2.2-Approximation des centres articulaires
Le mouvement de départ du sprint sollicite à la
fois les membres inférieurs et supérieurs. Vu la grande amplitude
des efforts exercés au niveau de ces segments (§-4.2), la
précision des couples articulaires calculés est dépendante
de la précision avec laquelle les centres articulaires sont
localisés. Les études qui traitent de ce problème sont
nombreuses et il est possible de les distinguer selon deux grandes
approches.
La première approche est dite
prédictive : elle estime la position du centre articulaire
à partir de régressions linéaires faisant intervenir les
dimensions et la géométrie du segment. La position du centre
articulaire est donc exprimée dans un repère local défini
par un emplacement précis de marqueurs cutanés. Suite à la
comparaison de trois approches prédictives, Kirwood et al. (1999)
démontrent que la détermination du centre articulaire de la
hanche peut se faire en calculant le milieu de la distance entre l'épine
iliaque antérosupérieure et la symphyse pubienne pour ensuite
descendre de 2 cm. Les erreurs d'approximation sont de l'ordre de 0,7 cm
suivant l'axe médiolatéral (OiZi) et 0,8 cm suivant la
verticale (OiYi). L'auteur considère cette méthode
valable pour l'analyse de la marche puisqu'elle permet l'estimation des moments
articulaires avec une précision de 95% [Kirw 99].
Dans le cas de l'étude du départ de sprint,
l'approche prédictive est adoptée pour les articulations du
poignet, du coude, du genou et de la cheville. Le centre fonctionnel de ces
articulations est donc défini au milieu des deux marqueurs
techniques et anatomiques situés respectivement sur la
partie latérale et médiale de l'articulation concernée,
telles que les malléoles latérale et médiale dans le cas
de la cheville (figure 79).
La seconde approche est dite fonctionnelle :
elle se base sur la réalisation de mouvements simples de
flexion-extension, d'abduction-adduction et de circumduction. L'ISB recommande
l'utilisation de la méthode des axes hélicoïdaux [Wu 05].
Toutefois, cette méthode est sensible à l'amplitude et à
la vitesse du mouvement [Camo 06, Ehri 06].
Plusieurs études se sont intéressées
à la comparaison des différentes méthodes fonctionnelles.
Dans ce sens, Begon et al. (2007) démontrent que le type de mouvement,
son amplitude et le nombre de répétitions possèdent un
effet significatif sur la détermination du centre articulaire de la
hanche. Ces auteurs recommandent d'effectuer 10 répétitions avec
des amplitudes limitées tout en associant des mouvements de
flexion-extension, d'abductionadduction et de circumduction [Bego 07].
L'étude de Monnet et al. (2007) confirme ces recommandations, et
démontre la validité de la méthode SCoRE (pour Symmetrical
Centre of
Rotation Estimation) lorsque les mouvements sont
réalisés à faible vitesse. La méthode SCoRE a
été développée par Ehrig et al. (2006) pour la
détermination du centre fonctionnel de l'épaule (articulation
scapulo-humérale).
Prenant en compte ces recommandations, des pré-tests
sont effectués en utilisant les coordonnées de marqueurs
techniques et anatomiques afin d'estimer les positions des
centres articulaires de la hanche et de l'épaule dans un repère
proximal et/ou distal (figure 80) tout en utilisant la méthode SCoRE.
Ainsi, connaissant la position de chaque marqueur dans
R0, il devient possible de construire un repère distal
gtd d'origine d et un repère proximal
gP d'origine P. La position du point I correspondante
au centre fonctionnel de l'articulation est supposée invariable en
fonction du temps dans Rd et ap.
Cette hypothèse est simplificatrice car les articulations
possèdent des centres instantanés de rotation du fait de la
complexité de la géométrie des surfaces osseuses en
contact. Toutefois, malgré cette hypothèse, la méthode
SCoRE permet une approximation des centres articulaires avec une incertitude de
1,2 mm [Ehri06].
|
|
|
Pour la hanche
A : [EIPS D]
B : [EIPS G] C : [EIAS D]
D : [EIAS G]
E : [CondLat D]
F : [CondMed D]
P : barycentre des points A,B,C,D
D : milieu de [EF]
|
g0
|
|
|
|
|
|
Figure 80 Positions des marqueurs pour la
définition des centres articulaires de la hanche droite et de
l'épaule droite (Vue antérieure)
La position du point I (figure 80) peut être définie
dans R.0 comme suit :
~~~ ~~~~ ~~~
OI oto =
Odoto + R 0d
dI ad Éq.VII. 5
tel que R0d est la matrice
rotation de Rd dans le repère fixe
R.0
aussi Oho = OP
go+ R0P PI
aP Éq.VII. 6
tel que Rf est la matrice rotation de
RP dans le repère fixe R.0
~~~~ ~~~ ~~~~ ~~~
d'où Odgo+ R 0 d
dI = OPgo +R o
PIgtP Éq.VII. 7
~~~
Dans cette dernière équation, seuls les vecteurs
positions du centre articulaires (dI ad
~~~
et PI aP
|
) sont inconnus. Cette relation peut s'écrire en
regroupant les deux grandeurs
|
inconnues dans un seul vecteur :
dI~~~~ ~~~~ ~ d ~~~
= OP Od
~ - ~
~ ~
PI ~ P
~~~
Éq.VII.8
R d
0 R0
3 x 6 6 x 1 3 x 3
L'écriture de l'équation (Éq.VII.8) sous
cette forme présente un système linéaire composée
de six inconnues pour trois équations. Ainsi, suite à
l'enregistrement de la position des marqueurs techniques et
anatomiques de l'instant ti à l'instant tf
lors des mouvements de flexion-extension, d'abduction-adduction et de
circumduction de l'épaule et de la hanche répétés
10 fois à faible vitesse, il devient possible de former le
système linéaire suivant :
~~~~ ~~~~
R d ( ) ( )
t -R P t ~~~ OP Od
( ) ( )
t - t
0 i 0 i i i
dI ~ d
? ? ~~~ = ?
PI ~~~~ ~~~~
d ~ P
( ) ( )
t -R P
R t OP ( ) ( )
t - Od t
0 f 0 f f f
|
~ ~
|
Éq.VII. 9
|
Étant exprimée dans les repères locaux
ad et RP, la position
instantanée du centre articulaire I est donc invariable tout au long de
l'enregistrement.
Le système obtenu (Éq.VII.9) est de la forme ax
= b . La résolution d'un tel système linéaire se fait
en introduisant la pseudo inverse a+ tel que
a+b donne la solution des moindres
carrées x qui minimise
ax - b 2 tel que a + = (
a T a )-1 aT avec
aT et a-1 respectivement
transposé et inverse de a .
Ainsi, suite à l'adoption de la méthode SCoRE, la
position du centre articulaire de la hanche et de l'épaule dans
Ed et aP sont estimées par
l'équation suivante :
~~~
dI ad
RaP
|
|
( a T a ) -1a T b
|
Éq.VII. 10
|
Les résultats issus de ces calculs d'approximation des
centres articulaires comme ceux issus de l'approximation des axes anatomiques
dépendent fortement des positions des marqueurs cutanés
placés sur l'athlète. À ce sujet, une série
d'études portant sur l'analyse du mouvement en biomécanique,
démontre que l'incertitude associée à la position des
marqueurs est importante [Capp 05 ; Chia 05 ; Croc 05 ; Lear 05]. Cette
imprécision provient des tissus mous et de leurs mouvements qui reste
l'un des problèmes irrésolus de l'analyse du mouvement in
vivo.
|