4-1-2- LES COMPORTEMENTS POLITIQUES DANS LES
BIDONVILLES
Les formes de participation ou comportements politiques seront
liés aux évènements politiques, aux conditions de vie.
4-1-2-1- Lors des élections
Fabien Eboussi Boulaga94(1999) recommande de
définir l'élection en considérant la forme et le contenu.
Selon la forme, l'élection a la forme d'un acte unique qui se
déploie en des opérations séparées, mais intimement
liées. Du point de vue du contenu, elle établit dans la
communauté l'accord et la cohérence avec soi-même. Aussi,
elle vise à élire ceux qui vont diriger l'action commune, de leur
vouer loyalisme contre la protection des vies et des biens, des libertés
et des droits fondamentaux convenus, une juste part du produit de la
coopération sociale. Enfin, les élections ne sont pas un abandon
d'une souveraineté qui ne serait exercée que dans l'isoloir ;
l'instant de mettre un bulletin dans une urne. Dans le cadre de notre travail,
nous allons nous en tenir aux élections présidentielles,
législatives et municipales et plus précisément la
présidentielle du 09 octobre 2011 et les législatives et
municipales du 30 septembre 2013 au Cameroun. Nous n'avons pas tenu compte des
élections sénatoriales parce qu'elles sont
réservées à une certaine catégorie sociale. Pour
présenter ces comportements, nous avons tenu compte des phases
d'inscription sur les listes électorales, des retraits des cartes
électeurs, de la campagne électorale et le jour du vote (du
scrutin).
Mais avant cela, il est important de faire un briefing des
grandes étapes du processus démocratique
camerounais95. Historiquement, le Cameroun renoua officiellement
avec le multipartisme en décembre 1990. C'est ainsi que dès
Février 1991, les premiers partis politiques sont
légalisés et à présent ils sont plus de 300.
Cependant, ces nouvelles formations politiques dans la mouvance des
revendications, réclament une « conférence nationale »,
ce qui leur a donné droit à une « conférence
tripartite ». Les conclusions de conférence entrainent :
94Eboussi (Boulaga Fabien), Lignes de
Résistance, Ed Clé, Yaoundé, Cameroun, 1999
95Transparency International
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- Dès le 1er Mars 1992 l'organisation des
élections législatives, qui se sont déroulées avec
le boycott du SDF. A partir de cet instant, il y a eu :
- L'élection présidentielle anticipée du
11 octobre 1992 et la loi y afférant, adoptée à l'issue
d'une session extraordinaire de l'assemblée nationale ;
- Les conseillés municipaux se sont soumis au verdict
des urnes pour la première fois depuis le retour du multipartisme le 21
janvier 1996. Avec une domination de l'UNDP et du SDF ;
- Les 18et 19 mai 1997, se tiennent les deuxièmes
législatives pluralistes, suivies en octobre de la même
année par le scrutin présidentiel. Une fois de plus
boycotté par le SDF mais avec la victoire écrasante du RDPC.
- En mars 2002, il y a les élections
législatives et municipales couplées avec comme vainqueur le
RDPC.
- Le 11octobre 2004, élection présidentielle
avec des urnes transparentes et la réclamation par la coalition des
partis de l'opposition et de la société civile, de
l'informatisation du processus électoral et la mise en place d'une
commission électorale en lieu et place du MINATD et de l'ONEL.
- Au niveau de la loi fondamentale, la modification de la
constitution de 1972 de décembre 1995, qui aboutit à la
promulgation de la nouvelle constitution du 18 janvier 1996 par le
président de la république. Cette nouvelle loi se
caractérise par la matérialisation des régions et des
communes ainsi que le passage du mandat présidentielle de cinq (5)
à sept (7) ans renouvelable une seule fois. Mais au cours de la session
de mars-avril 2008, l'assemblée nationale adopta le 14 avril 2008 la
nouvelle constitution modifiée qui annule la limitation des mandats.
- En ce qui concerne le système électoral,
l'ONEL face à ses difficultés va remplacée le 29
décembre 2006 par ELECAM suite à une délibération
et à une adoption de l'assemblée nationale. Avec un délai
de 18 mois pour sa mise en place afin d'organiser, de gérer et de
superviser l'ensemble du processus électoral et
référendaire au Cameroun, ne le fera pas lors du double scrutin
législatif et municipal du 22 juillet 2007 (informatisation du fichier
électoral, des cartes d'électeurs et de l'ensemble des documents
électoraux).
- Lors des élections du 09 octobre 2011, on note une
pléthore de partis politiques n'ayant ni sièges, ni militants et
ne s'étant jamais présenté à une élection.
Certains
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sont conçus comme des instruments au service
d'ambitions personnelles, n'ayant pas souvent de programme politique et encore
moins une idéologie identifiable.
- Pour finir, notons que le 19 avril 2012, fut adopté
un nouveau code électoral. Aussi, les élections
législatives du 30 septembre 2013 furent marquées par la refonte
biométrique des listes électorales.
Ainsi, à la suite de ce contexte historique, voici
comment se sont comportés les habitants des quartiers que nous avons
choisis lors des élections.
Comme nous l'avons vu ci-dessus, l'élection
présidentielle du 09 octobre 2011 étaient marquées par la
mise en place d'une nouvelle administration électorale (ELECAM), tandis
que les législatives et municipales du 30 septembre 2013 se
caractérisent par la refonte biométrique. Fort de cela, une
communication événementielle a été utilisée
; se caractérisant par une communication de proximité, les
campagnes de sensibilisation des populations et des réunions avec les
différents responsables dans les quartiers. C'est dans ce cadre que les
associations, les chefs religieux, les leaders d'opinions et les chefs de
quartiers ont été mis à contribution pour amener les
habitants de la populace à s'inscrire sur les listes électorales.
C'est ainsi que nous avons vu des individus sacrifier un peu de leur temps pour
supporter les rangs devant les agents d'ELECAM afin d'être inscrits en
retour d'un récépissé qui leur était remis pour le
retrait de la carte d'électeur. C'est ainsi que sur les 82000
électeurs potentiels de Douala IIème il y a eu 75000
inscrits96 (ces données ont été
utilisées par défaut puisque nous n'avons pas pu avoir les
chiffres spécifiques à chaque quartier).
Pour le retrait des cartes, le même dispositif de
communication a été mis sur pieds pour inciter ces habitants
à retirer leurs cartes. Mais à ce niveau, nous avons
observé une réticence de ces populations à aller retirer
leurs cartes d'électeur. De plus, le retrait fait par plusieurs a
été fait sous des contraintes familiales et professionnelles
(cartes distribuées 74000)97.
C'est la campagne électorale qui nous a fourni un cadre
d'observation non négligeable, puisque c'est le moment de rencontre
entre l'offre et la demande politique, dans le sens du marché politique
Max Weber 98(1919). Aussi parce que cela nous a permis de toucher du
doigt la réceptivité de ces populations face aux promesses des
acteurs politiques, qui dans le cas d'espèce sont
représentés par les partis politiques. C'est le cas à
New-Town aéroport III où nous avons assisté à
toutes formes d'animations, de petites séances de travail ou de
formation, destinés à présenter comment se conduire dans
un bureau de vote et comment faire
96 Rapport Général des élections
législatives et municipales du 30 septembre 2013
97 Chef d'antenne ELECAM DOUALA IIème
98 Weber (max), Le Savant et le Politique,
1919
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pour exprimer son choix. Nous avons assisté à
une utilisation des jeunes et des parents pour aller convaincre le maximum de
leurs voisins moyennant un franc symbolique. Ce fut aussi le moment d'observer
des caravanes de « benskineurs » au « mototaximen » pour
faire des bruits dans le quartier. Tout ceci devant des foules qui
s'empressèrent sur le bord de la route pour satisfaire leur
curiosité et pourquoi ne pas profiter de la distribution de certains
« biens ».
Aussi, nous avons remarqué que certains habitants
changeaient de parti en fonction du gain et ce pour l'instant présent.
En effet, ces individus lorsqu'ils étaient informés de la
descente d'un parti dans leur quartier se transformant immédiatement en
sympathisant pour participer à la distribution des offrandes
électorale. C'est également le moment pour certains d'exprimer
leur déception du genre :
« C'est ce que vous dites tout le temps » ou
encore : « faites nous rêver juste pour la circonstance
»
De toutes ces scènes qui nous ont été
données de voir, nous avons noté que, même si ces habitants
assistent à ces campagnes, il y a une improvisation car rien n'est
préparé à l'avance, ni de la part des populations, ni de
la part des partis politiques.
Le jour du scrutin, c'est le jour où les suffrages sont
exprimés et le dépouillement est effectué, ceci dans
chaque centre et bureau de vote. Ce jour qui le plus souvent est un dimanche,
toutes les activités sont au stop pour permettre à chaque
habitant de se rendre dans les bureaux de vote, qui, en plus sont situés
dans les quartiers. Mais l'on se rend compte que même si certains
(beaucoup plus les parents (hommes) vont remplir leur devoir de citoyens, c'est
comme s'il n'y avait aucun évènement pour d'autres (jeunes et
femmes). Par la suite, à 18 heures et 00 minute, heure de fermeture des
bureaux de vote, certains habitants restent pour assister au décompte
des voix.
Cependant, une question persiste : qu'en est-il en dehors des
échéances électorales.
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