3.2. Déplacement forcé des populations
en vue de la création du PNS
Après l?échec lors des enquêtes de
vacance des terres et des tentatives de rachats des droits indigènes,
lequel échec était dû au refus des populations
indigènes de toucher les indemnités et de céder leur droit
indigènes, le seul moyen sür pour l?Etat à l?époque,
en vue d?implanter le Parc National de la Salonga, fut le déplacement
forcé des populations indigènes qui vivaient de leurs terres.
Plusieurs villages furent déplacés de leur
milieu d?origine vers d?autres, laissant derrière toutes les ressources
héritées des ancêtres. Ce déplacement forcé,
sans aucune mesure de sécurisation ni d?encadrement,
considéré comme source de conflit entre les protecteurs du PNS et
les populations riveraines, eut des conséquences sur le plan
économique, social et politique des paysannats et devait faire, par la
suite, l?objet de contestation par ces populations indigènes, alors que
le cas des autres Parcs Nationaux (des Virunga et Upemba) aurait dû
servir de leçon à l?Etat et à l?Institut des Parcs
Nationaux en cette matière.
En effet, les anciens possesseurs des terres inclues dans le
Parc National des Virunga et le parc National de l?Upemba revendiquent
actuellement l?exercice de droits fonciers cédés en bonne et due
forme depuis bientôt un demi-siècle et ne cessent de contester
leurs limites bien que, dans sa lettre au Ministre provincial des Terres et
Mines, le Gouverneur Général manifestait déjà son
intention de bien délimiter ce nouveau parc afin d?éviter toute
contestation de limites, en ces termes: « Il est certes souhaitable
d'assurer la délimitation de ce nouveau parc dans les meilleures
conditions, et de prendre dès à présent les mesures
susceptibles d'éviter toutes contestations de limites pour l'avenir
»151.
En plus une disposition de la couverture aérienne
immédiate fut proposée par l?Institut des Parcs Nationaux du
Congo Belge, mais malheureusement elle n?a pas été mise en
pratique, simplement
151 Extrait de la lettre N°44/002332 du Gouverneur
Général du Congo belge, Direction-Terres au Ministre provincial
des Terres et Mines à Coquilhateville, du 11/09/1958.
parce que le Gouvernement Général
évitait de mobiliser des moyens disproportionnés à
l?objet, et à s?engager dans les dépenses que l?IPNCB ne pouvait
supporter lui-même et qui n?avaient pas été prévues
au budget colonie. En effet, les frais relatifs à ce levé
photographique aérien s?élevaient à environ 1. 210.000
francs mais le budget de l?IPNCB ne lui permettait pas de faire face à
une telle dépense152.
Les autorités de l?Etat qui voulaient
privilégier la recherche scientifique sur les primates au
détriment de la valeur patrimoniale du paysage pour les populations
riveraines, ont adopté deux stratégies d?exclusion de ces
populations riveraines dans leur politique en matière de gestion et
protection des ressources du Parc National de la Salonga, afin de bien aggraver
la misère de ces populations vivant déjà dans des
conditions précaires.
3.2.1. Gestion unilatérale du PNS
Depuis le projet de sa création jusqu?à ce
jour, les autorités protectrices du PNS n?ont jamais changé de
politique dans la gestion de celui-ci. Cette manière de gérer
montre le caractère policier et dictateur basé sur l?imposition
des lois sans consultations des autres acteurs tant à l?échelon
national que local, ce qui discrédite davantage encore l?autorité
de l?Etat vis-à-vis de ces acteurs.
Les gestionnaires du PNS se font les avocats de la cessation
de toute activité humaine dans les zones protégées, en
maltraitant les populations rurales qu?ils considèrent comme « une
menace pour la nature >>. Dans son étude sur les <<
Populations Locales et Organisations de Conservation de la Nature >>,
Jeanrenaud Sally confirme bien toutes ces maltraitances subies par les
populations rurales en ces termes:
<< La première partie du 20è
siècle vit le durcissement des attitudes envers les populations rurales
et la mise en oeuvre de nombreuses politiques qui aliénèrent les
populations de leurs terres, y compris l'établissement d'un grand nombre
de parcs nationaux et de réserves dans les pays en développement.
Ceci s'est poursuivi jusque dans la période faisant suite à la
seconde guerre mondiale où les populations rurales étaient
souvent perçues comme une menace pour la Nature sauvage
>>153.
152 Extrait de la lettre de FEYTNANS G., Inspecteur Royal des
colonies, Ministère des colonies, 3è direction
générale, 2è bureau cartographie et cadastre, au
Gouverneur général du Congo belge, du 1er /Août /1958.
153 SALLY JEANRENAUD (2002) Populations Locales et
Organisations de Conservation de la nature : Le léopard serait-il en
train de muer ?, IIED-IDS, p.15
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