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Exploitations agricoles familiales et projets d'agrocarburants de proximité au Sénégal: cas du projet Jatropha dans le département de Foundiougne

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par Amadiane DIALLO
Université catholique de Louvain - Master 2 en politique économique et sociale finalité développement/ politique et gestion de projets 2011
  

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5.4- Rapports à la paysannerie : monocultures industrielles ou agrocarburants de

proximité avec la polyculture paysanne

Le modèle dominant dans la mise en oeuvre des agrocarburants reste la monoculture industrielle caractérisée par un mode de production capital-intensive basé sur une utilisation massive d'énergie, d'eau, d'intrants chimiques dans de très grandes superficies. « Elles s'étendent en pratique soit aux dépens de zones dites inhabitées (forêts, savanes, etc.), soit au détriment de la polyculture paysanne ou d'autres activités agricoles ». (CETRI, 2010). Ce sont généralement de grandes entreprises privées qui travaillent en régie et emploient les petits producteurs comme ouvriers agricoles. Malgré cette utilisation de main-d'oeuvre, les monocultures sont taxées souvent de « destructrices d'emplois et de moyens de subsistance ». En effet, les emplois qu'elles créent par unité de surface exploitée sont en dessous de celles assurées par une agriculture paysanne diversifiée de nature labour-intensive. Dans beaucoup de pays comme l'Indonésie, les monocultures industrielles pour agrocarburants sont « destructrices de l'agriculture paysanne et ont accru l'insécurité alimentaire du fait du remplacement de cultures visant l'alimentation, de la réorientation de l'usage de cultures alimentaires, et de l'utilisation de terre, d'eau et de main d'oeuvre précédemment dédiée à la production d'aliments. » (Ibid.)

Une étude de la banque mondiale, référenciée précédemment, révèle que « les salaires payés sur les plantations ne sont en moyenne qu'une fraction (entre 1/2 et 1/10) des revenus de petits paysans indépendants ». Le rapport 2010 de l'UNICEF indique que dans un pays comme le Guatemala, 2ème fournisseur de l'Union Européenne en éthanol, ces « revenus sont

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Mémoire Master Amadiane DIALLO

insuffisants pour alimenter une famille : la malnutrition atteint 1 enfant sur 2 et 80% de la population indigène qui fournit la main d'oeuvre pour les grandes plantations (UNICEF, 2010) ».

A côté de ce modèle, d'autres projets tentent de relever le défi de l'accès ou de la satisfaction des besoins en énergie pour les populations rurales. Il s'agit de filières d'agrocarburants de proximité qui, à l'échelle d'un territoire restreint, reposent sur des savoir-faire existants et des technologies simples, et impliquent des artisans locaux intervenant aux différents maillons de la chaîne de production : production de la matière première énergétique, extraction de l'huile végétale et prestation de services divers. Pour le cas du Jatropha, l'huile végétale pure (HVP) obtenue est destinée à la satisfaction des besoins locaux tels que la fourniture d'énergie aux groupes électrogènes pour les moulins à céréales, les forages et à de petites centrales électriques qui fonctionnaient tous avec du diésel. En effet, l'huile du Jatropha peut remplacer progressivement le diesel dans toutes ses utilisations en milieu rural.

Ces types de projet sont ainsi différents des mégaprojets qui privilégient la monoculture comme principale forme de production et transforment le paysannat en ce que François

HOUTART appelle « le prolétariat rural ». Faisant une comparaison, il affirme que : « à côtédu palmier à huile, plante plutôt bourgeoise qui entraîne des déforestations massives, le

Jatropha curcas apparaît comme une plante prolétaire car n'importe qui peut la faire pousser ».

Des expériences prometteuses de projets d'agrocarburants de proximité avec le Jatropha existent dans beaucoup de pays comme le Mali et la Tanzanie. Au Mali, c'est M. Reihnard HENNING de la coopération allemande qui a initié le concept de "Système Jatropha" basé sur l'introduction du Jatropha au sein du système de production d'un village. Quatre composantes principales ont été ciblées. D'abord, « la lutte contre l'érosion » avec des haies plantées sur des pentes pour diminuer le ruissellement et l'infiltration rapide. La « fertilisation des sols » est la seconde composante. Elle consiste à utiliser les produits dérivés de la plante comme les feuillages, les tourteaux, les coques pour en faire de l'engrais organique et remplacer les engrais minéraux coûteux importés. Ensuite, vient le volet de la « réduction de la pauvreté » induite par : l'utilisation de l'huile végétale pure dans des moteurs diésel pour satisfaire des besoins locaux, l'amélioration des rendements par la fumure organique, la diminution des pertes imputables à la divagation des animaux avec la généralisation des haies vives de Jatropha. Enfin, il y a la « promotion des activités annexes pour les femmes » comme dernière

composante : organisation autour d'unités de production de savon, rémunération des tâches comme la cueillette des fruits et le traitement des graines, allégement des travaux avec l'installation de moulins tournant à l'huile de Jatropha. Dès lors, le système Jatropha est de nature à rendre la vie au village plus aisée. (ALPHA GANO A. K., 2011).

Selon HENNING, « le système Jatropha est une approche de développement rural intégrée dont l'avantage capital est de pouvoir réaliser toute la chaine de production à l'échelle d'un village ». Dans le souci de prévenir d'éventuels impacts négatifs de l'intensification à outrance des cultures de Jatropha au détriment des cultures vivrières, HENNING a suggéréde :

? privilégier la plantation en haie : le projet Jatropha Mali était, en 2007, à plus de 10 000 km de haies vives de réalisation avec un potentiel de production de 200 000 tonnes de graines ;

? privilégier les terrains accidentés et les terres pauvres dans les plantations hors haie vive : sur les 1800 ha de cultures financées par la coopération allemande au Mali, seuls 700 ha sont situés dans des zones de production de maïs.

? éviter au maximum la monoculture

? promouvoir les droits des populations des zones d'exploitations à bénéficier prioritairement des avantages des produits dérivés du Jatropha notamment l'huile végétale pure (moulins, forage...) et les tourteaux (fertilisant organique pour leurs parcelles).

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand