Les familles des politiciens amateurs
Avec la crise économique, le manque d'emploi, la
rémunération très faible ou inexistante, certains
congolais ont développé des reflexes de se procurer de l'argent
même dans les domaines où ils n'ont aucune compétence.
C'est ainsi qu'avec la démocratisation de la RD Congo, bien de gens
se sont lancés dans la politique, ils ont postulé à des
postes des députés provinciaux ou nationaux, non pas parce qu'ils
avaient envie de défendre les intérêts de la population ou
parce qu'ils en avaient la compétence, même pas parce qu'ils en
comprenaient le sens, la mission du statut auquel ils aspiraient, mais tout
simplement parce que la politique paye mieux que dans tous les autres secteurs
du pays.
En 2006, aux élections des députés
provinciaux, pour 5 sièges à pourvoir, il y avait 145 candidats
pour le territoire de Walungu, 99 candidats pour les députés
nationaux ; récemment, en 2011, pour 4 sièges à
pourvoir, il y avait 126 candidats députés nationaux. La
multiplicité des partis politiques (245 partis politiques
enregistrés par le Ministère de l'intérieur et
décentralisation en 2006) a permis aux citoyens d'y adhérer sans
problème. On en voit même qui appartiennent à deux ou trois
partis politiques en même temps, ou qui portent des effigies et
emblèmes des partis politiques auxquels ils n'appartiennent pas. C'est
dire qu'à Ngweshe, le fait d'être dans un parti politique n'est
pas un engagement politique, une détermination d'adhérer à
un idéal politique, à un projet de société
déterminé, mais c'est tout simplement être à
l'entente d'un poste politique rémunérateur, peu importe le parti
d'où il viendrait en premier lieu. Ces familles sont identifiables
à travers toute la chefferie, mais plus précisément aux
centres des groupements.
Les familles étudiées à travers cette
thèse se caractérisent aussi selon leurs
propriétés, leurs relations et leurs modes de
production :
Selon leurs propriétés
On peut distinguer cinq types des propriétaires au
sein de la chefferie :
· Le propriétaire en communauté
réelle : c'est par exemple le Mwami et tous ses chefs des
groupements et toute sa descendance qui sont les détenteurs du sol et
qui le distribuent à leurs sujets moyennant une redevance
coutumière appelée « kalinzi » qui
s'évalue traditionnellement en chèvres ou en vaches.
Actuellement, la vente de terrain se fait plus en argent et plus
spécifiquement en dollar américain qu'en bétail.
Même si l'unité de la transaction est la chèvre, cette
dernière est évaluée et même
surévaluée en dollars américains. Le statut des
propriétaires en communauté est entrain de s'effriter, car ils
ont presque tout vendu de façon qu'ils sont réduits en ce qu'on a
appelé au Moyen âge, « les rois sans terres ».
Mais, il y a encore tous ces marais qui appartiennent au Mwami et d'autres
domaines par- ci par- là à travers la chefferie.
· Le propriétaire privé mais
entravé : entrent dans cette catégorie, les paysans
qui ont acquis des terres de leurs seigneurs (mwami, chefs de groupement et
chefs des villages) et qui en disposent à leur guise mais qui, par
moment, sont limités lorsqu'ils veulent en vendre une portion, car la
redevance coutumière (kalinzi) peut n'avoir pas été
apurée totalement.
· Le propriétaire capitaliste : il
s'agit des gens qui ont acquis de grandes portions de terres et qui les
gèrent de façon très autonome. Ce sont des
propriétaires disposant de vastes plantations de théier ou de
quinquina : on peut citer les Plantations Irabata, Gombo, Cibeke,
Pharmakina, Bukina et d'autres particuliers tels que Nyamulinduka, Olive,
Mudwanga ... dont les domaines sont en jachère pour le moment.
· Le propriétaire étatique :
certains espaces appartiennent à l'Etat, c'est le cas des boisements
appartenant à la MAE (Mission anti - érosive), les espaces
scolaires, sanitaires, les bureaux administratifs de la chefferie, des
groupements, des postes administratifs, les casernes des policiers, etc.
· Le propriétaire collectif et social :
c'est une catégorie des personnes qui se sont constituées en
groupe et qui, de par des cotisations des membres ou un financement d'un
partenaire, ont pu acheter un lopin de terre qui est une
propriété du groupe. C'est le cas de certaines associations
locales de développement, des Eglises locales, etc.
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