III. APPLICATION AU CAS MEDITERRANEEN EVALUER LA
DYNAMIQUE D'OUVERTURE
Quel est le bilan de la situation après dix
années de réformes en Méditerranée ? Les
paragraphes suivant proposent de comparer les PM à des profils
performants et accessibles (classification ou benchmarking), puis de
déterminer leur rang respectif (classement ou rating)...
1. Construction des espaces de critères : Pertinence
et hiérarchie des indicateurs
La coopération impulsée par le processus
de Barcelone concerne aujourd'hui trente-cinq pays des deux rives de la
Méditerranée, notamment après l'adhésion à
l'UE des dix PECO dont le processus de transition s'est remarquablement
accéléré. Les partenaires méditerranéens
doivent à présent oeuvrer dans le sens de la convergence en vue
d'atteindre, au plus vite, le niveau d'intégration des pays d'Europe de
l'Est. La priorité est de prendre exemple sur ces standards pour
être en phase avec les nouveaux enjeux politiques, économiques et
sociaux de la région. Dans ce sens, nous proposons d'élaborer un
benchmarking puis un rating faisant appel aux procédures
d'agrégation multicritère. Il s'agit d'évaluer les
distances entre les pays euro-méditerranéens au niveau des trois
thèmes abordés par les accords d'association (volets politique,
économique et social).
L'objectif est d'obtenir une statique comparative
entre le moment de la signature de la Déclaration de Barcelone et la
période actuelle (1995-2005). Pour ce faire, une série de
critères regroupés au sein de trois grands axes
représentant les principaux volets de la Déclaration de Barcelone
résume les thèmes sur lesquels seront jugés les PM. Le
premier axe, à savoir le « volet politique et de
sécurité », contient 13 critères répartis en
trois sous-espaces. Le second axe, le « volet économique et
financier », contient 17 critères répartis en quatre
sous-espaces. Enfin le troisième axe, le « volet social, culturel
et humain », contient 13 critères répartis sur quatre
sous-espaces (cf. annexe 16).
a. Hiérarchisation des poids par la
régression linéaire
L'attribution des poids comporte en soi un aspect
subjectif. Afin de contourner ce problème, nous avons
hiérarchisé les critères d'évaluation en utilisant
une technique de régression linéaire. A l'aide du logiciel
XlStat, nous avons estimé des coefficients de corrélation que
nous avons transformés en poids puis utilisés dans
l'évaluation des PM.
L'idée de retranscrire les coefficients de
corrélation dans un système de pondérations nous a
été inspirée des travaux de Sala-i-Martin. A la
lumière de son article « I just ran four million
regressions », il apparaît que les variables explicatives de la
dynamique de croissance n'ont pas le même impact. Partant d'une
série de conclusions d'analyses antérieures (Barro [1991], Levin
et Renelt [1992]), l'auteur a tenté de construire un système de
poids afin retranscrire le niveau de sensibilité de la croissance
économique (variable dépendante) aux 63 critères
sélectionnés (variables explicatives) à partir d'une
équation de régression multiple :
ã á â â â å
= j +
yj y +
zj z +
xj x
j +
Où : ã est le
taux de croissance (variable dépendante ou
expliquée).
y est un vecteur fixe de variables explicatives
revenant dans toutes les régressions (niveau initial de revenu, taux
d'investissement, taux de scolarisation, longévité).
z est la variable explicative testée au
cours de la régression j.
xj est un vecteur de trois variables
sélectionnées parmi les critères disponibles.
L'équation ci-dessus est une combinaison
linéaire des variables explicatives de la croissance
ã. Il a fallu ensuite définir une
fonction analytique permettant de trouver les valeurs numériques les
plus vraisemblables pour les multiplicateurs â.
Chaque régression j correspond à un modèle
donnant une description spécifique de la croissance (il y a au total
M modèles explicatifs et donc M combinaisons possibles
pour les variables xj). La vraisemblance Lzj est
la probabilité que le modèle théorique ait
pour
réalisation l'échantillon
observé.
?
Un intérêt particulier est accordé
à la fonction de densité de z
â , où la distribution globale
des estimateurs de âzj est
supposée suivre une loi normale d'écart-type
ózj et d'espérance
nulle25. Dans ce cas, l'estimateur est calculé par une
moyenne pondérée des M paramètres
âzj :
?
â z
|
=
|
M
~=
j 1
|
ù âzj zj
|
Au final, chaque poids
ùzj est
défini comme la proportion de la vraisemblance Lzj
qui lui est associée :
ù
zj
|
|
L zj
|
= M
|
~=
j 1
|
L zj
|
25 Dans le cas où la distribution ne suit pas une
loi normale, l'auteur développe une approche différente de celle
exposée ci-dessus. Sur ce point, voir Sala-i-Martin [1997], pp.
5-6.
A travers son système de poids, l'auteur a pu
donner davantage de crédibilité au modèle de croissance le
plus « vraisemblable », celui dont les composantes ont un impact
significatif sur la croissance. Concrètement, il a décelé
21 variables fortement corrélées à la croissance avec un
coefficient supérieur à 95%. C'est le cas des variables relevant
des caractéristiques régionales, politiques ou
religieuses.
Il en est de même pour les variables
liées aux distorsions des marchés (taux de change et
activités informelles), au types d'investissement (en équipement
ou pas), à l'ouverture et au type de structure économique
(libéralisé au sens de Freedom House ou pas). A
l'inverse, les facteurs qui semblent avoir très peu d'influence sur la
croissance, voire pas d'incidence du tout, relèvent du
développement du secteur financier, du niveau d'inflation, des effets
d'échelle, des barrières aux échanges et des
caractéristiques ethnolinguistiques.
Ces résultats ont été
corroborés par une étude empirique sur les facteurs
déterminants de la croissance économique à long terme
(Doppelhofer et al. [2000]), ce qui nous a conforté dans le
choix d'une approche similaire pour justifier le système de
pondérations de notre application empirique. La seule différence
est que nous n'avons pas utilisé une régression multiple
(reposant sur plusieurs variables explicatives) mais une régression
simple (à partir d'une seule variable explicative). Quoi qu'il en soit,
le cadre conceptuel et les méthodes de calculs sont
identiques.
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