La contribution de la microfinance au développement socio-économique dans la commune de Carrefour: le cas d'ACME pour la période 2000-2009( Télécharger le fichier original )par Jonathan SAINT JEAN Université d'état d'Haà¯ti - Licence ès Sciences Economiques 2015 |
8.3 Microfinance et EducationLe président de Freedom House from Hunger Christopher Dunford est d'avis que la microfinance est l'outil indispensable que les gens très pauvres ont besoin pour trouver des solutions aux causes et conditions de leur pauvreté. Il tient compte dans ces écrits du problème éducatif qui est l'un des déterminants de la pauvreté. Convaincu que l'éducation est la base du développement, il argumente que la microfinance de groupe constitue une excellente opportunité pour fournir les services éducatifs bon marché dont les pauvres ont besoin, des services qui peuvent aussi améliorer leur performance en tant que clients d'institutions de microfinance. Il croit que la microfinance sert à intégrer les femmes avec des services de santé et d'éducation. Pour Dunford la microfinance est un moyen de promouvoir la planification familiale et la prévention du VIH-SIDA (Dunford, p.18, 2006). Il s'illustre à partir de l'exemple de CRECER en Bolivie qui offre des programmes d'éducation sur la planification familiale qui incluent la distribution de contraceptifs, et de FOCCAS Uganda qui offre des programmes d'éducation sur la planification familiale et la prévention de l'infection par le VIH. Il appelle ce système Crédit avec Education, prestation de service unifié. Dans sa pensée, Dunford associe l'éducation à la santé. Pour lui une bonne éducation permettrait de résoudre certains problèmes de santé au sein des ménages et par extension, au sein de la société. La microfinance permet de résoudre un ensemble de problèmes basiques dans les pays pauvres et même dans les pays industrialisés. On n'est pas censé dire que la microfinance à elle seule peut entraîner le développement, mais plus d'un sont d'avis qu'elle peut porter une contribution spéciale au processus de développement dans son sens le plus large. Les paragraphes qui suivent traitent leurs pensées. 8.4 Microfinance et Développement« La microfinance s'illustre comme étant l'outil le plus prometteur et le moins couteux dans la lutte contre la pauvreté mondiale », Jonathan Morduc26(*) (Sam, 2005 ; Blondeau, 2006). L'Organisation des Nations Unies rapporte qu'une profusion d'études a confirmé par leur rigueur analytique ce que des observations ponctuelles sur plus d'une dizaine d'années avaient déjà révélé, à savoir que l'accès aux services financiers, en particulier au microcrédit, permettait aux populations pauvres d'accroître leur revenu, de se constituer des actifs et d'être mieux préparées face aux périodes de crise. On s'est également aperçu, poursuit l'ONU, que les clients du microfinancement, en particulier les femmes, étaient devenus plus autonomes, avaient pu investir leur surcroît de revenus dans l'éducation, la santé et l'alimentation et étaient plus aptes à faire face aux imprévus (ONU, 2004). Dans « mise en oeuvre de la première décennie des nations unies pour l'élimination de la pauvreté (1997-2006) et préparatifs de l'année internationale du microcrédit en 2005, (2004) », l'ONU confirme que l'impact du microcrédit et de la microfinance dans la lutte contre la pauvreté se voit à divers signes, tels que l'amélioration du revenu, de l'emploi et des dépenses du ménage ainsi que des ménages mieux armés face aux turbulences économiques et sociales. La preuve est faite que l'accès au crédit permet à beaucoup de pauvres d'accroître, de diversifier et de protéger leurs revenus. Par ailleurs, les institutions de microfinancement dans de nombreuses régions ont signalé une hausse des dépenses du ménage et des possibilités d'emploi chez leurs clients. L'organisation des Nations Unies poursuit que l'accès à des services financiers tels que les prêts, l'épargne ou l'assurance permet aux populations pauvres de se prémunir face aux crises économiques ou aux catastrophes naturelles, ainsi qu'aux imprévus, au chômage ou à des vicissitudes telles que les décès dans la famille. La microfinance peut améliorer la capacité de gestion des risques des ménages, grâce au renforcement du capital social par la formation et par le perfectionnement. L'ONU croit que l'inclusion financière peut s'avérer un important outil dans la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. Nicolas BLONDEAU fait une analyse objective sur l'impact réel du secteur microfinancier dans son ouvrage « la microfinance : un outil de développement durable ?(2006) ». Il affirme qu'aux exclus du système financier formel, la microfinance fournit des services diversifiés. Il résume les retombées positives du secteur de la microfinance en fonction des progrès réels pour les clients en termes d'augmentations de revenus, de réduction de vulnérabilité, d'accès aux soins, à l'éducation, au logement, d'une hausse de la confiance et d'estime de soi... Cependant, il a fait remarquer que la microfinance n'est qu'un outil financier, et n'est pas une solution complète, elle nécessite la complémentarité d'autres outils de développement. Philippe JEANNIN et Mariam SANGARE font ressortir, dans leur ouvrage « La microfinance. Quels impacts économiques et sociaux ? (s.d.)», que la microfinance génère un effet revenu, par l'activité économique qu'elle autorise dans les foyers. Selon elles, la microfinance améliore consommation et épargne, au bénéfice des enfants en particulier et de leur éducation. Pour ces auteurs, l'impact de la microfinance doit être mesuré en tenant compte de la zone ou de la région dans laquelle s'installe l'IMF. Pour eux, dans les pays en développement, l'exclusion n'est pas seulement bancaire ou financière, les pauvres sont également exclus des services de base tels que l'éducation, la santé. C'est pourquoi la diversification des activités des IMF est plus marquée dans ces zones, avec des activités de formation, d'alphabétisation ou d'éducation à l'hygiène domestique se combinant aux services financiers. Ils estiment que l'effet revenu des microcrédits est une partie minime de l'effet que la présence d'un programme de microfinance peut avoir sur la vie des villageois en pays en développement (PED). Cependant, constatent-ils, la microfinance est de plus en plus utilisée pour lutter contre les formes d'exclusion présentes dans les pays développés. De son côté, Simon CORNEE (2006) voit les dispositifs de microfinance comme des structures offrant des services financiers de base (épargne/crédit) et plus élaborés (assurances) à une frange de la population exclue des circuits financiers classiques. Dans son mémoire de master27(*), Cornée soutient que la microfinance apparaît comme une solution dans la lutte contre le chômage de masse en ce sens qu'elle permet de réinsérer des populations précarisées dans l'économie de marché afin qu'elles se réintègrent dans les circuits économiques et, par voie de conséquence, qu'elles se ré-sociabilisent. Dans sa présentation autour du thème « Microfinance : un outil de lutte contre la pauvreté. Principes et mécanismes de base » dans le dialogue 31 sur la microfinance en Europe, Mia ADAMS avance que la microfinance donne les moyens aux pauvres de mettre à profit leur capacité en faveur du développement économique durable. Elle voit la microfinance comme un outil de lutte contre la pauvreté et l'exclusion financière. S'appuyant sur des statistiques du département de Microfinance des Nations Unies, estimant à quelques 500 millions, les pauvres qui font actuellement fonctionner de manière rentable une microentreprise, Adams confirme que la microfinance peut présenter une véritable porte de sortie vers l'intégration économique et sociale pour ces individus, disposant de projets productifs, mais exclus des institutions financières formelles. Elle dit remarquer d'ailleurs depuis un certain nombre d'années que la plupart de ces personnes survivent grâce à des activités d'auto-emploi ou dans le cadre d'une micro ou petite entreprise. Mia Adams fait remarquer toutefois que la microfinance n'est pas la charité. Elle ne peut pas s'exprimer par : « Donnons quelque chose aux pauvres pour les aider ». Adams met l'accent sur l'aspect disciplinaire du système. Pour qu'elle puisse jouer pleinement son rôle, la microfinance doit se construire sur une discipline de gestion, sur la volonté de réussir à la fois au niveau de la clientèle et au niveau des institutions. Et elle suggère de ne pas considérer la microfinance comme pouvant tout faire, ce qu'elle qualifie de grave erreur (ADA, op. cit., pp.15-22). Quant à Cédric LOMBARD, il croit que la microfinace s'intéresse d'abord aux pauvres actifs, en leur permettant de pouvoir compter sur une source de fonds flexible, fiable et relativement bon marché et sur d'autres services financiers en vue de faire prospérer leurs affaires. Une institution de microfinance cherche à réintégrer des personnes exclues dans un système économique et social où elles peuvent alors s'affirmer et s'épanouir, a fait savoir M. Lombard dans son article « Pourquoi relier la microfinance avec les marchés financiers internationaux ? » dans le dialogue 31 d'ADA (2003). En leur offrant des services adaptés à leurs besoins, poursuit-il, elle (la microfinance) permet à ces entrepreneurs de sortir d'une logique de très court terme : ils deviennent capables de stabiliser (voire de faire augmenter) les revenus issus de leur petit business et peuvent s'offrir le luxe inconnu jusqu'alors de penser et préparer l'avenir par l'accès à l'épargne ou à l'assurance. Du point de vue de M. Lombard le succès continu du secteur microfinancier exige une gestion efficace. Il conclut que la mise en place d'un tel système financier exige des institutions qu'elles deviennent pérennes et pour ce faire les IMF doivent se concentrer sur quatre (4) éléments principaux à savoir: la taille critique de leur portefeuille, la gestion de leur risque crédit, la gestion de leur structure de coûts et la gestion de leur croissance. Dans le « guide de référence pour le secteur de la microfinance (1999) », l'Agence Canadienne pour le Développement International (ACDI) conçoit la microfinance comme un domaine en rapide évolution qui offre un énorme potentiel comme moyen d'aider les pauvres. Mais, souligne l'ACDI, les projets de microfinance doivent être bien conçus et bien s'intégrer au contexte des collectivités qu'ils doivent servir. Le domaine de la microfinance englobe un large éventail d'activités et d'interventions constate l'ACDI. Pour cette dernière, il faut prendre le soin de cibler efficacement les pauvres dans le cadre d'un projet de développement par le biais des IMF. C'est-à-dire il faut savoir les identifier en fonction de la région et du genre ; les rejoindre par la promotion des services de microfinance ; susciter leur intérêt en élaborant de méthodes innovatrices de prestations de services, remplaçant les garanties traditionnelles par une responsabilité de groupe, processus de demande simplifiée, limites peu élevées pour l'épargne et les prêts ; et exclure ou dissuader les non-pauvres soit avec des taux d'intérêt élevés et faible niveau des prêts (auto-exclusion) ou par des critères d'admissibilité favorisant les gens de faibles revenus. Enfin, pour Sabrina Djéfal, la microfinance représente une nouvelle source de financement de l'économie qui allie implication des populations concernées, financement et activités économiques. En cela, elle s'adapterait à un contexte socio-économique particulier où les points de vue et modes de fonctionnement de la population seraient pris en compte tout en favorisant l'accumulation économique par la création d'activités ; tout cela grâce à un simple financement. Elle pense que la microfinance donne lieu de croire que la relation finance-croissance économique est avérée. Djéfal constate beaucoup de personnes ayant contracté des prêts auprès d'organisations de microfinance ont ainsi pu développer leurs activités ou voir leurs conditions de vie s'améliorer très nettement. Elle estime que la microfinance apparaît comme un « remède miracle » parce qu'elle cristallise ainsi les aspirations des praticiens du développement depuis les années 1960, en ce qu'elle représente une sorte de « catalyseur » qui parviendrait (enfin) à enclencher le mouvement de développement tant recherché depuis cette époque. Dans sa thèse, Sabrina Djéfal estime que la microfinance allie la pratique et la logique du secteur privé tout en s'insérant dans le contexte socio-économique des « pays en voie de développement ». Elle offre à chacun la possibilité de se réjouir de l'un ou de l'autre de ses aspects et met tout le monde d'accord sur la pertinence de continuer les investissements dans cette voie. Djéfal a présenté le taux de remboursement et la confiance comme des facteurs de réussite des Institutions de Microfinance. Conclusion Cette revue de la littérature montre que le secteur microfinancier peut apporter une contribution réelle au développement économique et social des gens (bénéficiaires). Economique, dans la mesure où la microfinance permet aux pauvres de camper leurs propres entreprises et de créer d'auto-emplois. Les IMF permettent aux pauvres de générer un effet revenu qui les facilite l'accès aux ressources nécessaires. Social, dans le sens que la microfinance permet l'émancipation du rôle de la femme dans la maison et dans l'entreprise, permet d'améliorer la qualité de la santé, de l'éducation... De surcroît, la microfinance permet de réduire les vulnérabilités. Bref, elle permet d'améliorer la qualité de vie dans un contexte pluridimensionnel. Bien que nous nous accrochions aux pensées des auteurs qui sont convaincus que la microfinance contribue au développement, nous ne sommes guère autorisés de clamer que la microfinance contribue au développement en Haïti avant l'expérimentation scientifique de la cause. Avant d'y arriver, il s'avère convenable de faire une présentation synthétique de la situation socio-économique d'Haïti au cours de la période d'étude. Le chapitre trois (3) qui suit se fait le témoin de cette cause. * 26 MORDUC Jonathan est Président du Groupe d'experts des Nations Unies sur les statistiques relatives à la pauvreté mondiale. Professeur d'économie et chercheur à une université New-yorkaise. * 27Simon Cornée (2006) a fait l'expérimentation dans son mémoire de master intitulé : « Microfinance : entre marché et solidarité. Analyse de la convergence entre performances financières et performances sociales : application de la méthode Data Envolpment Analysis sur 18 institutions de microfinance péruviennes » |
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