TiTrE I : consécraTion ET récEpTion DE
principE DE précauTion
Le principe de précaution est un principe aussi bien
novateur que fondamental dans le droit moderne de l'environnement. Son champ
d'application est de nos jours très vaste allant des risques
technologiques7 aux risques naturels comme la gestion des
catastrophes naturels8 (surveillance d'un volcan inactif etc.). Ce
champ d'application va au delà des trois secteurs habituellement
distingués (santé, alimentation et environnement) pour couvrir
d'autres domaines comme celui des libertés publiques. La notion de
principe de précaution rassemble plusieurs situations. L'objectif
principal du principe de précaution est de diminuer les risques en
incitant à la recherche scientifique pour dissiper l'incertitude et,
éviter les dommages graves et irréversibles.
De par son contenu et ses objectifs, le principe de
précaution s'impose à nous. Sa place est plus qu'évidente
tant sur le plan international que sur le plan national. Le concept de
précaution, apparu tout d'abord dans certaines législations
nationales9, a finit par être consacré
dans le droit international par plusieurs procédés (chapitre I).
Cette consécration internationale a poussé un pays comme le
BURKINA FASO à intégrer le principe dans sa législation
nationale (chapitre II).
7 Ce principe a été invoqué lors de la
catastrophe écologique survenue dans le golfe d u Mexique en avril 2010.
Un disfonctionnement de la plateforme pétrolière avait
entrainé une gigantesque marée noire aux Etats unis notamment
dans l'Etat de la Louisiane.
8 Plusieurs personnes et organisation de la société
civile ont vu dans l'ampleur des inondations du 1er septembre 2009 survenues
à Ouagadougou, capitale du BURKINA FASO, une non ou mauvaise application
du principe de précaution notamment dans les zones inondables de la
ville.
9 Philippe Sands, principles of international environnemental Law
208 (1996)
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Chapitre I : l'avènement du principe de
précaution en droit international
Le principe de précaution a vu le jour dans la
société technicienne, dans le cadre des rapports entre droit et
science pour assurer une meilleure gestion des risques. Cet avènement
s'est révélé par la suite par une consécration
formelle au plan international (section I) et aussi par une consécration
régionale de plus en plus dynamique (section II).
Section I: La consécration formelle du principe
de précaution au plan international
L'acceptation internationale du principe de précaution est
l'uvre de deux idées fortes : d'une part, il y a que nous ne pouvons pas
toujours nous fier aux certitudes scientifiques pour prendre des mesures
coercitives, d'autre part, les conséquences résultant de ne la
non prise de mesures préventives en temps utile peuvent être
irréversibles. Ces deux idées maîtresses ont
contribué à la consécration du principe de
précaution dans un droit dit « mou » (paragraphe II) et
à son inscription dans des conventions internationales (paragraphe
I).
Paragraphe I : Les sources conventionnelles
Le principe de précaution s'est développé
principalement dans le contexte des politiques environnementales même si
son champ d'application est de nos jours très vaste. Le droit
international fit d'abord référence à des mesures de
précaution dans la convention de Vienne du 22 mars 1985 pour la
protection de la couche d'ozone et le protocole de Montréal de septembre
1987, qui mettent en place un régime original10. Mais la
consécration formelle de ce principe au plan international dans le droit
conventionnel a débuté dans le cadre des conventions des nations
unies de RIO de 1992.
10 « ... le régime spécial institué par
l'ensemble constitué sur la base de la convention de 1985
privilégie d'une façon générale la
coopération préventive sur la responsabilité
curative.», Pierre-Marie DUPUY, « À propos des
mésaventures de la responsabilité internationale des États
dans ses rapports avec la protection de l'environnement»,
Mélanges KISS, op. Cit. p.279
8
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en oeuvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
La convention des nations unies sur la diversité
biologique de 1992 prévoit le principe de précaution dès
son préambule en ces termes : « (...) Notant également
que lorsqu'il existe une menace de réduction sensible ou de perte de la
diversité biologique, l'absence de certitudes scientifiques totales ne
doit pas être invoquée comme raison pour différer les
mesures qui permettraient d'en éviter le danger ou d'en atténuer
les effets (...) »
Cette disposition montre bien la place que les parties
à la convention sur la diversité biologique entendent faire
occuper au principe de précaution dans la préservation et la
conservation de la biodiversité dans le monde.
Quant à la convention-cadre des nations unies sur les
changements climatiques de 1992, son article 3 dispose qu'il incombe aux
parties de « prendre des mesures de précaution pour
prévoir, prévenir ou atténuer les causes des changements
climatiques et en limiter les effets néfastes. Quand il y a risque de
perturbations graves ou irréversibles, l'absence de certitude
scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour différer
l'adoption de telles mesures, étant entendu que les politiques et
mesures qu'appellent les changements climatiques requièrent un bon
rapport coût-efficacité, de manière à garantir des
avantages globaux au coût le plus bas possible. Pour atteindre ce but, il
convient que ces politiques et mesures tiennent compte de la diversité
des contextes socio-économiques, soient globales, sétendent
à toutes les sources et à tous les puits et réservoirs de
gaz à effet de
serre qu'il conviendra, comprennent des mesures d'adaptation
et s'appliquent à tous les secteurs économiques. Les initiatives
visant à faire face aux changements climatiques pourront faire l'objet
d'une action concertée des Parties intéressées
».
Les changements climatiques représentent un enjeu majeur
pour la stabilité et la sécurité du monde car les
conséquences liées à ces manifestations sont de plus en
plus dramatiques. Le principe de précaution doit donc s'appliquer dans
toute sa rigueur.
A la suite de ces deux textes, d'autres instruments
internationaux majeurs consacrent le principe de précaution. On a tout
d'abord la convention de Paris pour la protection du milieu marin pour
l'Atlantique du nord-est de septembre 1992. Dans
cette convention le principe de précaution est ainsi
qualifié « principe selon lequel les mesures de
prévention doivent ttre prises lorsqu'il y a des motifs raisonnables de
s'inquiéter du fait des substances ou de l'énergie introduites
directement ou
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
indirectement dans le milieu, qu'elles puissent
entraîner des risques pour la santé de l'homme, nuire aux
ressources biologiques ou aux écosystèmes, porter atteinte aux
valeurs d'agrément ou entraver d'autres utilisations du milieu,
méme s'il n'y a pas de preuves concluantes d'un rapport de
causalité entre les apports et les effets ».
Par la suite on a aperçu une consécration
intéressante du principe de précaution dans le protocole sur
la biodiversité, adopté à Montréal le 28 janvier
2000. La conférence des parties à la convention a
expressément reconnu dans son article
10 paragraphe 6 le recours au principe de précaution. Il
est, en effet, indiqué : « L'absence de certitude scientifique
due à l'insuffisance d'information et de connaissance scientifique
pertinente en ce qui concerne les effets négatifs potentiels d'un
organisme vivant modifié sur la conservation et l'utilisation durable de
la diversité biologique dans la Partie importatrice, prenant
également en compte les risques pour la santé humaine,
n'empéche pas cette Partie de prendre une décision, si
approprié , concernant l'importation de l'organisme vivant
modifié en question, dans le but d'éviter ou de réduire de
tels effets potentiellement négatifs »
En sus, une autre convention originale consacre explicitement et
implicitement le principe de précaution. Il s'agit de la convention sur
les polluants organiques persistants (POP), convention adoptée par une
conférence des plénipotentiaires tenue du 22 au 23 mai 2001
à Stockholm en Suède. La Convention toute entière
s'inspire donc de l'esprit de précaution puisqu'elle encourage les
Parties à prendre diverses mesures pour empêcher le rejet et la
diffusion des polluants organiques persistants et en prévenir les effets
néfastes à la santé humaine et à l'environnement.
Aussi bien le préambule que les articles, premier, huit
(8) et l'annexe C (partie V) de cette convention, mentionnent
explicitement le principe de précaution.11
En dehors des textes cités plus haut, d'autres textes
consacrent le principe de précaution. Ce sont entre autres, le protocole
de Barcelone (1995) sur les zones spécialement protégés en
méditerranée ; le protocole de New York de 1995 sur la
conservation et la gestion des stocks de poissons chevauchant plusieurs
catégories de zones maritimes et les grands migrateurs.
11 Cf. Travaux d'une table ronde organisée par le
Réseau Environnement de Genève ; la précaution de Rio
à Johannesburg p 15,16.
10
SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
Ces différents textes sectoriels ou globaux permettent une
application un peu plus contraignante et généralisée d'un
principe qui occupe une grande place dans les textes de droit souple ou «
mou ».
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