La Cour de Justice de la CEDEAO à l'épreuve de la protection des Droits de l'Homme( Télécharger le fichier original )par Thierno KANE Université Gaston Berger de Saint- Louis Sénégal - Maitrises en sciences juridiques 2012 |
Paragraphe 2 : les contraintes d'ordre opérationnelCes contraintes sont relatives d'une part à la méconnaissance de la Cour (A) et d'autre part au caractère incertain de l'exécution des arrêts de la Cour (B). A. La Cour de la justice communautaire, une juridiction méconnueRégie par le protocole A/P1/7/91 du 06 Juillet 1991 amendé par le protocole A/P1/01/05 du 19 Janvier 2005, la Cour de justice de la Communauté joue un rôle majeur dans la création et le maintien d'un environnement juridique propice à la réalisation des objectifs de la CEDEAO. Elle a, entre autres, pour mission de promouvoir l'intégration judiciaire, le règlement des différends dont elle est saisie, l'interprétation et l'application du Traité, les conventions, les protocoles et autres instruments juridiques de la Communauté. Elle a aussi pour mission la détermination des cas de violation du droit humain dans tous les pays membres de la CEDEAO et d'autres mandats auxiliaires, de manière efficace et opportune. Pourtant malgré que les compétences de la Cour soient diverses, il est patent de constater que cette juridiction reste méconnue. En effet la Haute cour de justice communautaire n'est pas très bien connue de ses ressortissants voire même des Etats en ce qui concerne les règles procédurales. En effet, il est arrivé que des Etats, devant la Cour de la CEDEAO, se trompent sur les procédures en vigueur: un Etat a, à un stade de la procédure, au moins évoqué la possibilité d' « interjeter appel 139(*)»; un autre a parlé de la règle de l' « épuisement des voies de recours internes »140(*), nullement consacrée pourtant. Ces quelques exemples montrent bien que le droit sous régional en général, et les règles du contentieux en particulier, méritent d'être mieux connues, que leur pédagogie s'impose donc. L'insuffisante connaissance de celles-ci pourrait bien être un facteur explicatif de lenteur d de la gestation d'un droit jurisprudentiel de l'intégration.La protection des droits de l'homme ne peut dans ces conditions que faire défaut, ce qui est préjudiciable à leurs titulaires. Au niveau même des milieux judicaires et universitaires, il est symptomatique de constater que le nouveau titre de sa compétence relatif aux droits de l'homme est ignoré. Le colloque organisé à Dakar sur les droits communautaires ouest africain141(*) n'aborde pas d'une manière approfondie cette dimension de la protection des droits de l'homme. L'occasion était pourtant très belle pour apprécier sur le principe si la Cour mènera à bien sa mission avec l'intégration de ce nouveau titre de compétence relatif aux cas de violation des droits de l'homme. La pertinence pourrait ainsi être appréciée. Les rares communications qui abordent cette dimension manquent de précision et sont souvent en décalage avec la nouvelle réalité communautaire. A titre exemplatif, on peut se référer à la communication de Babacar SARR142(*) où l'auteur rappelle l'ancien article 9 alinéa 3 du Protocole de la Cour qui subordonnait la saisine de la Cour par les ressortissants par l'entremise de leurs Etats. Le protocole de 2005 qui définissait la compétence de la Cour a été révisé en 2005 et un nouvel article 10 introduit qui élargit le champ d'intervention de la haute juridiction communautaire à la violation des droits humains. Toujours sous l'aspect opérationnel, on peut noter l'exécution des arrêts de la Cour n'est pas satisfaisante d'où son caractère incertain. * 139arrêtEtim Moses Essien c/ République de Gambie et l'Université de Gambie du 29 octobre 2007 * 140arrêt Dame Hadijatou Mani Koraou c/ République du Nigerdu 27 octobre 2008 * 141 V. la revue Nouvelles Annales Africaines n° 1 2007 * 142SARR B., « L'implication du juge national dans la mise en oeuvre de la règle communautaire », Nouvelles Annales Africaines n° 1 2007, pp.102-112 |
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