SECTION 4. L'APPLICATION DE LA LOI SUR LES PATIENTS
INSOLVABLES EN MATIERE MEDICALE
La rétention des patients insolvables dans des
hôpitaux et centres de santé constitue à notre avis une
restriction au droit à la liberté. Ainsi, avant d'examiner la
question de sa légalité au regard du droit congolais, nous allons
préalablement évoquer les conditions et les formes dans
lesquelles une personne peut-être privée de sa liberté.
A. Les mesures privatives de liberté en droit
congolais
Nous commencerons par analyser le principe fondamental
régissant le droit à la liberté avant d'aborder les
circonstances et les conditions dans lesquelles un individu peut être
privé de sa liberté.
1. Principe fondamental
Le droit à la liberté est garanti par de normes
internationales ratifiées par la RDC et par la législation
interne congolaise.
Sur le plan international, nous pouvons notamment
évoquer l'article 3 la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme de 1948 qui dispose : « Tout individu a droit à la vie,
à la liberté et à la sûreté de sa personne
». L'article 13 point 1 du même texte poursuit : « Toute
personne a droit de circuler librement et de choisir une résidence
à l'intérieur d'un Etat ».
Sur le plan interne, l'article 17 de la constitution dispose
expressément : « La liberté individuelle est garantie.
Elle est la règle, la détention l'exception. Nul
ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou
condamné qu'en vertu de la loi et dans les formesqu'elle prescrit
».
Les dispositions sus évoquées montrent à
suffisance l'importance accordée au droit à la liberté. En
effet, sa réalisation permet celle de biens d'autres droits
attachés à la personne humaine. Devant les juridictions
répressives, ce droit est notamment une conséquence du principe
de la présomption d'innocence. Cela étant, priver quelqu'un de sa
liberté doit être une mesure exceptionnelle. Pendant l'instruction
préjuridictionnelle, les mesures privatives de liberté ont pour
but principal d'empêcher les présumés coupables de se
soustraire à la justice par la fuite. Elles peuvent parfois mettre fin
à un comportement infractionnel et/ou protéger
l'intéressé de la vengeance.
2. Les mesures restrictives de liberté en droit
congolais
La jouissance du droit à la liberté n'est pas
absolue en droit congolais. La Constitution de la RDC prévoit
expressément que certaines restrictions peuvent y être
apportées.
a. La garde à vue
La constitution de la RDC fait allusion à la garde
à vue. Elle peut être entendue comme étant une mesure
restrictive de liberté qu'un Officier de Police judiciaire ordonne
à l'encontre d'un suspect pendant l'instruction préparatoire.
Toutefois, l'OPJ ne peut y recourir que dans les conditions
suivantes :
- soit, que l'infraction soit punissable de six mois de
servitude pénale au moins ;
- soit, que l'infraction soit punissable de peines de moins de
six mois s'il y a crainte de la fuite du suspect ou que son identité est
inconnue ou douteuse ;
Même dans ce cas, il faut qu'il ait des indices
sérieux de culpabilité.
Aux termes de l'article 18 alinéa 4 de la constitution
du 18 Février telle que révisée à ce jour, la garde
à vue ne peut excéder 48 heures. Et cette durée ne peut
excéder 24 heures lorsqu'il s'agit des infractions relatives aux
violences sexuelles.
b. Le placement sous mandat d'arrêt
provisoire
Le mandat d'arrêt provisoire constitue un acte de
procédure qui est délivré par le magistrat instructeur. Ce
dernier y procède lorsque les conditions requises par l'article 27 du
code de procédure pénale pour placer une personne en
détention préventive sont réunies à charge d'un
inculpé.
Ces conditions sont :
- l'infraction doit être punissable de six mois de
servitude pénale au moins. Toutefois, la mise sous mandat d'arrêt
provisoire est possible même pour les infractions punissables de moins de
six moins de servitude pénale lorsque la fuite de l'inculpé est
à craindre ou que son identité est douteuse ou que la
sécurité publique l'exige.
-Mais en tout, il faut qu'il ait des indices sérieux de
culpabilité. Aussi, la personne doit au préalable avoir
été interrogée par le magistrat instructeur auteur du
mandat.
Le mandat d'arrêt provisoire n'est en principe valable
que pour cinq jours. A l'expiration de ce délai, l'officier du
ministère public qui voudrait maintenir l'inculpé en
détention a l'obligation de le conduire devant le juge compétent
le plus proche pour statuer sur la détention préventive.
c. La détention préventive
Rappelons que les conditions de placement sous mandat
d'arrêt provisoire sont aussi celles requises pour mettre un
inculpé en détention préventive. Seulement, le magistrat
instructeur recourt à cette mesure privative de liberté lorsqu'il
voudrait maintenir un inculpé en détention au-delà de 5
jours. L'ordonnance statuant sur la détention préventive est
rendue au premier degré par le Tribunal de Paix siégeant en
chambre du conseil sur réquisition du Ministère Public,
l'inculpé doit être préalablement entendu, et, s'il le
désire assisté d'un Conseil de son choix. L'ordonnance autorisant
la mise en état de détention préventive est valable pour
quinze jours, y compris le jour où elle est rendue. A l'expiration de ce
délai, la détention préventive peut être
prorogée pour un mois renouvelable, aussi longtemps que
l'intérêt public l'exige. Toutefois, la détention
préventive ne peut être prorogée plus d'une fois à
l'égard des infractions pour lesquelles la loi prévoit une peine
de servitude pénale ou une peine de travaux forcés qui n'est pas
supérieure à deux mois. Si la peine prévue est
égale ou supérieure à deux mois, la détention
préventive ne peut être prolongée plus de trois fois
consécutives.
d. Le placement sous un mandat de
dépôt
Le mandat de dépôt est prévu par l'article
68 du code de procédure pénale mais qui, ne l'a pas
défini. En effet, il est entendu comme un acte de procédure par
lequel le Ministère Public décide de placer un prévenu
traduit devant une juridiction répressive en détention entre le
moment de la saisine et celui du prononcé, dans le but d'éviter
qu'il se soustraie à l'exécution de la peine susceptible
d'être prononcée à sa charge.
Le mandat de dépôt ne peut être
décerné que si certaines conditions sont réunies :
Il s'agit d'abord de toutes les conditions relatives à
la mise en détention préventive. Ensuite, il faut qu'il y ait
saisine préalable du juge. Le mandat de dépôt ne
peut-être décerné que lorsque le prévenu a
été cité ou sommé à comparaître devant
le tribunal. Cela signifie que l'instruction préparatoire a
été menée et clôturée et que le magistrat
instructeur a décidé des poursuites en envoyant le dossier de
l'affaire devant le tribunal compétent. Ce mandat n'est valable que pour
cinq jours.
e. La détention en exécution d'une peine
de servitude pénale
L'article 5 du Code pénale congolais livre I retient la
peine de servitude pénale parmi celles applicables aux infractions en
RDC. Elle peut être à temps ou à perpétuité.
En vertu de cette disposition, une personne peut donc être détenue
en prison pour purger sa peine. Pareille détention est légale et
partant régulière.
f. Autres causes susceptibles de donner lieu à
la privation de liberté
Au-delà des mesures privatives de liberté
examinées précédemment, la législation congolaise
prévoit également des cas dans lesquels une personne peut
être privée de sa liberté. Il s'agit des cas suivants :
- la détention des aliénés ou d'individus
atteints des troubles mentaux;
- l'arrestation des vagabonds et mendiants;
- le droit de garde reconnue à ceux qui exercent
l'autorité parentale vis-à-vis des enfants;
- le pouvoir reconnu au particulier d'arrêter toute
personne auteur de l'infraction flagrante ou réputée flagrante
passible de trois ans au moins ;
- la contrainte par corps ;
- le placement en résidence surveillée des
personnes justiciables devant la Cour Suprême de justice.
1. Principe fondamental en matière de
recouvrement des créances
Dans la Rome antique, la personne répondait
corporellement de ses engagements. Ainsi, le créancier impayé
pouvait s'emparer de son débiteur insolvable pour en fin de compte le
vendre ou le réduire en esclave.
Avec le temps, ce procédé contraire à la
dignité humaine fut abandonné. Depuis lors, c'est sur le
patrimoine du débiteur que s'exécutent de gré ou de force
ses obligations de nature pécuniaire.
Ce principe fut formellement consacré par les articles
2092 et 2093 du code Napoléon.
Nous y lisons respectivement :
- Quiconque s'est obligé personnellement, est tenu de
remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers
présents et à venir.
- Les biens du débiteur sont le gage commun de ses
créanciers et le prix s'en distribue entre eux par contribution,
à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes
légitimes de préférence.
En droit congolais, le principe ainsi consacré par
l'article 2093 du Code Napoléon avait été textuellement
repris par l'article 245 de la loi foncière.
2. Le recouvrement d'une créance par voie
extrajudiciaire
La législation congolaise donne aux particuliers la
possibilité de régler leurs litiges relatifs au droit de
créance sans même recourir aux institutions judiciaires. Cela peut
se faire notamment par un payement après une mise en demeure. En plus,
les parties peuvent également transiger autour des litiges les
concernant. L'article 583 du CCCLIII définit la transaction comme
étant un contrat par lequel les parties terminent une contestation
née, ou préviennent une contestation à naître. Ce
contrat doit être rédigé par écrit. Et l'article 584
du même texte ajoute : « pour transiger, il faut avoir la
capacité de disposer des objets compris dans la transaction ».
Partant de ces dispositions, il est clair que les honoraires dus aux
médecins et au personnel soignant sont susceptibles d'être
recouvrés par voie extrajudiciaire, soit par le payement du patient
après mise en demeure lui faite, soit par une transaction entre le
médecin ou personnel soignant, d'une part et le patient de l'autre.
3. Le recouvrement d'une créance par voie
judiciaire
Le recouvrement d'une créance par voie judiciaire
consiste à saisir une juridiction compétente dans le but de
demander à celle-ci d'ordonner le payement. Cette demande est en
principe formulée par le créancier sous forme d'un exploit qui
peut notamment prendre la forme d'assignation, de requête, de citation
directe... La procédure à suivre diffère selon que l'on a
saisi une juridiction pénale, civile, du travail, de commerce ou
administrative. Lorsque la juridiction juge la demande du créancier
recevable et partiellement ou totalement fondée, elle ordonne par une
décision judiciaire le payement avec ou sans dommages et
intérêts. L'exécution de la décision ainsi rendue se
fait alors par la saisie des biens du condamné (débiteur)
lorsqu'il ne s'est pas exécuté volontairement en dépit de
la signification du jugement et du commandement à payer lui faits. La
saisie peut porter sur les biens mobiliers et/ou immobiliers du
condamné. Elle ne peut jamais porter sur la personne du
condamné.
Toutefois, lorsque le créancier estime que le
débiteur peut organiser son insolvabilité pendant la durée
de l'instance, il peut faire saisir préventivement ses biens par une
procédure de saisie conservatoire ou de saisie-arrêt selon que ces
biens sont entre les mains de ce dernier ou d'une tierce personne. Quoique
saisis, ces biens restent propriété du débiteur avant leur
vente ; ils sont juste placés sous le contrôle judiciaire pour
l'empêcher d'organiser son insolvabilité. La saisie conservatoire
ou la saisie arrêt doit être suivie d'une assignation en
validité dans les quinze jours de la saisie. La saisie conservatoire
n'est valable qu'à condition que le créancier assigne en
validité dans le délai fixé par ordonnance. Lorsque les
prétentions du créancier sont déclarées recevables
et fondées par la juridiction saisie en validité, celle-ci
transforme alors la saisie conservatoire ou arrêt en saisie-
exécution.
C'est en vertu de cette procédure que le médecin
peut recouvrer les honoraires qui lui sont dus. Toutefois, ce recouvrement doit
s'effectuer une année à partir du jour où ils deviennent
exigibles.
Ces notions sur le recouvrement des créances peuvent
nous permettre à présent de passer à l'analyse de la
problématique de la légalité de la rétention des
patients insolvables dans des hôpitaux et centres de santé en
République Démocratique du Congo.
1. Quid alors de la légalité de la
pratique de rétention des
patients insolvables ?
Comme dit précédemment, il s'est instauré
en République Démocratique du Congo une pratique consistant
à retenir les patients insolvables dans des hôpitaux et centres de
santé jusqu'à ce qu'ils aient payé leurs frais
médicaux. Ces patients n'hésitent pas quelques fois d'interpeller
les autorités politiques et les hommes de bonne foi de concourir
à leur libération en payant les frais pour lesquels ils sont
redevables envers l'hôpital ou le Centre de santé. Dans la ville
de Boma par exemple, les enquêtes que nous avons menées dans cinq
hôpitaux ont démontré que pendant la période allant
du mois de Mai 2011 au mois d'Octobre 2011, près de 150 patients y ont
été retenus pour défaut de payement des frais. Ceux qui
quittent les hôpitaux ou centres de santé sans honorer les
factures et sans autorisation des responsables habilités sont
carrément qualifiés « d'évadés »
(allusion faite aux évadés des prisons).
A notre avis, cette pratique qui semble être
légitime ou légitimé en RDC n'est pas conforme à la
législation congolaise. C'est, du reste, une manifestation de la justice
privée agressive interdite par la loi. En effet, le médecin ou le
personnel soignant qui fournit des prestations en faveur d'un patient a certes
droit à ses honoraires, à moins qu'il y renonce. Pour rappel, ces
honoraires ont même la nature d'une créance
privilégiée. En tant que telle, il va de soi que le recouvrement
de cette créance doit se faire de gré ou de force sur les biens
du patient par voie extrajudiciaire ou judiciaire. Jamais il ne peut
l'être sur la personne du patient en le retenant à l'hôpital
ou au centre de santé.
Nous pensons qu'il s'agit là d'une mesure restrictive
de liberté faite en violation des normes internes et internationales de
la République Démocratique du Congo.
Sur le plan international, la Charte Africaine des Droits de
l'Homme et des peuples à son article 6 précise que : « Tout
individu a droit à la liberté et à la
sécurité de sa personne. Nul ne peut être privé de
sa liberté sauf pour des motifs et dans les conditions
préalablement déterminés par la loi ; en particulier nul
ne peut être arrêté ou détenu arbitrairement
».
Sur le plan interne, rappelons que le deuxième
alinéa de l'article 17 de la Constitution du 18 Février 2006
telle que révisée à ce jour stipule : «La
liberté individuelle est garantie. Elle est la règle, la
détention l'exception. Nul ne peut être poursuivi,
arrêté, détenu ou condamné qu'en vertu de la loi et
dans les formes qu'elle prescrit ».
Ces dispositions démontrent l'importance qui est
juridiquement accordée au droit à la liberté. Les
restrictions n'y sont apportées que de manière exceptionnelle,
c'est-à-dire dans les seuls motifs et conditions fixés par la
loi.
Ceci nous amène davantage à conclure à
l'illégalité de la pratique qui consiste à retenir les
patients insolvables dans des hôpitaux et centres de santé. En
effet, le médecin ou le personnel soignant n'a en réalité
aucun pouvoir spécial d'arrêter, de détenir ou de priver
quelqu'un de sa liberté. De part sa profession reconnue et
organisée par le législateur, il peut certes retenir une personne
pour raison des soins médicaux. Il est alors clair que pareille
rétention est licite et même justifiée par la loi. En
dehors de ce cas, il ne peut en tout cas retenir qui que ce soit, surtout pas
pour recouvrer ses honoraires, lesquels en tant que créance doivent
être recouvrés non pas sur la personne du patient mais
plutôt sur l'actif de son patrimoine.
Nous pensons en fin de compte que le médecin ou le
personnel soignant qui retient son patient pour la seule raison qu'il est
insolvable se rend coupable de l'infraction d'arrestation arbitraire et de
détention illégale prévue et punie par l'article 67 du
code Pénal Congolais Livre II. Cet article dispose en effet : « Est
puni d'une servitude pénale d'un à cinq ans celui qui, par
violences, ruses ou menaces, a enlevé ou fait enlever,
arrêté ou fait arrêter arbitrairement, détenu ou fait
détenir une personne quelconque. Lorsque la personne enlevée,
arrêtée ou détenue aura été soumise à
des tortures corporelles, le coupable est puni d'une servitude pénale de
cinq à vingt ans. Si les tortures ont causé la mort, le coupable
est condamné à la servitude pénale à
perpétuité ou à mort ».
Cette infraction peut être définie comme
étant le fait de, par violences, ruses ou menaces, d'enlever ou de faire
enlever, d'arrêter ou de faire arrêter, de détenir ou de
faire détenir arbitrairement une personne.
L'analyse de cette disposition montre qu'il faut deux
éléments pour que cette infraction soit établie : un
élément matériel et un élément moral.
§ Elément matériel
Cet élément est doublement
caractérisé.
1° Actes matériels
L'acte matériel de l'infraction sous examen se
réalise par le fait d'enlever ou de faire enlever, d'arrêter ou de
faire arrêter, de détenir ou de faire détenir un
individu.
L'enlèvement consiste dans le fait d'entraîner,
de détourner, d'amener, de déplacer une personne de l'endroit
où elle se trouve.
L'arrestation est le fait de se saisir d'une personne, de
l'appréhender matériellement au corps, de l'empêcher de
continuer sa route, la priver physiquement de sa faculté de circuler,
c'est-à-dire de sa liberté d'aller et de venir de son
gré.
La détention consiste dans le fait de garder, de tenir
en sa possession, de retenir une personne pendant une durée plus moins
longue, de l'incarcérer.
LIKULIA précise que l'accomplissement de ces trois
actes matériels n'est pas requis pour que l'infraction d'arrestation
arbitraire et de détention illégale soit réalisée.
Un seul fait suffit.
Au regard de ce qui précède, nous pensons que la
détention d'un patient insolvable par le médecin ou le personnel
médical dans un hôpital ou dans un centre de santé
constitue un acte de détention évoquée par l'article 67 du
code pénal livre II, car il a été jugé, en effet,
que le lieu de la détention importe peu.
Il peut s'agir de la propre habitation de la victime ou d'un
lieu quelconque, par exemple, une maison privée ou même
solitaire.
2° Moyens utilisés
L'acte d'arrestation, de détention ou
d'enlèvement pour être retenu comme élément
constitutif de l'incrimination prévue et punie par l'article 67 de Code
pénal doit être fait par violence, par ruse ou par menace.
- En ce qui concerne la violence, il y a lieu de dire que
celle-ci peut être physique ou morale. Elle est physique lorsque l'auteur
exerce une pression corporelle sur la victime pour l'arrêter, la
détenir ou l'enlever. Tel est le cas d'un agent médical qui, par
lui-même ou par ses services de garde, empêche les sorties des
patients insolvables.
Elle est morale lorsque l'auteur exerce une pression morale
sur la victime jusqu'en le privant de sa liberté d'aller et de revenir.
Dans les hôpitaux et dans les centres de santé, nous pensons que
la présence des gardes chargés notamment de contrôler la
régularité des sorties peut être en soi une pression morale
à l'égard de patients insolvables. LIKULIA abonde pratiquement
dans le même sens lorsqu'il insiste que l'acte matériel de
détention est réalisé même si il n'est pas
précédé d'une appréhension matérielle de la
victime particularisant l'arrestation.
Dans le deux cas, le terme violence doit être
interprété de manière très large.
- La ruse consiste dans les manoeuvres tendant à
paralyser la volonté d'une personne ou la mettant dans
l'impossibilité morale d'user de sa liberté.
- La menace consiste dans l'annonce d'un mal imminent de
nature à troubler ou à impressionner la personne qui en est
l'objet.
§ Elément intentionnel
L'élément intentionnel de cette incrimination
est triplement caractérisé : l'agent doit avoir agi
illégalement, intentionnellement et arbitrairement.
a) l'illégalité de l'acte
La Constitution congolaise à son article 17
précise que la liberté est la règle et la détention
l'exception. Il ressort donc de cette disposition que les mesures privatives de
liberté ne peuvent être autorisées que dans les seuls cas
et conditions strictes prévues par la loi.
Ainsi, tout acte consistant à priver une personne de sa
liberté qui ne trouve pas sa justification dans la loi est
illégal. Tel est le cas d'un médecin ou d'un personnel soignant
qui, en recouvrement de ses honoraires retient son patient insolvable à
l'hôpital ou au centre de santé. En effet, les honoraires en tant
que créance (dette) ne peuvent justifier une quelconque mesure privative
de liberté.
b) L'intention coupable
L'auteur de l'infraction prévue par l'article 67 doit
avoir agi avec intention de priver injustement quelqu'un de sa liberté
en l'arrêtant, en le détenant ou en l'enlevant. En d'autres
termes, il doit avoir su le caractère illégal de son acte. Le
principe nul n'est censé ignorer la loi peut trouver son application
à ce niveau.
Tombe alors sous le coup de cette infraction, le
médecin ou le personnel soignant qui, au lieu de recourir aux voies de
droit prévues pour recouvrer sa créance préfère
détenir son patient jusqu'à ce qu'il ait payé.
c) le caractère arbitraire
L'acte de l'auteur de l'infraction d'arrestation arbitraire et
de détention illégale, doit dépendre de sa seule
volonté, de son bon plaisir, de son caprice.
Il a été jugé dans la même optique
qu' « un acte est arbitraire lorsque l'agent a agi par caprice ou par dol,
sans pouvoir indiquer aucune justification à l'appui de son action.
Au regard de ce qui précède, nous pouvons
affirmer que la détention d'un patient insolvable par le médecin
ou le personnel soignant est arbitraire puisque ce dernier agi dans la seule
volonté de recouvrer ses honoraires par une procédure
illégale.
4° Régime répressif
L'infraction d'arrestation arbitraire et de détention
illégale est punie d'une peine de servitude d'un à cinq ans.
Toutefois, lorsque la personne enlevée, arrêtée ou
détenue aura été soumise à des tortures
corporelles, le coupable est puni d'une servitude pénale de cinq
à vingt ans. Si les tortures ont causé la mort, le coupable est
condamné à la servitude pénale à
perpétuité ou à mort.
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