3.2. La loi de Sécurité Financière
(LSF) en France
3.2.1. Le contexte de mise en place de la loi de
Sécurité Financière
La loi de Sécurité Financière246
a été adoptée en France dans le contexte de l'adoption de
la loi Sarbanes-Oxley aux Etats-Unis, et s'est même partiellement
inspirée de la loi américaine.
L'objectif de cette loi était de ramener la confiance sur
les marchés financiers, suite à la crise mondiale de confiance
initiée par les nombreux scandales financiers aux Etats-Unis.
Le Ministre Français de l'Economie et des Finances de
l'époque, Francis Mer, avait présenté la LSF lors de son
intervention de présentation du projet de loi au Sénat, comme
« une réponse aux insuffisances de régulation dont le
monde économique et financier a pris conscience
»247.
La loi de Sécurité Financière est venue
compléter la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques
(NRE)248 ayant pour objectif de moraliser l'activité
commerciale et de faciliter les échanges.
La loi NRE a introduit un certain nombre de dispositions
visant à améliorer la gouvernance d'entreprise, notamment
à travers une exigence de transparence de l'information (transparence en
matière de développement durable, information au titre des
rémunérations et des avantages accordés aux mandataires
sociaux....).
3.2.2. Les principales dispositions de la loi de
Sécurité Financière
Les principales dispositions instaurées par la loi de
Sécurité Financière peuvent être
résumées en trois points essentiels, à savoir ;
· la création de l'Autorité des
Marchés Financiers (AMF),
· l'amélioration de la sécurité des
épargnants,
246 : Loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de
Sécurité Financière, publiée au Journal Officiel de
la République Française (JORF) du 2 août 2003.
247 : Béatrice Bon-Michel et George Chappotteau, «
Contrôle interne bancaire : objectif conformité », Editions
Editiea, 2008, page 40.
248 : Loi n°2001-420 du 15 mai 2001 sur les nouvelles
régulations économiques, est parue au Journal Officiel de la
République Française (JORF) du 16 mai 2001, le décret
d'application n°2002-803 du 3 mai 2002 est paru au JO du 5 mai 2002.
Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des
établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des
standards internationaux
· la modernisation du contrôle des comptes et de
la transparence dans les entreprises.
Dans cette section, nous nous intéresserons plus
particulièrement aux dispositions relatives à la création
de l'Autorité des marchés financiers en tant qu'autorité
de réglementation et de surveillance des marchés financiers et
à celles relatives à la modernisation du contrôle
légal des comptes et de la transparence dans les entreprises.
1. La création de l'autorité des
marchés financiers
L'autorité des marchés financiers (AMF) est
issue de la fusion de la commission des opérations de bourse (COB), du
conseil des marchés financiers (CMF) et du conseil de discipline de la
gestion financière (CDGF).
La fusion de ces trois entités a pour objectif de
renforcer l'efficacité et la visibilité de la régulation
de la place financière française.
L'AMF est une autorité publique indépendante,
dotée de la personnalité morale, disposant de l'autonomie
financière, qui a pour missions249 de veiller :
· à la protection de l'épargne investie dans
les instruments financiers et tout autre placement donnant lieu à appel
public à l'épargne,
· à l'information des investisseurs,
· au bon fonctionnement des marchés d'instruments
financiers.
L'AMF agit en coordination avec les autres autorités
chargées du contrôle des professions financières et
bancaires en France, à savoir, la Banque de France, la Commission
bancaire, le Comité des Etablissements de Crédit et des
Entreprises d'Investissement (CECEI), l'Autorité de Contrôle des
Assurances et des Mutuelles (ACAM), et le Comité des Entreprises
d'Assurance (CEA).
Elle apporte son concours à la régulation de ces
marchés aux échelons européen et international, en
participant aux instances internationales et en coopérant avec ses
homologues étrangers.
Les compétences250 de l'AMF portent sur les
opérations et l'information financière des sociétés
cotées, les marchés et leur infrastructure, les professionnels
autorisés à fournir des services d'investissement ou des conseils
en investissements financiers, les titres (actions, obligations...) et les
produits d'épargne collective (fonds communs de placement, SICAV...).
Dans ce cadre, l'AMF exerce quatre types de
fonctions249 :
· L'AMF réglemente les opérations
financières et l'information diffusée par les
sociétés cotées, supervise et contrôle l'information
financière délivrée au public par ces
sociétés.
Les documents d'information émis par les
sociétés cotées (prospectus, note d'information, document
de référence, document de base, etc....) sont soumis au
contrôle de l'AMF. Dans certains cas, ces documents sont soumis au visa
de l'AMF avant leur diffusion (contrôle à priori), dans d'autres
cas, ils sont déposés auprès de l'AMF qui procède
à leur contrôle (contrôle a posteriori).
L'AMF veille à ce que les sociétés
cotées communiquent rapidement au public, à travers des
communiqués de presse, toute information significative, et
contrôle le respect de l'obligation législative de publication des
comptes annuels, des résultats semestriels et du chiffre d'affaires
trimestriel.
249 : Les missions de l'AMF ont été
définies par l'article L 621-1 du code monétaire et financier.
250 : La description des compétences et des fonctions
de l'Autorité des marchés financiers décrites dans ce
paragraphe, est extraite d'un document de présentation établi par
l'AMF et disponible sur son site Internet, intitulé «
L'Autorité des marchés financiers : une autorité publique
indépendante au service de la protection de l'épargne »,
octobre 2009, 12 pages,
www.amffrance.org.
Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des
établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des
standards internationaux
· L'AMF définit les principes
d'organisation et de fonctionnement des marchés. Elle
édicte les règles de bonne conduite des professionnels
autorisés à fournir des services d'investissement, placée
sous son contrôle. L'AMF surveille enfin les produits d'épargne
collective soumis à son agrément, elle autorise la
création des OPCVM et vérifie la régularité de ces
produits avant leur commercialisation
· L'AMF surveille les marchés
d'instruments financiers et toutes les personnes intervenant
sur ces marchés. Elle dispose de moyens performants et
d'un pouvoir d'enquête et de contrôle qui lui permet de mener
à bien cette fonction.
· L'AMF dispose également d'un pouvoir de
sanction envers toute personne ayant commis un manquement à la
réglementation financière de nature à porter atteinte
à la protection des investisseurs ou au bon fonctionnement du
marché.
Par ailleurs, l'AMF veille à la protection de
l'épargne par des actions d'information et de pédagogie ainsi que
par la résolution amiable des différents opposant les
investisseurs non professionnels et les prestataires de services
d'investissement ou les émetteurs.
L'organisation de l'AMF comprend un collège
composé de 16 membres, une commission des sanctions de 12 membres, des
commissions spécialisées et des commissions consultatives.
2. La modernisation du contrôle des
comptes
Les principales dispositions visant à moderniser et
améliorer le contrôle des comptes, instaurées par la loi
sur la sécurité financière sont :
· La création du H3C : l'article
100 de la loi sur la sécurité financière, a
institué un Haut Conseil du Commissariat aux Comptes (H3C) auprès
du garde des sceaux251.
Le Haut conseil a pour mission « d'assurer la
surveillance de la profession avec le concours de la compagnie nationale des
commissaires aux comptes », par ailleurs, « de veiller au
respect de la déontologie et de l'indépendance des commissaires
aux comptes ».
Dans le cadre de l'accomplissement de cette mission, le Haut
conseil est en particulier chargé :
- d'organiser les contrôles de l'activité des
professionnels,
- d'identifier et de promouvoir les bonnes pratiques
professionnelles,
- d'émettre un avis sur le code de déontologie de
la profession et sur les normes d'exercice professionnel élaborés
par la Compagnie nationale des commissaires aux comptes,
- de définir et de superviser les orientations et le
cadre des contrôles périodiques,
- Il est l'organe d'appel des chambres régionales en
matière disciplinaire et en matière
d'inscription.
· La séparation des activités
d'audit légal et de conseil : l'article 104 de la loi sur la
sécurité financière a interdit aux commissaires aux
comptes de cumuler les activités d'audit légal des comptes avec
les activités de conseil ou tout autre prestation de services n'entrant
pas dans les diligences directement liées à la mission de
commissaire aux comptes telles que définies par les normes d'exercice
professionnel, pour le compte de l'entité contrôlée ou
à celles qui la contrôlent ou qui sont contrôlées par
celle-ci.
Dans le cas où un commissaire aux compte est
affilié à un réseau national ou international, la
règle de séparation entre les activités de l'audit
légal et celles du conseil s'applique à tous les membres du
réseau.
251 : Garde des sceaux est le nom donné au ministre
français en charge de la Justice.
Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des
établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des
standards internationaux
· Le renforcement des règles
d'indépendance et de nomination des commissaires aux comptes:
les commissaires aux comptes et les membres signataires d'une
société de commissaires aux comptes ne peuvent être
nommés dirigeants ou salariés des personnes morales qu'ils
contrôlent, moins de cinq années après la cessation de
leurs fonctions. Par ailleurs, les personnes ayant été dirigeants
ou salariés d'une personne morale ne peuvent être nommées
commissaires aux comptes de cette personne morale moins de cinq années
après la cessation de leurs fonctions.
La durée de certification des comptes des
sociétés faisant appel public à l'épargne, par le
même commissaire aux comptes personne physique ou par le même
membre signataire d'une société de commissariat aux comptes, a
été limitée à six exercices consécutifs,
soit la durée d'un mandat de commissariat aux comptes en France.
L'information au titre des honoraires versés à
chacun des commissaires aux comptes est mise, au siège de la personne
contrôlée, à la disposition des associés et
actionnaires.
L'autorité des marchés financiers est tenue
informée des propositions de nomination ou de renouvellement des
commissaires aux comptes des personnes faisant appel public à
l'épargne. Si elle le juge nécessaire, l'AMF peut faire toute
observation sur ces propositions, et les porter à la connaissance de
l'assemblée générale ou de l'organe chargé de la
nomination du commissaire aux comptes.
3. L'amélioration de la transparence dans les
entreprises
La loi sur la sécurité financière renforce
la responsabilité des dirigeants dans le cadre de la production et de la
publication de l'information financière.
En effet, le président du conseil d'administration ou
du conseil de surveillance d'une société faisant appel public
à l'épargne doit dans un rapport252 joint au rapport
de gestion, rendre compte des conditions de préparation et
d'organisation des travaux du conseil ainsi que des procédures de
contrôle interne mises en place par la société.
Pour les sociétés anonymes à conseil
d'administration, ce rapport doit mentionner les limitations apportées
au pouvoir du directeur général par le conseil d'administration,
notamment en cas de séparation entre les fonctions de président
et de directeur général.
Les commissaires aux comptes présentent dans un rapport
séparé253, leurs observations sur le rapport
établi par le président du conseil sur le contrôle
interne.
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