D'être expert ou employé comme témoin
dans les actes ;
7. De témoigner en justice, autrement que pour y faire
de simples déclarations »
Cette disposition légale apparait désormais
totalement « épanouie » et sa compréhension devient
aisée. Puisque dépouillée de deux articles relatifs
à « la forfaiture » que prévoyait l'ancien code de
justice militaire, elle se veut expressive de la volonté réelle
du législateur de faire oeuvre autonome et réaliste.
28
L'actuel code judiciaire militaire cesse d'être une
copie aveugle des législations d'inspiration, ou l'on retrouvait des
concepts difficiles à intégrer dans le système
répressif congolais, et sources des divergences préjudiciables
pour les justiciables.
Pour l'heure, ce qu'il faut utilement retenir, c'est que
l'interdiction de l'exercice des droits civiques, politiques ou civils est une
mesure de sureté ou une peine complémentaire facultative,
applicable aux cas limitativement prévus par la loi, notamment à
l'encontre des coupables d'insoumission28, de désertion dans
les situations exceptionnelles déterminées par la
loi29, des complices médecins, pharmaciens, assistants
médicaux, infirmiers, guérisseurs, tradi-praticiens ou autres
professionnels de santé30, de l'outrage au drapeau ou
à l'armée, etc. En claire, le juge de fond ne peut s'arroger le
loisir de prononcer cette mesure pour des faits auxquels la loi ne la rattache
pas expressis verbis. Par ailleurs, celle-ci peut-être
appliquée en même temps que d'autres peines complémentaires
obligatoires ou facultatives. A titre d'exemple, en matière d'outrage au
drapeau ou à l'armée31, la loi prévoit
obligatoirement la destitution à l'encontre de l'officier coupable et
accorde au juge la possibilité de prononcer également cette
interdiction à sa charge32.
De même, l'application de cette mesure n'est pas
incompatible avec les principes énoncés aux articles 29 à
31 du CPM, relatif aux peines complémentaires inhérentes aux
grades33, pour des délits auxquels celle-ci se trouve
rattachée.
28 Art. 41 al. 3 du CPM
29 Art. 52 du CPM
30 Art. 52 du CPM
31 Art. 87 al. 7 du CPM
32 Art. 87 al. 6 du CPM
33 Art. 29, 30 et 31 du CPM
29
E. Le renvoi de l'armée, de la police nationale
ou du service national
L'art. 34 du CPM dispose : « tout militaire ou
assimilé est renvoyé de l'armée ou de son service en cas
de condamnation pour vol ou détournement d'effets militaires ».
Scrupuleusement attaché à deux incriminations,
le renvoi de l'armée ou de la police...conserve toute sa nature d'une
sanction à double face : c'est-à-dire essentiellement
disciplinaire, et exceptionnellement judiciaire.
? Sanction substantiellement disciplinaire
En rapport avec les forces armées, le renvoi est
régi par l'art. 84 du décret-loi du 9 juin 1965 portant
règlement de discipline des officiers, sous-officiers, gradés et
soldats, encore d'application à ce jour, normalement, il s'agit d'une
mesure disciplinaire qui peut-être prise par le conseil de discipline
à charge de tout militaire, quel que soit son rang, ayant commis un
manquement grave au devoir de son état ou à la discipline.
Ce domaine échappe naturellement à l'action des
juridictions militaires qui ne peuvent se prononcer que sur les faits
punissables par la loi et les peines y attachées légalement, en
vertu du célèbre principe de la légalité
déjà évoqué. En clair, quelque soit la
gravité de l'acte perpétré par un militaire, aucun juge ne
peut se permettre de violer la loi en prononçant son renvoi de
l'armée.
Ce domaine est réservé au conseil de guerre
général à travers la stricte observance de la loi.
C'est donc à titre exceptionnel que le
législateur soumet cette sanction à la compétence des
juridictions militaires, et par suite de la reforme, son champ d'application
s'étend tant aux forces armées qu'à la police nationale
congolaise et au service national.
30
? Sanction exceptionnellement judiciaire
C'est depuis l'ordonnance-loi du 13 février 1986 que la
peine de renvoi de l'armée à recouvré cette autre face
d'une peine complémentaire obligatoire : c'est-à-dire
prononcée d'office contre tout militaire coupable de détournement
ou de vol d'effets militaires, alors prévus et réprimés
par les articles 443 et 443 bis de l'ancien CJM, mais présentement
réglementé par l'art. 74 de CPM.
Il est donc important de saluer l'effort fourni par le
législateur de la réforme de remédier à toute
dispersion des textes légaux, les rendant souvent inaccessibles au
regard de l'étendue remarquable de l'espace géographique
nationale. Nous nous trouvons dans des situations ou certains juges, même
de la ville de Kinshasa, justifiaient la non application de cette peine par
« ignorance » de l'existence du texte légal qui la
réglementait.
F. La révocation
A priori, il serait hors propos de parler de cette sanction
dans cette étude si l'on sen tient à sa nature primaire et
à son inexistence sur la liste des peines organisées par la loi
militaire. Cependant, connue de tout temps comme sanction disciplinaire ou
administrative, la révocation, c'est une innovation légale, vient
de revêtir la nature d'une sanction quasi judiciaire et applicable
à tout « agent public de l'Etat » dont les militaires et leurs
assimilés (membres de la police nationale ou bâtisseur de la
nation).
En effet, par le décret-loi n°017/2002 du 03
octobre 2002, portant code de conduite de l'Agent public de l'Etat, il est
institué un cadre légal devant servir d'instrument de
régulation du comportement de celui-ci en vue de la bonne marche de
l'appareil étatique, assurer bien entendu dans chaque secteur
spécifique d'attributions. Aux termes de l'art. 1 de ce
décret-loi, « l'agent public de l'Etat »
31
s'étend de « toute personne exerçant une
charge publique de l'Etat et/ou rémunérée par le
trésor public ».
Sur cette liste d'agents publics de l'Etat sont
énumérés respectivement le personnel civil et militaire
oeuvrant au sein des forces armées et les agents de la Police Nationale
Congolaise.
A ce propos, l'art. 32 al.3 de ce décret-loi dispose :
« Tout Agent Public de l'Etat qui est condamné
définitivement à une peine de servitude pénale
égale ou supérieure à trois mois doit être
révoqué d'office sur simple constatation de la condamnation
».
En ce qui concerne le condamné, membre des forces
armées, de la police nationale ou service national, l'avis de
condamnation adressé au commandement par les instances judiciaires
militaires, permet d'effectuer ce constat automatique de révocation,
dans la mesure ou ce document renseigne suffisamment sur le sort judiciaire de
l'agent.
G. L'amende
A l'instar de nombreuses autres peines prévues par
l'actuel CPM, la peine d'amende figure dans la nomenclature de l'art. 26 dudit
texte. Il s'agit là d'une évolution positive par rapport au CJM
abrogé sous le régime duquel cette sanction n'apparaissait
qu'à travers certaines dispositions répressives qui la
prévoyait dans des hypothèses très limitées. Quoi
qu'il en soit, il importe d'en cerner le sens et d'en évoquer les
modalités de paiement.
1. Notions
L'amende est une peine accessoire ou principale qui consiste
dans le paiement par le présumé délinquant,
l'inculpé ou le condamné d'une certaine somme d'argent au profit
du trésor public. Cette sanction affecte pour ainsi dire
32
« la poche ou la porte-monnaie » de la personne
incriminée. L'on parle de l'amende transactionnelle lorsqu'elle
résulte d'un « marchandage » entre l'accusé pour une
infraction et l'autorité judiciaire compétente,
c'est-à-dire un OPJ de droit commun ou un magistrat du parquet. La loi
de la réforme retire à l'OPJ militaire la prérogative de
transiger les amendes avec l'auteur présumé de l'infraction,
justiciable de la juridiction militaire.
En sus, il faut retenir qu'un principe général
de droit préconise l'interdiction des amendes
collectives34.
En cas de condamnation, l'amende résulte d'une
décision du juge de
font.
Toujours en droit pénal militaire, lorsque la peine
d'amende est prononcée pour une infraction de droit commun contre des
militaires ou assimilés n'ayant pas rang d'officier, le tribunal peut
décider, par une disposition spéciale, de substituer à
cette peine celle de servitude pénale subsidiaire de deux jours à
six mois, l'intéressé conservant la faculté de payer
l'amende en lieu et place de l'emprisonnement35. Et la peine ainsi
infligée conserve le caractère d'une amende mais elle ne se
confond pas avec les autres peines prononcées. Elle est subie
indépendamment de celle-ci36.
Bien plus, lorsqu'il s'agit d'une infraction prévue par
le Code pénal Militaire, et quand les circonstances atténuantes
ont été admises, en aucun cas une peine d'amende ne peut
être substituée à une peine de servitude
pénale37. Ces principes énoncés par le droit
pénal militaire en matière d'amende doivent être
explicités ; en raison de la spécificité des destinataires
« originaire » de la loi militaire, l'on peut épingler une
approche réaliste de la situation socio-économique
34 Cfr. Cass. 8 Janv. 1951, JT, p. 320.
35 La peine d'amende est organisée par les
articles 10 et 13 du CPO L 1er et 26, 37 et 38 du CPM
36 Art. 37 al.2 du CPM
37 Art. 38 du CPM
33
des justiciables visés, de même que le choix
d'une situation favorable à ces incriminés.
a. L'approche réaliste
La loi militaire est « naturellement »
destinée aux personnes dont les avoirs sont généralement
modestes, sinon très limités surtout en ce qui concerne les
hommes n'ayant pas rang d'officier tant au sein de l'armée qu'au sein de
la police nationale ou du service national. Or l'amende étant une peine
patrimoniale, le législateur fait ainsi preuve de réalisme en
tenant compte des possibilités limitées de cette catégorie
des justiciables. C'est ainsi que l'alternative d'une peine de servitude
pénale subsidiaire est consacrée pour sanctionner tout de
même le délinquant « insolvable ». Il faut en outre
noter contrairement au droit commun qui ignore cette faculté
accordée au condamné38, ce dernier, en droit
militaire, peut payer l'amende et échapper à la servitude
pénale.
b. Le choix d'une situation favorable
Lorsqu'un condamné pour une infraction à la loi
militaire bénéficie des circonstances atténuantes, il lui
est retiré la latitude d'option entre l'amende et la servitude
pénale subsidiaire. Dans ce cas, il reste soumis au paiement de la seule
peine d'amende (art. 38 du CPM). A notre avis, cette solution traduit la
volonté réelle du législateur d'offrir au condamné
une situation favorable, dans la mesure où la peine d'amende
relève moins afflictive que celle de privation de liberté, et la
disponibilité de l'agent pour le service commandé s'en trouve
garantir.
38 Art. 13 du CPO LII « ...le condamné ne
peut se soustraire aux poursuites de ses biens en offrant de subir la servitude
pénale »
39 Art. 1er de l'Ord-loi n°85-010
du 31 Déc. 1985 modifiant l'ord-loi n°79-007 du 06 Juil. 1979
fixant l'expression monétaire et le taux de la majoration des amendes
pénales
34
2. Modalités de paiement
Le législateur n'impose aucune procédure pour le
paiement de l'amende prononcée par la juridiction répressive. En
droit commun, il détermine seulement le délai de huit jours
francs, à l'issue duquel la servitude pénale subsidiaire doit
être subie par le condamné. Quant à l'amende
transactionnelle, elle est versée dès que possible auprès
de l'autorité judiciaire l'ayant proposée et ce moyennant
quittance comme preuve de paiement, quand bien même, payée devant
l'enquêteur primaire(OPJ), elle ne met pas définitivement un terme
aux poursuites judiciaires ultérieures sur les mêmes faits.
En ce qui concerne l'unité monétaire, l'amende
s'exécute en principe en monnaie nationale. Mais, il y a lieu de
reconnaitre que cette règle n'a pu être de stricte rigueur
jusqu'à l'actuelle reforme judiciaire par suite de l'environnement
socio-économique particulièrement rude que connait les pays
depuis des décennies entrainant une dépréciation continue
de la monnaie nationale. Les taux d'amende étaient devenus
insignifiants, voire inadaptés aux différents signes
monétaires apportés par les multiples reformes monétaires
(francs congolais, zaïres, nouveaux-zaïres) intervenus dans notre
pays. Devant les fluctuations spectaculaires de la monnaie nationale, la
nécessité de majorer les taux d'amande s'avérait
impérieuse.
Déjà en 1985, le législateur avait,
à juste titre, perçu cette nécessité et
s'était résolu de « multiplier par dix le minima et le
maxima des amendes pénales39 ». Car, à
l'époque, la peine d'amende avait perdue « se vertu
répressive et dissuasive » dont elle devait pourtant jouir ; l'on
relevait en effet que « dès lors, une amende pénale
lorsqu'elle devient dérisoire par le fait de la
dépréciation monétaire, ne remplit plus son rôle de
prévenir des infractions et d'intimider des
La confiscation spéciale s'entend de toute, peine
complémentaire et patrimoniale affectant les biens du condamné
l'ayant servi à la perpétration d'une
35
délinquants potentiels ». Mais l'érosion
monétaire poursuivant son avancée, l'ordonnance-loi n°85-010
du 31 décembre 1985 s'avouait largement dépassée.
Actuellement, c'est par un arrêté interministériel que le
taux des amendes est fixé.
H. La confiscation spéciale
Grâce à la réforme, le législateur
a repris, à l'article 06 de la loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002,
la peine de confiscation spéciale, et avec l'abrogation de l'ordonnance
n°78/060 du 25 septembre 1972, la suppression de la peine de confiscation
générale devient effective par le fait d'une loi contraire ; au
rebours de toutes les spéculations antérieure des praticiens
gagnés aussi bien par des visions simplistes que des élans
d'intérêts.
Introduite en droit congolais depuis l'époque
coloniale, la peine de confiscation spéciale est inhérente
à la culpabilité de l'agent. D'autant plus qu'elle ne peut
être prononcée que lorsque ce dernier fait objet d'une
condamnation par la juridiction répressive. Cependant, force nous est de
constater que la pratique a, du moins pour les infractions de droit commun,
« consacré » l'exécution de cette peine tant à
la phase préliminaire qu'à la phase préparatoire de
l'instruction pour des infractions dont la peine principale peut être la
servitude pénale principale à temps ou l'amende. Tel est le cas
du vol simple dont l'auteur peut être amené à payer les
amendes transactionnelles. Il importe ainsi de dégager le sens du
concept « confiscation spéciale » avant d'évoquer
quelques problèmes pouvant être engendrés par l'application
de cette peine, surtout suite à l'abandon par le législateur de
la confiscation générale.
1. Notions
36
infraction, ou constituant le produit de cette
dernière. Elle procède généralement d'une
incrimination intentionnelle. Cette définition est tirée de
l'article 14 du CPO
L 1er qui dispose : la confiscation spéciale
s'applique uniquement :
a. Aux choses formant l'objet d'une infraction et celles qui
ont servi ou qui ont été destinées à la commettre
quand la propriété en appartient au condamné ;
b. Aux choses qui ont été produites par
l'infraction
La confiscation spéciale est prononcée pour
toute infraction dont l'existence est subordonnée à l'intention
délictueuse. Elle n'est prononcée, pour les autres infractions
que dans le cas déterminé par le législateur »
Ce pendant, il a été jugé que la
confiscation spéciale peut être prononcée, à titre
exception, en cas d'acquittement, quand bien même les objets
n'appartiennent pas au délinquant, si la circulation de ces biens
s'avère dangereuse40, ou s'ils sont sans valeur comme l'est
un bouton41.
Ici la confiscation spéciale apparaît comme
«une mesure de sûreté et de police à caractère
réel » d'un objet criminel42.
En revanche, l'on exclut de la confiscation les biens
utilisés dans la phase préparatoire de l'infraction et avant le
commencement d'exécution, tel le cheval dont s'est servi le voleur pour
se rendre sur le lieu du vol43.
Par ailleurs, l'on admet que la sacoche de médicaments,
propriété du condamné ayant servi à commettre
l'infraction doit être confisquée44, de même que
le véhicule qui a servi au chargement ou à l'enlèvement du
butin45. Mais après la suppression de la peine de
confiscation générale, la confiscation spéciale
met-elle
40 Boma, 24 Avr. 1913, Jur Congo, p. 103 cité
par MUTATA LUABA p. 133.
41 T. 1ere inst. Coq, 19 Janv. 1923, Jur
Kat I, p. 108.
42 Art. 114 du code de la route
43 Lire ESIKA MAKOMBO, code pénal
Zaïrois annoté, livre 1er, Lubumbashi 1977, P. 146
et 9 cité par MUTATA LUABA, Droit pénal militaire
congolais, Ed. Du SDEMJDH, Kinshasa 2012 p. 133.
44 T. 1ere inst. Lubumbashi, 03 Avr. 1969,
RJCB n° 02, p. 229 avec note
45 Elis, 03 Avr. 1954, RJCB, p. 200.
37
définitivement les innocents liés au
délinquant à l'abri de toute violation de leurs droits ?
Tels sont les problèmes que nous abordons dans les lignes
ci-dessous.
2. Problèmes pouvant résulter de
l'application de cette peine
A ce stade nous plancherons d'une part sur le problème
découlant de l'alternative légale, et d'autre
part sur l'atteinte possible aux droits des innocents.
a. L'alternative légale
L'article 74 al 2 du CPM dispose : « Le tribunal peut en
outre
prononcer la confiscation de tous les biens produits du vol,
du détournement ou de la dissipation ».
Cette alternative nous paraît préjudiciable pour
les bénéficiaires des effets de cette sanction, en l'occurrence
l'Etat Congolais, l'armée, la police ou le service national ainsi que
leurs membres respectifs pris collectivement ; tous ces
bénéficiaires de ne pas être restaurés dans leurs
droits par suite d'une attitude irresponsable d'un juge négligent,
distrait, voire même « intéressé » par l'agent
incriminé. Nous aurions souhaité que cette alternative qui, hier,
était compréhensible par l'application obligatoire de la
confiscation générale, puisse être abandonnée au
profit d'une formule impérative «la juridiction doit en outre...
», Devant laquelle le juge est tenu de s'incliner à tout prix. Car
elle garantit suffisamment les intérêts de la partie civile.
b. L'atteinte aux droits des innocents
A défaut d'une procédure particulière sur
l'application de cette peine,
il reste de principe que, tant que la condamnation du
délinquant n'est pas encore effective, aucune saisie des biens,
même réputés d'origine délictuelle, ne peut
être opérée, en vertu de la présomption d'innocence
que bénéficie toute personne
38
attraite devant la justice. A l'appui de cette assertion, il y
a une jurisprudence qui note que la confiscation n'est pas subordonnée
à une saisie préalable46. Cependant nous ne pouvons
perdre de vu que ce principe, applicable aux biens produits de l'un ou l'autre
fait punissable sus précisé, n'est pas souvent observé en
pratique, ou l'on recourt généralement à la « saisie
conservatoire des biens suspects ». Il peut advenir que la confiscation
des biens d'origine du vol, mais surtout du détournement, affecte le
patrimoine intégral du condamné, dont la valeur peut être
proportionnelle ou inferieur aux deniers publics détournés. Il y
a risque de sacrifier les intérêts des enfants, mais aussi ceux de
l'autre conjoint en violation du régime matrimonial de la
communauté réduite aux acquêts, conféré
à un contât de mariage muet.
Et pourtant, en ce qui concerne les enfants, l'ordre juridique
international requiert que leurs intérêts puissent être pris
en compte, afin que leur droit à la vie ou à
l'épanouissement sain soit toujours sauvegardé, bref le sort des
enfants doit constitue une préoccupation primordiale, en vue de garantir
la survie même de la société.
Quant à l'autre conjoint innocent (et
particulièrement celui de sexe féminin), il peut être
porté atteinte à son patrimoine acquis grâce au
régime sus évoqué, consacré par l'art. 489 du code
de la famille : « si les époux n'ont pas
régulièrement opéré leur choix, le régime de
la communauté réduit aux acquêts leur sera applicable(...)
». Et l'art. 516 in fine de ce même texte prescrit : « sont
communs et comme tels qualifiés acquêts, les biens que les
époux acquièrent pendant le mariage par leur activité
commune ou séparée ainsi que les biens conjointement acquis par
les deux époux par donation, sur cession ou testament ».
46 ESIKA MAKOMBO, 03 Avr. 1937, RJCB, p.129
cité par MUTATA LUABA, Droit pénal militaire congolais,
Ed. Du SDEMJDH, Kinshasa 2012
39
Cependant, face à ces principes, deux
hypothèses, peuvent être observées dans le comportement du
délinquant : d'une part c'est le cas où les deniers publics
détournés ont généré le patrimoine des
innocents, et d'autre part le cas où les deniers sont gaspillés
par le délinquant au point d'entamer le droit à la
réparation civile.
1. Le cas ou les deniers publics
détournés ont généré le patrimoine des
« innocents »
Cette hypothèse suppose que la famille a pu constituer
son patrimoine, ou ce qui en est essentiel après l'acte
répréhensible de l'agent. De ce fait, les principes ci-haut ne
peuvent pas s'appliquer s'il est établi que le patrimoine
constitué provient de ce détournement. Ces biens doivent
être confisqués lors même qu'ils affecteraient le patrimoine
intégral du délinquant. D'ailleurs si la mauvaise foi d'autres
membres « présumés innocent » est prouvée, les
adultes peuvent s'exposer à la rigueur légale sur pied de l'art.
101 prévoyant et réprimant le recel. Les titres de
propriété obtenus pour des biens d'origine délictuelle se
révèlent invalides. Tel serait le cas d'un certificat
d'enregistrement obtenu pour un immeuble payé à l'aide des
deniers détournés.
2. Le cas ou les deniers sont gaspillés au
point d'entamer le droit à la réparation civile.
Il peut advenir qu'un agent traduit en justice du chef de
détournement de deniers publics, se livre au gaspillage de son butin
pour des motifs divers. Dans ce cas certaines décisions dont « la
saisie conservatoire » peuvent être envisagées pour
sauvegarder le patrimoine présumé de l'Etat.
C'est ici que tout les principes ci-haut exposés
doivent être observés pour prévenir des abus des organes
chargés de l'administration de la justice, et
40
particulièrement les OPJ et les magistrats du parquet.
Quant au juge de fond, il devra éviter toute condamnation « par
appartenance familiale », en dissociant les biens du coupable de ceux des
innocents dont les droits sont garantis par la société.
41
CHAPITRE II. PRESENTATION DE LA PRISON MILITAIRE DE
N'DOLO
|
Comme nous l'avons dit dans les pages
précédentes, nous avons passé notre stage
académique au TMG/GOMBE, où nous avons eu à nous
déplacer pour les audiences foraines dans la prison centrale de Makala
comme dans la prison militaire de N'dolo. Nous avons été
motivé à aborder ce sujet par rapport aux conditions de vie des
détenus militaires constatées, d'où nous avons
pensé écrire comme c'est l'arme la plus forte que nous
possédons à ce stade. Dans les pages qui viennent, nous allons
donc retracer l'historique et les missions de ladite prison (section 1) et
parler de l'organisation et du fonctionnement de celle-ci (section 2).
Section 1 : Historique et missions de la Prison
Militaire de N'dolo
1) Historique
Créée en 1933, la Primil de N'dolo fut une
ancienne prison tenue par la gendarmerie nationale. En 1967, elle à
été mise à la disposition de l'Auditorat
Général par la haute hiérarchie. Suite à un
état de délabrement avancé, elle à vu ses portes se
fermer. Ce bâtiment vieux et négligé ne présentait
plus des bonnes conditions de viabilité. D'où la
nécessité d'une réhabilitation. Ce fût le cas le 17
décembre 2010 grâce au financement du Royaume de Pays-Bas avec
l'appui de la section Etat de droit de la MONUSCO et de l'unité
Gouvernance de PNUD. Sa capacité d'accueil est de 520 pensionnaires en
principe, bien qu'à l'heure actuelle elle connait un problème de
surpopulation, soit plus de 1472 détenus.
2) Missions
La Prison Militaire de N'dolo est destinée à
recevoir les justiciables des juridictions militaires.
A l'instar des autres prisons modernes, la Prison Militaire de
N'dolo a pour mission :
42
? La garde et la sécurité ;
? L'intimidation des fautifs ;
? L'amendement ;
? Le reclassement social du détenu par des
stratégies de réinsertion sociale.
Section 2. Organisation et fonctionnement de la
Primil de N'dolo
§1. Organisation de la Primil de N'dolo
La Prison Militaire de N'dolo, entant qu'établissement
mixte, est placée sous l'autorité de l'Inspecteur
pénitentiaire en chef, directeur de l'administration
pénitentiaire militaire. Elle est régie par un règlement
d'ordre intérieur qui constitue une référence en
matière d'obligations et des droits des détenus. Il
détermine les mesures d'ordre intérieur et les détails des
services utiles à préscrire dans un établissement
pénitentiaire.
Ce règlement intérieur organise la vie
quotidienne des détenus affectés au sein de la primil de N'dolo.
Il fixe les obligations générales auxquelles sont soumis les
détenus, les décisions et éventuellement les tiers, dans
la mesure où ces obligations justifient les décisions prises
à leur égard, il détermine les droits dont les
détenus bénéficient pendant toute leur durée de
détention et définit pour le personnel, le cadre dans lequel il
doit accomplir ses devoirs.
La Prison Militaire de N'dolo est dotée d'une
infrastructure moderne, notamment :
a. Un parloir scindé en deux compartiments comprenant
un local de sécurité où se font l'identification, la
fouille, la remise des jetons, l'accueil des visiteurs. Il peut aussi servir de
salle de conférence ;
b. Parloir proprement dit où les détenus
reçoivent leurs visites
c. Blocs toilette (pour personnel et visiteurs)
43
d. La Détention, constituée des quartiers
équipés en lits, matelas, couvertures et toilettes.
- La Grande détention : avec une grande cour
intérieure. On y trouve la troupe, c'est-à-dire les
détenus les moins gradés. Elle a dix pavillons avec une
capacité d'accueil de 44 pensionnaires chacun.
- Quartier VIP : qui reçoit les officiers. Il a une
capacité d'accueil de 4 cellules individuelles qui peuvent à la
limite recevoir deux personnes chacune, et trois cellules collectives à
12 lits chacune.
- Quartier Femme : destiné aux femmes avec une
capacité de 6 cellules individuelles et une cellule collective de 14
lits
e. Un Bâtiment comprenant le bureau du Chef de
détention, un bureau de la comptabilité est une infirmerie ;
f. Une Cuisine avec un moulin mixte (maïs et manioc)
g. Bâtiment Administratif qui comprend :
· Bureau du directeur Chef d'Etablissement ;
· Bureau des Adjoints ;
· Secrétariat Administratif ;
· Greffe où se fait la gestion administrative des
détenus
· Salle de réunion ;
· Cellule d'accompagnement de la MONUSCO ;
· Snack ;
· Cantine.
h. Une porcherie
Notons qu'il y a quelques projets déjà
réalisés par le Service d'Appui à l'Administration
Pénitentiaire (SAAP) justement pour contribuer au mieux être des
pensionnaires de la Primil N'dolo, notamment à :
44
> La construction de deux (02) miradors
supplémentaires :
> La Fourniture et l'installation interne et externe de
fils concertina sur les murs de clôture ;
> La construction d'un bureau et d'une barrière de
sécurité à l'entrée de la grande détention
;
> La construction de deux postes de police dans la grande
détention ; > La contribution à la construction de la cuisine
collective ;
> La fourniture de deux citernes de 1500 litres avec pompes
pour réserve d'eau ;
> La réhabilitation des fissures des dortoirs et du
périmètre de sécurité et
la réhabilitation et renforcement des fenêtres
avec des fers de 16 mm ; > L'équipement en air conditionné du
bureau de la cellule
d'accompagnement de la MONUSCO
> Le remblayage dans la garde détention avec 240 m3
de matériaux de remblai ;
> L'aération des dortoirs du quartier femme avec des
ouvertures d'aération ;
> La formation de la 1ère promotion de
120 agents pénitentiaires déjà sur terrain et aussi d'une
2ème promotion de 150 agents pénitentiaires en Gestion
et administration des Prison en cours ;
> La construction des terrains de volley Ball et basket
Ball dans la grande détention.
> Enfin, la réalisation en cours du terrain de foot
Ball et la construction d'un hangar dans le quartier femme (en projet).
45
§2. Fonctionnement de la Primil de N'dolo
La Primil de N'dolo est dirigée par un commandant,
Chef
d'établissement, assisté par deux adjoints, dont
l'un est chargé de la Détention et
Sécurité, et l'autre de l'Administration et
Production.
Pour mener à bien sa mission, d'exécution des
peines et le maintien
de l'ordre et de la discipline et veiller ainsi à la
régularité et à la légalité de la
détention, la Prison Militaire de N'dolo organise les
services suivants :
? Le Service Administratif constitué du
secrétariat, du Greffe, de la
comptabilité et de l'économat plus la production
;
? Le Service de surveillance ;
? Le Service Socio-éducatif ;
? Le Service Technique ;
? Le Service Médical.
A. Le service administratif
Ce service est composé d'un secrétariat, d'une
greffe, de la
comptabilité et de l'économat plus la
production.
1. Le secrétariat
Ce service est composé d'un secrétaire titulaire,
d'un secrétaire
adjoint et d'un bureau informatique chargé de la
rédaction de tout ce qui est lettre administrative. Il constitue un
grand noyau qui a pour rôle de réceptionner les lettres venant de
l'extérieur, puis les expédier aux destinataires. Le service
informatique à pour rôle la rédaction des lettres
administratives venant de la prison militaire de N'dolo pour
l'extérieur.
Le greffe ne dépend pas du magistrat. Il lui est
reconnu le droit de libérer le prévenu lorsque ce dernier est
illégalement détenu.
46
2. Le greffe
Le greffe de la prison militaire de N'dolo est composé
d'un Greffier en chef, d'un Greffier adjoint et de quelques greffiers dont le
greffier de détention et le greffier de garnison.
Il constitue le poumon de la prison par : ce qu'il est
là pour recevoir tous les documents venant du ministère public en
vue de mettre le prévenu en détention. Il constitue en soi un
service d'archive de la prison. Ce service reçoit le détenu et
l'écroue c.à.d. l'enregistre dans différents registres.
Les registres d'écrou constituent l'ensemble de gros
cahiers où est mentionné l'identité du détenu en
occurrence le nom et le numéro du dossier, le travail, provenance et le
motif de prévention du détenu. Chaque dossier est
représenté par un n° R.E qui sert de référence
en cas de recherche après une longue date.
Il y a par exemple le registre appelé `'Momento»,
dans lequel est enregistré le document prouvant la sortie du
détenu en cas d'acquittement ou de libération provisoire.
Ainsi, on présenter d'abord un document MAP (mandat
d'arrêt provisoire), à la Primil et après 30 jours le
magistrat doit obligatoirement amener la décision de la prorogation de
la détention préventive et en informer l'Auditeur. Au cas
où le magistrat n'envoie pas ce document de prorogation, nous tombons
donc dans le cas de la détention illégale. Une fois que le greffe
remarque une détention illégale, celui-ci est obligé
d'informer immédiatement à la hiérarchie
Sur le plan administratif, le greffe gère
l'arrivée, la durée et la sortie du détenu.
47
La libération provisoire est réservée
uniquement aux détenus prévenus. En effet, un prévenu est
un détenu incarcéré en attendant que sa culpabilité
soit prononcée, par un procès en cours ou un à
venir47. Un détenu bénéficiant d'une
liberté provisoire, sera obligée de se présenter au juge
chaque fois qu'il lui sera recommandé.
Le greffe a aussi la charge de calculer les peines, de
dénombrer les personnes devant être libérées pendant
la semaine, le mois, l'année, voire savoir la date de sortie de tous les
détenus de la prison.
Par ailleurs, le greffe de la prison militaire de N'dolo
rencontre plusieurs difficultés notamment celle du surnombre
justifié par le fait que celle-ci ne pouvant recevoir que 500
détenus. Suite au manque d'infrastructure, elle regorge à ce jour
plus de mille détenus.
Aussi, l'obstruction des magistrats sur les missions
dévolues au greffe, l'empêche de fonctionner correctement.
Ainsi, le problème d'un quart de peine (1/4), qui ne
s'accorde que dans les prisons civiles et non pas les prisons militaires.
En effet, le un quart de peine signifie qu'un condamné
qui purge le 1/4 de sa peine peut bénéficier d'une liberté
conditionnelle. Fort malheureusement cette dernière ne s'applique que
sur le plan textuel donc ne reste qu'une hypothèse d'école.
3. Comptabilité
Ce service est composé d'un Chef comptable, d'un Chef
comptable adjoint chargé de relever les comptes de détenus et
d'un chef comptable adjoint chargé des achats internes et externes.
47 84.1, Règles minima de détention, NU,
Genève 1955
48
Ce service est chargé de garder les biens de valeur du
détenu consignés lors de son incarcération ou
trouvé au lieu de la
fouille.il est également
chargé de retrait de solde de détenus et de recevoir l'argent
consigné par leur membre de famille ou personnes extérieures.
Il ya quelques temps passé, le comptable de la prison
devait retirer les soldes des détenus chez leurs commandant
d'unités sous procuration de la prison, avec l'avènement du
système bancaire, de la bancarisation, qui consiste à la paie des
fonctionnaires de l'Etat par les banques commerciales. Ce système a
quelque peu changé les choses puisse qu'il échappe à la
fraude notamment aux manoeuvres des comptables publics. Avec ce système,
le retrait se fait non par procuration parce que les banques détiennent
une procuration spéciale, celles-ci remettent de fiches qui doivent
être remplies par les détenus. Et avec ce système
l'avantage est que les membres de famille, le représentant judiciaire du
détenu peuvent retirer le solde du détenu moyennant sa carte de
service.
Etant donné que le détenu ne peut gérer
son argent lui-même, la prison par le biais du service
comptabilité a créé un compte qu'on appelle «
pécule ». Le pécule constitue l'ensemble des fonds que gagne
le détenu pendant la période d'incarcération, celui-ci est
enrichi par son solde, ses petits travaux de rémunération
exercés en prison.
C'est-à-dire, une fois que le comptable
récupère le solde du détenu, ce dernier doit le consigner
dans un registre du bureau comptable et en retour le bureau lui remet une
décharge.
Il y a un terrain d'entente entre le détenu et le
comptable pour le frais de transport du comptable vue que cela n'est pas
règlementé. Il soustrait donc dans le solde du détenu son
frais de déplacement.
Le service comptabilité de la Primil de N'dolo
déplore beaucoup de difficultés :
49
? La gestion des finances de la prison lui échappe,
donc quelque part il y a usurpation du pouvoir ou de fonction par la
hiérarchie ;
? Le manque du personnel compte tenu du nombre de
détenus
? La situation dans la quelle, quelques détenus leurs
soldes sont bloqués pour une simple raison que la banque exige une
présence physique
4. L'économat
Le service économat autrement appelé logistique,
ou encore cuisine, appelé en terme militaire bureau S4, est un service
or matière pénitentiaire, il est donc un service spécial.
Il est composé d'un chef du bureau, secondé d'un chargé de
la cuisine et de l'administration.
Ce service travaille ensemble avec les détenus car ils
ont droit de savoir ce qu'ils mangent, comment ça se prépare, et
généralement ce sont les détenus dont la peine tend vers
la fin qui aident à la cuisine et ceux-ci doivent être
amendés. Soutenu par une équipe du personnel civil appelé
« Percis », constituée des dames ou femmes qui aident à
la cuisine mais à condition d'être breveté en la
matière.
La prison militaire de N'dolo est ravitaillée en
aliment pour les détenus par le gouvernement, d'où le service a
pour rôle de calculer le grammage et faire la demande à la
direction par un bon, la direction à son tour l'adresse au gouvernement
pour exécution.
La nourriture résultant de ces aliments profite non
seulement aux détenus mais aussi au personnel, ce qui s'avère
être normale.
Les détenus ont droit à deux repas par jour dont
le matin entre 7h et 8h (un pain plus bouillit) et entre 13h30 et 15h30 le
soupé.
50
Selon l'organigramme, il est prévu que par semaine les
détenus mangent quatre fois les haricots avec le foufou, deux fois les
feuilles de manioc, et 1 fois les feuilles des patates douces ou les
amarantes.
Ce service travaille sous la surveillance des ONG tant
nationales qu'internationales et de droits de l'homme surtout.
Nous tenons à signaler qu'en terme de subvention, il
n'y a que l'Etat seul jusque là qui s'en occupe sauf qu'une fois
seulement que le Comité International de la Croix Rouge, C.I.C.R en
sigle aurait donné un don.
Les détenus ont droit à une même
quantité de nourriture sauf ceux qui aident à la cuisine qui
bénéficient du reste de nourriture, ce qui constitue donc un
surplus ; par ailleurs ils reçoivent du lait chaque semaine puisqu'ils
s'exposent aux feux.
Enfin la cuisine a toujours droit à 50% de la
production en termes d'agriculture et d'élevage, nous expliquerons mieux
la production dans le point qui suit. Ce service gère aussi le service
de la production,
5. Production
Ce service est composé d'un chef de bureau et d'un chef
de bureau adjoint, tous deux sous-lieutenants. L'un de deux doit être
agronome et l'autre éleveur, il en est de même dans la prison
centrale de makala. Mais chaque division est coiffée par un
médecin vétérinaire.
Cette division a pour but, la réalisation des produits
alimentaires d'origine animale et végétale. C'est une division
technique donc elle a besoin des techniciens. Le service a son bureau central
à la D.A.P. Pratiquement le service produit les maraichages et la
porcherie, ces produits sont au bénéfice des détenus et du
personnel.
51
En termes de maraichage, le fond à été
fourni par la D.A.P, pour l'achat des semences, des engrais chimiques et outils
de travail. S'agissant de l'élevage, le service a trouvé mieux de
faire la porcherie parce que celle-ci a une prolifération facile et
rapide.
En effet le produit sera reparti par 50% pour les
détenus, 20% pour la main d'oeuvre généralement
assurée par les détenus et 30% sont vendus pour l'achat des
aliments de bétails, pour l'élevage et des semences pour
l'agriculture. La porcherie comprend à peut près 32 porcs de tout
âges confondus.
Ces services rencontrent des difficultés telle que :
? Le manque d'aliment pour la porcherie ;
? La difficulté d'achat des médicaments en cas
de maladie ;
? Le manque d'outils de travail.
Toutes ces difficultés précitées sont
dues au manque de moyens financiers. En conclusion l'élevage
pratiqué dans la Primil de N'dolo, ne se pratique pas comme il se
doit.
B. Service surveillance (Détention)
Ce service est composé d'un chef de détention et
de son adjoint, il a pour rôle de gérer le quotidien des
détenus, à la différence du greffe ce service gère
physiquement les détenus.
Une fois que le greffe reçoit un détenu, il
l'enregistre et l'envoi au bureau de détention qui le garde pour le
reste de son temps jusqu'à l'expiration de sa peine.
Le service de détention s'occupe de la
libération physique des détenus c'est à dire une fois
qu'un détenu est libéré, le greffe doit remettre une fiche
de libération au bureau de détention et celui-ci le libère
physiquement, dans
52
le même cadre avant une audience, le greffier de la
juridiction doit dresser une demande au greffe de la prison pour la comparution
d'un détenu, le greffe de la prison le transmet également au
bureau de détention et c'est à lui d'exécuter en allant
chercher le détenu dans sa cellule et il doit s'assurer que celui-ci
rentre dans sa cellule après l'audience.
Il faut noter que les années de détention sont
comptées à daté du jour de prévention donc de
l'entrée dans un local de détention.
C. Service social
Le service social est composé de quatre personnes dont
un chef de bureau titulaire et de deux adjoints dont l'un chargé
d'administration et logistique et l'autre chargé de la
réinsertion.
Le chargé d'administration est logistique s'occupe de
tous le personnel et détenus, ce service n'est pas seulement
chargé du social de détenus mais aussi du personnel.
En cas de décès par exemple, ce service s'assure
de l'assistance physique tant pour le personnel que pour le détenu. Il
assiste ces deniers, en allant dans la famille. Le service social est en
contact direct et permanent avec les familles de détenus pour leur
informer de la situation présente de leur membre de famille.
En ce qui concerne la survie de détenus, le social doit
se rassurer que tout se passe bien, le service social constitue donc une
mère au sein d'un foyer et s'occupe de la situation non seulement des
enfants qui s'illustrent en détenus mais aussi du père qui
s'illustre en personnel, comme si cela ne suffi pas, s'assure aussi de
l'état de la maison qui s'illustre par la prison (bâtiment).
53
Du point de vue logistique, le service doit se rassurer que
chaque service s'exécute comme il faut, par exemple, il doit se rassurer
que la nourriture soit bien préparée, de la potabilité de
l'eau etc. S'assurer de l'approvisionnement en produit pharmaceutique au centre
médical etc.
Ce service reçoit les dons qui viennent de
l'extérieur, doit s'occuper des activités culturelles donc
organise des loisirs entre autres le match de foot Ball, basket Ball, volley
Ball, jusque là ce sont les disciplines sportives présentes.
Ce service travail avec les assistants sociaux et religieux
qui viennent s'entretenir avec les détenus pour les occuper. Il y a
même un projet de la construction d'une bibliothèque et d'un
atelier de couture pour faciliter leur réinsertion dans la
société.
S'agissant de celui chargé de la réinsertion, il
est organisé une formation en alphabétisation, en Anglais,
Français, par l'un d'eux qui est professeur.
Généralement ce sont les détenus dont la
peine tant vers la fin qui sont concernés pour préparer leurs
réinsertions dans la société, et à travers ces
travaux, d'atelier surtout, le détenu en voie de sortie se procure un
peu d'argent qui entre dans son pécule. Cet argent va permettre son
survie une fois sorti de la prison.
Nous avons ainsi relevé quelques difficultés
suivantes dans ce service :
? L'espace est insuffisant et donc, ne permet pas une
circulation paisible de détenus
? Le manque d'un matériel nécessaire pour la
formation de détenus pouvant faciliter leur réinsertion.
? Enfin un problème de bâtiment qui se pose
à tout le niveau.
54
D. Service technique48
Appelé autrement département du génie de
N'dolo, ce service est constitué de 2 groupes, d'une part le P.E.C
(pelletons camp et entretien camp) et d'autre part du service maintenance
constitué des Percis. Il est composé d'un chef de service
maintenance et un chef de bureau technique.
Ce service est composé de plusieurs services notamment le
service : ? de maçonnerie
? d'électricité
? de menuiserie et charpenterie
? de peinture
? d'ajustage etc.
Ce service à pour mission de maintenir la prison en bon
état, il comprend donc 2 ingénieurs, 2 contremaitres
chargés de la plomberie. Ce service n'a vraiment pas besoin de la main
d'oeuvre, mais de fois l'équipe de maçonnerie utilise les
détenus quant à ce.
La seule difficulté dans ce service, c'est seulement
que tous les travaux sont exécutés à la main.
E. Service médial
Ce servie est organisé dans un centre de santé
militaire à la prison militaire de N'dolo et à la prison centrale
de Makala nous ne trouvons que des postes de santé militaire.
A la tête un médecin superviseur qui supervise le
soin, après vient l'infirmier titulaire, il assume la fonction de
coordinateur de soin dans toutes les deux postes, vient après lui un
adjoint chargé de consultation de médicament et matériel,
un adjoint chargé de soins sur place (infirmier A2), un infirmier
chargé de l'administration. Il faut signaler qu'il y a aussi d'autres
infirmiers qui se
48 Interview accordé par le Lt. MUSWASWA
MPIANA, chargé de la technique, Avril 2015
55
chargent des soins. Ce servie à pour mission,
l'assistance médicale, donc des détenus et du personnel, l'appui
médical et les premiers soins sont assurés par les adjudants
malades (l'ensemble des techniciens mais détenus qui aide le centre).
En cas d'une urgence, on signale le médecin superviseur
qui signe le billet de transfert si le cas est transférable. Le centre
est approvisionné à 100% par le gouvernement en fonds comme en
produits pharmaceutiques par le biais de la hiérarchie.
Il faut signaler que les soins sont gratuits pour tous les
détenus et le personnel. Ce qui justifié qu'il n'y a pas des
frais de fonctionnement. Statistiquement, le centre rencontre une moyenne de
plus ou moins 5 à 10 malades par semaine et les maladies les plus
fréquentes sont le paludisme, les maladies dermatoses et la tuberculose
causées par la promiscuité.
Ce centre fonctionne 24h/24, et les infirmiers font le rond ou
tour de grade. Au cas où un produit manque dans la pharmacie du centre
médical de la prison, la famille intervient, sois l'argent est
puisé dans le pécule du détenu pour couvrir le besoin.
Ce centre rencontre des difficultés telles que ;
? Le manque de ravitaillement ; ? Le manque de fonds ;
? Le manque de transfèrement ; ? Et de frais de
fonctionnement.
Dans le chapitre qui suit, nous allons donc analyser le
traitement pénitentiaire dans la Primil de N'dolo.
56
CHAPITRE III : LE TRAITEMENT PENITENTIAIRE A LA PRISON MILITAIRE DE
N'DOLO
|
Dans ce chapitre, nous énoncerons l'organisation du
traitement pénitentiaire dans la Primil de N'dolo (section1), en suite
nous allons déceler les abus aux règles minima de
détention orchestrés dans ladite prison (section2).
Section 1. Organisation du traitement
pénitentiaire
Cette section aborde un aperçu du Règlement
Intérieur de la Primil de N'dolo (§1) puis va donner un
aperçu sur une journée dans la Primil de N'dolo (§2).
§1. Le Règlement Intérieur de la Primil
de N'dolo
Le règlement intérieur constitue une
référence en matière d'obligations et des droits des
détenus. Il détermine des mesures d'ordre intérieur et des
détails des services utiles à prescrire dans un
établissement pénitentiaire. Il organise la vie quotidienne des
détenus au sein de la Primil de N'dolo et il fixe les obligations
générales auxquelles sont soumis les détenus, le personnel
et éventuellement les tiers, dans la mesure où ces obligations
justifient les décisions prises à leur égard.
Ce règlement détermine les droits dont les
détenus bénéficient pendant toute la durée de
détention et définit pour le personnel, le cadre dans lequel il
doit accomplir ses devoirs. Les règles énoncées dans ce
règlement intérieur doivent être conformes à la
Constitution, à l'ordonnance n° 344 du 17 septembre 1965 relative
au régime pénitentiaire applicable en RDC et se
référer aussi aux normes internationales de détention dont
les règles minima49.
49 Règlement intérieur de la Primil de
N'dolo, préambule p. 2 inédit.
57
Le règlement intérieur comprend 13 fiches
thématiques qui regroupent
en fait les règles minima de détention et ces
fiches sont :
> L'emploi du temps ;
> Les activités des détenus ;
> Le service socio-éducatif ;
> La gestion des biens et de soins ;
> L'habillement, l'hygiène et l'entretien ;
> L'assistance spirituelle et morale ;
> L'isolement ;
> La sécurité et la discipline ;
> Les relations du détenu ;
> Le transfèrement ;
> Le recours ;
> Les formalités à la sortie50.
§2. L'emploi du temps dans la Primil de N'dolo
Une journée dans la Prmil de N'dolo se passe de la
manière suivante : 05h00 à 07h00 : Réveil, hygiène
corporelle et entretien de la cellule
07h00 à 08h00 : Ouverture des cellules, appel nominal,
inscription dans le cahier des malades et rapport dans chaque
pavillon/cellule.
08h00 à 09h00 : Petit déjeuner
09H00 à 12h00 : Différentes activités
(travail des détenus, promenade, visite) 12h00 à 14h00 :
Déjeuner et détente
14h00 à 15h30 : Différentes activités
(travail des détenus, promenade, visite) 15h30 à 16h30 :
Fermeture des cellules/pavillon.
50 Règlement intérieur de la Primil de
N'dolo, préambule p. 2 inédit.
58
Pour le dimanche et jours fériés, l'emploi du
temps se présente comme
suit :
05h00 à 07h00 : Réveil, hygiène corporelle
et entretien de la cellule
07h00 à 07h30 : Ouverture des cellules, appel nominal,
inscription dans le cahier des malades et rapport dans chaque
pavillon/cellule.
07h30 à 08h00 : Petit déjeuner
08h00 à 09h30 : Culte
09h30 à 11h30 : Visite et promenade
12h00 à 14h00 : Déjeuner et détente
15h30 à 16h30 : Fermeture des cellules/pavillon.
Nous tenons à signaler que, rien de cet emploi de temps
n'est respecté que ce soi en terme de temps ou de programmes. Car, le
réveil des détenus dépend d'un jour à un autre et
des humeurs des agents, mais jamais à 5h00, l'hygiène corporelle
est facultative et l'heure dépend d'un détenu à un
autre.
L'appel nominal ne se fait pas chaque jour comme prévu
dans le R.I mais plutôt une fois la semaine. Aucune inscription ne se
fait pour les malades car dit-on c'est le malade qui cherche le docteur, il
n'existe donc pas un cahier des malades. D'où nous comprenons qu'il n'y
a aucun rapport le matin.
Effectivement, un déjeuner se prend mais pas à
une heure fixe et même pas chaque jour. Cela dépend
également des caprices des agents. S'agissant des visites, elles
commencent dès l'ouverture de la barrière de la prison
c'est-à-dire 09h00. On se pose la question de savoir quand est ce que le
travail des détenus et la promenade se font à moins que ces 3
activités se fassent au même moment.
Le déjeuner n'est pas régulier et se prend
toujours en retard mais généralement c'est de 12h00 à
14h00 qu'un seul repas se prend.
59
Section 2. Les violations aux règles minima de
détention constatés dans la Primil de N'dolo
Les règles minima ont étés conçues
par les Nations Unies pour
pouvoir uniformiser au minimum le traitement
pénitentiaire au niveau international en le canalisant vers le respect
des droits de l'homme. Il y a d'une part les règles d'application
générale (§1), qui s'appliquent à tous les
détenus et d'autre part, les règles applicables à des
catégories spéciales (§2), qui s'appliquent donc à
des détenus spéciaux.
§1. Les règles d'application
générale
Ces règles, sont celles qui s'appliquent à tous les
détenus d'une
manière générale.
A. Principe fondamental
Ces règles doivent être appliquées
impartialement. Il ne doit pas
exister de différence de traitement basée sur un
préjugé, notamment de race, de couleur, de sexe , de langue, de
religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou
sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.51
S'agissant de ce principe, nous avons remarqué une
petite différence de traitement liée à l'opinion politique
et à la fortune nous citons, le cas de Denis LESSIE et consort qui, en
étant détenu avait droit à son téléphone
portable moyennant 5000FC par jour ; chose que nous avons vécu
personnellement pendant notre période de stage dans le Tribunal
Militaire de Garnison de la Gombe à l'occasion d'une descente dans la
Primil de N'dolo pour les audiences foraines. Ce ci constitue une
différence de traitement liée à la classe sociale et de
fortune. Il existe même un quartier qu'on appelle quartier VIP dans
lequel nous trouvons des classes sociales élevées ; Denis LESSIE
et ses compagnons y ont séjourné.
51 UN, règles minima de
détention, Genève, 1955
60
Quartier réservé principalement aux officiers
supérieurs mais curieusement on y a trouvé un neveu d'un
gouverneur de la place.
B. Registre
Le greffe gère au quotidien les détenus mais
d'une manière administrative. Il tient à jour un registre dans
lequel on trouve :
> l'identité du détenu ;
> les motifs de sa détention et l'autorité
compétente qui l'a décidé ;
> le jour et l'heure de l'admission et de la sortie du
détenu.
Il se pose un sérieux problème au niveau de la
catégorisation des détenus. Du point de vue de la
séparation, les hommes sont réellement séparés des
femmes par des quartiers. Mais s'agissant de la séparation entre les
détenus prévenus et les détenus condamnés, les
emprisonnés pour dettes ou condamnés à une autre forme
d'emprisonnement civil et la séparation des jeunes et des adultes sont
totalement impossible compte tenu du surnombre52. Ce surnombre dans
la Primil de N'dolo est dû à :
> l'augmentation du nombre des détenus
particulièrement militaires ;
> l'insuffisance du nombre des lieux de détention
;
> les caprices de la justice ;
> et la durée, anormalement longue de la
détention53
C. Locaux de détention
90% des prisons et cachots en RDC sont en mauvais état
car, beaucoup ont été construits avant
l'indépendance54.
Normalement la Primil de N'dolo a été construite
pour recevoir 520 détenus en raison d'au moins 50 détenus par
pavillon mais aujourd'hui elle a 1636
52 Interview accordé par le Lt. GRODYA AZA,
Greffier titulaire de la Primil de N'dolo, Avril 2015
53 MONUSCO, Rapport sur la détention dans
les prisons et cachots de la RDC, Avril 2014, p. 13
54 Idem
61
détenus donc plus ou moins 150 détenus par
pavillons, le triple donc du nombre prévu. Il n'y a que dans le quartier
ou pavillon femme où on trouve 24 détenues. Curieusement sur ces
24 détenues, il n'y a que 2 détenues condamnées et les 20
autres sont encore prévenues.
Il y a aussi dans le pavillon VIP, ou pavillon des officiers
dans lequel nous trouvons encore 2 détenus par cellule. Il faut signaler
que dans ce pavillon on y trouve également les détenus civils
recommandés par la hiérarchie notamment le neveu d'un gouverneur
de la place.
Les détenus ne sont pas surveillés, ils sont
plutôt surveillés par eux-mêmes. Les locaux sont bien
sûr aérés mais pas suffisamment pour permettre aux
détenus de lire dans la journée comme dans la
nuit55.
Les détenus sont invités à signaler toute
détérioration constatée dans leur cellule au chef de
bâtiment. Dans le cas contraire, tout dommage constaté leur sera
imputé56.
D. Hygiène personnelle
Les détenus doivent assurer l'hygiène, l'entretien
de leurs cellules et
de leurs installations sanitaires. Ils doivent porter les
cheveux courts, lorsqu'ils
doivent se raser par mesure d'hygiène, il sera
utilisé une lame par détenu57.
Le constat fait de nos propres yeux par rapport à
hygiène personnelle
est amer et catastrophique, nous nous sommes rendu compte que
:
? Une lame de rasoir peut être utilisée par deux ou
trois détenus ;
? Les détenus ne se lavent pas tous et pas chaque jour
;
? Dans la grande détention, les locaux sont trop sales
;
? Pas d'exigence sur l'hygiène personnelle.
55 Interview accordé par le Cap. MONGILA NSELE,
chef du bureau de détention de la Primil de N'dolo, Avril 2015
56 Art. 33, fiche VI du Règlement
intérieur de la Prison Militaire de N'dolo
57 Art. 31 du R.I de la Primil de N'dolo, fiche VI
62
E. Vêtement et literie
Les détenus doivent être vêtus correctement en
toute circonstance et le
port du blouson est obligatoire en dehors de la
détention. Tout détenu doit garder sa tenue en état de
propreté satisfaisante ; la lessive se fait dans la cour et non dans les
dortoirs58.
La rubrique literie n'est pas reprise dans le R.I de la Primil
de N'dolo car les détenus partagent le lit et les frais sont à
leurs charges ; raison pour laquelle les draps sont toujours sales.
F. Alimentation
Ce service est assuré par le service économat ou
logistique, ou encore
cuisine, appelé en terme militaire bureau S4 comme nous
l'avons dit tantôt. L'alimentation est au moins réussie en terme
de quantité, mais moins bonne quant à la qualité, est
à la valeur nutritive suffisante au maintien de la santé ; elle
est nulle mais heureusement servie à l'heure59.
G. Exercices physiques
Les activités physiques se déroulent dans la cour
de la prison et sont
supervisées par un encadreur sportif. Ces
activités sont organisées pour la pratique des sports suivant :
foot Ball, basket Ball, volley Ball, hand Ball, tennis de table, gymnastique ou
tout autre exercices physiques autorisés par le chef
d'établissement60.
Il y a exercice physique pendant les heures de promenade, le
matin dans chaque bâtiment, chaque pavillon. Celui-ci s'arrange pour
l'achat de vareuse pour le tournois inter pavillons61.
58 Art. 30 du R.I de la Primil de N'dolo, fiche VI
59 Interview accordé par l'Adjchef. MULONGO wa
KYUNGU, chargé de la comptabilité, Avril 2015
60 Art. 8 du R.I de la Primil de N'dolo, fiche II
61 Interview accordé par le Cap. NDUMBA
MAYONGA, chargé du social, Avril 2015
63
Le constat est que les activités sportives sont trop
rares dans la Primil de N'dolo compte tenu du surnombre qui cause le manque
d'espace. Les exercices physiques n'ont pas d'heure fixe et sont facultative
et, il n'existe pas un encadreur sportif dans cette prison ; les détenus
intéressés s'exercent seuls 62
H. Services médicaux
Assuré par un centre médical dépourvu
d'équipements des soins parce que c'est chaque jour qu'il y a des
malades dans la Primil de N'dolo, chose normale à cause de la
promiscuité. Mais le centre ne sait fonctionner convenablement pour des
raisons suivantes :
? Le manque de ravitaillement en produits ;
? le manque de fond ;
? le manque de transfèrement ;
? et de frais de fonctionnement ;
I. Discipline et punitions
A l'arrivée du détenu dans
l'établissement pénitentiaire, en principe doit lui dire ce qu'il
est autorisé de faire, et ce qu'il est interdit de faire.
Les fautes disciplinaires des détenus sont
cochées dans le R.I de la Primil de N'dolo dans sa fiche IX au point B.2
consacré à la discipline des détenus dans les articles 49
à 55.
La chose que nous condamnons ici est l'usage de l'isolement
(sous appellation Mitard) entant que mesure disciplinaire, celui-ci reste
encore repris dans le R.I de la Primil de N'dolo comme une mesure
disciplinaire. Cette punition strictement interdite par les règles
minima est encore pratiquée et cela
62 Interview accordé par le soldat de
1ère classe MUYONGWA, détenu, Avril 2015
64
régulièrement dans cette prison. Nous
déplorons également la pratique de la privation en
coulisse63.
J. Information et droit de plainte des
détenus
A ce sujet, le détenu à son entré dans la
Primil de N'dolo n'est pas informé du régime
pénitentiaire, ni de sa catégorie, ni des règles
disciplinaires de l'établissement, ni des moyens autorisés pour
obtenir des renseignements et formuler une plainte et de tout autres points
pouvant être nécessaire pour le permettre de connaitre ses droits
et obligations et de s'adapter à la vie carcérale. Nous avons eu
cette conclusion par rapport aux tâtonnements de notre
informateur64.
Cette rubrique Information et droit de plainte des
détenus ne reste qu'une hypothèse d'école car, les
détenus se plaignent mais leurs plaintes ne restent que lettre morte.
Déjà 80% des détenus sont analphabètes ; ce qui
justifie même la rareté des plaintes écrites dans le bureau
du directeur de l'établissement, à l'inspection
pénitentiaire, encore moins à la direction de l'administration
pénitentiaire65.
K. Contact avec le monde extérieur
Nous dénonçons le non respect du point 39 de
cette partie dans les règles minima par rapport au manque d'information
avec le monde extérieur par les détenus.
De même une pratique qui viole le R.I de la prison par
ceux qui sont censés le faire respecter, c'est l'usage de
téléphone cellulaire par les détenus par l'entremise des
agents de la Primil de N'dolo moyennant une entente.
63 Interview accordé par le Cap. MONGILA NSELE,
chef du bureau de détention de la Primil de N'dolo, Avril 2015
64 Interview accordé par le Lt. GRODYA AZA,
Greffier titulaire de la Primil de N'dolo, Avril 2015
65 Interview accordé par le Cap. Alain,
inspecteur pénitentiaire, Mai 2015
65
L. Bibliothèque
Il n'existe pas de bibliothèque dans la Primil de N'dolo.
Les chargés
du social nous ont confié que c'est en projet.
M. Notification de décès, maladie et
transfèrement
A ce sujet, la déviation se trouve au niveau du point 44.2
des règles
minima de détention qui veut qu'un détenu puisse
avoir la possibilité de se rendre au chevet de son proche parent en cas
de maladie grave. Cette possibilité n'a jamais été
accordée à un détenu par manque de confiance.
N. Transfèrement des détenus
Il existe deux sortes de transfèrement : judiciaire et
pénitentiaire. Le
premier est celui effectué par la justice et le
deuxième est celui effectué par l'établissement
pénitentiaire. Les règles minima prônent le
transfèrement pénitentiaire pendant que dans la Primil de N'dolo
n'exécute que le transfèrement judiciaire et, jamais
pénitentiaire pour raison de manque des moyens. Et même, ce
transfèrement judiciaire se fait sur le fonds propre du détenu ou
de sa famille.
Cependant, les conditions de ce dernier ne respectent en rien
le point 45.1 et 45.2 des règles minima de détention car, les
détenus sont souvent menottés et exposés aux insultes et
à la curiosité du publique pendant ce fameux
transfèrement.
O. Personnel pénitentiaire
Le recrutement du personnel se fait par postulat puis au choix
aveugle. C'est qui constitue une déviance aux règles minima. En
principe, la direction de l'administration pénitentiaire doit recevoir
les dossiers des candidats, les soumettre à des tests puis à une
formation avant de les envois sur terrain. Mais dans la pratique, on les met
sur terrain sans tenir compte de leurs niveaux d'études, de leur morale
et éthique. Tout cela est dû à la carence du personnel et
au manque
66
d'organisation de la DAP. Les règles minima
prévoient que le directeur habite l'établissement ou à
proximité immédiate de celui-ci ; ce qui n'est pas le cas pour
celui de la Primil de N'dolo.
§2. Les règles d'application à des
catégories spéciales
Sont des règles qui s'appliquent aux détenus
spéciaux notamment les détenus condamnés (A), les
détenus aliénés et anormaux mentaux (B), les personnes
arrêtés ou en détention préventive (C).
A. Détenus condamnés 1. Principes
directeurs
L'emprisonnement et les autres mesures qui ont pour effet de
retrancher un délinquant du monde extérieur sont afflictifs par
le fait même qu'elles dépouillent l'individu du droit de disposer
de sa personne en le privant de sa liberté. Le but et la justification
des peines et mesures privatives de liberté sont en définitive de
protéger la société contre le crime.
Le problème qui se pose est que, le régime
pénitentiaire congolais ne réduit en rien la différence
entre la vie en prison et la vie libre, car être dans la Primil de
N'dolo, c'est être dans un autre monde ; un monde dans lequel
règne la promiscuité, l'injustice, bref la souffrance. Il n'y a
donc pas de mécanismes de réinsertion réelle. Nous
assistons à un traitement qui tend à faire croire que les
détenus sont soustraits désormais du monde réel pour un
autre non souhaité et non souhaitable. Le gouvernement censé
prendre soin d'eux, ne prend pas des mesures pour assurer la
réintégration des détenus âpres la prison quand bien
même que la plupart restent encore prévenus malgré tout.
67
Les assistants sociaux et organisations non gouvernementales,
censés donner un coup de pousse au gouvernement, avec pour missions de
maintenir et d'améliorer les relations des détenus avec leurs
familles, sont inactifs.
Bref, les détenus ne bénéficient pas
d'une aide post pénitentiaire tendant à diminuer les
préjugés à leur égard et leur permettant de se
reclasser dans la communauté66.
2. Traitement
Il est demandé aux établissements
pénitentiaires de recourir aux soins religieux, à l'instruction,
à l'orientation, à la formation professionnelle, aux
méthodes de l'assistance sociale individuelle, au conseil relatif
à l'emploi tout en tenant compte du passé social et criminel du
condamné voire, de la durée de la condamnation et perspectives de
reclassement.
Parmi les mécanismes cités ci-haut, aucun n'est
utilisé dans la Primil de N'dolo pour favoriser le suivi des
détenus. Dans la Primil de N'dolo, ils s'en foutent totalement du
passé du délinquant, tant noir soit-il, tous ont le même
traitement.
B. Détenus aliénés et anormaux
mentaux
En principe, les aliènes ne doivent pas être
détenus dans les prisons. Des dispositions doivent être prises
pour les transférer aussitôt que possible dans les
établissements pour malades mentaux67. Mais pendant qu'ils
sont là, ils doivent être placés sous la surveillance
spéciale d'un médecin.
Dans la Primil de N'dolo, nous signalons la présence
d'un malade mental qu'on ne nous a permis d'aborder. Ce malade mental ne
bénéficie d'aucun traitement favorable à son état
sous prétexte qu'il simule sa maladie mentale pour
66 Art. 57, 58, 60 et 61, ensemble des règles
minima de détention, Genève 1955
67 82.1, ensemble des règles minima de
détention, Genève 1955
68
être libéré. Sans résultat
médical qui atteste cette observation mais le personnel pense par
rapport à leur observation qu'il n'est pas souffrant.
C. Les personnes arrêtées ou en
détention préventive
Un prévenu c'est toute personne arrêtée ou
incarcérée en raison d'une infraction à la loi
pénale et qui se trouve détenu soit dans les locaux de la police
soit dans une maison d'arrêt, mais n'a pas encore été
jugée68.
Toute personne accusée d'une infraction est
présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité
ait été établie par un jugement
définitif69.
En principe, les prévenus innocents, doivent être
traités en conséquence et les règles suivantes doivent
être observées à leur egard :
> Ils doivent être séparés des
condamnés ;
> les jeunes séparés des adultes, au besoin
dans les établissements différents ;
> ils peuvent se nourrir à leurs frais ;
> ils doivent porter leurs vêtements personnels ;
> en cas d'uniforme, ça doit différer de ceux
des condamnés ;
> la désignation d'un avocat d'office.
Ces règles citées ci-haut ne sont pas
respectées dans la Primil de N'dolo parce que les prévenus ne
sont pas séparés des condamnés, les prévenus
adultes ne sont pas séparés des jeunes prévenus, tous
détenus et prévenus ont les mêmes blousons quant ils
sortent de la détention et tous sont en vêtements propres quand
ils sont dans la détention et enfin, on ne les accordes pas des avocats
d'office. Sauf quelques avocats qui par bonne volonté suivent les cas
des certains prévenus quand bien même que ça n'aboutit pas
souvent.
68 84.1, Idem
69 Art. 17 in fine, constitution de la RDC, 18
février 2006
69
3. Classification et individualisation
A la Primil de N'dolo, il est impossible de faire une
classification ou
une individualisation compte tenu du surnombre causé
par le manque d'infrastructure et de la surpopulation dans cette prison.
4. Privilège
La confusion qui existe entre les détenus
condamnés et les détenus
prévenus empêche d'observer ou d'organiser un
privilège à cette catégorie de détenus qui en
principe, devrait bénéficier d'un traitement de faveur. Nous
avons donc remarqué que certaines faveurs qui devraient en principe
être accordées aux prévenus sont plutôt
accordées aux officiers supérieurs par rapport à leurs
grades.
5. Travail
Des dispositions doivent être prises pour indemniser les
détenus pour
les accidents du travail et les maladies professionnelles,
à des conditions égales à celles que la loi accorde aux
travailleurs libres70.
Le nombre maximum d'heures de travail des détenus doit
être fixé par la loi ou par un règlement administratif
comme chez les travailleurs libres71.
Nous tenons à signaler que rien concernant le travail
n'est respecté car en cas d'accident ou maladie professionnel, aucune
indemnisation n'est accordée aux détenus et il n'y a aucune
organisation quant aux heures de travail72.
6. Instruction et loisir
L'instruction des jeunes détenus doit être
obligatoire et doit suivre si
possible le programme national pour le faciliter la
réintégration scolaire ou
70 UN, 74.1 et2, règles minima de
détention, Genève 1955
71 75.1, Idem
72 Interview accordé par le soldat de
1ere classe MASUDI Paul, Avril 2015
70
académique une fois en dehors de la
prison73. Il y a aucune instruction organisée dans la Primil
de N'dolo sauf un cours d'anglais dispensé par un détenu
professeur.
73 77.1 et 2, règles minima de
détention, UN, 1955
Nous pensons ainsi, qu'il est temps qu'une réforme soit
encore envisagée pour pouvoir réfléchir comment doit-on
adapter le traitement
71
CONCLUSION
Nous nous sommes intéressés aux juridictions
militaires, au sort du condamné militaire après le
prononcé de son jugement le condamnant à une peine tel que le
prévoit le code pénal militaire et de la vie qui l'attend une
fois dans son milieu de privation de liberté.
Cependant après une analyse minutieuse du traitement
pénitentiaire, nous sommes arrivés à constater que toutes
les règles tant internationales que nationales qui ont tendance à
cadrer ou à encadrer le système carcéral en
République Démocratique du Congo ne sont qu'échantillon,
puisque certains détenus de la Primil de N'dolo sont allés
jusqu'à dire que la prison en RDC est un Enfer sur terre. Les conditions
de détention sont vraiment en dessous même de la moyenne. Les
déficiences se remarquent donc dans l'alimentation, en vêtements
et literie, en exercices physiques, en service médical, en information
et droit de plainte des détenus, en bibliothèque, en
séparation des détenus par catégories, en instruction et
loisir et pire encore en personnel. Bref, le traitement pénitentiaire
congolais dévie énormément non seulement aux règles
minima qui s'avèrent être internationales mais aussi et surtout
à celles de l'ordonnance n°344 du 17 Septembre 1965 portant
régime pénitentiaire, qui en soit s'inspire aux mêmes
réglés minima de détention.
C'est pour cela même, dans un atelier national
organisé en juillet 2007 sur la réforme du système
pénitentiaire en RDC, le ministre de la justice, George Minsay Booka,
avait insisté sur le respect des règles minima pour tous les
détenus et par tous les établissements pénitentiaires,
notamment les déviations citées ci-haut.
72
pénitentiaire tant sur le plan textuel que sur le plan
pratique aux conditions conjoncturelles de notre pays, la République
démocratique du Congo.
Nonobstant toutes les déviations tragiques, le
gouvernement Congolais par le biais de son ministère de la justice et de
la défense reste sourd et muet. Nous pensons qu'il serait
agréable que celui-ci pense à réduire le nombre des
détenus en particulier ceux qui ont déjà purgé le
1/4 de leur peine par une liberté conditionnelle, soit par grâce
présidentielle. D'où nous saluons l'idée de l'opposition
congolaise mise en oeuvre par le chef de l'Etat, de pouvoir gracier et
amnistier certains détenus. Car cela permettra de réduire le
nombre de détenus dans les prisons de la République en
général et en particulier celle de N'dolo qui normalement a
été construite pour recevoir 500 détenus mais qui en est
là à plus de 1472 détenus.
Il ne suffit pas seulement de diminuer le nombre des
détenus dans les prisons mais aussi d'en assurer la
réintégration ou la réinsertion dans la
société en leur apprenant au mieux un métier.
La surpopulation de la Primil de N'dolo n'est donc pas
uniquement due au grand nombre des militaires incarcérés à
cause des circonstances des guerres, mais surtout à la durée
anormale d'incarcération de chaque détenu, aggravée par le
mauvais fonctionnement de la justice militaire.
Cette surpopulation des prisons contribue à :
y' Accentuer les mauvaises conditions matérielles de
détention et le non-respect de la plupart des règles
édictées dans l'Ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus et dans la législation congolaise en la
matière ;
y' Détériorer la condition physique des
détenus et à faciliter la transmission des
maladies infectieuses (comme la tuberculose) chez les
détenus ; y' Aggraver anormalement les conditions détention de
ceux, très nombreux, qui
sont en préventive alors que ces personnes doivent
bénéficier de la
73
présomption d'innocence et, à ce titre, jouir de
conditions de détention différentes des condamnés qui ont
été reconnus coupables d'infractions pénales.
La République démocratique du Congo fonctionne
sur une base répressive mais non préventive.
La dignité humaine est si importante, d'où
l'importance de la protéger à son extrême
vulnérabilité, car il vient d'être démontré
et approuvé à suffisance dans ce travail qu'en RDC, les droits de
l'homme en général et ceux du détenu en particulier
restent encore une hypothèse d'école. Le pauvre est donc soumis
à plus d'obligations qu'il lui est reconnu des droits.
Ce travail formule des recommandations, surtout à
l'intention des responsables du système judiciaire et
pénitentiaire congolais, dont certaines sont des actions et des mesures
à coût faible ou nul et dont la mise en application
immédiate ou à court terme est possible.
Visant à combattre la détention
illégale
? Renforcer le contrôle sur le respect des
procédures en matière d'arrestation et de détention
(notification, comparution devant une autorité judiciaire, etc.) ;
? Instruire les Officiers du Ministère Public qu'ils
assument les responsabilités de contrôle qui sont les leurs au
niveau des divers centres de détention conformément à
l'article 80 du Code congolais de procédure pénale, afin de
relever rapidement les cas d'arrestations arbitraires et de détentions
illégales et de les régulariser au fur et à mesure ;
? Assurer au détenu le concours d'un avocat (dès
son arrestation et sa mise en détention) pour permettre au détenu
d'exercer son droit d'avoir l'assistance d'un avocat ;
74
w' Informer les détenus des droits qui sont les leurs
tant au stade de l'instruction pré juridictionnelle et juridictionnelle
que pendant l'exécution de la peine privative de liberté.
Visant à améliorer l'administration de
la justice pénale
w' Fournir un appui léger aux parquets et à
l'administration pénitentiaire (en fourniture de bureaux, papiers,
etc)
w' Renforcer à travers des sessions de formation et
séminaires la formation du personnel pénitentiaire, des
magistrats, APJ et OPJ (dont la majorité n'a pas reçu la
formation adéquate) particulièrement dans le domaine des normes
internationales sur les garanties judiciaires et sur la protection des
personnes en détention, pour également éviter des
arrestations arbitraires et des détentions irrégulières
;
w' Réviser la législation pénitentiaire
et plus particulièrement l'ordonnance 344 du 17 septembre 1965 sur le
régime pénitentiaire. Il y a lieu d'initier une nouvelle
législation ou de proposer des modifications au texte qui existe
actuellement en rapport avec les règles minima pour le traitement des
détenus.
w' Améliorer des conditions de travail et de
rémunération des personnels intervenant dans l'administration de
la justice et dans le système pénitentiaire ;
w' Appuyer les Bureaux de consultation et d'assistance
gratuite des barreaux ;
w' Pousser la justice en générale et militaire
en particulier à accélérer sa manière de traiter
les dossiers pour éviter que les prévenus qui croupissent encore
en prison en attendant même que leurs dossiers puissent enfin être
mis à table ;
w' Enjoindre les magistrats à accorder la mise en
liberté provisoire et la mise en liberté conditionnelle, surtout
les établissements doivent en informer les
75
détenus de cette faculté et les encourager
à recourir à des peines substitutives à
l'emprisonnement.
Visant à améliorer les conditions de
détention et à respecter les Règles minima sur le
traitement des détenus
Dans le domaine alimentaire :
w' Distribuer régulièrement et de façon
contrôlée les aliments ;
w' En favorisant la communication des détenus avec
l'extérieur et leur famille (notamment en supprimant toute forme de
monnayage des visites) afin de suppléer par les apports de nourriture
;
w' En favorisant l'incarcération des détenus
dans les établissements pénitentiaires proches de leur lieu
d'origine ou de leur famille ;
w' Développer le travail des détenus y compris
les travaux d'intérêt collectif particulièrement ceux
pouvant augmenter l'autosuffisance alimentaire ;
w' Coordonner l'intervention des divers organismes caritatifs
ou humanitaires qui interviennent pour apporter une aide alimentaire ;
Dans le domaine médical :
w' Respecter la législation en matière de
transfert pour hospitalisation (art 60 de l'Ordonnance 344) ;
w' Séparer les personnes détenues atteintes de
maladies infectieuses de la population pénitentiaire
générale pour éviter la propagation de ces maladies et
leur administrer un traitement médical adapté à leur
état ;
w' S'assurer que les médecins ainsi que les infirmiers
de l'Etat s'acquittent effectivement de leurs tâches dans les prisons
;
w' Reconnaître, officiellement, aux médecins
engagés bénévolement dans les soins des détenus, le
droit de consulter et de soigner les prisonniers malades
;
w' Envisager des visites médicales dans les cachots ;
76
w' Traiter les détenus malades sur un même pied
d'égalité, sans aucune discrimination liée à leur
rang social, les motifs de leur arrestation, leurs tendances politiques,
etc.
w' Ouvrir dans les hôpitaux publics proches des prisons,
un pavillon pour détenus malades en transfert
Dans le domaine de l'adoucissement des conditions de
détention :
w' Favoriser l'exercice physique, le sport
w' Faciliter l'usage de radios, TV, lectures, etc.
Visant à réhabiliter le système
pénitentiaire :
w' Augmenter les effectifs du personnel pénitentiaire
notamment le personnel féminin ;
w' Assurer une formation de base et un recyclage du personnel
pénitentiaire en remettant en route le Centre de formation du personnel
judiciaire qui fonctionnait à Kinshasa-Gombe et dont le but était
la formation du personnel judiciaire (greffier, huissier, gardien de prison,
surveillant, etc.
w' Réhabiliter les prisons militaires permettant ainsi
de diminuer la surpopulation de nombreuses prisons et de séparer
détenus civils et militaires ;
w' Remettre en état des établissements de garde
et d'éducation pour les enfants afin d'éviter la présence
de mineurs dans les prisons et y assurer un encadrement des mineurs en vue de
leur réinsertion par des modules spécialisés en
matière d'éducation civique et morale et d'apprentissage des
métiers ;
w' Remettre en état la fourniture de la restauration et
des soins médicaux.
w' Remettre en route dans les prisons les activités de
production agricole et artisanale et plus particulièrement celles visant
à augmenter l'autosuffisance alimentaire notamment par la mise en place
de projets à caractère durable.
77
BIBLIOGRAPHIE
I. TEXTES JURIDIQUES
A. Textes juridiques internationaux
1. Ensemble de règles minima pour le traitement des
détenus, adopté par le 1er congrès des Nations
Unies pour la prévention du crime et le traitement délinquant,
Genève 1955
2. Protocole facultatif se rapportant à la convention
contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants du 10 décembre 1948, ratifié par la RDC par la
loi n°06/16 du 12 juin 2006 autorisant la RDC à ratifier ce
protocole, in J.Q, 47ème année, n°13 du
1er juillet 2006 ;
3. Protocole de la Charte Africaine des droits de l'homme et
des peuples, ratifié par la RDC par la loi n°06/015 du 12 juin 2006
autorisant l'adhésion de la RDC à ce protocole, in J.Q,
47ème année, n°13 du 1er juillet 2006
;
B. Textes juridiques nationaux
1. Constitution de la République démocratique
du Congo du 18 février 2006, telle que révisée par la loi
n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles
de la RDC du 18 février 2006, in J.Q, 52ème
année, Numéro spécial du 5 février 2011 ;
2. Loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant code
judiciaire militaire, in J.Q, Numéro spécial du 20 mars
2003
3. Loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 portant code
pénal militaire, in J.0, Numéro Spécial du 20
mars 2003
4. Ordonnance-loi n°85-010 du 31 décembre 1985
modifiant l'ordonnance-loi n° 79-007 du 06 juillet 1979 fixant
l'expression
78
monétaire et le taux de majoration des amendes
pénales, in J.O, 27ème année,
Numéro 1 du 1er janvier 1986 ;
5. Décret-loi n°017/2002 du 03 octobre 2002
portant code de conduite de l'agent public de l'Etat, in J.O,
44ème année, Numéro spécial du 15
janvier 2003 ;
6. Décret-loi du 09 juin 1965 portant règlement
des disciplines des officiers, sous-officiers, gradés et soldats de
l'Armée Nationale Congolaise, in Moniteur congolais,
6ème année, Numéro spécial du 13
juin 1965
7. Loi organique n° 11/012 du 11 aout 2011 portant
organisation et fonctionnement des forces armées, in J.O,
52ème année, n° spécial du 22 août
2011.
II. JURISPRUDENCES
1. Conseil de guerre de police de Kisangani, 15 Mai 1988,
inédit ;
2. Tribunal de 1ère instance de Lubumbashi, 03 avril
1969, RJCB, n°22 du 03 avril 1969 ;
3. Tribunal de 1ère instance d'Elisabethville, 03
avril 1954, RJCB, p. 129 du 03 avril 195 ;
4. Tribunal de 1ère instance Coquillatville, 19
Janvier 1923, Jurisprudence du Katanga I.
III. DOCTRINE A. Ouvrages
1. ESIKA MAKAMBO, Code pénal zaïrois
annoté, Livre 1, Lubumbashi, 1977;
2. LIKULIA BOLONGO, Droit et sciences
pénitentiaires, Kinshasa, PUZ, 1981 ;
79
3. MBOKO D'JADIMA, Principes et usages en matière
de rédaction d'un travail universitaire, Kinshasa, Ed.
CACIDEP-UNIAPAC/CONGO, 2004 ;
4. MUTATA LUABA Laurent, Droit pénal militaire
congolais, Kinshasa, Ed. Du SDEMJD, 2012 ;
B. Cours
1. BAYONA-ba-MEYA, Cours de procédure
pénale, UNIKIN, Kinshasa 1981-1982 (notes polycopiées);
C. Autres publications
1. Rapport sur la détention dans les prisons et
cachots de la RDC, MONUSCO section des droits de l'homme, Avril 2004.
2. Recueil des journées d'études de Lubumbashi
(JEL) ,1974. IV. INTERVIEWS
1. Interview accordé par l'Adjchef. MULONGO wa KYUNGU,
chargé de la comptabilité, Avril 2015,
2. Interview accordé par le Cap. Alain, inspecteur
pénitentiaire, Mai 2015,
3. Interview accordé par le Cap. MONGILA NSELE, chef
du bureau de détention de la Primil de N'dolo, Avril 2015,
4. Interview accordé par le Cap. NDUMBA MAYONGA,
chargé du social,
Avril 2015,
5. Interview accordé par le Lt. GRODYA AZA, Greffier
titulaire de la Primil de N'dolo, Avril 2015,
6. Interview accordé par le Lt. MUSWASWA MPIANA,
chargé de la
technique, Avril 2015,
7. Interview accordé par le soldat de 1ere
classe MASUDI Paul, Avril 2015,
8. Interview accordé par le soldat de
1ère classe MUYONGWA, détenu, Avril 2015.