WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'inscription d'un site naturel sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO comme moyen de protection de l'environnement : cas des chutes de la Karera et de la faille de Nyakazu au Burundi

( Télécharger le fichier original )
par Olivier Dismas NDAYAMBAJE
Université de Limoges  - Master en Droit International et Comparé de l'environnement (DICE)  2014
  

sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

UNIVERSITÉ DE LIMOGES
FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES ÉCONOMIQUES DE LIMOGES
PROGRAMME UNIVERSITÉ PAR SATELLITE
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

MASTER 2 DROIT INTERNATIONAL ET COMPARÉ DE L'ENVIRONNEMENT
Formation à distance, Campus Numérique « ENVIDROIT »

L'INSCRIPTION D'UN SITE NATUREL SUR LA LISTE DU
PATRIMOINE MONDIAL DE L'UNESCO COMME MOYEN DE
PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT : CAS DES CHUTES DE LA
KARERA ET DE LA FAILLE DE NYAKAZU AU BURUNDI

 

Mémoire présenté par Olivier-Dismas NDAYAMBAJE

Sous la direction de M. le Professeur Koffi AHADZI-NONOU, Président de l'Université de Lomé

AOUT / 2014

UNIVERSITÉ DE LIMOGES
FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES ÉCONOMIQUES DE LIMOGES
PROGRAMME UNIVERSITÉ PAR SATELLITE
AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

MASTER 2 DROIT INTERNATIONAL ET COMPARÉ DE L'ENVIRONNEMENT
Formation à distance, Campus Numérique « ENVIDROIT »

L'INSCRIPTION D'UN SITE NATUREL SUR LA LISTE DU

PATRIMOINE MONDIAL DE L'UNESCO COMME MOYEN DE

PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT : CAS DES CHUTES DE LA

KARERA ET DE LA FAILLE DE NYAKAZU AU BURUNDI

Mémoire présenté par Olivier-Dismas NDAYAMBAJE

Sous la direction de M. le Professeur Koffi AHADZI-NONOU, Président de l'Université de Lomé

AOUT / 2014

2

DEDICACE

A mes grands-parents ; A mes parents ;

A mes frères et soeurs.

II

REMERCIEMENTS

Nous remercions le Professeur Koffi AHADZI-NONOU pour avoir accepté d'encadrer avec professionnalisme notre travail et Monsieur François PELISSON pour sa disponibilité sans lasse à résoudre nos problèmes tout au long de notre formation.

Nos remerciements vont aussi à l'endroit de l'Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) pour avoir mis en place le programme de formation à distance (FOAD) et l'attribution des allocations d'études à distance pour nous alléger le poids des frais de formation.

Nous remercions également l'Ecole Nationale d'Administration (ENA) du Burundi à travers la personne de son Directeur, Dr André NDUWIMANA, pour tout le soutien tant matériel que financier qu'elle nous a accordé tout au long de la formation.

Nous exprimons également nos sentiments de gratitude envers Monsieur Ernest NAHIMANA, Chef de service Musée, Sites historiques et Monuments au Ministère de la Jeunesse, Sports et Culture (Burundi), pour toutes les informations utiles qu'il nous a fournies en vue de l'accomplissement de ce travail.

Nous tenons également à remercier Messaline, notre fiancée, pour ses encouragements et son soutien moral tout au long de cette formation.

Que tous nos collègues de formation trouvent ici l'expression de notre gratitude pour les débats animés aux cours de notre formation.

III

LISTE D'ABREVIATIONS

AP : Aire Protégé

BiF : Burundi Francs

FEM : Fonds pour l'Environnement Mondial

ICOMOS : Conseil international des monuments et des sites

ICCROM : Centre international d'études pour la conservation et la restauration

des biens culturels

INECN : Institut National pour l'Environnement et la Conservation de la Nature

ONG : Organisation Non Gouvernementale

PCH : Patrimoine Commun de l'Humanité

UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la

Culture

UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature

USA : United States of America

VUE : Valeur Universelle Exceptionnelle

iv

SOMMAIRE

DEDICACE i

REMERCIEMENTS ii

LISTE D'ABREVIATIONS iii

SOMMAIRE iv

INTRODUCTION GENERALE 1

Ière Partie : PROCESSUS D'INSCRIPTION DE LA FAILLE DE NYAKAZU ET DES CHUTES

DE KARERA SUR LA LISTE DU PATRIMOINE MONDIAL DE L'UNESCO 8

Chapitre 1 : LES CARACTERES DES SITES DE NYAKAZU ET KARERA ET LEURS

CONFORMITES AUX CRITERES D'EVALUATION 8

Chapitre 2 : LES ETAPES D'UNE INSCRIPTION 21

2ème Partie : LES DEFIS ET ENJEUX DE L'INSCRIPTION DE LA FAILLE DE NYAKAZU ET

DES CHUTES DE KARERA AU PATRIMOINE MONDIAL 34

Chapitre 1 : LES OBSTACLES AU CLASSEMENT 34

Chapitre 2 : LES ENJEUX DE L'INSCRIPTION 45

CONCLUSION 57

BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE 61

TABLE DES MATIERES 66

ANNEXES 69

1

INTRODUCTION GENERALE

Dès le début des années 70, la dégradation constante de l'environnement naturel a entraîné une prise de conscience généralisée de la gravité des atteintes que l'homme inflige à la nature. L'importance vitale pour l'humanité de la protection de l'environnement, tout comme l'action décisive d'un grand nombre d'organismes voués à la protection de l'environnement, a abouti, au fil des années, à l'adoption d'une importante réglementation juridique sur les questions relatives à la protection et à la préservation de l'environnement naturel1.

En effet, si quelques jalons sont posés plus tôt - telle la Convention de Paris relative à la protection des oiseaux utiles à l'agriculture de 1902 - , c'est véritablement dans la seconde moitié du XXème siècle, et en particulier depuis la fin des années 70, que les réglementations visant la protection de l'environnement connaissent une croissance rapide, de façon concomitante dans la plupart des Etats, « à la suite de la prise de conscience que notre planète est menacée par l'explosion démographique et ses conséquences, par l'impact d'une technologie toujours plus envahissante et par la multiplication désordonnée des activités humaines »2.

Simultanément, la conscience du caractère planétaire du danger et de la solidarité qui unit les éléments de l'environnement, méconnaissant les frontières politiques, stimule une coopération internationale. S'inscrivant d'abord dans un cadre bilatéral, celle-ci se manifeste rapidement aussi sur un plan multilatéral et donne naissance une activité réglementaire sans précédent par son ampleur et sa rapidité3.

1 La protection de l'environnement naturel en période de conflit armé, 31-12-1991 ARTICLE, REVUE INTERNATIONALE DE LA CROIX-ROUGE, 792, DE ANTOINE BOUVIER (Disponible sur http://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/5fzez4.htm; consulté le 11 août 2014)

2 A. Kiss, 1989. Droit international de l'environnement, Pedone, Paris, p. 5 cité par Maljean-Dubois S., La mise en oeuvre du droit international de l'environnement, N° 03/2003 | GOUVERNANCE MONDIALE (ex-Les notes de l'Iddri n°4) ; (Ceric), p 9

3 Maljean-Dubois S., La mise en oeuvre du droit international de l'environnement, N° 03/2003 | GOUVERNANCE MONDIALE (ex-Les notes de l'Iddri n°4) ; (Ceric), p10

2

Aujourd'hui, en faisant abstraction des traités bilatéraux, encore bien plus abondants, plus de cinq cents traités multilatéraux, pour l'essentiel régionaux, ont été adoptés dans le domaine de l'environnement. Plus de trois cents ont été négociés après 1972. La voie conventionnelle a permis de formaliser, secteur après secteur, domaine après domaine, des régimes internationaux, institutionnalisés, organisés et soutenus par des engagements financiers4.

De cette longue liste de Conventions de protection de l'environnement, une retient particulièrement notre attention. Il s'agit de la Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel, adoptée à Paris, le 16 novembre 1972.

La Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel est un texte juridique par lequel les États s'engagent à protéger sur leur territoire les monuments et les sites reconnus d'une valeur telle que leur sauvegarde concerne l'humanité dans son ensemble. Ces mêmes États sont également tenus de respecter le patrimoine de valeur universelle situé sur le territoire d'autres États et de coopérer, par le versement d'une contribution financière, à la sauvegarde de ce patrimoine dans les pays qui n'ont pas les moyens de l'assurer. Le nombre des États parties à la Convention du patrimoine mondial n'a cessé d'augmenter au fil des décennies (il s'élève à 185 pays en 2008)5.

La caractéristique la plus originale de la Convention de 1972 est de réunir dans un même document les notions de protection de la nature et de préservation des biens culturels. La Convention reconnaît l'interaction entre l'être humain et la nature et le besoin fondamental de préserver l'équilibre entre les deux6.

Concrètement, la convention définit le genre de sites naturels ou culturels dont on peut considérer l'inscription sur la liste du patrimoine mondial et fixe les devoirs des

4 Maljean-Dubois S., La mise en oeuvre du droit international de l'environnement, N° 03/2003 | GOUVERNANCE MONDIALE (ex-Les notes de l'Iddri n°4) ; (Ceric), p10 5 http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Convention_pour_la_protection_du_patrimoine_mondial_culturel_et_ naturel/103663 (consulté le 12 août 2014)

6 http://whc.unesco.org/fr/convention/ (consulté le 13 août 2014)

3

Etats parties dans l'identification de sites potentiels, ainsi que leur rôle dans la protection et la préservation des sites7.

Pour bien comprendre ce qu'est un « patrimoine mondial », « il convient d'expliquer la différence entre ce dernier et le Patrimoine Commun de l'Humanité, puisqu'à prime abord, le patrimoine naturel ressemble au PCH. Sous les deux concepts juridiques on retrouve l'obligation pour l'État dépositaire de protéger et d'éviter les dommages au milieu naturel au nom de l'humanité toute entière. L'apanage de l'humanité est au coeur des deux concepts afin de transmettre aux générations futures des sites naturels de qualité ayant préservé leur diversité biologique. Cependant, l'origine distincte de leurs instruments juridiques fait en sorte que, malgré des ressemblances, les objectifs de chaque concept sont différents »8. Il est vrai, le concept de «patrimoine mondial » apparaît comme un moyen d'application élargie du concept de « Patrimoine Commun de l'Humanité »9.

D'une part, les biens identifiés par l'expression « patrimoine mondial » s'entendent comme « l'héritage du passé dont nous profitons aujourd'hui et que nous transmettons aux générations à venir. Nos patrimoines culturel et naturel sont deux sources irremplaçables de vie et d'inspiration. Des lieux aussi extraordinaires et divers que les étendues sauvages du parc national de Serengeti en Afrique orientale, les Pyramides d'Egypte, la Grande Barrière d'Australie et les cathédrales baroques d'Amérique latine constituent le patrimoine de notre monde. Ce qui rend exceptionnel le concept de patrimoine mondial est son application universelle. Les sites du patrimoine mondial appartiennent à tous les peuples du monde, sans tenir compte du territoire sur lequel ils sont situés »10.

En fait, le patrimoine mondial se divise initialement en deux, le patrimoine culturel mondial et le patrimoine naturel. Le patrimoine culturel est défini comme les biens culturels présentant un intérêt exceptionnel qui nécessite leur préservation en tant

7 http://cms.unige.ch/isdd/spip.php?article46 (consulté le 13 août 2014)

8 MARTEL A., Le patrimoine commun de l'humanité: Solution possible à l'anthropocentrisme en droit international de l'environnement? Mémoire de maîtrise en Droit international, Université du Québec à Montréal ; Novembre 2012 ; p 85

9 MARTEL A., Op. Cit. ; p 73

10 http://whc.unesco.org/fr/apropos/ (consulté le 07 août 2014)

4

qu'élément du patrimoine mondial de l'humanité toute entière11. Le patrimoine naturel est défini comme les monuments naturels constitués par des formations physiques et biologiques ayant une valeur universelle exceptionnelle (VUE) du point de vue esthétique ou scientifique; ou encore des formations géologiques et physiographiques délimitées constituant l'habitat d' espèces animales ou végétales menacées qui ont une VUE du point de vue de la science ou de la conservation; ou encore des sites naturels ou des zones naturelles strictement délimitées qui ont une VUE au nom de la science, de la conservation ou de la beauté naturelle12.

D'autre part, le Patrimoine Commun de l'Humanité se définit comme un espace ou un bien appartenant à l'humanité tout entière et, partant, soustrait à l'appropriation exclusive des États. Le PCH permet donc un régime d'exploitation au profit de l'humanité par une entité distincte des États, transformant de facto l'humanité en possesseur. Par contre, son utilisation est restreinte à un petit nombre de situations (lune, planètes, fonds marins et l'Antarctique) déterminées par des conventions. Ce sont au sein de ces conventions internationales que la notion juridique qu'est le PCH s'est établie avec les six principes fondamentaux que nous lui connaissons actuellement. L'articulation du PCH s'effectue, en effet, autour de principes directeurs mutuellement interdépendants; la non-appropriation, l'usage pacifique, l'accessibilité à tous, la considération envers les générations futures, l'obligation pour toute exploitation d'être faite au nom de l'humanité et l'obligation de gestion faite par un organisme représentant l'intérêt de tous13.

L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) encourage l'identification, la protection et la préservation du patrimoine culturel et naturel à travers le monde considéré comme ayant une valeur exceptionnelle pour l'humanité.14.

En 2009, la Liste du patrimoine mondial comportait 890 biens constituant le patrimoine culturel et naturel considéré comme ayant une valeur universelle

11 Convention du Patrimoine mondial de l'UNESCO, 16 novembre, 1972, article 1

12 Convention du Patrimoine mondial de l'UNESCO, 16 novembre, 1972, article 2

13 MARTEL A., Le patrimoine commun de l'humanité: Solution possible à l'anthropocentrisme en droit international de l'environnement? Mémoire de maîtrise en Droit international, Université du Québec à Montréal ; Novembre 2012 ; p 50-51

14 http://whc.unesco.org/fr/apropos/ (consulté le 07 août 2014)

5

exceptionnelle. Cette liste comprend 689 biens culturels, 176 naturels et 25 mixtes (répartis dans 148 Etats parties)15.

A partir de cette liste, le constat est que le patrimoine naturel est sous représenté. C'est ainsi que les Orientations devant guider la mise en oeuvre de la Convention du patrimoine mondial insistent sur le fait que « Tous les efforts doivent être déployés pour maintenir un équilibre raisonnable entre le patrimoine culturel et naturel sur la Liste du patrimoine mondial »16. Sur ce, les biens du patrimoine naturel doivent être privilégiés par rapport aux biens du patrimoine culturel. En plus, les « propositions d'inscription de biens soumises par des États parties n'ayant pas de biens inscrits sur la Liste » doivent être analysées en priorité.

En tout, l'idée de départ est que « le patrimoine culturel et le patrimoine naturel sont de plus en plus menacés de destruction non seulement par les causes traditionnelles de dégradation mais encore par l'évolution de la vie sociale et économique qui les aggrave par des phénomènes d'altération ou de destruction encore plus redoutables »17. Et après un constat que « la protection de ce patrimoine à l'échelon national reste souvent incomplète en raison de l'ampleur des moyens qu'elle nécessite et de l'insuffisance des ressources économiques, scientifiques et techniques du pays sur le territoire duquel se trouve le bien à sauvegarder »18 ; la Convention de 1972 de l'UNESCO rappelle « qu'il est indispensable d'adopter à cet effet de nouvelles dispositions conventionnelles établissant un système efficace de protection collective du patrimoine culturel et naturel de valeur universelle exceptionnelle organisé d'une façon permanente et selon des méthodes scientifiques et modernes »19.

Dans ces mêmes dispositions, la Convention prévoit une procédure d'inscription de biens sur la Liste du patrimoine mondial dans le but d'assurer la protection et la

15 http://cms.unige.ch/isdd/spip.php?article46 (consulté le 13 août 2014)

16 Orientations ; § 57

17 Convention du Patrimoine mondial de l'UNESCO, 16 novembre, 1972, Préambule

18 Idem

19 Idem

6

conservation des biens du patrimoine mondial par, entre autre, l'octroi de l'assistance internationale issue du Fonds Mondial de la Nature20.

En guise de conséquence, seuls les pays qui ont signé la Convention de 1972 de l'UNESCO concernant la protection du Patrimoine mondial, culturel et naturel et se sont par-là même engagés à protéger leur patrimoine naturel et culturel peuvent soumettre des propositions d'inscription de biens situés sur leur territoire sur la Liste du patrimoine mondial. L'inscription sur la Liste du Patrimoine mondial est avant tout un engagement de conservation et de valorisation, qui implique en outre de nombreuses obligations en termes de gestion du site et d'aménagement du territoire21.

Selon Françoise Benhamou, la labellisation « patrimoine de l'humanité » des biens et sites tient compte des données culturelles et entraîne « la mise en oeuvre de logiques de développement économique centrées sur le tourisme et la « mise en valeur » de ces sites » (BENHAMOU, 2010)22. Plus important, la conservation et la gestion de ce patrimoine doivent reposer un cadre normatif adéquat.

Peut-on directement en déduire que l'inscription au patrimoine mondial de l'UNESCO apporterait donc une plus-value dans la protection et la gestion de l'environnement des sites de la Faille de NYAKAZU et des Chutes de KARERA (Nyakayi 1 et 2, Mwaro, Karera et 2) au Burundi ? Quelle procédure faudrait-il suivre pour les faire inscrire si jamais ils répondent aux critères fixés par la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel de 1972?

Le patrimoine naturel burundais est constitué d'écosystèmes d'une singularité unique au monde entier ce qui justifie le besoin de leur protection particulière. Le Burundi conscient de ce besoin a déjà élaboré une « liste indicative » d'une dizaine de biens

20 Orientations ; § 1

21 Quelle est la procédure pour l'inscription d'un bien sur la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO (Convention de 1972 concernant la protection du Patrimoine mondial, culturel et naturel) ? Disponible sur : http://www.culturecommunication.gouv.fr/Aides-demarches/Foire-aux-questions/Europe-et-international/Quelle-est-la-procedure-pour-l-inscription-d-un-bien-sur-la-liste-du-patrimoine-mondial-de-l-UNESCO-Convention-de-1972-concernant-la-protection-du-patrimoine-mondial-culturel-et-naturel (consulté le 07 août 2014)

22 Benhamou F., « L'inscription au patrimoine mondial de l'humanité » La force d'un langage à l'appui d'une promesse de développement, Revue Tiers Monde, 2010/2 n° 202, p. 113-130. DOI : 10.3917/rtm.202.0113

7

du patrimoine naturel, culturel ou mixte ayant une valeur exceptionnelle. Néanmoins, aucun de ses biens n'a été jusqu'ici inscrit à la Liste du patrimoine mondial. L'étude de cas des chutes de Karera et de la faille de Nyakazu permettra de comprendre les défis que le Burundi connaît en matière de protection de son patrimoine naturel et la contribution que cela peut avoir dans la gestion et la conservation de son environnement.

Ainsi, l'analyse du processus d'inscription de la faille de Nyakazu et des chutes de Karera sur le patrimoine mondial de l'UNESCO (Ière Partie) fera ressortir les étapes que le dossier a déjà franchies et les étapes restant à franchir pour arriver à la dernière issue, en espérant qu'elle débouche à une inscription23.

Ensuite, il convient aussi de comprendre qu'il ne faut pas seulement analyser l'inscription comme une procédure mais faudra-t-il aussi considérer ses retombées. Estimant qu'une telle inscription peut contribuer dans l'amélioration de la protection et de la gestion de l'environnement du site comme une part d'enjeux de l'inscription de la faille de Nyakazu et des chutes de Karera au patrimoine mondial, sans oublier les défis à relever pour y arriver (2ème partie), ceci ne manquerait pas d'aider à démontrer les préoccupations écologiques du Burundi et son attachement à la mise en oeuvre de la la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel de 1972.

23 On reconnaît que la Décision du Comité du patrimoine mondial peut être soit une inscription, soit une décision de ne pas inscrire, soit un renvoi des propositions d'inscription, soit des propositions d'inscription différées

8

Ière Partie : PROCESSUS D'INSCRIPTION DE LA FAILLE DE NYAKAZU ET DES CHUTES DE KARERA SUR LA LISTE DU PATRIMOINE MONDIAL DE L'UNESCO

Dans le processus d'inscription de la faille de Nyakazu et des chutes de Karera sur la liste du Patrimoine mondial de l'UNESCO, il sera indispensable de vérifier préalablement si ce site répond au moins à l'un des critères définis dans la Convention de 1972 pour confirmer qu'il a une valeur universelle exceptionnelle24 (Chap. Ier), puis suivra la présentation des étapes de ce processus (Chap. II).

Chapitre 1 : LES CARACTERES DES SITES DE NYAKAZU ET KARERA ET LEURS CONFORMITES AUX CRITERES D'EVALUATION

Dans le but de vérifier la conformité du site étudié aux critères de sélection selon la Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel du 16 novembre 1972 ; d'abord, un exposé de ces critères sera nécessaire (section 1) afin de faire un rapprochement avec la description du site (section 2).

Section 1 : Les critères de sélection selon la Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel du 16 novembre 1972

Les critères et les conditions pour l'inscription de biens sur la Liste du patrimoine mondial ont été élaborés pour évaluer la valeur universelle exceptionnelle des biens, et guider les Etats parties dans la protection et la gestion des biens du patrimoine mondial25.

24 UNESCO, Orientations devant guider la mise en oeuvre de la Convention du patrimoine mondial, WHC.12/01 ; juillet 2012, § 77

25 UNESCO, Orientations, Op. Cit. ; p 2

9

§ 1. Contenu des critères

Ces critères étaient précédemment présentés sous forme de deux ensembles séparés de critères - les critères (i)-(vi) pour le patrimoine culturel et (i)-(iv) pour le patrimoine naturel. La 6e session extraordinaire du Comité du patrimoine mondial a décidé de classer ensemble les dix critères (Décision 6 EXT.COM 5.1)26.

A. Exposé des critères

Le Comité du patrimoine mondial définit les critères sur la base desquels un bien du patrimoine culturel et naturel peut être inscrit dans la liste du patrimoine mondial27.

Le Comité considère qu'un bien a une valeur universelle exceptionnelle si ce bien répond au moins à l'un des critères suivants28. En conséquence, les biens proposés doivent :

i. représenter un chef-d'oeuvre du génie créateur humain ;

ii. témoigner d'un échange d'influences considérable pendant une période
donnée ou dans une aire culturelle déterminée, sur le développement de l'architecture ou de la technologie, des arts monumentaux, de la planification des villes ou de la création de paysages ;

iii. apporter un témoignage unique ou du moins exceptionnel sur une tradition culturelle ou une civilisation vivante ou disparue ;

iv. offrir un exemple éminent d'un type de construction ou d'ensemble architectural ou technologique ou de paysage illustrant une période ou des périodes significative(s) de l'histoire humaine ;

v. être un exemple éminent d'établissement humain traditionnel, de l'utilisation traditionnelle du territoire ou de la mer, qui soit représentatif d'une culture (ou de cultures), ou de l'interaction humaine avec

26 UNESCO, Orientations, Op. Cit. ; § 77 (Note en marge)

27 Convention du Patrimoine mondial de l'UNESCO, 16 novembre, 1972, article 11 §5

28 UNESCO, Orientations, Op. Cit. ; § 77

10

l'environnement, spécialement quand celui-ci est devenu vulnérable sous l'impact d'une mutation irréversible ;

vi. être directement ou matériellement associé à des événements ou des traditions vivantes, des idées, des croyances ou des oeuvres artistiques et littéraires ayant une signification universelle exceptionnelle (le Comité considère que ce critère doit de préférence être utilisé conjointement avec d'autres critères) ;

vii. représenter des phénomènes naturels remarquables ou des aires d'une beauté naturelle et d'une importance esthétique exceptionnelles ;

viii. être des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l'histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d'éléments géomorphiques ou physiographiques ayant une grande signification ;

ix. être des exemples éminemment représentatifs de processus écologiques et biologiques en cours dans l'évolution et le développement des écosystèmes et communautés de plantes et d'animaux terrestres, aquatiques, côtiers et marins ;

x. contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants
pour la conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation.

Après un bref exposé des critères d'évaluation de la valeur universelle exceptionnelle d'un bien, nous essaierons de relever les critères qui correspondent mieux au site des chutes de Karera et de la faille de Nyakazu.

B. Examen des sites par rapport aux critères

Les chutes de la Karera et la faille de Nyakazu sont susceptibles d'être proposées pour inscription selon les critères vi et vii. Selon les constats et recommandations de

11

l'Atelier Technique « Harmonisation des Listes Indicatives d'Afrique Centrale » tenu à Libreville, Gabon, en dates du 06-09 décembre 201029, le critère vii décrit parfaitement le bien alors que le vi porte des faiblesses. Ainsi, il convient d'enrichir le critère vi par un examen supplémentaire des documents spécialisés et ajouter le critère viii comme critère supplémentaire.

La combinaison des critères vi et vii font des chutes de la Karera et de la faille de Nyakazu en font un site mixte.

+ Selon le critère vi qui stipule qu'un site doit « être directement ou matériellement associé à des événements ou des traditions vivantes, des idées, des croyances ou des oeuvres artistiques et littéraires ayant une signification universelle exceptionnelle (le Comité considère que ce critère doit de préférence être utilisé conjointement avec d'autres critères) », il est intéressant de rappeler qu'en 1914, au début de la Première Guerre mondiale, Nyakazu, situé dans la province de Rutana, au Sud Est du Burundi, non loin de la frontière avec la Tanzanie, était un poste militaire allemand construit pour contrôler toute la partie orientale du Burundi. Le plateau de Nkoma sur lequel il a été édifié aurait été, dit-on, "entaillé par les bottes des soldats allemands en fuite devant les forces belges" d'où l'appellation de "faille aux Allemands". Depuis le départ des allemands, le site de Nyakazu, devenu un site historique, est surtout utilisé par l'armée burundaise pour passer les épreuves du brevet commando30. Bref, cette faille présente une structure exceptionnelle et on y trouve des vestiges historiques du fort allemand. Et du côté des chutes, il s'y trouve une grotte érigée en un lieu de culte et les populations de différentes régions viennent se recueillir. En plus, historiquement, les Chutes de Karera et les Failles de Nyakazu se localisent dans la région de Nkoma qui a longtemps gardé des vestiges historiques et culturels d'une civilisation monarchique ancienne. C'est en effet le massif de

29 NZAMBA NZAMBA T.P. & NYANGILA J., RAPPORT DE L'ATELIER TECHNIQUE « HARMONISATION DES LISTES INDICATIVES D'AFRIQUE CENTRALE », Libreville, Gabon, 06-09 décembre 2010

30 http://www.souffle-et-chemins.fr/index.php?option=com content&task=view&id=34&Itemid=2 (consulté le 25 juillet 2014 à 11H40').

12

Nkoma qui abrite, à la fin du 16ème siècle, la première lignée royale avec le premier roi du Burundi, Ntare Rushatsi Cambarantama.

+ Pour le critère vii, le bien doit « représenter des phénomènes naturels remarquables ou des aires d'une beauté naturelle et d'une importance esthétique exceptionnelles ». Les chutes et la grotte de Karera, d'une part et la faille et la forêt de Nyakazu, d'autre part constituent deux aspects naturels exceptionnels. Leur aspect esthétique les rapproche d'autres monuments d'une beauté similaire. Les chutes de Karera qui ont une hauteur de 80

m sont comparables à celles du Niagara aux USA et au Canada qui sont constituées de cataractes de 51 m de haut aux USA et de 49 m au Canada. Les deux ont respectivement 790 m et 305 m de front. La faille de Nyakazu rappelle la grande faille de Midori produite pendant le séisme de 1891 au Japon, mais celle de Nyakazu s'impose par sa longueur de 112 m31.

+ Et d'après le critère viii, il est dit qu'un bien à inscrire sur la liste du patrimoine mondial doit « être des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l'histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d'éléments géomorphiques ou physiographiques ayant une grande signification ». La faille de Nyakazu s'ouvre sur la dépression du Kumoso. C'est une entaille dans le massif de Nkoma qui surplombe la plaine et se prolonge à la frontière avec la Tanzanie. Cette faille est d'origine tectonique récente et s'étend sur 600 ha32. En effet, les failles de l'Est du Burundi sont le résultat des mouvements tectoniques qui se sont manifestés par le basculement des massifs quartzitiques de Nkoma et l'effondrement de l'ensemble de la région du Kumoso. L'âge géochronologique du milieu est évalué jusqu'au précambrien moyen faisant partie des roches du domaine du Burundien33. Il s'agit d'une structure bien individualisée qui surplombe la dépression du Kumoso. (...) le massif du Nkoma correspond à une mégastructure morphologique bien circonscrite séparée à l'Est de la

31 http://whc.unesco.org/fr/listesindicatives/5150/ (consulté le 26 juillet 2014 à 10H30').

32 http://whc.unesco.org/fr/listesindicatives/5150 (consulté, le 18 août 2014)

33 http://www.papaco.org/METT%20Monuments.pdf (consulté, le 19 août 2014)

13

dépression du Kumoso par une zone de rupture de pente et du reste des plateaux centraux par deux cours d'eau principaux à savoir la Nyamabuye au Nord et Musagara Muyovozi au Sud. Sur le franc oriental du massif du Nkoma, le mouvement tectonique a donné naissance à des fractures avec une multitude des failles dont celles de Nyakazu34.

Il convient d'ajouter que d'après l'étude faite en 2008 par A. ESSESE, Expert pour le Centre du Patrimoine Mondial de l'UNESCO, la justification de la valeur universelle exceptionnelle du site du Massif Sacré du Nkoma peut être faite à base des critères iii, vi, viii et x35. Des difficultés de choix plus convaincant demeurent. Faudra-t-il alors que l'équipe chargée de l'élaboration du dossier de soumission pour inscription retiennent les critères les plus pertinents.

Enfin, il convient aussi de signaler que « pour être considéré d'une valeur universelle exceptionnelle, un bien doit également répondre aux conditions d'intégrité et/ou d'authenticité et doit bénéficier d'un système adapté de protection et de gestion pour assurer sa sauvegarde »36.

§ 2. Intérêt de l'intégrité et de l'authenticité d'un site

Les critères sont complétés par l'ajout de conditions d'authenticité et d'intégrité et par la nécessité d'un système de sauvegarde efficace37. En effet, pour être considéré d'une valeur universelle exceptionnelle, un bien doit également répondre aux conditions d'intégrité et/ou d'authenticité et doit bénéficier d'un système adapté de protection et de gestion pour assurer sa sauvegarde38.

34 INECN, Plan de gestion et d'aménagement des monuments naturels des chutes de Karera et des failles de Nyakazu, Bujumbura, Septembre 2009

35 Essessé, E. (2008) - Rapport de mission. Justification de la valeur universelle exceptionnelle pour la proposition d'inscription du site : « Les chutes et la grotte de Karera. La faille de Nyakazu, sa chute et sa forêt » sur la Liste du patrimoine mondial, p 33

36 Orientations, Op. Cit. ; §78

37 SEVERO M., La sélection du patrimoine mondial : une analyse des systèmes d'information de l'UNESCO, dans La sélection patrimoniale, Cahier de l'Institut du patrimoine de l'UQAM, n° 13, Editions Multimondes, p. 181-196, 2011 ; p 4

38 UNESCO, Orientations ... ; op. cit., p 23

14

sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein