La transparence optimale d'une banque centrale( Télécharger le fichier original )par Artan Itsitsa Nzamba Université Omar Bongo de Libreville-Gabon - Master 2014 |
UniversitéOmarBongo ........... Faculté de Droit et deSciences Economiques ........... Département d'Economie ........... Laboratoire d'Economie Appliquée (L.E.A) MEMOIRE DE MASTER II EN SCIENCES ÉCONOMIQUES OPTION : SPÉCIALITÉ : ÉCONOMIE INTERNATIONALE MACROÉCONOMIE APPLIQUÉE LA TRANSPARENCE OPTIMALE D'UNE BANQUE CENTRALE THEME : Présenté par : Sous la direction de : Artan ITSITSA NZAMBA Jean-Louis NKOULOU NKOULOU Email : generationnews@outlook.frAgrégé des Facultés de Sciences Économiques et de Gestion Maître de Conférences SOMMAIRE Partie I : Les gains de la transparence optimale d'une banque centrale 6 Chapitre 1 : La transparence optimale : un déterminant de la crédibilité d'une Banque centrale 7 Chapitre 2 : La transparence optimale : un moyen de réduire le risque d'incohérence temporelle 17 Section 1 : La transparence totale comme degré optimal 17 Section 2 : La transparence intermédiaire comme degré optimal 18 Chapitre 3 : Règles monétaires, transparence optimale et conduite de la politique monétaire 21 Section 1 : La règle doit tenir compte de l'activité économique 21 Section 2 : Les caractéristiques propres à la formulation 33 Chapitre4 : L'adoption d'une règle monétaire spécifique 39 Section 1 : La règle d'objectif spécifique 40 Section 2 : « Clean » versus « lean » 42 Annexe..................................................................................................53Table des matières..................................................................................56 Introduction généraleLa transparence optimale d'une Banque centrale caractérise un niveau de communication permettant à la politique monétaire de garantir aussi bien la stabilité d'inflation que la cohérence de celle-ci avec les anticipations des agents privés (Gosselin, 2008 ; Cornand, 2013). Ainsi considéré, l'existence de plusieurs niveaux de transparence a favorisé l'émergence des débats au sein de la théorie économique (Mishkin, 2004 ; Macklem, 2005 ; Cukierman, 2001, 2005 ; Musard-Gies, 2007 ; Geraats, 2007). À cet égard, les débats ont privilégié deux principales approches pour la recherche de la transparence optimale d'une Banque centrale : celle qui fonde le choix de la transparence sur les objectifs afin d'accroître les performances de la politique monétaire, d'une part (Taylor, 1993 ; Bernanke et al, 1999 ; Pollin, 2005 ; Svensson, 1997, 1999, 2003, 2010), et celle qui privilégie la transparence d'équilibre, supposant l'existence de niveaux intermédiaires de transparence qui oscillent entre l'opacité totale et la transparence parfaite, d'autre part (Morris et Shin, 2002 ; Hahn, 2006 ; Cukierman, 2007 ; Hoogduin et al., 2010). S'agissant de la première approche, la question relative à la détermination du degré optimal de transparence retient l'attention depuis l'article pionnier de Cukierman et Meltzer (1986) sur « Une théorie de l'ambiguïté, la crédibilité et l'inflation sous discrétion et l'asymétrie d'information ». Ces analyses sont complétées par Barro et Gordon (1983), Eijffinger et al. (2000), Faust et Svensson (2001), Jensen (2002) et Geraats (2006), pour justifier l'opacité des Banques centrales. Ce choix apparait optimal dans la mesure où la présence d'une asymétrie d'information sur les préférences entre la Banque centrale et les agents économiques permet à la Banque centrale de générer des surprises inflationnistes afin d'augmenter la production au-delà de son niveau naturel sans que cela soit coûteux en terme de crédibilité. Le manque de crédibilité conduit donc à l'inefficacité de la politique monétaire et, par conséquent, l'efficacité de la politique monétaire repose sur la capacité des Banques centrales à réduire le biais inflationniste (Gies, 2006). L'abandon de la discrétion, source d'incohérence temporelle1(*) aboutissant à la perte de crédibilité des autorités monétaires (Kydland et Prescott, 1977 ; Barro et Gordon, 1983), a conduit a évoqué l'instauration des règles (Taylor, 1993 ; McCallum, 1993 ; Drumetz et Verdelhan, 1997).La transparence de cette règle peut alors jouer un rôle dans la mise en place d'une politique de soutien à la crédibilité et dans la résolution du problème d'incohérence temporelle (Cornand, 2007 ; Gies, 2007). Ainsi, plusieurs stratégies sont envisageables pour assurer la transparence de la politique monétaire. Leur conception doit s'efforcer de concilier trois caractéristiques qui ne sont pas aisément compatibles. En effet, la règle de comportement doit être lisible pour garantir la crédibilité de la politique monétaire, s'approcher autant que possible de l'arbitrage optimal entre la variabilité de l'inflation et celle de la production et offrir une souplesse suffisante pour tenir compte d'événements particuliers2(*) ou d'évolutions dans le modèle de l'économie3(*) (Pollin, 2005). Pour atteindre leurs objectifs, les Banques centrales doivent alors se montrer responsables, transparentes et crédibles auprès des agents économiques. La transparence de la règle monétaire vient donc renforcer cette crédibilité des autorités monétaires (Artus, 1998 ; Orphanides et Williams, 2007). Cette stratégie de politique monétaire devrait donc fournir une référence permettant au public d'évaluer la responsabilité et la capacité de la Banque centrale à atteindre les objectifs de politique monétaire fixés à l'avance (Artus, 1998). Cependant, en présence des chocs asymétriques4(*), la Banque centrale a-t-elle intérêt à être transparente sans être responsable ? Autrement dit, la banque centrale a-t-elle intérêt à réduire sa marge de transparence ? Si la banque centrale reste transparente en présence des chocs asymétriques, elle ne fera pas preuve de responsabilité. La responsabilité de la politique monétaire implique une flexibilité pour réagir aux chocs qui affectent l'économie (Cruijsen et al., 2006 ; Hoogduin et al., 2008). D'où le terme de «discrétion contrainte»5(*)préconisé par Bernanke et Mishkin (1997) et Bernanke (2003) pour caractériser le ciblage d'inflation. Lacontrainte n'étant plus ici représentée par la règle de politique monétaire que la Banquecentrale s'est fixée, mais simplement par la cible d'inflation qu'elle s'est engagée à atteindre à un horizon prédéterminé (Svensson, 1999 ; Heikensten, 1999 ; Goodhart, 2001 ; Pollin, 2005). La transparence optimale, quant à elle, reposant sur les niveaux intermédiaires de transparence, a remis d'actualité la problématique de divulgation des informations privilégiées de la Banque centrale, d'une part (Cornand, 2007) et les raisons de celle-ci, d'autre part (Morris et Shin, 2002 ; Cukierman, 2005 ; Hoogduin et alii., 2010 ; Cornand, 2013). Par rapport à la problématique de divulgation des informations privilégiées, unetransparence parfaite n'est plus nécessairement une solution optimale. En effet, en gardant confidentielle certaines informations, la banque centrale s'assure d'un avantage stratégique vis-à-vis des agents privés et ce, conduisant donc à un niveau optimal d'ambiguïté (Cukierman, 2007). Pour cette raison, il serait préférable sous certaines conditions, pour la Banque centrale, de détenir certaines informations plutôt que de les divulguer publiquement (Cukierman, 2005, 2007 ; Musard-Gies, 2007 ; Muto, 2012). Par rapport aux raisons qui fondent la transparence intermédiaire, la notion même d'un niveau optimal de transparence apparait théoriquement significative en limitant certaines formes de transparence (Cruijsen et alii., 2010). En effet, le concept de niveaux intermédiaires de transparence se pose pour au moins trois raisons. D'abord, une transparence parfaite pourrait conduire à des incertitudes. En fournissant trop d'informations, les agents focalisent sur la complexité de l'élaboration de la politique monétaire et l'incertitude entourant les prévisions (Hoogduin, 2010). Ensuite, le degré élevé de transparence pourrait conduire à une surcharge de l'information et de la confusion. L'hypothèse que les individus sont capables d'absorber, comprendre et peser toutes les informations que la banque centrale fournit est probablement trop forte (Eijfingeret alii., 2010). Enfin, la prise en compte des complémentarités stratégiques. Si les agents privés ont besoin d'anticiper la valeur des fondamentaux pour prendre leur décision, ils doivent également considérer l'opinion des autres quant à la valeur de ces fondamentaux (Morris et Shin, 2002 ; Cornand, 2011). La transparence optimale, nécessaire pour accroitre l'efficacité de la politique monétaire, se situe alors entre une dose d'informations précises à révéler et celle qui ne doit pas l'être (Mishkin, 2004 ; Cukierman, 2005, 2007 ; Gosselin, 2008 ; Muto, 2012). Les approches liées à la recherche de la transparence optimale d'une Banque centrale se réfèrent à la divulgation des informations privilégiées (Cornand, 2013). Ainsi, il y a transparence parfaite lorsque la banque centrale rend publique toute l'information dont elle dispose et opacité complète lorsqu'elle n'en divulgue rien. Entre ces deux cas extrêmes, il existe tout un éventail de degrés de transparence possibles (Musard-Gies, 2007 ; Diana, 2008). D'où la nécessité de rechercher un niveau optimal de transparence. En dépit de l'existence d'un consensus autour de l'importance de la transparence, aucun consensus n'est dégagé quant à la nature, la qualité et le volume de l'information à divulguer (Kharrat, 2014). En outre, les différentes manières de modéliser l'asymétrie d'information entre la Banque centrale et les agents économiques peuvent également expliquer la divergence des résultats quant au degré optimale de transparence d'une Banque centrale (Musard-Gies, 2007). C'est en fait la mise en évidence de différents degrés de transparence des Banques centrales des pays de l'OCDE qui a renouvelé l'intérêt pour l'analyse théorique de la transparence optimale d'une Banque centrale (Cornand, 2007, 2011). Cette analyse est une refondation de la proposition de Rogoff (1985) comme une solution à l'incohérence temporelle en considérant l'indépendance de la Banque centrale sur les objectifs. Nous nous proposons alors de vérifier si la transparence optimale permet à la politique monétaire d'atteindre l'objectif d'inflation en cohérence avec les anticipations des agents privés. L'objet de la présente réflexion est d'analyser, sur la base d'une littérature théorique, l'opportunité et l'intérêt du choix de la transparence optimale en dehors des solutions de coins6(*), prenant pour cible la BEAC qui apparait inéluctablement un champ d'investigation pertinent pour au moins deux raisons : 1°) la BEAC a un objectif statutaire de stabilité des prix. Or sa politique monétaire actuellement en vigueur n'est pas en cohérence avec les anticipations d'inflation des agents privés, ce qui révèle que la stabilité des prix obtenue n'a pas d'incidence sur les anticipations (Awana, 2013). 2°) le rôle de la transparence optimale comme stratégie efficacement bénéfique dans la restauration de la crédibilité de la BEAC. De ce fait, la présente réflexion, qui vise à définir une transparence d'équilibre pour la BEAC, s'articule autour de deux parties : les gains associés à la transparence optimale (Partie I) et ses implications en termes de conduite de la politique monétaire (Partie II). La littérature économique montre que la transparence optimale exerce des effets économiques. Ces effets sont doubles : l'effet incitatif engage la Banque centrale sur la poursuite d'une inflation faible et l'effet d'information permet d'agir sur les anticipations des agents privés et en retour sur la dynamique macroéconomique (Hellwig, 2002 ; Walsh, 2006 ; Svensson, 2008 ; Geraats, 2009 ; Boivin, 2011). À cet effet, les gains associés à la transparence optimale d'une Banque centrale peuvent donc s'apprécier à deux niveaux : la restauration de la crédibilité des Banques centrales (Chapitre 1) et la réduction efficace du risque d'incohérence temporelle (Chapitre 2). * 1On dit qu'une politique souffre d'une incohérence temporelle quand la politique en t + 1 remet en cause la politique décidée en t. La politique optimale est alors sans cesse remise en cause (Kydland et Prescott, 1977 ; Barro et Gordon, 1983). * 2Une crise financière, un choc extérieur, etc. * 3Le processus de transmission des impulsions monétaires, la dynamique de la demande et de l'inflation, les caractéristiques des chocs, etc. * 4Un choc est dit asymétrique lorsqu'il ne touche qu'un pays ou un groupe de pays de l'union ou même l'ensemble des pays de l'union mais dans des proportions différentes. Il est symétrique lorsqu'il atteint simultanément et dans les mêmes proportions tous les pays membres d'une union. * 5Bernanke et Mishkin (1997), Bernanke (2003) indiquent que l'aspect « contrainte » est lié à l'engagement en faveur d'une inflation basse, engagement quipermet d'ancrer les anticipations du public tandis que l'aspect « discrétion » recouvre la liberté opérationnelle dont jouit la Banque centrale et la possibilité qu'elle a de mener à bien ses taches de stabilisation réelle. * 6Opacité ou transparence. |
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