CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
L'objectif de ce mémoire a été
d'évaluer empiriquement les niveaux relatifs d'efficacité
technique de 24 banques commerciales de la CEMAC sur la période allant
de janvier 2001 à décembre 2004, et de rechercher les facteurs de
la gestion bancaire susceptibles d'expliquer les niveaux obtenus. Pour ce
faire, nous avons estimé grâce à la méthode DEA, des
scores mensuels d'efficacité technique de chaque banque sous
différentes hypothèses de rendements d'échelle. Une fois
ces scores obtenus, nous avons fait ressortir à travers l'estimation
d'un modèle linéaire multiple, l'influence de certains ratios de
la gestion bancaire sur les scores d'efficacité technique pure. Ce qui a
permis d'aboutir aux résultats suivants :
v' Sous hypothèse de rendements constants,
l'efficacité technique moyenne de l'ensemble des banques de
l'échantillon sur toute la période de l'étude s'est
établie à 0,369. Ce qui signifie qu'entre 2001 et 2004, ces
banques n'ont produit en moyenne que 36,9 % de la quantité de
crédits qu'elles auraient pu produire à partir de leurs
ressources si elles opéraient toutes à rendements
d'échelle constants. En d'autres termes, elles auraient pu
accroître proportionnellement leur volume de crédit de 171 % en
maintenant le niveau des dépôts constant si elles opéraient
toutes à rendements d'échelle constants.
v' Sous hypothèse de rendements variables,
l'efficacité technique moyenne s'est plutôt établie
à 0,693 sur toute la période de l'étude. Ce qui veut dire
que durant cette période, les banques n'ont produit en moyenne que 69,3
% de la quantité de crédits qu'elles étaient susceptibles
de produire à partir de leurs ressources. Autrement dit, elles auraient
pu accroître proportionnellement leur volume de crédits de 44,3 %
en maintenant le niveau des dépôts constant.
v' C'est en septembre 2003 que les banques ont
été le plus techniquement inefficaces. Elles n'ont produit en
moyenne que 20 % de ce qu'elles auraient pu produire à partir de leurs
ressources si elles opéraient toutes à rendements
d'échelle constants.
v' Les banques ont beaucoup plus souffert entre 2001
et 2004 de problèmes d'inefficacité d'échelle que de
mauvaises pratiques de gestion. Leurs sous productions sont beaucoup plus
liées à un problème d'échelle sous optimale
qu'à un problème de mauvaises pratiques de gestion. En effet, le
score moyen d'efficacité d'échelle a été de 53,8 %
sur toute la période tandis que celui d'efficacité technique pure
reflétant les pratiques de gestion s'est établi à 69,3 %.
Les pratiques de gestion des banques n'ont pas beaucoup variées durant
la période de l'étude au regard de l'évolution des scores
moyens d'efficacité technique pure.
v' Les banques gabonaises et camerounaises semblent
avoir été dans l'ensemble les plus performantes dans la
transformation de leurs ressources entre 2001 et 2004 dans toute la sous
région.
1' Le risque encouru par les banques,
évalué par la proportion des créances douteuses dans le
total des crédits accordés est au centre du processus de
transformation des ressources bancaires dans la sous région. En effet,
plus les banques accumulent des créances douteuses, plus elles
deviennent réticentes à octroyer des crédits.
1' La proportion des fonds propres dans l'ensemble des
actifs des banques, semble également être un facteur clé
dans le processus de transformation des dépôts en crédits.
En effet, plus la part des fonds propres d'une banque dans ses ressources
augmente, plus elle est efficace dans la transformation de ses
ressources.
1' Une trésorerie pléthorique pour une
banque pourrait s'interpréter comme la manifestation d'une
inefficacité dans la transformation de ses ressources. En d'autres
termes, plus la part de l'excédent de trésorerie dans les actifs
d'une banque augmente, moins elle est efficace dans la transformation de ses
ressources.
1' Une proportion de fonds propres dans le total des
crédits élevée pour une banque semble être
également la manifestation d'une inefficacité dans la
transformation de ses ressources. Autrement dit, plus la proportion des fonds
propres dans le total des crédits augmente, moins la banque est
techniquement efficace.
Face à ces résultats, plusieurs axes
d'actions sont envisageables pour l'amélioration de l'efficacité
des banques dans la transformation de leurs ressources. Nous évoquons
ici celles qui nous paraissent les plus importantes.
RECOMMANDATIONS
L'analyse des déterminants de
l'efficacité technique pure montre que le risque encouru par les banques
est au centre du processus de transformation des ressources bancaires en
crédits. La crainte de ne pas pouvoir récupérer leurs
créances serait le principal facteur qui justifie le comportement
frileux des banques. Fort de ce constat, nous suggérons quelques mesures
d'incitations à mettre en oeuvre pour une amélioration des
niveaux d'efficacité technique des banques de la sous région
à savoir :
v' L'amélioration du cadre juridique
L'amélioration du cadre juridique dans la CEMAC
est primordiale pour redynamiser le processus de transformation des ressources
bancaires. En effet, le montant élevé des frais de
justice, la lenteur des procédures juridiques
de recouvrement des créances, la partialité des décisions
de justice qui favorisent certains débiteurs au détriment des
banques, l'impunité dont jouissent certains clients influents, la
corruption régnant dans le milieu juridique, sont autant de facteurs qui
entravent le processus de transformation des ressources bancaires en
crédits. Tous ces facteurs susmentionnés font en sorte que les
banques soient réticentes à financer l'activité
économique bien que disposant suffisamment de ressources.
V' La mise en place d'outils appropriés
d'évaluation du risque
Nous suggérons aux banques de mettre en place
des outils appropriés pour l'évaluation du risque au lieu de
s'abstenir à octroyer des crédits. Les banques devraient en
réalité examiner minutieusement les demandes de crédits
qu'elles reçoivent afin d'extirper du lot de ces demandes celles
présentant moins de risque.
V' Le renforcement des fonds propres dans le total de
l'actif des banques
Nous recommandons aux banques de toujours maintenir un
niveau de fonds propres considérable dans leurs actifs. Pour ce faire,
elles pourraient par exemple faire appel à de nouveaux actionnaires ou
augmenter la part des bénéfices non
distribués.
V' La création de structures pour
l'élaboration de projets d'investissements bancables
L'une des raisons évoquées par la
plupart des banques par rapport à leur comportement frileux est
l'absence de projets d'investissements bancables et viables. En effet, les
banques se plaignent que les projets d'investissements qui leur parviennent de
la part des opérateurs économiques ne remplissent pas tous les
conditions nécessaires pour être financés. Nous
suggérons donc aux Etats de la CEMAC de promouvoir la création de
structures pour l'élaboration de projets d'investissements bancables.
Ces structures devraient accompagner les investisseurs potentiels dans le
processus d'élaboration de leur projet d'investissement de la phase de
conception du projet à la recherche des financements.
En définitive, il ressort de cette étude
que malgré tout le processus de restructuration mis en oeuvre par les
autorités monétaires pour assainir le secteur bancaire dans la
sous région, la plupart des banques éprouvent encore des
difficultés à transformer leurs ressources en crédits. La
production de crédits bancaires dans la sous région reste encore
inférieure à ce qui est techniquement possible. La vocation
fondamentale des banques étant le financement de l'activité
économique à travers des prêts aux agents
économiques qui manifestent le besoin, beaucoup d'efforts restent encore
à faire dans la sous région.
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