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Roman: "Voix étranglées "

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par Jean- Baptiste NTUENDEM
Université de Dschang - Master 2 2011
  

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CHAPITRE IV

D

epuis ce jour sombre où elle avait appris la disparition jugée mystérieuse de son amant, Angeline NDOLO n'avait plus goûté la tendresse du sommeil. Toutes ses nuits n'avaient plus été que de longs moments de méditation, de lamentation, et surtout, les périodes d'insomnies et de violents cauchemars. La vie n'avait plus de sens pour elle. Les promenades l'importunaient désormais ; le divertissement était sans objet. Pour elle, tous les jours étaient devenus ternes. Elle restait tout simplement dans sa chambre, pareille à une jeune veuve amoureuse qui, ne pouvant pas supporter la disparition de l'homme de sa vie, se soustrait à la lumière du soleil, et s'interdit toute vie publique. La force de cet amour qu'elle témoignait à Menkaazeh' s'extériorisait d'une façon irrésistible.

Angeline n'avait plus eu de force suffisante pour faire la cuisine. Même ces omelettes simples que tout étudiant consomme pendant les dures périodes d'examen lui paraissaient difficiles à faire frire. En une semaine de vie ascétique et de jérémiades, la douce avait subi les méfaits de la métamorphose. Ses longs cheveux noirs et naturellement frisés avaient perdu de leur éclat et de leurs ravissantes ondulations. Son beau teint basané avait subi l'érosion de la claustration et des chagrins.

Mais, dans ces longues et profondes méditations, elle n'avait pas su se convaincre de la disparition de cet être cher dont seule la présence virile l'inondait de bonheur. Au tréfonds d'elle-même, elle était en proie à un doute qui de temps en temps s'emparait d'elle ; elle oscillait entre le pessimisme extrême et d'intermittentes lueurs d'espoir :

- «Non ce n'est pas vrai ! C'est un peu si je rêve ! Cela ne peut pas arriver à ce garçon que je connais très bien. Innocent, sauf cas d'erreur de ma part, n'a jamais escroqué quelqu'un ; il n'a jamais abusé de la confiance d'autrui... Et, d'où vient-il qu'il commette subitement un ``cime politique'', ``un crime grave'', ``une faute très lourde'' comme le prétendent les médias d'Etat ?

Cette pensée lumineuse qui était passée éclairer cet empire sombre de ses chagrins lui avait enfin permis de se ressaisir. Puis, après avoir quitté le bord des larmes quelle avait suffisamment versées depuis une semaine, elle décida d'aller chez conseiller. Elle se voulait désormais rationnelle ; il fallait faire une lecture juridique des évènements, depuis l'annonce de l'arrestation jusqu'à ce jour. N'était-elle pas une juriste débutante ?

- « Il faut que j'aille chez in conseiller juridique. Il faut qu'une autre lumière, plus objective brille sur ces tristes évènements de l'Université. Beaucoup d'arrestations se sont opérées à l'Université, près de moi, avec des motifs les plus hasardeux et contradictoires. Mais, d'où vient-il que même les grandes Ecoles de Formation soient aussi des champs de chasse aux hommes ?» se demanda-t-elle.

Elle avait fini par se décider. La toilette faite après quelques jours de paresse et de désespoir, elle s'était laissée conduire en route par un léger vent d'optimisme.

Le soleil n'avait pas encore le Zénith ce jour de la lune du mois de Julius. La traversée de la ville n'avait pas été de toute aisance, car d'un quartier à l'autre, il fallait se soumettre aux gymnastiques les plus périlleuses. Exercices qui réclamaient des heures entières et beaucoup d'adresse dans cette petite capitale dont on apercevait les frontières dès qu'on se perchait sur l'une de ses sept collines. Cette ville avait un problème réel ; elle n'avait pas bénéficié, dès la fondation, d'un véritable plan d'urbanisation digne des capitales modernes. Les maisons sortaient de terre spontanément, comme des plantes indésirables. Ici, on avait construit son W.C devant la porte centrale d'une maison dont la cuisine crachait quotidiennement ses épais nuages de fumée noire d'usines de houille dans la chambre d'un couple en proie au chômage. Là, on avait creusé de simulacres de caniveaux qui conduisaient les torrents d'eaux noires tout droit sous les lits des voisins dans les zones marécageuses localement appelées « élobis1(*) », les gens s'étaient tout simplement spécialisés dans la fabrication des pirogues et des lits flottants. A voir le spectacle qu'offrait la vie de ce côté-là et, surtout en saison de pluies, on avait l'impression que certaines populations, rongées par la pauvreté et la misère, avaient opté pour la vie à demi ou mieux la non vie. Imaginons des eaux noires sortir lourdement des fausses d'aisance dont les profondeurs n'atteignent pas le mètre, traînant toutes les ordures versées de part et d'autre et prenant du volume avec les eaux usées et des stations d'essence et des maisons nantis ! Lorsqu'il pleuvait, c'était un spectacle invivable qui s'y déroulait. Tout le monde se précipitait à vider toutes ses poubelles dans le torrent ; ces mêmes ordures ménagères, mêlées aux boîtes, aux roues usées et à de la boue empêchant l'eau de ruisseler et, quelques minutes seulement après, tous les « élobis » étaient en crue ! On sortait tout ce qu'on pouvait sortir avant que la fougue des eaux folles ne s'accroisse ; on installait les matelas sur les toitures ou on attachait des filets sur les lattes des plafonds pour dormir.

En bordure des routes, c'était une propreté menteuse ; ce genre de propreté qui ne se constate d'ailleurs que les jours de fêtes nationales ou encore les rares jours où le siège des institutions accueillait des diplomates ou autres hôtes de marque.

Certaines personnes avaient toujours souhaité que la capitale finisse par devenir un théâtre de fréquents ballets diplomatiques, pour qu'enfin les autorités politiques et municipales trouvent au moins une politique d'urbanisation et d'assainissement à la hauteur du crédit dont le pays pouvait auprès de l'extérieur et aux yeux des touristes.

Les reliques des routes étroites mal asphaltées, héritées de la cruelle et monstrueuse colonisation n'offraient que les lambeaux tranchants de leur goudron et des nids de poules aux pneus de véhicules.

Les quartiers n'étaient pas semblables sur tous les points, les populations non plus. Ainsi les mentalités donnaient-elles des configurations les plus diverses à chaque quartier de la cité. Dans certains quartiers populaires, les routes avaient cette triste particularité que les ordures s'étendaient sur des kilomètres, quand elles ne formaient pas des montagnes. Lorsque les véhicules y arrivaient, les passagers étaient toujours obligés de remonter rapidement toutes les vitres et de couvrir entièrement le visage de leurs mouchoirs, car tout ce qui s'y trouvait était suffisant pour faire avorter une femme, ou donner une nausée chronique.

Ces poubelles aux mille ordures nourrissaient mille insectes différents et des milliers d'animaux d'espèces variées. De tous les insectes, les mouches aux vêtements de deuil étaient d'une présence étouffante. Elles réussissaient très souvent à mettre à sec les corps suintants d'animaux imprudents que certains chauffeurs en proie à l'alcool écrasaient à leur passage. Lorsqu'une voiture amorçait les premiers mètres de la route envahie, ces mouches voraces se levaient, s'envolaient et couvraient le ciel couleur d'azur de leurs larges voiles noires, créant ainsi une nuit artificielle, parfois même en plein midi !

Les souris n'y manquaient jamais, elles qui avaient déserté les maisons assiégées par la crise économique, elles y avaient trouvé un sempiternel refuge paradisiaque. Certaines souris aux appétits aiguisés, à force de ronger tout ce qu'elles y trouvaient de comestibles, avaient curieusement décuplé de volume, prenant ainsi d'étranges formes des rats des champs. C'étaient des souris d'une fertilité surprenante, peut-être l'abondance de la ripaille expliquait-elle cette reproduction accélérée ?

Certains gamins, appelés communément ``enfants de la rue'' ou ``enfants des poubelles'', y trouvaient tout pour s'occuper et de quoi satisfaire un estomac même le plus exigeant. Voyons, on y trouvait presque tout. Et, très tôt le matin, ils étaient déjà là, qui rôdaient d'un bout à l'autre, de la base vers le sommet et vice-versa. Certains collectaient tout ce qui contenait de l'aluminium ; et, c'était leur spécialité. Pour eux, c'était suffisant pour avoir de la pitance quotidienne et de quoi s'acheter de la cigarette, de la drogue ou de la boisson alcoolisée. D'autres ramassaient des bouteilles qu'ils classaient selon qu'elles pouvaient être vendues aux revendeuses d'huile de palme ou aux propriétaires des débits de boisson. C'étaient des sales métiers, mais ces exclus de la société, ces oubliés du Ministère des affaires sociales, ces enfants pour qui la journée internationale des droits de l'Enfant n'a pas de sens « vivaient » à leur façon dans notre monde. D'autres se nourrissaient des restes sortis des maisons où coulaient le lait et le miel. Presque toute la capitale passait par là, nuit et jour et les voyait bien ! Mais, personne n'osait interroger sa conscience ! Même le 20 Novembre, c'était l'apathie !

Angeline dont l'esprit était presque hors du corps avait réussi à résister à sa manière à se sombre décor et à ces spectacles troublants que présentait tout ce grand théâtre scandaleux. Le taxi aux ressorts amortis par les routes avait tout de même réussi à aller la laisser ``Rue THEMIS''. C'était dans l'un des rares quartiers de cette époque, où un heureux hasard avait guidé l'urbanisation.

Ici, il fallait bien sûr être d'une certaine couche sociale pour acquérir un lopin de terre, ou une maison conventionnée tous vendus à prix d'or. Les maisons, construites avec des matériaux locaux importés étaient d'une éclatante beauté.

Devant le cabinet du conseiller, légèrement en bordures de route, en face d'un immeuble occupé par un avocat et un notaire très réputés, une petite plaque métallique portait les inscriptions :

Cabinet du Dr METJEL : Conseiller juridique

B.P. 1992, RUE THEMIS

Tél: 11-10-92

Dans la large salle où Angeline avait fait son entrée, il se dégageait une forte odeur de livres. On avait l'impression qu'on ne pouvait pas y faire un moindre pas à droite comme à gauche sans risquer de se faire aplatir au sol par de gros livres et toutes sortes d'encyclopédies. Mais, cette odeur de papiers secs soigneusement conservés était légèrement dissipée par un climatiseur ultramoderne qui rafraîchissait la salle et récréait une atmosphère très agréable et très propice et à la lecture et à la conversation.

La porte principale tapissée, à battants garnis de cuir, donnait immédiatement sur la Rue THEMIS. Les murs lisses étaient tendus avec des étoffes d'une blancheur laiteuse et dont les broderies présentaient une grande balance placée devant une belle femme assise devant un temple, et tenant une épée de sa maison droite. Les cheveux lisses et blonds, un bandeau sur les yeux, son nez pointu, ses lèvres fines et minces rappelaient en tous points la divine Thémis, l'impartiale gardienne des lois divines, déesse de la justice.

Le cabinet de Dr METJEL avait tout d'une bibliothèque : des livres d'histoire universelle, histoire de l'Afrique et, histoire du pays. C'était un grand consommateur de la littérature et, surtout les romans policiers il s'intéressait beaucoup aux droits de l'homme, et à la criminologie. Le 10 Décembre était un jour sacré pour lui. Au centre, les beaux sièges mousseux formaient un demi-cercle autour des tablettes à glaces et aux pieds dorés et, sur lesquelles étaient posés des pots pleins de mosaïques de fleurs.

Sa table de travail faisait face à certains meubles au cuir noir ciré. Derrière, c'était un long buffet plutôt court, sur lequel on pouvait lire à gauche, dans un grand cadre, quelques phrases de la déclaration universelle des droits de l'Homme. Il y avait ceci de particulier que, les Articles 18, 19 et 20 de cette déclaration universelle des droits de l'Homme étaient écris en gros caractères, et frappaient à distance. A droite, c'était la constitution du pays. A quelques centimètres au-dessus, était suspendu un portrait du Président de la République à l'aube de son règne. Il y arborait un sourire candide sur lequel on pouvait lire les indices d'un avenir prometteur. Légèrement en dessous, c'était l'un des plus beaux portraits que le Conseiller avait fait dans un Amphithéâtre, du temps où il enseignait à l'Université fédérale. Cette image majestueuse montrait l'homme dans une attitude magistrale. Devant lui, sous ses pieds, un immense parterre le regardait religieusement et consommait avec délectation son docte cours. Cette image, le Conseiller aimait la contempler ; elle lui rappelait sa première profession dont il parlait parfois avec nostalgie.

L'homme, la cinquantaine révolue, était l'un des premiers enseignants qui avaient eu l'auguste honneur de dispenser les cours à l'Université fédérale après son inauguration, quelques années après l'accession du pays à l'indépendance.

Après son long séjour européen à la recherche du savoir, l'homme était retourné au pays avec un bagage intellectuel digne d'un jeune intellectuel dont avait besoin l'Afrique.

Pétri de bonne volonté, débordant d'énergie, gonflé d'enthousiasme, patriote jusqu'aux bouts des ongles, le jeune professeur était dévoué à la cause de leur jeune nation.

A cette période, le délicat timon de l'Etat était déjà entre les mains de ses compatriotes. Mais, le chat blanc parti, les souris noires se mirent à démontrer leur voracité aux populations timorées. Après quelques années d'enseignement, ses échos messianiques parvinrent un jour aux oreilles méfiantes et soupçonneuses du régime en place qui décida de le mettre à l'index. Désormais, tous les amphithéâtres étaient plus fréquentés par des espions, des délateurs que de vrais étudiants. Il était désormais devenu comme un lion enfermé dans une cage. Tous ses cours, tous ses gestes, tous ses propos étaient minutieusement tamisés.

Ses cours portant sur le Droit Constitutionnel et surtout sur les régimes politiques n'étaient pas du goût du régime en place. C'étaient, selon ce régime ombrageux, des cours destinés à former des opposants et des révolutionnaires redoutables. Aussi avait-on décidé, faute de le museler immédiatement, de faire passer au préalable tous ses cours à la censure ! A force d'y dépister trop d'éléments susceptibles de trahir les pratiques sordides et antidémocratiques du régime en place, les censeurs optèrent pour les bastonnades répétées : les passer au caviar n'était plus suffisant. Après avoir amèrement constaté que tous ses moindres toussotements étaient désormais considérés comme des provocations contre le pouvoir en place, après avoir constaté qu'on avait malignement mis feu dans sa bibliothèque, l'homme avait résolu de déposer la craie !

Ne voulant pas quitter définitivement Thémis dont il se voulait un inséparable serviteur, l'homme avait embrassé la profession libérale de conseiller juridique.

Il était tranquillement et douillettement assis dans son mousseux, le Conseiller. C'était déjà un vieux routier. Mais ses cheveux noirs cachaient son âge. Son aisance et sa fraîcheur cachaient un passé hideux qui failli écourter son séjour sur terre. En face de lui, Angeline avait pris place et parcourait les rayons de la nouvelle bibliothèque d'un regard anxieux et inquiet.

- A qui ai-je l'honneur ce jour de la lune, jeune et charmante créature, demanda le Dr Métjel, avec une cordialité de grands éducateurs.

- A Mlle NDOLO Angeline, lui répondit la jeune perle, toujours en proie aux inquiétudes.

- Alors, Angeline en quoi puis-je vous être utile, s'il vous plaît ?

- Euh... Oui Monsieur le Conseiller, je suis étudiante à la Faculté de Droit. Je ne suis que débutante pour le moment.

- Ah ! Voilà qui est de la maison de Thémis ! Mais, dites, qu'est-ce qui fait défaut à votre bonheur ce jour, charmante Angeline ? Est-ce méchant séducteur qui a essayé de vous déposséder de vous-même ?

- Non, loin de là, Monsieur le Conseiller. La fleur de ma virginité, je l'avis fait enlever par un doux et charmant garçon à qui j'avais confié mon coeur. Mais, ce garçon qui incarne la tendresse, un vent violent me l'a mystérieusement arraché depuis une semaine, répondit Angeline, d'un ton qui suscita pitié et compassion.

- S'il vous plaît Angeline remettez-vous dans votre jolie peau et racontez-moi posément votre histoire fit Métjel qui s'apprêtait à consigner les données du délicat problème.

- J'ai un amant, étudiant à l'Ecole Normale Supérieure, jusqu'à sa mystérieuse disparition vendredi dernier. A mon retour d'un voyage d'une semaine, j'avais à peine ouvert ma porte, quand une amie mienne était venue m'annoncer qu'il avait été arrêté et incarcéré. C'était avait-elle précisé, un communiqué de la radio nationale. Mon amie, une fille crédible, m'avait précisé de manière emphatique, qu'il s'agissait d'une faute politico-criminelle, et que, eu égard à la gravité de cette faute impardonnable, ils étaient passés par les armes.

A ce témoignage, ses larmes se mirent à ruisseler, franchissant à grosses gouttes la digue de ses paupières. Le Conseiller s'investit pour tarir la source lacrymale et n'y réussit que grâce à sa dextérité peu commune.

A l'annonce de cette triste nouvelle, j'avais immédiatement tenu à me rendre chez Menkaazeh' Innocent, c'est son nom, afin de m'enquérir de la réalité. Mais lorsque j'étais arrivée devant la porte désertée de sa chambre, j'avais amèrement constaté que les cambrioleurs l'avait littéralement vidée de tout son contenu ! Le plafond était éventré ; les murs étaient dénudés ; la table d'étudiant était emportée avec tout : téléviseur, lecteur de cassettes, dictionnaires, et livres, diplômes... tout était emporté ! La penderie, le lit, bref tout ! La chambre était d'une humidité de glace ! On aurait dit que son occupant avait déménagé depuis un an !

- Quelle était la nature de leur faute avez-vous dit ?

- Mon amie m'avait parlé d'une faute politico-criminelle, reprit-elle fidèlement.

- Adjop djem ! é a poua yem ! é a Um Nyobé ! é a Ouandié1(*) ! C'est quoi une faute politico-criminelle, Hein ? Lui demanda le Conseiller dont la consonance du dangereux vocable avait fait sauter les lunettes. Les deux mains implorantes, la bouche largement ouverte, les yeux écarquillés, il regardait la jeune fille apeurée comme si elle sortait d'un univers jamais imaginé.

- Monsieur le Conseiller, ce vocable-là échappe à mon entendement moi aussi.

- Ecoutez, il y a comme une sorte d'amalgame dans ce que vous révélez-là, Mademoiselle Angeline NDOLO. En droit, ce vocable assourdissant est un galimatias, précisa le Conseiller juridique.

Mais le comportement quasi ingénu de la jeune fille avait fini par prouver au Conseiller qu'elle ne plaisantait pas. Aussi avait-il pris la ferme résolution de percer l'énigme.

- Angeline, je sais qu'il y a les délits, il y a les contraventions, il y a les infractions et il y a les crimes. Tous ça relève du droit pénal, vous comprenez ? Le crime est un comportement punissable d'emprisonnement allant de dix ans à la peine de mort, fit-il posément.

Malheureusement l'expression ``peine de mort'' avait profondément froissé Angeline. Aie ! La peine capitale ! Elle en avait lu les effets chez Victor Hugo ; elle en avait entendu parler par ses parents et tous ceux qui avaient connu l'époque des luttes d'indépendance, quand les nationalistes capturés par le pouvoir colonial étaient présentés au peuple naïf comme des « Maquisards », et par conséquent bons pour la fusillade ou la pendaison sur la place publique !

- Veuillez vous calmez ; veuillez vous calmer ; calmez-vous. Soyez tranquille dans notre peau. Nous n'en sommes qu'à la simple phase des définitions des termes sont capitales. Le délit est un comportement punissable d'un emprisonnement allant de un à dix ans, d'une amande allant jusqu'à vingt-cinq mille francs. Cette deuxième définition avait moins apeuré la jeune fille. Elle n'avait pas trouvé dix ans longs ou insupportables. C'était trop certes, cela ressemblait à un bannissement, c'est vrai. Mais, c'était plus acceptable. Car elle pourrait encore attendre dix ans et être sûre de revoir cet être qui lui était si cher. Mais, la peine de mort !... No, non et mille fois non ! Cette idée écourterait son séjour sur terre. Elle était même à se demander ce qui avait poussé des mortels pourtant si avides d'éternité, à penser à un article aussi lourd de conséquences et aux senteurs de boucheries.

- La contravention est une infraction dont l'auteur est punissable d'un emprisonnement allant jusqu'à deux mois et d'une amende ne dépassant pas dix-mille francs.

Une fois de plus Angeline n'avait pas senti souffler un mauvais vent, un vent à irriter le toucher. Le rythme de son coeur sensible avait une cadence régulière. Car dix-mille francs à payer et deux mois de séparation ! Si tel était le cas, elle trouverait cette justice humaine. Mais la peine de mort ! La fusillade !... La pendaison !... Sur la place publique encore ! Ah ! Un triste spectacle à éclabousser et son image et toute celle de sa famille ! L'amante d'un pendard ! L'amante d'un « ennemi de la République » ! Non ! Non et non !

Le Conseiller, très soulagé, avait manifesté une joie perceptible à ce calme qu'affichait désormais son interlocutrice. Puis, il continua :

- On distingue trois types d'infractions : il y a l'infraction pénale ; il y a l'infraction civile et il y a l'infraction disciplinaire. L'infraction c'est un fait prévu par a loi et sanctionné par elle d'une peine. Jusqu'ici, Angeline n'avait pas encore compris ce qu'on aurait reproché à son amant, au point de l'arrêter de façon mystérieuse et le mettre à mort ! Le tuer, oui, tuer... Innocent ! Le tuer ! Non, non et non !

- Votre amant serait-il l'auteur matériel d'un crime, d'un vol, d'un abus de confiance ou d'une escroquerie ? Demanda le Conseiller en la regardant cette fois droit dans les yeux, fixement, comme pour la contraindre à e pas lui dissimuler un éventuel détail.

- L'auteur matériel..., l'auteur matériel...matériel, qu'est-ce ? pensa-t-elle, la tête baissée, l'index appuyé sur son menton.

Le Conseiller avait compris le blocage provoqué par la nouvelle notion. Il entreprit rapidement de revenir aux définitions.

- J'ai failli oublier de vous rappeler que l'auteur est le plus souvent l'auteur matériel. Il existe le co-auteur d'un acte et le complice. L'auteur matériel, c'est celui qui accompli personnellement les actes matériels constitutifs de l'infraction. Le coauteur, c'est aussi celui qui a accompli personnellement les actes matériels constitutifs d'une infraction. Il les a accomplis avec une ou plusieurs personnes...

- Vous voyez, Mlle NDOLO, nous vivons dans un état de droit où chaque citoyen, en respectant les lois qui régissent la société, est libre. Il doit jouir pleinement d'un certain nombre de libertés fondamentales sans lesquelles il ne saurait se considérer comme citoyen. A savoir par exemple : La liberté de pensée, la liberté de conscience, la liberté d'expression, la liberté physique, la liberté civile, la liberté d'opinion la liberté d'association, la liberté... nos législateurs ont prévu tout cela et, tout cela est bel et bien dans l'esprit de la déclaration universelle des droits de l'Homme, hein ? La communauté mondiale reconnaît le 10 Décembre 1948 comme le premier jour de l'histoire de l'humanité ! Et, l'article 9 de la déclaration universelle des Droits de l'Homme est clair !

Bien, supposons qu ces libertés sus-citées soient effectivement respectées pour les citoyens et par ceux qui ont la délicate mission de nous diriger, hein ? Alors est-ce que Innocent votre amant militait dans un parti politique quelconque ? Je tiens d'ailleurs à préciser qu'il en a le plein droit, la rassura le Conseiller qui avait vu la jeune fille frissonner comme si elle avait pris une méchante torgnole.

Angeline n'avait pas frissonné pour rien. Car les partis politiques dans ce tumultueux contexte de transition démocratique étaient devenus ces genres de sectes dans lesquels on initie les citoyens à l'art de haïr et même d'éliminer sans réfléchir, tous ceux qui ont choisi de militer en faveur de tel ou tel parti. C'était tout simplement effrayant ; c'était très difficile à vivre, cette nouvelle ère-là. Beaucoup de citoyens avaient sagement renoncé à militer, surtout dans l'opposition. Il fallait tout faire pour ne jamais laisser sa couleur politique apparaître au grand jour. Mais, le naturel étant difficile à chasser, on finissait parfois, même par inadvertance, par se faire soupçonner soit à travers une certaine façon de manger, soit par sa façon de parler, soit par ses vêtements, ses compagnies, ses lieux de distraction, ses lectures ses chaînes de radios et de télé. C'était difficile. Oui, c'était très difficile d'être citoyen et de vivre ou d'exprimer sa citoyenneté. L'accès à une école de formation, la promotion à un important poste de responsabilité dans l'administration, tout cela était minutieusement contrôlé et, l'unique porte étroite était le militantisme zélé et l'attachement méchamment aveugle au parti au pouvoir. C'était difficile d'être citoyen. Oui, c'était très difficile. Des clans et des tribus avaient payé de leur sang et même de leur vie la transition démocratique. C'était difficile. On ne pouvait pas facilement se réclamer du parti au pouvoir sans risquer de se faire taxer de ``complice des détourneurs et de tueurs !'' Ce n'étaient pas les intimidations qui manquaient ! Ce n'étaient pas non plus de violentes menaces et les tracts savamment confectionnés et qui recommandaient aux citoyens de faire de leurs flèches et de leurs machettes leurs fidèles compagnons volant partout comme des criquets à l'approche de Décembre. Oui, il fallait, en dormant, poser ces armes-là sur le chevet et ne dormir que d'un seul oeil ! Les citoyens d'un même quartier, jadis soudés, dormaient désormais en chien de fusil !

Les partis politiques, ses creusets des apôtres de Satan, recommandaient une vigilance de chasseurs ! Dans les quartiers, les familles qui avaient longtemps vécu dans une harmonie relative se désolidarisaient au rythme des harangues à coloration tribale... il fallait soutenir le ``frère'' ; il fallait ``voter village'' ; il fallait « élire la tribu »...

- Innocent, sans être forcément dans un parti politique, participe à la vie politique de son pays, comme moi d'ailleurs. Il vote, car il a déjà la majorité. Moi aussi.

- Bien, je n'irai pas vous demander pour qui ou contre qui vous avez voté, car, il s'agit là de votre droit le plus absolu et c'est un droit sacré ! En votant, vous faites un choix personnel. Elire, c'est choisir. Et, chaque citoyen est libre de choisir qui il estime être capable pour l'heure, de manoeuvrer le gouvernail de l'Etat. Donc, quiconque vous menace d'avoir voté pour tel ou contre tel est ipso facto considéré comme un ennemi de la Démocratie. Le Conseiller avait compris que les attitudes de Angeline ressemblaient en plusieurs points à celles de beaucoup de leurs compatriotes qui n'avaient pas encore réellement pris conscience de leur citoyenneté dont ils devaient pourtant jouir pleinement. Le mot « politique » ou l'expression « parti politique » relevait du domaine du tabou.

- l'ère des tabous doit être définitivement révolue ! Angeline voyez-vous ? Il me souvient encore que j'ai tout récemment reçu ici même, des citoyens en proie aux persécutions perpétrées par une certaine catégorie de fous qui se réclament et du parti au pouvoir et de la tribu du Président de la République ! Il est tout à fait inadmissible que des gens sans foi ni loi, des gens qui ont vendu leur raison et leur âme au diable, vous espionnent jusque dans les isoloirs des bureaux de vote et vous promettent la mort si vous ne votez pas pour leur candidat ! Çà c'est ce qu'un de mes confrères appelle «une forme masqué du gangstérisme politique »

Et comment un candidat comme d'autres candidats à la magistrature suprême peut accepter un jeu aussi sordide que démoniaque ? demanda le Conseiller. Angeline était quelque peu devenue sereine. Car même les grands juristes du pays étaient au courant de presque toutes les exactions et les supercheries du régime. Mais jusque-là, il lui avait semblé que le juriste qu'elle avait vu entrer dans les textes et dans les anecdotes n'avait pas encore déchiffré l'énigme.

- J'ai dans l'un de mes tiroirs importants, les dossiers de certains pauvres jeunes qu'une certaine poignée de fils du diable avaient réussi à faire arrêter par les forces de sécurité é, mama Yem ! é a Mètjel1(*) ! Pouvez-vous deviner les chefs d'accusation qui pesaient contre ces pauvres ? Oh ! Thémis ! Il se trouve qu'on avait soupçonné un illettré d'être le plus grand lecteur des journaux privés du pays !

A un autre qui aimait écouter les radios étrangères, on lui reproche d'être le correspondant permanent de ces chaînes dans le pays ! Pour le troisième, vraiment, je ne sais pas s'il faut en rire ou en pleurer, car c'est bizarre.

A cette phase de son témoignage, l'homme enleva sa grosse paire de lunettes et éclata de rire. Il se mit à rire à se briser les côtes. Il déposa ses verres sur son bureau et soutint ses côtes de ses deux mains. Puis, c'étaient des toussotements. Ensuite, les larmes qui se mirent à ruisseler sur ses joues et allaient se perdre dans la mousse du tapis. L'homme se leva et se mit à parcourir toute la salle en riant, les mains sur les hanches, puis sur la tête. Par moments, il prenait appui sur les livres. Seul un heureux hasard empêchait que la bibliothèque ne se renverse sur lui.

L'homme sortit par la porte arrière qui donnait aux toilettes. Angeline ne put se retenir ; elle pouffa d'un rire qu'elle se précipita d'étouffer dans sa pochette. Puis, il réapparut, le visage légèrement humecté d'eau fraîche. Il sortit sa pochette et assécha son visage. Une fois confortablement assis dans son fauteuil, il chaussa ses verres et continua :

- Le troisième est un malheureux qu'on avait surpris dans un bar en train de siroter tranquillement sa bière. C'était bien dans un bar, c'est-à-dire un lieu public. Ce bar de renom respectait bien les horaires fixés par la loi. Ce bar payait bien ses taxes et autres impôts. L'homme buvait une bière, une bière qui avait été brassée selon les normes requises. Cette bière était produite par une société brassicole de notre pays. Une société qui fonctionne légalement. Elle emploie une main d'oeuvre à faire respirer l'Etat de renflouer ses caisses. Mais, mais, mais... parce que ce citoyen qui se croyait bien libre de sa liberté civile, avait osé acheter avec l'argent de la sueur de son front cette bonne bière qui fait par ailleurs la fierté de l'industrie du pays, de ses compatriotes, soumis pourtant aux mêmes lois que lui, l'ont taxé d' « ennemi du pays » ! Pour eux, sa couleur politique se lisait clairement sur la marque de bière qu'il consommait et, par conséquent, il était un redoutable opposant. Oui, ce n'est pas facile d'être Africain. Mais, moi, Métjel, je refuse tout ce qui peut, d'une manière ou d'une autre, freiner la bonne marche de la Démocratie. Je refuse que soient violées au quotidien les lois sans lesquelles l'homme en qui survit l'instinct de loup, serait toujours un loup pour son semblable. Le juriste avait fait son travail. Mais il n'avait pas les pouvoirs de lire les évènements passés ou futurs. Aussi n'avait-il pas entièrement satisfait la jeune fille. Après tout ce qu'il avait dit et démontré, il restait une chose : lui dire où se trouvait son amant.

- L'auteur intellectuel ou moral est quelqu'un qui n'a pas accompli lui-même l'acte constitutif du délit, mais qui a été simplement la cause intellectuelle de la commission de celui-ci. La complicité suppose tout simplement un acte de participation, ajouta-t-il à ses définitions.

- Bien Angeline NDOLO, vous allez m'aider à vous aider. Soyez calme, pondérée, réfléchie et honnête. Dites, votre amant se montrait-il parfois violent ?

- Non, Docteur, je crois que si Innocent était violent, logiquement je ne serais plus avec lui. Je ne supporte ni la violence, ni la brutalité, et c'est ma nature. Je suis d'un tempérament doux.

- Mais, Angeline, on peut dire que de temps en temps, Innocent allait voler pour vous faire plaisir, pour vous conserver...

- Ah ! Non, non, je n'ose aucunement l'imaginer. Ce garçon est trop honnête pour se livrer à une telle activité. D'ailleurs, sa condition et son statut ne le prédestineraient jamais à faire cela.

- Ne faites pas la naïve, Angeline. Vous savez très bien que les jeunes garçons de nos jours sont pour la plupart de vrais caméléons. Ils peuvent faire feu de tout bois pour garder vos faveurs.

- Non, non et non ! Innocent, je le connais trop pour me faire un tel portrait de lui.

- Mais, voyons, vous savez que ces jeunes sont de bons harangueurs, surtout quand ils sont poussés par l'instinct grégaire. Innocent peut avoir dressé les populations contre elles-mêmes ! Ou contre le institutions de la République !

Pensez-y !

- Aieee ! Dresser les populations contre elles ! Aieee, comment ? Pourquoi ? Et quand ? Monsieur le Conseiller, rien de tout cela.

- Angeline, nous venons là de faire un tour d'horizon assez fouillé. Nous avons mis en relief un certain nombre de crimes politiques pour lesquels un citoyen peut-être puni de mort, conclut le Conseiller Métjel.

A ces mots de fin, Angeline, laissée presque sur sa faim, fixa le front luisant du juriste. Elle avait toujours l'impression que l'homme lui avait caché quelque chose ses yeux parcouraient désormais tous les rayons de la bibliothèque, comme pour y trouver un éventuel live qui lui tiendrait plutôt un langage prophétique, un langage rassurant. Elle souhaitait qu'en fin d'analyse, le Conseiller lui dise par exemple : « Angeline, voilà, c'est clair, votre amant est bel et bien vivant ; il se trouve au lieu X... il sera libéré ... »

- Mademoiselle NDOLO, je comprends assez bien votre attachement à votre amant et je mesure votre affliction. Mais, je puis vous rappeler que toutes les questions que je vous ai posées relèvent du droit pénal. Mon rôle ici n'est nullement de percer les mystères. Je ne suis ni devin, ni diseur de sorts. Cependant, si j'étais en possession de son dossier, j'essaierais de mieux envisager la suite et quand bien même tout semblerait perdu pour lui, je tenterais de contacter le procureur de la République. MEBALA MENAL est un ami personnel ; il fait partie des toutes premières promotions de mes Etudiants de l'Université fédérale, dès mon retour de France. J'ai d'ailleurs accueilli très favorablement sa récente promotion. C'est un garçon manifestement hostile au mensonge et au faux. Tu sais qu'aujourd'hui, notre société subit une dégradation morale très avancée. Tel qu'il paraît, actuellement à défaut de l'argent, il faut avoir des relations. Je suis tut à fait convaincu que, ces jours-ci, seuls l'argent et les relations comptent dans notre société. La réalité est ainsi faite. L'objectivité dans le traitement des dossiers, je ne suis pas très prêt à y croire, car c'est relatif. Le plus souvent, quand les gens sont entre deux chaises, ils constituent rarement une défense. La plaidoirie et la postulation, non ! Pour eux, l'avocat, c'est très compliqué ça demande de gros sous ; ça fait trop marcher ; la procédure est très longue... Et, au bout du tunnel, ça ne fait pas forcément atteindre les fins escomptées. Alors qu'est-ce qu'il fonts ? Ils vont voir les O.P.J.- entendons les officiers de police judiciaire- ils leur ``mouillent la barbe'' et, tout est joué. Soit les dossiers disparaissent avec les inculpés dès la base, soit les données des problèmes changent complètement. Ici, c'est une étape capitale où les gens se battent pour étouffer leurs sales affaires. Ils n'hésitent pas çà faire parler de l'argent face aux enchères de leurs harceleurs cupides. Vous savez, chez nous, les flics, ça rime bien avec les frics, hein ? Flics- frics en Afrique ! Mais il me semble que sitôt que le Procureur de la République se saisit de certaines affaires, le sérieux commence...

* *

*

Après ces entretiens, Angeline très peu rassérénée s'était tout de même momentanément résignée. Elle remplit toutes les formalités et quitta son illustre hôte. Sitôt qu'elle avait emprunté le tout premier taxi qui passait par la rue Thémis, une voiture couleur noire vint s'arrêter devant l'immeuble. Au volant, c'était MEBALA MENAL, le jeune et tenace Procureur de la République. A sa droite était assis son vieil ami NDEMTELI, un jeune professeur de lettres. Ces deux gens avaient été étudiants du Docteur Métjel, à l'aube de sa carrière d'enseignant à l'Université. Une fois descendues du véhicule, ils se dirigèrent vers le Cabinet de leur ancien professeur.

- Humm ! Quelles odeurs ! Ça sent les livres par ici ! On se croirait dans la bibliothèque de l'université.

- Oui, Professeur, tu sais, chez vous autres enseignants, c'est d'abord la bibliothèque. Ce sont tout d'abord les livres, les documents, il me semble qu'avec le temps, Docta Métjel a réussi à reconstituer une bibliothèque digne de lui, fit le Procureur très émerveillé. Puis vint le Conseiller qui s'était momentanément soustrait afin de se rafraîchir la gorge. Dès qu'il les vit, il s'exclama :

- Oulalalala ! Qui vois-je ? ME-BA-LA ME-NAL ! Ce n'est pas vrai ! Quelle coïncidence ! Quand on parle du loup, on voit sa queue. Il y a de cela quelques poussières de secondes que je faisais allusion à vous. Ah ! Soyez les bienvenus mes chers amis. Puis, il les prit tendrement dans ses bras de quinquagénaire.

- Recevez mes félicitations, Monsieur le Procureur. J'avais suivi votre promotion avec une profonde joie alors, et l'ami, à qui ai-je l'honneur ? Comment puis-je interpréter cette visite qui me fait honneur ?

- Ah ! Docta, vous savez, il très difficile d'oublier les gens qui vous ont positivement marqués dans votre vie, et surtout votre vie scolaire. Vous savez, les enseignants sont des gens à ne jamais oublier. Il y a un vieux préjugé qui veut que l'enseignement soit un métier ingrat. Mais, j'incline à croire que l'école est la deuxième famille de l'homme. Hier déjà le professeur NDEMTELI que voici est venu me rendre visite. Lui et moi, nous sommes comme le doigt et l'ongle. Mais, vous rendez-vous compte que durant notre conversation, nous n'avons parlé que de vous et rien que de vous ? C'est d'ailleurs ce qui nous a poussés à venir rendre visite.

- Merci bien. Et lui, le professeur ? A qui ai-je l'honneur ?

- Oui, c'est NDEMTELI, c'est un garçon dont j'admire beaucoup l'endurance et l'optimisme. A l'époque, il était étudiant en droit. Mais après avoir grillé son mandat en deuxième année, il avait fini par découvrir sa vraie vocation du côté des lettres.

Tous éclatèrent de rire.

- Ah ! Voilà ! Voilà, ils ne pourront jamais changer, ces gens-là. Le langage reste le même, hein ? ``Griller le mandat'' hein ? ``Griller le mandat'' c'est bel et bien échouer après un redoutablement, non ?

- Oui Docta, fit le professeur NDEMTEI.

Tous se mirent à rirent à haute voix. On eut de la peine à croire qu'il n'y avait que trois personnes. Ils évoquèrent la vieille époque : la vie sociopolitique, la vie au campus, les professeurs, les étudiants, les cours, le restaurant et « l'epsi », c'est-à-dire la bourse. Après, autour d'un pot de retrouvailles, le conseiller revint sur le sujet qui les préoccupait tant : l'arrestation de Menkaaseh' et les autres.

- Monsieur le Procureur, je vous ai dit tantôt qu'avant votre arrivée, j'étais en train de faire allusion à vous. En effet, je me demandais si l'affaire Menkaaseh' Innocent était déjà portée à votre connaissance. Je venais de recevoir une jeune fille qui m'a dit être son amante. Elle a évoqué le communiqué radio qui avant annoncé leur arrestation, leur incarcération et leur exécution éventuelle pour « faute très lourde ». Je puis vous avouer que j'ai parcouru tout le sujet sans pouvoir y voir clair.

- Oui, Docta, je connais bien cette affaire Menkaaseh'. A ma connaissance, c'est une affaire très simple à trancher, puisqu'il n'y a véritablement rien qui soit fondé. Pour le Procureur que je suis, c'est une non affaire, si je puis ainsi m'exprimer. Mais je dirais que c'est également une affaire très complexe. Ah ! Oui, cela peut paraître paradoxal, mais elle s'est compliquée parce qu'elle a pris des colorations politiques et tribales. On a tout politisé ; on a tout tribalisé. Voilà la réalité. Mais, du point de vue de la légalité, c'est une affaire classée, sans suite.

Les révélations du Procureur troublèrent tout le monde. Et, chacun prit goût à l'affaire.

- Il y a de cela quelques semaines que j'avais effectué une descente du côté de la gendarmerie. Il était question pour moi de faire une visite de routine et surtout de veiller à la légalité des actes qui se seraient posés. Mais, ayant parcouru quelques registres, j'avais constaté que les étudiants avaient fait le plein des cellules. On se croirait en plein campus universitaire ! Fait insolite : même les étudiants de l'Ecole Normale Supérieure peuplaient les cellules ! Cela paraîtrait surprenant, mais c'est la vérité ! Les arrestations s'étaient effectuées en masses et surtout avec la plus grande partialité et une rage indescriptible. Je voulais faire le tour de toutes les cellules. Mais, cette occasion m'avait été refusée. Le prétexte avancé : les cellules, pour la plupart, étaient pleines de tous les grands coupeurs de routes et de tous les braqueurs de renom qu'on avait arrêtés tout récemment. On redoutait leur évasion m'avait-on répété avec insistance. D'autres gendarmes plus bavards prétendaient que les clefs étaient gardées par un soldat licencieux mais très protégé, appelé Mambezimbi.

Manbezimbi, m'avait-on affirmé, était un intouchable, un soldat dont les relations débordaient les frontières de la haute hiérarchie de l'armée. Il avait des attaches dans tous les ministères et... surtout les grosses pointures : sa mère et ses soeurs modulent le rythme des battements des coeurs !

Mais, ce qui révoltait l'esprit et inquiétait le bon sens, c'étaient les chefs d'accusation. Oui, des chefs d'accusation teintés de complaisance et même de puérilité ! Pleins de légèreté. Tenez, comment ne pas juger de puériles les accusations selon lesquelles ces innocents ne lisent que les journaux privés, il n'écoutent que les radios étrangères, ils ne boivent que des bières brassées par les opposants, ils tiennent permanemment de grands meetings politiques clandestins dans leurs chambres, dans le seul but inavoué de faire chuter le régime au pouvoir, ils sont propriétaires des imprimeries puissantes financées par les ennemis du régime, et spécialisées dans la confection des tracts, ils sont des spécialistes en attentats et en coups d'Etat, ils sont des poseurs de bombes patentés et confirmés !...

Le procureur avait cité ces différents chefs d'accusation qui pesaient tels des pieds d'airain sur la tête de ces jeunes prévenus qui ne demandaient qu'à poursuivre leurs études. La stupéfaction avait suscité la frayeur et une indignation généralisée on n'avait presque jamais connu le Procureur dans un tel état d'énervement. Pendant qu'il énumérait les motifs pour lesquels toute cette petite république de jeunes devrait être exécutée, de grosses veines se dessinaient sur sa main et sur son front. Que de voix étranglées !

- Par ailleurs, Eben le philosophe et Menkaazeh' sont accusés, dit-on, d'avoir décidé de voter pour l'opposition ! Oui, on les accuse d'avoir voté contre le régime et, cela représente aux yeux des accusateurs une faute très lourde qui mérite inévitablement la mort !

Ah ! Mes chers compatriotes, mes chers frères, gens de bonne foi, âmes bien pensantes, comment voulez-vous qu'un homme équilibré comme Mebala Menal puisse souffrir pareilles grossièretés comme preuves à charge ? Voyez-vous ? Ce sont des monstruosités ; ce sont les fantasmes de quelques hallucinés. Tenez, d'autre part, ces jeunes gens sont accusés d'assassinat et d'anarchie. Bien que ces crimes soient qualifiés, les indices constitutifs pertinents et dignes de crédibilité manquent ! Vu ces arguments, j'avais ordonné que l'affaire fût immédiatement classée sans suite et que les prévenus fussent purement et simplement relaxés. Mais, malheureusement, il me semble que pour des raisons politiques, la gendarmerie avait fait table rase de ma décision. La réponse était un non possumus.

- Ah ! Faut-il donc déduire que le judiciaire n'a pas de pouvoir ? demanda Ndemteli - Mon cher, je ne te le fais pas dire. Vous comprendrez désormais que notre métier n'est pas aisé à exercer : d'un côté, nous avons charge de préserver les intérêts publics ; de l'autre, nous sommes très souvent en face de l'exécutif et même très souvent opposés aux officiers de police judiciaire qui devraient pourtant être nos précieux collaborateurs, au regard des rôles qu'ils sont appelés à jouer dans l'instruction des procès. Du côté de la police, c'est plutôt de la merde. Là, la garde à vue est très souvent criarde et insensée. Car ces gens-là semblent avoir cultivé la cupidité ; ils sont tellement friands de pécule qu'ils en ont déjà fait une divinité. On a l'impression qu'ils n'hésiteraient pas à vous éliminer tacitement sous prétexte que vous leur mettez les bâtons dans les roues.

Vous vous en rendez compte ? J'ai souvent eu à faire relaxer une cellule entière, faute de véritables preuves à charge. Mais, il faut le dire, tout cela, c'est à mes risques et périls.

- Ah bon ? C'est donc dire que ce serait pour une raison similaire que certains policiers fougueux avaient sauvagement battu un Procureur dans leur commissariat ? demanda le professeur Ndemteli.

- Hé ! Oui, oui, voilà donc une parfaite preuve illustrative de ce que je disais. Voyez-vous ? Les exemples, ça ne manque pas. Ce traitement pour le reste honteux et déplorable avait été infligé à mon ami et confrère NBONGUEUH'. Vous savez très bien ce que la presse a pu dire de « l'affaire MBONGUEUH' » ? Cette affaire a fait couler beaucoup d'encre et de salive dans ce pays. C'était un acte odieux qui était venu une fois de plus mettre la puce à l'oreille de l'exécutif. L'opinion se demande si nos centres d'instruction et nos écoles de formation fonctionnent encore ! La déontologie est-elle enseignée à nos hommes en tenue ?

MBONGUEUH' est un confrère clairvoyant. C'est le symbole du travailleur acharné ; il incarne l'impartialité. Malheureusement pour lui, le devoir l'avait conduit chez ces abeilles cupides. Le reste...vous le savez. 

MBONGUEUH'  avait été molesté au point où son corps ressemblait à celui d'un cambrioleur piégé dans un quartier populeux et livré à la vindicte, expliqua le Procureur.

Pendant que le Procureur faisait l'autopsie de ces hérésies qui apportaient davantage de noirceur à ce tableau de la vie sociopolitique, Métjel le Conseiller qui s'était levé et s'était mis à collecter tous les numéros des différentes publications ayant traité du problème estudiantin revint avec toute une pile de journaux qu'il versa sur le tapis. Il s'agissait d'essayer de faire une sorte de reconstitution des faits qui avaient secoué la capitale, à la lumière de toutes les publications de cette période. L'homme sortit tous les journaux nationaux et quelques publications étrangères qu'il avait pu conserver.

- Mes chers amis, voici presque tous les journaux qui se sont plus ou moins largement penchés sur les tristes évènements survenus au campus universitaire et dans ses environs, du ``Jeudi noir'' à ce jour. Voilà les exemplaires du journal officiel. Ça, ce sont les exemplaires du « PHOENIX ». Vous le savez certainement autant que moi, depuis que l'on parle de liberté de presse dans ce pays, il est des journaux qui, malheureusement, paraissent plutôt de moins en moins. « Le PHOENIX », beaucoup de gens ne le savent peut-être pas, est l'ancêtre des journaux de ce pays. C'est un journal qui est né avec notre pays ; il a l'âge de l'indépendance de notre pays ! Mais, nos gouvernements véreux n'ont jamais souhaité que sa perte : le passer au caviar, voilà leur devise. La censure est une sangsue qui suce horriblement cet hebdomadaire. Vous vous rappelez bien le dernier procès intenté contre son directeur de publication ? Savez-vous que c'était à cause de cet article presqu'anodin ? Lisez-vous même son titre principal : « Où va l'argent de notre pétrole ? »

- « Notre pétrole » C'est-à-dire le pétrole du pays ! s'exclama NDEMTELI.

- Bien sûr que oui, si un journaliste ne peut plus attirer l'attention de l'opinion sur la gestion des biens publics, j'incline à croire qu'il est nettement passé à côté de sa vocation, précisa le Conseiller juridique.

- Vous savez bien qu'il était frappé d'une peine principale et pas n'importe laquelle : il était condamné à mort. Oui, une condamnation à mort pour avoir soulevé ce qu'on a appelé dans la presse proche du pouvoir : « un dossier secret de l'Etat » ! Selon eux, on ne devrait pas parler des circuits du pétrole comme si c'était celui de l'huile de palme ou de la bière ! Vous comprenez que, tous les dossiers étant presque des « dossiers secrets de l'Etat », nos cimetières fourmilleront des corps de tous ceux qui auront la malchance de se demander comment les biens publics sont gérés.

Pendant qu'il parlait ainsi, le conseiller classait méticuleusement les journaux : c'était une forte collection. Le professeur Ndemteli et le procureur les dévoraient avec curiosité.

- A l'allure où vont les interpellations des journalistes et les arrestations de tous ceux qui sont impliqués sans les circuits des journaux, la presse finira par se spécialiser dans les annonces des anniversaires et des mariages, continua le conseiller

Le Procureur éclata de rire, puis :

- Voici un important numéro du « Phoenix » qui se penche avec fort détails sur ces évènements de l'université. Il lut à haute voix le titre :

« Gros plan sur les évènements qui secouent l'université depuis quelques semaines. Dans ce numéro, les étudiants témoignent. »

- Cet exemplaire du « Coq » enrichira nos connaissances car, je trouve ce titre assez accrochant :

«  Encore des affrontements entre étudiants à l'Université : l'Armée frappe, viole et vole. Bilan provisoire selon des témoins : de nombreux blessés graves, des centaines d'arrestations et des chambres (une cinquantaine) cambriolées et mises à nue ! » Vous voyez, il s'agit là en effet d'un numéro qui avait paru à une époque où « le quotient du Patriote » prétendait que la paix régnait désormais dans le campus, fit Ndemteli.

- Oui, je crois que c'est dans ce même numéro du « Phoenix » qu'on fait allusion à certains hommes en tenue qui, ayant bouclé une cité, avaient copieusement fessé les étudiants à qui ils avaient par la suite demandé de chanter en insistant sur le refrain : « Je sais désormais que le CEPE dépasse la LICENCE. » Tu trouveras également aux pages 9e et 10, un témoignage d'une étudiante, victime du viol. Attends d'ailleurs que je t'y conduise.

Le conseiller prit ce volumineux numéro spécial du « Phoenix » des mains de Ndemteli et le feuillet furtivement. Puis, arriva aux pages indiquées. Ladite étudiante avait décidé de braver des assaillants, affirmait-elle. Ils l'avaient raclée et neutralisée. L'un d'eux lui avait dit, tout jovial et fier de pouvoir faire l'amour avec une étudiante, qu'ils allaient tous passer par ses cuisses. Ils avaient déchiqueté ses vêtements et arraché ses sous-vêtements. C'était le deuxième jour où elle avait ses ours. Le flot de sang qui jaillissait de ses entrailles n'avait en rien atténué la fougue libidineuse et vengeresse de ces disciples de Mars. Chacun l'avait consommée tant qu'il avait pu.

- Vous Voyez, elle avait décidé de se faire filmer telle que vous la voyez là sur la photo, précisa le conseiller juridique.

Cet acte bestial avait complètement fait perd la honte à cette jeune étudiante ; la photo, en couleur, présentait tout ce qu'il y a d'intime sur la femme, sauf qu'on avait l'impression qu'elle avait subi l'excision. Tout autour d'elle, une foule d'étudiants et d'étudiantes enragés exhibaient des pancartes et des banderoles qui annonçaient leur détermination à « mener le combat jusqu'au bout. »

Les trois hommes parcouraient les titres, lisaient les articles et nourrissaient les commentaires.

- Vous avez ici un numéro de la « La vermine. » je l'ai acheté Lundi. Voilà son titre principal :

« Crimes crapuleux dans un dortoir de notre Université. Des pseudo étudiants armés par une certaine opposition prennent d'assaut les chambres d'étudiants et violent nos jeunes étudiantes. Pour l'heure, le bilan est effrayant et scandaleux. »

Le procureur demanda à le lire. D'un bout à l'autre, ce journal tenait l'opposition pour responsable de tout ce qui pouvait arriver à l'université. Il présenta la photo de la jeune étudiante violée. C'était l'image fidèle de la victime ; mais tout autour d'elle, au lieu des étudiants et des étudiantes, c'étaient des soldates tenant quelques vêtements de femmes qui s'apprêtaient à l'habiller. Une longue interview escortait la photo. Et, on faisait dire à la victime que les opposants l'avaient fait violer pour montrer que le régime en place en avait fait un prétexte pour jeter le discrédit sur toute une génération d'étudiants qui n'étaient pas acquis à sa cause. Toutes ces images et ces interviews donnèrent à réfléchir à ce solide trio. C'était là qu'ils tombèrent d'accord pour constater que la presse ou les médias pouvaient manipuler l'opinion au point de montrer un homme nu avec le sexe d'une femme ou tout autre trucage.

Le conseiller leur proposa deux numéros du « Charognard ». Le procureur et Ndemteli furent tous surpris de voir un tel titre, car il appartenait à un certain type de journaux qui ne paraissaient que quand un évènement envenimait les rapports entre le régime et l'opposition. Beaucoup de connaisseurs juraient qu'ils ne se feraient jamais prendre au piège, car disaient-ils, c'étaient des satellites du journal du parti au pouvoir.

Les deux publications du « Charognard » pendant toute cette période et depuis le début de l'année avaient pour titres principaux : « l'opposition se lance à nouveau à la conquête de notre Temple du Savoir. «  Ce numéro portait la date du 30 Juin. Le deuxième dont le titre était :

«  Notre régime une fois de plus en danger ! Cette fois-ci l'opposition a choisi de l'arracher en passant par notre Université et par nos étudiants », était publié deux jours après ! Beaucoup de lecteurs découvrirent ce bihebdomadaire avec un rire sarcastique.

- Mais, Docta, « La Vermine » fait allusion, dans l'un de ses passages, à des étudiants brûlés. Je crois que la radio avait officiellement paré d'un seul étudiant brûlé par d'autres, fit Ndemteli.

- Et, « le Perroquet », à ce sujet, avait bien précisé que cet étudiant brûlé était un indic à la solde des dirigeants de l'université. Il se livrait à des dénonciations secrètes et mensongères. Etudiants et enseignants indésirables étaient tous ses victimes. Ce garçon jouait un rôle manifestement dangereux dans la tragédie en plusieurs actes qui se déroulait à l'université. C'était une vipère aux crochets et au venin redoutables, précisa le Conseiller.

- Pour ce qui est du nombre d'étudiants arrêtés, ces journaux parlent d'une centaine. Pour avoir parcouru et les commissariats et les gendarmeries, j'affirme que c'est un euphémisme. Ce que j'ai personnellement vu était tout simplement effrayant et déconcertant. Un détail qu ces journaux ne mentionnent pas, c'est la présence des lycéens, des collégiens et de certains civils qu'on avait certainement pris dans les filets des rafles aveugles. Un autre détail, la présence massive des étudiants de l'Ecole Normale Supérieure. Savez-vous que de ce côté les arrestations avaient été opérées avec une telle discrétion que rares sont les étudiants et les professeurs de cette Ecole qui en savent quelque chose ? Ils sont plus d'une cinquantaine ! Tenez, Menkaazeh' et les autres, c'est quoi ? N'est-ce pas l'Ecole Normale Supérieure ? L'opinion a les yeux essentiellement rivés sur l'université. Mais l'Ecole Normale est un véritable volcan ! Révéla Mebala Menal.

* 1 Zones marécageuses

* 1 Mon Dieu !Ah mon père ! Ah Um Nyobé ! Ah Ouandié !

* 1 Ah ! ma mère ! Ah ! Mètjel !

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