I. CADRE DE L'EVALUATION ETABLIR LE LIEN ENTRE
THEORIE ET PRATIQUE
Comment recentrer l'étude sur la dynamique
d'ouverture des PM et leur processus de transition ? Partant des notions de
croissance, de développement et d'attractivité, les paragraphes
suivants proposent de revenir sur les facteurs traditionnels de transition puis
de définir de nouveaux critères...
1. Comprendre la transition des PM : Lancement,
acheminement et aboutissement
Pour comprendre la transition, il est essentiel de
partir des raisons qui ont impulsé un tel processus, ce qui revient
à cerner les défaillances des systèmes centralement
planifiés (facteurs déclencheurs ou causes). Il s'agit tout
d'abord d'une politique de prix en décalage avec les valeurs de
l'échange. Des prix totalement déconnectés des principes
du marché étaient fixés par les Ministères du Plan
et du Commerce afin que les bien jugés indispensables soient accessibles
à la population (pour le reste, les prix étaient excessifs). Il
s'agit ensuite d'une allocation inefficiente des facteurs de production. Des
prix relatifs indépendants des coûts réels de production
étaient fixés par les Ministères du Plan et de
l'Industrie. Ceci a conduit à une surconsommation des ressources,
notamment des matières premières (l'exemple des hydrocarbures
dans les PM est parlant).
Il s'agit enfin d'une structure de marché
monopolistique lourdement contrôlée par l'Etat, où les
mouvements d'entrées et de sorties étaient exclusivement
réservés aux entreprises publiques. Le secteur privé
était alors dévalorisé, les mécanismes de change
déconnectés du système international et le marché
parallèle en pleine effusion. Par ailleurs, l'économie
fonctionnait sur des principes autres que la rentabilité. Les
facilités financières, fiscales et administratives étaient
réservées aux entreprises dites <<
privilégiées >>. Les marchés d'actifs financiers et
fonciers étaient quasiinexistants, les taux d'intérêt fixes
et le transfert de propriété du secteur public vers le secteur
privé improbable. Le marché du travail reposait sur le statut de
fonction publique et la promotion de la productivité n'était pas
une priorité.
C'est en 1990 et par les PECO qu'une dynamique de
transition a été impulsée pour pallier l'échec des
politiques de planification. Un processus de réformes issu d'une
volonté affichée de décentraliser a permis de converger
vers le modèle de marché. A partir de là, le qualificatif
<< économies en transition >> a été
attribué par l'OCDE aux pays d'Europe de l'Est, puis s'est
répandu à d'autres systèmes centralisés (les PM,
entre autres).
a. Inefficience des systèmes planifiés et
dynamique de transition
Lorsque la transition a commencé en Europe de
l'Est, les performances économiques des pays étaient très
contrastées. Alors que la production avait chuté de plus de 40%
au début du processus, elle a augmenté dans la
quasi-totalité des économies en fin de période.
Après des décennies passées sous un régime
centralisé, le processus chaotique de privatisations à grande
échelle a provoqué de l'instabilité politique (remise en
question du rôle de l'Etat et perte de confiance envers les
autorités). La politique économique a été
hésitante, fluctuante et les gouvernements se sont
succédés au pouvoir. L'incohérence du système a
favorisé le développement d'activités frauduleuses
(corruption et détournement de fonds). Enfin, le déficit
budgétaire causé par le nonpaiement des impôts a
évolué vers de l'inflation, voire de
l'hyperinflation.
L'industrie a été touchée de
plein fouet, de même que l'équipement et l'infrastructure. Les
usines, alors contrôlées par les mêmes entrepreneurs
qu'à l'époque de la planification, ont été
fermées ou maintenues en l'état avec un effectif
injustifié. Les produits issus de l'agriculture ont été
confrontés à l'importation de biens de meilleure qualité,
introduisant une concurrence extérieure sévère.
Parallèlement, la compression du budget de l'Etat a ouvert la voie
à des propositions d'aide financière formulées par les
pays développés et le FMI. Les économies en transition ont
été incitées à emprunter et se sont enlisées
dans une spirale de dettes, ce qui a fortement contribué à
dégrader le niveau de vie de la population. En parallèle, les
statistiques officielles ont surestimé la production et la croissance
pour maintenir un équilibre instable, ce qui a fini par créer un
décalage avec la réalité et stimulé
l'activité informelle.
A la lumière de l'expérience des PECO en
matière de transition, un consensus s'est formé sur les
principaux éléments de la stratégie globale de
réforme (cf. encadré 36). Plusieurs points ont
été sujets à controverse : la stabilisation
macroéconomique, la libéralisation des prix et du commerce, ainsi
que le rythme de la privatisation. Les divergences d'opinions relèvent
aussi de l'agencement des réformes, notamment en ce qui concerne leur
ordre de priorité. Les pays ayant obtenu les meilleurs résultats
sont ceux qui, dès le départ, se sont attachés aux
réformes et les ont menées avec rapidité et
cohérence (Fischer et Sahay [2000]).
Déterminer le rythme des réformes,
autrement dit, la vitesse de rupture entre les régimes planifiés
(situation initiale) et les systèmes libéralisés
(post-transition), donne lieu à trois stratégies (Kaufman [1990],
pp. 14-20). La << thérapie de choc » est une approche
radicale relevant d'une transition rapide par des réformes de masse.
Elle permet d'éviter tout retour en arrière et d'écourter
la période de déséquilibres (Pologne et République
Tchèque). La << transition douce » est une approche
gradualiste à caractère prudentiel. Elle permet l'adoption
progressive des réformes alliant liberté des prix, privatisation
et convertibilité de la monnaie (Hongrie). Enfin, la <<
démarche timide » est une approche paradoxale : l'Etat proche des
régimes communistes tient un discours pro-libéral dans l'optique
d'un éventuel passage au marché (Bulgarie et
Roumanie).
Encadré 36 : Déterminants d'une
transition réussie
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