Il arrive parfois que les éditeurs juridiques se
racontent et se livrent. Ce qui prend souvent la forme de la réponse
à la question: je suis éditeur juridique, que
fais-je, que suis-je?
Et si dans les premiers temps de leurs discours, ils se
présentent, classiquement comme « des
intermédiaires », « des passeurs » entre
les auteurs et leurs lecteurs, qui se chargent de la publication, de la
diffusion et de la commercialisation des ouvrages.
« Je suis Président de Dalloz
depuis plus de 16 ans. J'ai, avec mes équipes, le privilège de
jeter une passerelle entre les auteurs et les
lecteurs.»12(*)
« Selon le Robert, l'éditeur est
celui qui publie un ouvrage littéraire ou scientifique à son
compte pour le mettre en vente. La définition souligne le rôle
économique de ce professionnel et le risque qu'il encourt en se
substituant à l'auteur. Intermédiaire entre celui-ci et le
public, il opère sur deux versants : il assure l`impression et la
fabrication des ouvrages; il se charge ensuite de la publicité et de la
diffusion commerciale ».13(*)
A mesure qu'ils s'épanchent sur la question, ils
font souvent apparaître une configuration moins égalitaire du
monde de l'édition dans laquelle les auteurs, « leurs
auteurs », sont au même plan que les informations qu'ils
sélectionnent et trient et, eux, au sommet d'une chaîne de
diffusion de l'information appelée « chaîne du
livre ».
« Grâce à ses auteurs,
mais aussi grâce à son estampille, et à ses supports. [...]
L'éditeur peut aider à capter (grâce à ses
rédactions internes...) et à sélectionner l'information
juridique pour nourrir les travaux qu'écriront les auteurs qu'il
publiera, communiquer aux auteurs le premier matériau de leur travail.
Le rédacteur en chef d'une Revue proposera
le commentaire de tel arrêt ; il s'efforcera de ne pas seulement
accueillir des propositions de contributions, mais de les
solliciter.»14(*)
« Chaque cahier de la revue est le
résultat de trois opérations : une sélection de
l'information, un traitement de l'information retenue et, enfin, la
publication. [...]
La sélection de la doctrine est la plus
délicate car c'est elle qui véhicule l'image de la revue, donc
l'image de la marque. »15(*)
« Souvent, l'éditeur prend
lui-même l'initiative d'une oeuvre collective dont il détermine
les caractères principaux.
Il est entrepreneur à part entière
et assure pleinement ses responsabilités d'informateur.
Il a alors recours à des salariés,
rémunérés à forfait ou mensuellement. Parfois,
rarement, le contrat est « à compte d'auteur », avec
transfert des risques à ce dernier, qui paie les frais
d'impression. »16(*)
De même, ils attribuent une dimension plus sociale
à leur rôle et à leur fonction. Ils ne se contenteraient
pas de diffuser et publier des ouvrages juridiques, mais diffuseraient et
éclaireraient le droit dont-ils contribueraient également
à la connaissance et à l'amélioration.
Ainsi, selon Charles
Vallée:
« L'éditeur juridique [...] fait
passer de la science juridique à la connaissance du droit. [...] Il
contribue [à l'] éclairer [et] à [le]
diffuser»
« Il [lui] revient par ses auteurs,
d'expliquer le droit positif. »
Il suggère « par la voix de la
doctrine (c'est-à-dire par les auteurs...), au législateur ou au
juge, ce qu'il conviendrait de faire pour améliorer le
droit».
Et enfin « grâce à ses
auteurs les plus vigoureux [il], peut, et même doit, dénoncer la
multiplication de textes elliptiques».