CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Dans le cadre spécifique de notre programme de
formation en économie de la santé, une étude descriptive
intitulée « essai d'approche des comptes nationaux de la
santé en République Démocratique du Congo : cas du
district sanitaire de Boma », s'est déroulée de septembre
à novembre 2005 dans le District Sanitaire de Boma.
Elle avait pour objectif de contribuer à une meilleure
gestion et planification des services de santé dans le district
sanitaire de Boma selon l'approche des comptes nationaux de la santé.
Pour y arriver, elle devait déterminer le niveau de
santé du district sanitaire de Boma, l'importance relative des secteurs
public et privé, de la communauté internationale et des
ménages dans le financement de la santé pour ce district ; de
préciser l'origine des fonds (ressources) et leur affectation
(fonctions) dans le district, de déterminer également les
dépenses de santé du district ainsi que leurs implications et de
permettre enfin une meilleure utilisation des informations relatives au
financement du district sanitaire afin d'en améliorer les
performances
Cette étude descriptive, grâce à l'usage
d'un questionnaire et une revue documentaire fouillée, permit de
récolter des informations auprès des ménages, des
formations médicales, des employeurs, des bailleurs de fonds du
district, des ONG actives dans le domaine de la santé et des
représentants du ministère de la santé dans le district ;
selon la méthodologie de l'OCDE et du modèle simplifié des
CNS du Maroc.
Ainsi, différentes constatations furent faites au
niveau de ces différentes sources de dépenses de santé.
En effet, notre étude a permis de constater que le
montant global des dépenses de santé dans ce District, a atteint
en 2004 la somme de 902551950 FC ou 2005671$ qui équivaut environs
à 4364 FC par habitant soit +/- 10$ par habitant.
L'analyse approfondie de ces dépenses nous
révèle également que le coût moyen d'une ordonnance
médicale, tout épisode maladie confondue, varie en moyenne entre
2274 et 5153 FC (soit 5 à 11$) tandis que le coût d'une
consultation médicale dans une formation médicale varie entre 652
et 725 FC (soit 1.4 à 1 .6$).
Ces frais de consultation sont à 38%
dépensés pour les enfants de moins de 5 ans.
On ajoutera à cela qu'un accouchement coûte en
moyenne 12450 FC aux ménages (soit l'équivalent de 28$)
On a pu constater aussi grâce à notre travail que
dans 76,4% des cas, les ménages déclarent payer eux-mêmes
leurs frais des soins médicaux ; et cela grâce à leurs
salaires ou aux revenus d'une activité régulière (dans 54%
des cas) toute Zone de santé d'origine confondue. A ce sujet, une
relation significative entre la Zone de Santé et l'origine des frais
pour le paiement direct des ménages a été mise en
évidence.
Le constat fut fait également que la source principale
de financement du district est constituée par les ménages qui
sont à l'origine de 39.4% des dépenses.
Ils sont suivis par les employeurs publiques (29.4%) et par la
coopération
internationale (28.2%).
A ce sujet, 54% de ménages ont un revenu mensuel moyen
compris entre 15000 et 50000 FC mais ne dépensent en moyenne qu'un
montant allant de 1000 à 5000 FC ; sans jamais dépasser la
hauteur de leurs revenus.
Il n'existe pas de relation statistiquement significative
entre les dépenses de santé des ménages et le niveau
d'étude du chef de ménage, sa profession, son statut matrimonial
ou sa Zone de Santé d'origine.
Par contre, il existe une relation significative entre le
choix du type de traitement et la hauteur des dépenses de santé
surtout pour les enfants < 5 ans, les femmes enceintes et les hommes adultes
; et les ménages choisissent (dans 46 à 75 % des cas) le
traitement dans une formation médicale quelle que soit la Zone de
Santé d'origine ou leurs revenus mensuels moyens.
En ce qui concerne la notion des CNS par pathologie, le
présent travail a pu mesurer l'importance des maladies fébriles
dans les dépenses de santé surtout pour les enfants < à
5 ans et >à 5 ans, les femmes non enceintes et les hommes ; en
retenant l'existence d'une relation significative entre la maladie
présentée par les membres du ménage et les dépenses
de santé.
De plus, un épisode de maladie fébrile
coûte en moyenne aux ménages 3084 FC (soit 7 $) avec des petites
différences selon les catégories des membres de ménages
concernés.
Pour ce qui est des femmes enceintes, les dépenses de
santé sont surtout dues aux affections gynécologiques et
obstétricales sans qu'une relation significative ne soit
observée.
En rapport avec les employeurs, on a pu observer que les
entreprises publiques réalisent plus des dépenses pour le
remboursement des soins de santé de leurs agents ; et que l'existence
d'un centre médicale intra-muros alourdit davantage leurs
dépenses.
On a aussi relevé à ce niveau qu'un agent
coûte en moyenne 353,2$ par an à son employeur dans une entreprise
publique et 34$ par an dans une entreprise privée.
Les ONG de santé quant à elles, orientent plus
leurs actions vers l'appui pour l'achat des médicaments et autres
fournitures médicales, l'éducation pour la santé ; en
défaveur de la réhabilitation nutritionnelle, de l'assainissement
et salubrité, de la recherche et du développement et de la
formation des professionnels de santé.
Les bailleurs de fonds quant à eux, dont la
Coopération Technique Belge est le plus important de tous, appuient plus
l'achat des médicaments et fournitures médicales,
l'administration des services de santé, les équipements et les
infrastructures de santé.
Pour finir, notre étude a pu mettre également en
évidence le fait que les formations médicales et les
représentants du ministère allouent plus des fonds pour les
dépenses opérationnelles ; et ils reçoivent plus d'apports
financiers sous forme de subsides et autres transferts surtout pour celles
situées en milieu urbain.
Ainsi compte tenu des différentes informations
recueillies tant en ce qui concerne l'origine que l'affectation des fonds
mobilisés pour le financement du District Sanitaire de Boma, nous
pouvons émettre les recommandations suivantes :
a) Aux prestataires des soins :
> Veiller à la tenue correcte régulière
et transparente et selon les normes des différents outils de gestion
financière
> Assurer une répartition équitable des
subsides et autres transferts en privilégiant tous les secteurs de
dépenses (toutes les fonctions)
> Fournir aux éventuels bailleurs des informations sur
leurs besoins réels de financement et participer aux négociations
devant y aboutir.
> Veiller à plus de rationalité dans les
prescriptions et ordonnances médicales selon une tarification
réaliste.
b) Aux entreprises :
> Encourager leurs agents à consulter les institutions
médicales
publiques pour des soins de santé efficaces et
efficients
> Réduire les dépenses de santé en
assurant un contrôle rigoureux de leurs services médicaux
intra-muros de manière à réduire les ordonnances
médicales et les transferts inutiles
> Mettre à la disposition du Ministère de la
santé, toutes les informations relatives à leurs dépenses
de santé
c) Aux ONG :
+ Fournir un effort pour se conformer le plus possible aux
informations découlant du SNIS de manière à orienter leurs
interventions dans le secteur de la santé
+ User de plus de transparence dans la présentation de
leurs informations sanitaires.
d) Aux bailleurs de fonds :
> Informer les structures bénéficiaires de
l'appui sur les montants exacts des dons, subsides ou interventions en
nature
> Associer les bénéficiaires dans le choix des
activités à appuyer, en tenant compte des réels besoins de
la base.
> Veiller à une tenue standardisée des
outils de gestion financière en spécifiant clairement les
activités pour lesquelles les ressources sont allouées
> Fournir à leurs cellules d'appui locales ou
à leurs représentations locales toutes les informations
financières les concernant et sans trop les centraliser.
e) A l'Etat (Ministère de la santé) :
> Mener des démarches pour rendre effectif le lancement
des CNS en RDC pour la mesure des dépenses de santé.
> Veiller à la préparation d'un manuel
écrit pour les estimations des CNS en RDC, prenant en compte les sources
de données sur les dépenses, les classifications et les
définitions utilisées.
> Contrôler les dépenses de santé
réalisées dans les entreprises publiques de manière
à éviter les effets négatifs du risque moral et de la
demande induite.
> Former, en collaboration avec le Programme National des
Comptes Nationaux de la Santé, un comité de pilotage et une
équipe de CNS pluridisciplinaire.
> Standardiser les outils de gestions financières
des services et établissement des soins de santé pour l'ensemble
du pays, et quel que soit le réseau (public ou privé).
> Convaincre les partenaires pour fournir le montant exact
de leurs interventions, en nature ou en espèce, aux différentes
structures bénéficiaires.
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