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Mesures provisoires et conservatoires dans l'arbitrage
CCI
Cette étude a pour base une procédure arbitrale
qui se déroulait en 2009 au sein de la Cour internationale d'arbitrage
de la Chambre de commerce internationale.
Cet arbitrage avait lieu à Genève et
était celui qui nécessitait, à l'époque, les
mesures les plus urgentes. C'est la raison pour laquelle une analyse a
été consacrée aux mesures provisoires et conservatoires
dans le cadre de l'arbitrage CCI, vis à vis de son règlement et
de la pratique.
L'importance de cette affaire en discussion, son
intérét juridique et son adéquation aux thèmes qui
avaient attrait au master sont des facteurs qui amenées l'auteur
à y dédier ce travail.
Il convient de remarquer l'opportunité d'avoir pareil
accès à un arbitrage CCI soumis à un tribunal ayant des
composants expérimentés, présidé par un
renommé professeur genevois et concernant d'importants conseils.
Premièrement, il est temps de conter brièvement
les faits qui ont entrainé le déclenchement du litige, ainsi que
de formuler une synthèse des phases principales de la procédure
arbitrale (sentence partielle, mémoires et ordonnances) et du
problème de droit (A).
Par la suite, on se penche sur la matière des mesures
provisoires et conservatoires dans arbitrage international et surtout dans des
procédures se déroulant sous les auspices de la Chambre de
commerce internationale, en soulevant les recherches faites par le stagiaire et
leur utilité dans l'affaire en question (B).
1 Note de l'auteur : Le texte reproduit ici, qui correspond
à la deuxième partie du rapport de stage présenté
en 2009 à l'Université Paris 1, a été
rédigé après la réalisation d'un stage à
l'Association Boedels Avocats, cabinet d'avocats situé à Paris.
Cette étude s'est basée sur une procédure arbitrale qui se
déroulait sous les auspices de la Chambre de commerce internationale.
Pour les raisons habituelles, les noms des parties ont été
masqués.
A- Affaire CCI
1. Sommaire des faits
a. Contrat hôtelier du 31 octobre 1978
La société Demanderesse (bailleur) et la
société Défenderesse (preneur) ont signé le 31
octobre 1978 le ÇContrat de gestion d'unité
hôtelière È, appartenant à la catégorie
génériquement dénommée Çcontrat
hôtelier È. Ce type d'accord utilisé
généralement par les hôtels et les restaurants en France
consiste pour le bailleur à mettre à la disposition du preneur un
ensemble hôtelier que ce dernier doit rendre fin de bail dans
l'état d'usage, afin qu'il puisse être remis immédiatement
à un nouveau preneur, sans qu'il soit nécessaire de
réaliser de nouveaux travaux ou des réinvestissements.
Dans ce contexte, l'état d'usage ne se confond pas
avec l'état d'usure légère ou avancée bien qu'il se
situe plus près de l'une que l'autre. Il s'agit donc simplement
d'équipement ou de matériel qui ne peuvent être tenus pour
neuf pour avoir été utilisé, mais que l'on ne doit pas
pour autant déclarer comme usé ou usagé. En d'autres
termes, le matériel et les équipements sont censés pouvoir
être utilisés en hôtellerie ou en restauration, sans que le
client n'ait à redire sur leur qualité, leur présentation
et leur aspect.
b. Inventaire d'entrée dans les lieux
Le document a été signé
contradictoirement, c'est-à-dire par les deux parties concernées.
Il est pour autant incontestable de ce point de vue.
Son intérêt principal consiste à
démontrer qu'il a été remis, selon l'usage dans
l'industrie hôtelière, un ensemble immobilier comprenant les
bâtiments, le gros et le petit matériel, et que cet ensemble
devait être restitué en fin de contrat.
Plus que la recherche toujours éprouvante de
l'identité des objets, il relève le caractère
immédiatement opérationnel de l'unité
hôtelière. En outre, c'est en raison de l'existence de cet
inventaire que la Demanderesse juge avoir le droit de recevoir la même
chose en 1998, au moment de la fin du contrat.
c. Fin du contrat
Le contrat signé en 1978 prévoit une
durée de 20 ans. En effet, il étendrait le 31 octobre 1998
(article 4, contrat hôtelier). Il est donc habituel qu'en ce moment les
parties procèdent à ce que l'on appelle l'inventaire de
sortie.
Les usages de l'hôtellerie et de la restauration se
produisent de tel le forme que le jour de cet inventaire, les lieux doivent
être tenus propres et en ordre; il s'impose que le matériel soit
rangé et aligné pour être décompté et
inspecté plus facilement. Selon les propres professionnels,
l'avènement des litiges entre eux est rare. Or, habituellement, ils
tiennent à leur réputation, ont le souci de leur clientèle
et recherchent la conservation des appréciations dont ils ont pu
bénéficier dans des guides touristiques et auprès des
critiques gastronomiques.
Postérieurement à la restitution des lieux, la
Demanderesse a reproché le preneur de ne pas avoir respecté
Çla lettre du contrat, l'esprit des conventions et les usages de la
profession>> (pp. 8, Mémoire récapitulatif), dans la mesure
oü il aurait laissé l'ensemble hôtelier dans un état
de décrépitude, de délabrement >>.
D'après le bailleur, ce serait la raison pour laquelle
la Défenderesse a refusé de signer l'état des lieux de
sortie. Au vu de cette situation, la Demanderesse a décidé
d'établir unilatéralement l'inventaire de sortie.
d. Travaux de rénovation supportés par la
société Demanderesse
Sur le fondement du contrat de travaux conclu avec une
société tierce, la Demanderesse a fait effectuer les
rénovations, reconstructions et remises en état de l'ensemble
hôtelier qu'elle avait loué et qui lui avait été
restitué hors d'usage.
Après s'être rendu compte de la
nécessité pressante de rénover l'ensemble hôtelier,
sous peine de ne pas continuer l'exploitation du fonds de commerce, cette
société a dü supporter des dépenses diverses.
e. Pratique habituelle du preneur en matière de
gestion d'hôtel de luxe
Il résulte des renseignements concordants et
précis réunis auprès de professionnels des
opérations touristiques que le Club (É) réserve son
enseigne à la gestion d'ensembles hôteliers neufs ou
intégralement rénovés.
Ce groupe hôtelier effectue durant la période
oü il est en charge de l'opération les travaux lui incombant tels
qu'ils résultent du contrat. Lorsque le coüt des travaux
d'entretien s'élève au point qu'il faut passer à des
travaux de rénovation, le Club (É) procède alors à
une double opération.
Premièrement, l'hôtel de catégorie palace
luxe ou cinq étoiles (selon la dénomination locale) est
déclassé en village de vacances, haut gamme tout d'abord et puis
de niveau courant. Au cours de ce processus, le nom de Club (É)
dispara»t pour laisser la plac e uniquement à la
société Défenderesse qui lui succède, afin de ne
pas trop obérer son image. Cette substitution aboutit
inéluctablement à une lente dévalorisation des ensembles
immobiliers.
f. Témoignage d'un salarié du preneur
Le témoignage de M. Alfio Belluso est édifiant
dans la mesure oü il démontre que le preneur avait conscience
d'être tenu tôt ou tard de l'exécution de l'obligation de
restitutio in integrum (Cf. item 3.c suivant): Ç Il s'agit d'un
hôtel de luxe oü les exigences sont élevées et sans
ces remplacements du mobilier fixe le bon fonctionnement de l'hôtel ne
peut pas être assuré. Des remplacements de cette sorte n'ont
jamais eu lieu pendant ma période de travail à l'hôtel
(É). Cette omission est souvent devenue l'objet des plaintes et des
protestations qui des fois furent assez intenses de la part du
propriétaire du complexe hôtelier È.
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