I.2 Problématique
Pendant longtemps, le pouvoir fut exercé sous forme
monarchique et transmis par voie héréditaire. Il y a eu ensuite
les oligarchies. C'est tardivement avec la Grèce antique que va
débuter l'expérience de la démocratie (Agboyibor,
2010)3. Depuis lors, ce concept va évoluer surtout au
tournant du XIXème siècle grâce à l'extension du
suffrage universel et progressivement par l'élargissement d'une
série de prérogatives reconnues à l'être humain.
Aujourd'hui, la démocratie avec l'effondrement de l'idéologie
communiste ne se prête plus à aucune confusion sémantique.
Elle est une et universelle comme la raison humaine4. Elle est une
valeur, celle des valeurs existentielles qui ne sont pas l'apanage d'une partie
du corps social fondée sur les différences raciales, religieuses
et de sexe mais de l'ensemble du corps social. C'est
alors en cela qu'on parle de citoyen et non de sujet.
Reconnue comme le système dans lequel le pouvoir
découle de l'autorité du peuple, la démocratie est
fondée sur la reconnaissance en l'être humain d'une intelligence
et d'une capacité lui conférant le droit de participer, d'opiner
sur les décisions influençant son destin. On ne saurait, alors,
parler réellement de la démocratie sans une participation accrue
et libre du peuple sur ce qui les concerne en tant que citoyen. Pour Dimitri
Georges LAVROFF (1991),
« Le fondement philosophique de la démocratie
réside dans la croyance à l'individu et en son droit naturel
à participer dans la formation et dans la gestion de la chose publique.
L'idée selon laquelle il y a plus de sagesse dans la
délibération de plusieurs que dans l'avis d'un
3 Gouvernance politique et sociale en Afrique subsaharienne,
Lomé, Fondation FAR, 2010
4 M. Danioué, Cours de Sociologie politique 3ème
année, 2008
13
seul, fût-il le plus intelligent. C'est le postulat de
base de la
démocratie. »5
Ainsi, la politique ne saurait être l'exclusivité
d'une catégorie d'individus dans un pays à régime
démocratique. Car la citoyenneté est une et entière, les
individus passé du statut de sujet à celui du citoyen, ont acquis
leur plein droit de ne plus subir uniquement les lois, mais de les former ou de
poser son regard dans leur formation.
Cependant, c'est le constat que l'on semble faire quand on
jette un regard synoptique sur l'activité politique africaine en
général et togolaise en particulier. Aujourd'hui, la quête
d'égalité est plus que jamais une préoccupation des femmes
africaines et des Gouvernements. Malgré leur poids démographique
écrasant, les femmes sont faiblement représentées dans les
instances de décisions publiques. Au Togo, le Gouvernement, conscient de
ces rapports inégalitaires entre l'homme et la femme et du statut
inférieur réservé à la femme, a établi avec
l'appui du PNUD au cours de l'année 2005, un diagnostic des
inégalités de genre. Dans le domaine de la gouvernance, le
diagnostic a révélé la faible
représentativité des femmes dans les postes de décisions
que ce soit au sein du Gouvernement où elles ne représentent que
22% de l'effectif des Ministres, à l'Assemblée Nationale et au
niveau des autres institutions de la République. Il en est de même
dans la gestion politique tant sur le plan national qu'international et dans
les centrales syndicales.
Selon les statistiques des Nations-Unies établies en
1995, en Afrique contemporaine, les femmes ne sont pas
représentées à plus de 8% dans les instances de prises de
décisions politiques. La situation est d'autant plus criarde dans les
partis politiques où elles ne servent que du
5 Le système politique français, Paris, Dalloz,
1991
14
faire valoir. Au Togo, depuis 1960, année d'obtention
de l'indépendance, il a fallu attendre 40 ans pour voir une femme
poindre dans l'arène des élections présidentielles en
2010. En outre, depuis 40 ans d'indépendance, les femmes n'ont eu que
deux (2) chances dans les nominations des maires. Il s'agissait de Mme Marie
Sivomey à la Mairie de Lomé de 1967 à 1974 et de Mme
Sankaredja Tempo à la mairie de Dapaong. Dans le domaine de la
communication, le constat est que la plupart des médias audio visuels et
les organes de presse sont créés et dirigés par les
hommes.
Cette situation pas assez confortable pour les femmes dans le
domaine politique a alimenté un certain nombre de préjugés
et de mauvaises appréciations sur sa nature réelle. Pour
certains, cette amorphie politique féminine leur est innée,
congénitale, alors inutile de chercher les causes ailleurs. De telles
visions, nous semble - t-il émanerait des esprits ayant une courte vue
sur la participation politique de la femme togolaise.
Car, en effet, une rétrospective de l'histoire du Togo
regorge d'extraordinaires scènes d'actions politiques de femmes ayant
influencé la décision de l'autorité politique de
l'époque. Souvent déclenchées par des autorités
coloniales qui contrevenaient à leurs intérêts
économiques, les révoltes des femmes ont conduit à des
remises en cause des décisions de l'autorité politique coloniale
(Adjalogo, 2000). Les Togolaises auraient joué un rôle sans
précédent dans les luttes indépendantistes et sans doute
à en croire Ekué Silivi D'Alméida (1992), l'actuel
monument de l'indépendance serait un hommage et une reconnaissance
à leur endroit.
Alors, la question fondamentale sur laquelle il faut apporter
un éclairage est de savoir à quoi est due réellement cette
apathie politique des femmes togolaises ?
Telle est la principale interrogation qui va guider notre
recherche.
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