Pret-a-porter Made in France : quels facteurs pourraient amplifier la dynamique des relocalisations ?( Télécharger le fichier original )par Alyona CHARLES Burgundy School of Business - Executive ESC 2015 |
(9) Améliorer la compétitivité par la technologie (Tissus High Tech)La haute Technologie produit semble une fausse bonne idée à court terme. D'ailleurs, les mille premières entreprises dans le monde qui investissent le plus dans l'innovation, ont dépensé 603 milliards de dollars pour leur R&D en 2011. Le cabinet Booz &Company a identifié une très faible corrélation entre investissements en R&D et les performances. Dans les faits, même s'il est en croissance et bien représenté en France, le marché des fibres techniques reste à la marge (de l'ordre de 3%). Sur ce marché déjà limité, les textiles innovants fabriqués en France sont eux aussi à la marge. Même avec des croissances à deux chiffres, ils ne représentent donc pas à court terme un gisement d'évolution majeure pour le MIF d'autant plus que la production de fibres techniques est extrêmement gourmande en ressources (MP, énergie et capital). De ce fait, leur exploitation à grande échelle n'est ni souhaitable ni soutenable et ne devrait concerner que les applications où ils sont strictement nécessaires. Globalement, le marché des textiles techniques représente 6,1 Md€ en France22(*). Sur cette production, seuls 7% sont destinés à l'habillement (430M€). Les textiles techniques destinés à l'habillement ne représentent donc qu'une niche de l'ordre de 3% d'un marché de 15 Md€ en France. Malgré des chroniques enthousiastes, ce marché est très volatile et, in fine, sa croissance moyenne sur les 10 dernières années (2004-2014) s'établit à -3,67%. Graphique 15 : Taux de croissance annuel moyen des CA par domaine d'application De plus, il n'existe pas de statistiques fiables pour évaluer la part des textiles vraiment innovants sur le petit marché des textiles techniques (le GoreTex est par exemple utilisé depuis 30 ans, n'est plus vraiment très innovant et conserve par nature des applications limitées). Une innovation de rupture reste néanmoins possible, observons quelques candidats : Les cosméto-textiles : par exemple, des shorts amincissants, des ceintures abdominales raffermissantes ou encore des gants antitaches et anti-âge (gants Hand-Filler de Filorga). Comment cela fonctionne-t-il ? Par une action « textile »gainant ou massant, obtenue par un tissage spécifique associée à une action « cosmétique ", où les actifs sont soit micro-encapsulés soit enduits sur le tissu comme le proposent les chaussettes et les gants Spa Adoucissants de Sephora. D'emblée, il nous semble que ces débouchés à usages unique ou limités dans le temps et incompatibles avec le lavage resteront à la marge. Les « smart »textiles : La startup Cityzen Sciences23(*) a été créée en 2010. Chef de file du consortium Smart Sensing (CA 2013- 4 700€). Grâce à l'important soutien de BPI France, Smart Sensing propose des « vêtements connectés » capables d'effectuer le monitoring d'individus (gamme destinée au monde sportif professionnel et grand public). Le textile en lui-même, n'est pas innovant, il s'agit de grands communicants chasseurs de prime visant à lever des fonds en intégrant au vêtement des micro-capteurs biométrique communs (utilisés pour les électrocardiogrammes...) pour les relier ensuite à un smartphone. Les textiles-traités : l'exemple de The Best ShirtEver24(*) (campagne Kickstarter à $119) estséduisant. C'est une chemise en tissu antitache, respirant, imperméable, lavable à la machine. Selon son créateur, le PRI est 200 à 300% supérieur car le traitement doit être effectué très en amont de la filière, au moment du filage du coton naturel et après teinture (ce qui impose des grandes séries ET des variétés de couleur limitée : Peu de flexibilité et de souplesse vis-à-vis de la mode). Innovation discutable : L'innovation est de plus relative puisque les textiles huilés (à base d'huile de lin ou de cire d'abeille-veste de chasse imperméable) ou encore les revêtements polyuréthane hydrofuge sont connus et exploités depuis longtemps. Accessoirement, tous ces traitements ont une tenue dans le temps et une résistance au lavage limitée. Enfin, quid des impacts écologiques (déchets, recyclage) ? Plus récemment, l'Institut Royal de Technologies de Melbourne (RMIT) a annoncé travailler sur des revêtements à base de nanoparticules métalliques afin de rendre le textile autonettoyant à la lumière. Cet effet d'annonce ne doit pas occulter les travaux antérieurs de 2011 menés par un chercheur Français du GEMTEX de Roubaix en collaboration avec le laboratoire des matériaux céramiques et procédés associés de Maubeuge et Probiogem, le laboratoire de microbiologie de Lille. Les fibres textiles étaient traitées dans un bain chimique, où étaient déposées des nano aiguilles d'oxyde de zinc. Il s'agit de recherches fondamentales qui 5 ans après n'ont pas encore trouvé les débouchésespérés. De plus les nanoparticules sont fortement suspectées d'avoir des impacts négatifs sur l'environnement et la santé. Quoi qu'il en soit, les surcouts de production imposent donc la vente en direct (hors circuit de détail traditionnel) ou sur des marchés de niche en différenciation. La faible flexibilité des procédés limite la fraicheur et la largeur de gamme (« slow fashion »). Le tableau ci-après illustre avec des chiffres approximatifs combien ce modèle de « textile innovant » semble plutôt difficile à appliquer dans le cadre d'une production « MIF » grande consommation. Tableau 4 : Evaluation de la marge restante pour une chemise BSE qui serait MIF * 22 http://www.textilestechniquesenfrance.com/tableau-de-bord-conjoncturel-decembre-2015.html, visitée le 25/10/2016 * 23 http://www.smartsensing.fr/smart-sensing/, visitée le 25/10/2016 * 24 https://www.kickstarter.com/projects/1932357265/the-best-shirt-ever/description, Source visitée le 29/10/2016 |
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