CHAPITRE V
PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS.
5.1 Aspect financier de l'activité de taxi-moto
dans la ville des Cayes.
Dans notre enquête, nous étions
intéressés à l'activité que faisaient nos
enquêtés avant de devenir chauffeurs de taxi-motocyclette. Ils
nous ont laissés comprendre que cette activité répond au
mieux à leurs besoins quotidiens d'où, le taxi-motocyclette est
une source de financement.
32 % des chauffeurs affirme qu'ils oeuvraient dans
l'agriculture et/ou dans l'élevage avant de devenir chauffeur de
taxi-moto. Certains d'entre-eux exercent encore l'agriculture et
l'élevage comme activités parallèle à celle de
taxi. D'autres au contraire, affirment qu'ils sont désormais
attachés à l'activité de taxi parce que, l'agriculture et
l'élevage deviennent peu rentables.
Soulignons qu'un enquêté qui exerce
l'activité de taxi-moto pendant seulement 2 mois nous a confié
qu'il venait de vendre un de ses boeufs pour s'acheter la moto de seconde main
avec laquelle il travaille.
18% des enquêtés exerçait
l'activité de maçonnerie et 22 % celle de ferronnerie. Ces
citoyens affirment qu'ils sont obligés désormais d'être
chauffeurs de taxi parce que leurs professions (maçonnerie et
ferronnerie) ne leur permettent pas d'entrer assez de revenus pour qu'ils
puissent prendre soin quotidiennement de leur famille.
Enfin, sont classés dans la catégorie «
autres » tous ceux qui ont répondu qu'ils faisaient toutes sortes
de travail pour survivre, et rien de particulier, avant de devenir chauffeurs
de taxi-motocyclettes. Nous en avons dénombré 14 soit un taux de
28%.
Ces données ont suscité notre curiosité
en ce qui concerne la rentabilité d'investir dans un taxi-moto aux
Cayes.
38
5.2 Tableau 1 : Calcul de la rentabilité
d'investir dans un taxi-
motocyclette aux Cayes.
Selon le modèle de Dupont, le rendement de l'actif
total (ROI) est le quotient du bénéfice net par l'actif total.
D'où,
Durée du contrat n= 286 jours
(11 mois)
|
Année du
véhicule : 1
|
Versement (V) V= 200 HTG/jours
|
Chiffre d'Affaire (CA) CA = V*n
|
Bénéfice net = CA-PR
|
Prix d'achat
|
35 000
|
|
|
|
|
Enregistrement SCCV
|
500
|
Assurance40
|
915
|
Plaques
|
522
|
Droits spéciaux
|
117
|
Matricule fiscale
|
300
|
Graissage
|
250
|
Maintenance
|
500
|
TOTAL
|
38 104 (PR)
|
57 200
|
19 096
|
|
|
|
Source : l'auteur, d'après l'enquête en
2014
D'où l'équation : devient ROI= 0.5112. Ce qui
veut
dire que l'investissement de 38 104 gourdes dans un
taxi-motocyclette permet de gagner 19096 gourdes dans une durée de 11
mois soit 51, 12 % du capital investi.
Après la fin du contrat, la motocyclette qui est
désormais la propriété de son chauffeur-contractuel
possède, selon son état, une valeur marchande au voisinage de 20
000 gourdes, le plus souvent. Nous pouvons facilement comprendre que lorsqu'un
propriétaire est à la fois chauffeur il gagne au bout de onze
(11) non seulement le retour sur investissement mais aussi, la valeur marchande
de la moto et la recette de tous les dimanches.
40Ici, la prime d'assurance a été
divisée en deux du fait qu'elle doit être payée par le
propriétaire et le chauffeur de taxi-moto selon le contrat.
39
5.3 Le taxi-moto aux Cayes : source
d'insécurité routière et physique.
Dans la ville des Cayes, il est très facile de
constater que les taxis-motocyclettes constituent une source
d'insécurité pour les piétons. Car, certains marchands
occupent les trottoirs (annexe III) obligeant ainsi les piétons à
marcher sur la chaussée. Ce qui rend la circulation des voitures et des
motocyclettes plus difficile. A cet effet, nous constatons, aux heures de
pointes, des écoliers qui éprouvent des difficultés
à marcher et à traverser les rues des Cayes. Personnellement,
nous connaissons aussi des piétons qui ont déjà
été heurtés par des taxi-motocyclettes. Dans l'un des cas,
la victime était décédée quelques heures plus tard
à l'HIC. Donc, la mairie des Cayes doit surtout garder un oeil ouvert
sur les marchands qui s'étalent sur les trottoirs compliquant ainsi la
circulation des véhicules.
Rappelons que, l'article 3 de la Déclaration
Universelle des Droits de l'homme du 10 décembre 1948 stipule que :
« tout individu a droit à la vie, à la liberté et
à la sureté de sa personne ». Ceci doit être
l'une des préoccupations des autorités.
Au moment de notre enquête, nous avons interrogé
les chauffeurs de taxis-motocyclettes sur le climat d'insécurité
qui commence à développer dans la ville des Cayes. A la question
: « Pensez-vous que les taxis sont aussi sources
d'insécurité dans la ville ? », 70% répondent
positivement. Ils ne confirment pas pour autant que les chauffeurs de taxis
participent à des actes d'insécurité dans la ville mais
ils sont conscients que la conjoncture de cette activité est un facteur
favorable à l'insécurité. Les 30% qui ont répondu
non à cette question, sont aussi d'avis du fait qu'ils ajoutent à
leurs réponses qu'il n'y a pas que les taxis qui utilisent une
motocyclette aux Cayes. Donc, la motocyclette en général est une
source d'insécurité41.
Nous avons été à la Section
Départementale de la Police Judiciaire (SDPJ). Le responsable de service
(SDPJ)42 nous a montré des motocyclettes (annexe III) qui
sont effectivement impliqués dans des cas de meurtre, de transport des
produits volés, de viols et autres cas d'infractions pénales. Ces
motocyclettes sont parfois abandonnées sur les lieux du crime ou bien
elles sont promptement arrêtées par la police à la suite
des informations données par la
41Selon nos enquêtés.
42Il ne veut pas que son nom soit cité.
40
population. Dans le cas de l'assassinat du très
regretté Agronome Jean-Yves Banatte tout récemment (avril 2015),
un chauffeur de taxi-motocyclette a été aussi arrêté
parce qu'il tentait de s'enfuir avec un présumé coupable dans
cette affaire43. Donc, à travers notre recherche, nous
pouvons confirmer que la motocyclette constitue vraiment une source
d'insécurité et mérite pour cela un contrôle plus
strict en matière de circulation de la part des pouvoirs publics.
5.4 Chauffeurs de taxi-motocyclettes et
équipements.
Seulement 12 % des chauffeurs de taxi-moto
enquêtés soit un total de 6 sur 50 possèdent leur permis de
conduire au moment de l'enquête. Ces chauffeurs affirment qu'il n'y a pas
de permis de conduire pour les motocyclettes. D'ailleurs, les permis des
chauffeurs qui ont en sont ceux délivrés pour les voitures (type
A) avec une mention spéciale indiquant qu'ils peuvent aussi conduire des
motocyclettes (type AC : A pour voiture/ C : pour moto). Parfois, le service de
circulation leur donne une autorisation de circuler à moto sur une
feuille de papier de 8 1/2 par 11 qui coûte 150 gourdes. Cette
autorisation doit être renouvelée chaque mois.
2%, soit un seul sur les 50 enquêtés
possédait son casque au moment de l'enquête. Les autres ont
estimé que le port du casque est ennuyant. Le casque, aux dires de ces
chauffeurs, fait trop chaud au cours de la journée.
80% des chauffeurs de taxi-motocyclette n'avait pas de plaques
et de prime d'assurance valide au moment de l'enquête. Selon eux, la
plaque et la prime d'assurance coûtent trop chères. Ils ne gagnent
pas assez, d'après eux, pour s'en procurer. Nous constatons aussi que
parfois c'est le service de circulation de la PNH qui n'a pas assez de plaques
pour desservir la population. A cet égard, le responsable du Service de
Circulation de la Police Nationale nous confie que c'est parce que le
phénomène de taxi-motocyclette dépasse l'état
haïtien actuellement. En effet, d'après le responsable du SCCV, la
commande de plaque pour motocyclette est faite habituellement selon une
estimation de la demande pour des services privés mais non pas pour les
taxis. C'est ce qui explique cette rupture de stocks à chaque fois :
trop de gens se lancent dans le secteur taxi-moto ces derniers jours (annexe
II, tableau 4).
43Selon les propos du responsable de la Section
Départementale de la Police Judiciaire (SDPJ) le 28 mai 2015.
41
43 sur 50 enquêtés soit 86% du total
n'appartiennent à aucun syndicat. La raison, selon ces chauffeurs, c'est
que les syndicats ne s'inquiètent pas des problèmes des membres.
Les syndicats, affirment-ils, s'occupent plutôt des affaires politiques
au lieu de s'occuper des problèmes des adhérents. Le gilet que
portent les chauffeurs appartient à des syndicats et permet juste de
voir qu'il s'agit d'un taxi et rien d'autre, soutiennent certains
enquêtés (annexe II, tableau 5).
5.5 Niveau d'éducation des
enquêtés.
Le niveau d'éducation des chauffeurs de taxi-moto aux
Cayes explique en partie le non-respect du code de la route. En effet, 86% des
enquêtés atteignent la 9ème année
fondamentale. 60% soit un effectif de 30 sur 50 arrive seulement au niveau
primaire. Donc, il n'est pas tout à fait facile de faire respecter le
code de la route à ces gens-là qui n'ont pas vraiment acquis une
culture du respect des normes à l'école. Tout cela explique
pourquoi tant de problèmes dans le secteur taxi-motocyclette. Il faudra
donc être patient avec eux et trouver un moyen efficace pour les
apprendre le code de la route. L'alternative est la formation à travers
des séminaires et des émissions
radio-télédiffusées.
26 % des chauffeurs de taxi-moto enquêtés, soit
13 atteignent le niveau de secondaire premier cycle. Le reste, soit 14 %
représentant 7 chauffeurs sur 50 arrivent en secondaire deuxième
cycle. Il est important de signaler qu'il n'y a pas de chauffeur de taxi-moto
atteignant le niveau universitaire parmi nos enquêtés en avril
2014 (annexe II, tableau 6).
5.6 Tranches d'âges des
enquêtés.
La majorité des chauffeurs de taxi-motocyclette aux
Cayes sont des jeunes. Selon notre enquête, l'âge des
enquêtés est reparti en 5 classes. La classe comprise entre 26 et
35 ans contient à elle seule 40 % des enquêtés soit un
total de 20 sur 50. 60% de ces chauffeurs de taxi-moto soit un total de 30 sur
50 enquêtés sont âgés de moins de 36 ans. Ce qui nous
laisse comprendre que la jeunesse Cayenne s'intéresse beaucoup à
cette activité pour répondre à leurs besoins quotidiens
(annexe II, tableau 7).
42
5.7 Présentation de l'Association des
Motocyclistes-Taxis du Sud.
Aucun cadre légal n'est disponible pour le
fonctionnement des taxis-motos. Cependant, l'Association des
Motocyclistes-Taxis du Sud (AMTS) dispose d'une constitution. Cette association
regroupe 50 membres actifs dont 44 chauffeurs (avril 2014). Les six autres sont
des femmes qui ont toutes les mêmes droits que les hommes. Mais elles ne
conduisent pas de motocyclettes. 68% de ces chauffeurs de taxi ont des plaques
et assurances. En 2012, seulement un seul chauffeur a été
accidenté et en 2013, aucun cas d'accident n'a été
enregistré au sein de l'association. Ce résultat est dû
grâce à la bonne formation des chauffeurs qui se réunissent
chaque dimanche à 2h pm pour échanger des idées.
L'association contient des membres appelés membres
d'honneur. Ces derniers ne sont pas des chauffeurs de taxis, mais plutôt
des notables de la ville des Cayes qui patronnent l'association. Ils apportent
leurs idées, leurs argents et tous autres moyens utiles au bon
fonctionnement de l'association. En cas d'accident d'un chauffeur de
l'association, ce qui arrive
rarement, il a droit à un premier soin grâce aux
cotisations des membres. Parfois, ils s'entraident aussi socialement, en cas
de maladie, par exemple. Le tableau 11 de l'annexe II présente la
structure de l'Association des Motocyclistes Taxis du Sud sous forme de
tableau.
5.8 Nombre de blessés par motocyclette
enregistrés à l'Hôpital Immaculée Conception des
Cayes.
Nous avons recueilli les données concernant le nombre
de blessés par motocyclette pour les années 2011, 2012 et 2013
à l'Hôpital Immaculée Conception des Cayes (HIC)
appelé couramment Hôpital Général des Cayes.
Malheureusement les données des années antérieures qui
pourraient nous servir comme base de comparaison pour mieux comprendre
l'évolution des cas n'étaient pas disponibles. Les années
2011, 2012 et 2013 étant proches l'une de l'autre, il n'y a donc pas une
très grande variation du nombre de cas. L'analyse des chiffres qui ont
été à notre disposition nous permet de comprendre que
l'HIC enregistre en moyenne44 5 blessés par moto
quotidiennement (annexe II, tableau 8).
44 Calcul effectué en divisant le total des
blessées pour une année par 365 jours.
43
5.9 Cas d'accidents de motocyclettes enregistrés
par le SCCV des Cayes.
Il n'y a pas une très grande variation entre le rapport
de l'année 2012 et celui de l'année 2013 concernant le nombre de
cas d'accidents enregistrés par le service de circulation et de
contrôle des véhicules (SCCV) de la PNH. Toutefois, bien que le
nombre de cas d'accidents soit passé de 233 à 195 le nombre de
mort est passé de 18 à 30 et le nombre de blessés est
passé de 324 à 222.
Si le nombre de blessés est souvent supérieur au
cas d'accidents enregistrés c'est que parfois, un cas d'accident peut
impliquer plusieurs usagers de la route (voir les tableaux 9 et 10 à
l'annexe II).
En comparaison avec les données de l'Hôpital
Immaculée Conception des Cayes, le nombre de blessés
enregistrés par le service de circulation et de contrôle des
véhicules de la Police Nationale au cours des années 2012, 2013
est largement inférieur. Ceci s'explique par le fait que ces deux
institutions ne travaillent vraiment pas de concert sur les cas d'accidents
répétés dans la ville des Cayes. De plus, un accident
enregistré par le SCCV peut ne pas se retrouver dans les archives de
l'HIC si l'accidenté n'était pas aller se faire soigner dans
cette institution. De même, certaines victimes de la route peuvent se
retrouver à l'hôpital sans que le SCCV ait pu intervenir sur le
cas d'accident.
A l'avenir, si rien n'est fait, ces résultats sont loin
d'être meilleurs car les taxi-motocyclistes ne cessent d'augmenter dans
les mêmes circonstances dans la ville des Cayes. Dans un tel souci, nous
avons aussi mené une enquête auprès des distributeurs de
motocyclettes aux Cayes afin d'avoir une idée des ventes. Voyons le
tableau ci-après.
44
5.10 Tableau 2 : Répartition des distributeurs de
motocyclettes aux Cayes selon leurs débuts d'exercice et ventes
mensuelles en unités.
Distributeurs
|
Début d'exercice
|
Marque /puissance
|
Prix Unitaire (HTG)
|
Stock courant
|
Ventes en Unités/mois
|
|
CHEZ TIMO
|
2006
|
Honda
|
81 165
86576
|
15
|
5
|
100cc 125cc CGL
|
TI GABY
|
2009
|
Apollo 110cc
|
|
8
|
20
|
Dayung 110cc
|
|
HAOJIN (2)
|
2010
|
Haojin 110cc
|
7700
9240
9295
|
44
|
80
|
125cc 150cc
|
ANGE DE LETERNEL
|
Aout 2015
|
Dayana 110cc
|
7700
8700
|
40
|
20
|
125cc
|
DAYANG- CHOUCHOU
|
Juin 2014
|
Dayang 110cc
|
8300 9000 9300 8200
|
50
|
65
|
125cc 150cc
Chouchou 110cc
|
|
BEL BOUKAN MULTI- SERVICES (2)
|
-
|
Bel bb
|
-
|
-
|
70
|
Dayang
|
Haojiang
|
|
SEYÈ OU DEVAN
|
-
|
Bel bb
|
-
|
-
|
40
|
Dayang
|
Haojiang
|
Polo
|
|
TOTAL
|
-
|
-
|
-
|
-
|
300
|
|
Sources : L'auteur, d'après l'enquête le 25
novembre 2015.
En novembre 2015, il existe aux Cayes sept (7) distributeurs
de motocyclettes logés dans deux (2) adresses pour certains. Nous avons
pu comprendre qu'aux Cayes, environ 300 motocyclettes sont vendus chaque mois.
Les acheteurs proviennent parfois des différentes communes de
l'arrondissement. Donc, ventes probables pour une année = 300 * 12 = 3
600
45
unités. Ventes probables dans 5 années = 3600 *
5 = 18 000 unités. Ce qui signifie que d'ici 2020, il est probable que
l'on assiste à une augmentation de 18 000 motocyclettes dont la
majorité va circuler dans la ville des Cayes. Les ventes sont aussi
fonctions de la demande de mobilité individuelle et du taux du dollar.
Ainsi, il est possible de prévoir qu'avec le temps, cette augmentation
possible des ventes ne sera pas sans incidences sur le transport dans la ville
des Cayes.
5.11 Graphique 2 : Conséquences de
l'évolution sans contrôle des motards aux Cayes.
Motocyclettes (Taxis)
Hypercentralisation
O S
Distributeurs
A
Mobilité individuelle
2010 2015 x x+n x+2n x+3n Temps
Sources : L'auteur, d'après l'enquête en
2015
Selon notre étude, l'augmentation des
taxi-motocyclettes est tributaire du chômage, de la mobilité
individuelle et du temps. Les distributeurs offrent aussi en fonction de cette
mobilité accrue. Maintenant nous sommes au point A. Dans x+3n
années, nous atteindrons le point S, point à partir duquel la
ville connaitra sa capacité maximale d'absorption de motocyclette.
Au-delà, nous nous retrouverons dans les limites de
l'hypercentralisation. Pour éviter que cela arrive, il faudra que l'on
arrête les distributeurs au point O même si la demande continue
Hypercentralisation
d'accroître afin de ne pas dépasser la ligne de
l'hypercentralisation.
46
5.12 Conclusion.
Le principal objectif de cette étude est d'apporter
notre contribution dans le domaine du transport dans la ville des Cayes. Pour
cela, au niveau du troisième chapitre, nous avons fait une analyse de la
mobilité des personnes au niveau de cette ville. Nous avons aussi
passé en revue les différents modes de transport qui y existent
pour ensuite nous focaliser sur le mode de fonctionnement des
taxis-motocyclettes, notre cas d'étude. Dans ce chapitre, nous avons
constaté certaines irrégularités dans leur fonctionnement
qui engendrent des problèmes tels que les cas d'accidents et
d'insécurité. Dans le quatrième chapitre, nous avons
jeté un bref coup d'oeil sur la règlementation relative aux
taxis-motos en France comparée à celle d'Haïti afin
d'exploiter certaines idées. Enfin, c'est au niveau du cinquième
chapitre que nous avons présenté et analysé les
résultats de notre enquête.
La recherche de solutions à ces problèmes dans
le secteur taxi Aux Cayes nous a emmené à effectuer une
enquête sur le fonctionnement des taxi-motocyclistes et sur les
distributeurs. Ainsi, il est possible de confirmer que, le faible niveau
d'éducation des chauffeurs de taxi, le manque des conditions
d'accès à l'activité et le manque de contrôle sur
les flux des personnes qui se lancent dans cette activité constituent
les principaux obstacles à une bonne gestion du transport urbain
assuré par les taxis-motos aux Cayes.
En novembre 2015, nous avons interrogé 30
taxi-motocyclistes, choisis au hasard, dont 15 font partis des syndicats (AMTS,
AOMTC, AJCTC) et 15 autres qui ne sont pas des syndiqués. La question
qui leurs a été posée est la suivante : «
avez-vous déjà été impliqué dans un accident
de la route au cours de cette année 2015 ? » A cette question,
seulement un (1) des chauffeurs syndiqués ont répondu
affirmativement. D'un autre côté, nous avons trouvé 4 des
chauffeurs non-syndiqués qui affirment avoir été
impliqué dans un accident de la route aux Cayes en 2015. Ainsi, il est
possible de confirmer notre réponse anticipée sur la question du
transport assuré par les deux roues aux Cayes. Plus on encadre les
motocyclistes, moins on enregistrera de cas d'accidents.
47
Le transport urbain doit être l'une des priorités
de l'Etat en Haïti car la population augmente jour après jour et le
besoin de se déplacer pour une raison ou pour une autre est au coeur de
toutes les activités humaines. L'enjeu du transport urbain devient trop
important pour être passé inaperçu. L'Etat doit trouver un
moyen de contrôler le flux de chauffeurs de taxi-moto qui entre sur le
marché car, nous savons que le transport urbain par taxi-motocyclette
réduit le niveau de chômage et crée une certaine valeur
ajoutée dans l'économie. Cependant, nous n'ignorons pas tous les
dommages que peut aussi bien créer cette activité. Nous pensons
qu'il est possible de limiter les effets négatifs liés à
cette activité si l'on tient compte d'une planification
stratégique du secteur. Le fait de pouvoir acheter une motocyclette ne
doit signifier en aucun cas que l'on peut être chauffeur de
taxi-motocyclette.
Nos déplacements sont de plus en plus individuels, plus
fréquents. En ce sens, nous avons pu comprendre que les taxis-motos
constituent un maillon fort de la mobilité urbaine. Pierre Merlin a si
bien dit que : « le transport urbain bien règlementé
constitue un corollaire de développement et un élément de
cohérence entre les différents facteurs de ce
développement »45. En conséquence, le
système de transport urbain aux Cayes assuré par les taxis-motos
ne doit pas être, à cause de la surpopulation, improvisé et
inadapté sans aucune règle; mais de préférence, il
doit être un système agencé à un processus
d'urbanisation planifié où l'aléatoire n'aura plus sa
place. La ville des Cayes peut en effet servir de modèle au reste du
pays. Les citoyens de la ville vivront mieux et l'on enregistrera moins de cas
d'accidents et d'insécurité. Cependant, l'importance que les
pouvoirs publics accorderont à ce secteur déterminera la
suite.
45 P., Merlin, Op.cit. p.76.
48
5.13 Propositions.
Les résultats de notre enquête, l'analyse de
S.W.O.T. et le mode de règlementation d'un pays comme la France sur le
transport de personnes à deux roues nous permettent de mieux comprendre
le transport urbain Aux Cayes notamment l'activité de taxi-motocyclette
et les différents problèmes auxquels elle est confrontée.
Dans une perspective de réduction du nombre de cas d'accident, de cas
d'insécurité et d'anticiper tous les problèmes qu'ajoutera
le secteur dans le futur, nous allons faire plusieurs propositions aux pouvoirs
publics. Toutefois, la mise en application de ces différentes
propositions actions passera par la volonté politique et la vision des
décideurs qui doivent veiller à ce que la réglementation
en la matière soit réellement appliquée. Ainsi nous
faisons les propositions qui suivent aux Pouvoirs Publics:
5.13.1 Création d'un Cadre légal pour le
fonctionnement des taxis-motocyclettes.
Le décret-loi du 26 mai 2006 réglementant
l'immatriculation et la circulation des véhicules n'avait pas
prévu de cadre légal pour les TM en Haïti. Nous proposons
que ce soit fait. En effet, des conditions doivent être prévues
pour l'exercice de cette activité. Nous pouvons classer ces conditions
en deux catégories à savoir : les conditions liées
à l'état de la motocyclette et celles qui sont liées
à la personne de chauffeurs de taxi-moto.
5.13.1.1 Conditions liées à
l'état de la motocyclette.
Les véhicules de tous les chauffeurs de taxi-motos que
nous avons interrogés, avons-nous constaté, sont en mauvais
état pour transporter des personnes. Les motocyclettes doivent
être dotées d'accessoires nécessaires. En effet, elles
doivent être équipées d'un avertisseur sonore, de deux
paires de pose pieds, d'un bon dispositif d'éclairage et de
signalisation, d'un bon dispositif de freinage fonctionnel. Elles doivent
être toutes immatriculées avant d'être exploitées. En
ce qui concerne les plaques d'immatriculation des motocyclettes nous avons
remarqué qu'elles ont des différences avec celles des voitures.
Les plaques des voitures contiennent par exemple le nom du département
de provenance (SUD ou Ouest par exemple) et elles indiquent s'il s'agit d'un
véhicule privé ou d'un taxi.
Nous suggérons que les plaques des motocyclettes
comportent aussi ces mentions car, toutes motocyclettes doivent être
identifiées rapidement selon le département d'où elles
sortent, selon qu'elles soient privées ou publiques. Les motocyclettes
doivent aussi faire l'objet
49
d'inspection systématique et régulière
afin de déterminer tout disfonctionnement pouvant éventuellement
être cause d'un accident.
5.13.1.2 Conditions liées à la
personne de chauffeur de taxi-moto.
Nous suggérons qu'il y ait une nouvelle instance afin
d'enregistrer les transporteurs par motocyclettes, notamment les chauffeurs de
taxi-moto. Le secteur peut encore générer d'autres emplois si
l'on pense à mettre sur pied une nouvelle instance pouvant le
contrôler afin d'avoir de meilleurs résultats. Cette instance,
devra d'abord s'assurer que tout aspirant chauffeur de taxi-motocyclette
possède un certificat de bonne vie et moeurs et peut faire l'usage de
tous ses membres. Nous croyons que c'est vraiment important car, selon les
ouïs dire certains chauffeurs de taxi sont chauffeurs au cours de la
journée et des voleurs dans la soirée.
Cette instance devra aussi s'assurer que tous transporteurs
par motocyclettes appelés chauffeurs de taxi soient inscrits dans un
registre spécial et qu'ils aient leur permis de conduire
c'est-à-dire qu'ils maitrisent effectivement le code de la route. Aussi,
elle attribuera à chaque chauffeur de taxi-moto un numéro
d'identification qu'il devra attacher comme une vignette sur sa motocyclette.
Par exemple, en voyant la moto numéro 15 accidentée, toutes les
instances concernées reconnaitront rapidement qu'il s'agit de tel
chauffeur avec tous les détails particuliers. Les chauffeurs
éviteront ainsi de brûler un stop, de faire un dépassement
hasardeux car ils sauront qu'ils sont identifiables facilement. Ainsi, il y
aura moins d'insécurité au sein de la ville.
5.13.2 Existence de lois sur les contraventions pour les
motocyclettes.
La loi concernant la circulation et l'immatriculation des
véhicules en Haïti doit aussi prévoir des contraventions
spécifiques pour les motocyclettes avec des montants à payer en
fonction du type d'infraction commise. Au sein de la ville des Cayes, les cas
de surcharge, d'excès de vitesse, de situation irrégulière
avec le SCCV et même le non-respect d'un panneau stop doivent être
pénalisés chaque jour. A l'avenir, il faudra aussi placer des
caméras de surveillance dans certains endroits stratégiques comme
au rond-point des quatre chemins.
50
5.13.3 Contrôle sur les distributeurs de
motocyclettes.
Certains problèmes causés par l'utilisation des
motocyclettes peuvent être aussi contrôlés au niveau de la
vente des distributeurs. En effet, la carte d'identification nationale ne doit
pas être selon nous, la seule pièce requise pour l'achat d'une
motocyclette. Nous suggérons qu'une preuve d'adresse soit aussi
exigée. Le SCCV pourra aussi avoir accès aux livres de vente des
distributeurs en vue d'accéder à des informations qui peuvent
s'avérer utile lorsqu'il s'agira de retracer un propriétaire, et
ainsi contrôler le nombre de motocyclette en circulation.
Après l'achat d'une motocyclette, les distributeurs
doivent remettre aux propriétaires le certificat de vente, le bordereau
de douane et le papier de douane. Un distributeur nous affirme que parfois, il
livre les motos sans les papiers de douane. La raison c'est que, les stocks
sont parfois disponibles sans ces papiers qui permettront aux nouveaux
propriétaires d'effectuer des démarches pour assurer leurs
motocyclettes. En ce sens le SCCV doit exiger des distributeurs certains
devoirs.
5.13.4 Amélioration du processus
d'immatriculation et d'assurance des véhicules.
Pour mieux faire face aux problèmes d'immatriculation
et d'assurance pour les motocyclettes, le service de circulation, l'OAVCT et la
DGI doivent travailler de concert de manière à ce que, ils soient
plus rapides dans le processus d'immatriculation et d'assurance des
véhicules. D'abord, à court terme, nous mettons
particulièrement l'accent sur la mise en place d'un dispositif
permettant d'identifier toutes les motocyclettes indistinctement. Car, le
comportement des motocyclistes est fortement lié à cela. Lorsque
le chauffeur sait qu'il n'est pas facilement identifiable, il s'est permis de
se mal comporter à travers les rues.
En fait, le processus est parfois décourageant par le
fait que l'on prend trop de temps. Parfois, l'on ne peut même pas
effectuer ces transactions pendant une semaine pour des raisons de rupture de
stocks des plaques, d'erreur de réseau et d'embouteillage. Nous
suggérons que les méthodes pour assurer et immatriculer les
véhicules, notamment, les motocyclettes soient révisées.
Ainsi, il ne restera plus de motocyclettes qui ne soient immatriculées.
Ces mesures permettront aussi aux pouvoirs publics de dénombrer les
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motocyclettes, car actuellement (avril 2014), le service de
circulation de la Police nationale n'est même pas en mesure de donner le
nombre approximatif de motocyclette en circulation aux Cayes. Ceci s'explique
par le fait que la majorité des motos ne sont pas
enregistrées.
5.13.5 Augmentation des agents de
circulation.
L'augmentation du nombre des agents de circulation permettra
d'assurer un contrôle
régulier du transport dans la ville des Cayes,
notamment les taxis-motocyclettes. La présence permanente de ces agents
contribuera aussi à faire respecter les principes de circulation.
5.13.6 Promotion et encadrement des syndicats de
taxi-moto.
Les pouvoirs publics doivent aussi aider les syndicats de
taxi-motos à bien jouer leur rôle
de sensibilisateurs. Ils doivent aussi accorder des avantages
aux chauffeurs syndiqués afin d'inciter ceux qui ne font pas encore
parti des syndicats à s'inscrire. Par exemple, la prime d'assurance pour
les chauffeurs syndiqués pourra être meilleur marché. Il
faudra aussi renforcer les capacités des chauffeurs de taxi-moto en
subventionnant leur formation à la conduite. Conduire une motocyclette
requiert une certaine habilité technique que l'on ne peut se risquer aux
intuitions du chauffeur car, il s'agit de vies humaines qui sont en jeu.
5.13.7 Interdiction de monter à trois et
de stationner en double file.
L'interdiction formelle de monter à trois sur une
motocyclette permettra d'éviter la
surcharge et aussi lutter contre l'insécurité
dans la ville des Cayes. En France par exemple, il est strictement interdit de
transporter à la fois deux personnes sur une motocyclette.
Il faut aussi prendre garde au mauvais stationnement. En
effet, le stationnement en double file, par exemple, sur la première
grande rue aux Cayes rétrécit la chaussée et rend ainsi la
circulation plus difficile. L'interdiction de stationner ainsi évitera
les encombrements et permettra d'enregistrer moins de cas d'accidents.
5.13.8 Le port des insignes et la
création de stations de taxis.
Nous proposons aussi que les taxis-motocyclettes portent des
insignes permettant de
les distinguer de toutes autres motocyclettes privées.
Qu'ils ne stationnent pas n' importe où par exemple. Pour cela, les
pouvoirs publics doivent penser à créer des stations de taxis. En
agissant ainsi, les autorités valorisent du même coup
l'activité de chauffeur de taxi et donnent plus de visibilité au
secteur.
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5.13.9 Intégration des notions du code de la
route dans le cursus des écoliers.
Les accidents sur la voie publique impliquent non seulement
les chauffeurs mais aussi tous usagers de la route y compris les
piétons. Ainsi, le ministère de l'éducation Nationale, en
plus de donner aux écoliers des notions d'histoire et de
géographie doivent étudier la faisabilité
d'intégrer dans le cursus des notions du code de la route. Ceci se
justifie davantage par le fait que, le temps d'apprentissage de la conduite
dans les autos écoles est très court pour acquérir une
véritable connaissance en matière de conduite. Ce serait vraiment
pertinent puisque ces élèves sont parfois, déjà des
utilisateurs de bicyclettes et de motocyclettes. Et, il leur est plus facile de
mémoriser certaines notions de la vie courante.
5.13.10 Création de
moto-écoles.
Actuellement (2015), il n'existe pas d'écoles où
l'on apprend à conduire une motocyclette aux Cayes. La création
de telles écoles pourra permettre aux utilisateurs de mieux
connaître leurs engins, et ainsi devenir plus aptes à conduire
pour le bien-être de tous.
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