III. MODE DE FONCTIONNEMENT DEUX EXEMPLES
EMPIRIQUES
Quel est le positionnement des PM compte tenu des
objectifs de Barcelone ? Comment évaluer l'aptitude du Mercosur à
adopter une politique monétaire commune ? L'utilisation de
l'agrégation multicritère dans une optique de benchmarking /
rating permet de mesurer la convergence des pays et d'analyser leur aptitude
à évoluer vers un objectif commun...
1. Etude de cas n° 1 : Converger vers le
libre-échange en Méditerranée
L'Europe a depuis des décennies amorcé
un processus d'intégration régionale, alors que les PM en sont
encore aux premiers stades du libre-échange. L'asymétrie entre
les deux régions n'a pas empêché d'établir une
alliance euro-méditerranéenne car les perspectives des pays
concernés restent étroitement liées. Par ailleurs,
l'évolution du contexte mondial durant les années 90 a
donné lieu à un nouvel environnement où cohabitent
globalisation et régionalisation. De leur côté, les PM ont
préservé une logique nationale individualiste et tenté de
l'intégrer dans un contexte global de mondialisation.
Face à un tel paradoxe, le meilleur compromis a
été de modifier les relations entre les deux rives de la
Méditerranée, au profit d'une coopération
Nord-Sud.
A cet effet, un partenariat a officiellement vu le
jour en novembre 1995, à l'issue de la Conférence de Barcelone.
Il lie 27 pays (15 européens18 et 12
méditerranéens19) et permet d'instituer les fondations
d'un nouvel ensemble régional. Ces pays ont pris l'initiative unique et
ambitieuse de former, à l'horizon 2010-2012, une zone de
libreéchange et de prospérité économique, mais
également un espace de stabilité politique et de bien-être
social. Trois grands thèmes ont été abordés
:
- Le volet politique et de sécurité :
définition d'un espace commun de paix et de stabilité en
renforçant le dialogue politique et sécuritaire.
- Le volet économique et financier : construction
d'une zone de libre-échange au moyen d'un partenariat économique
et financier.
- Le volet social, culturel et humain : rapprochement
des peuples par un partenariat favorisant la compréhension des
cultures et les échanges entre les sociétés
civiles.
18 Les quinze pays membres de l'Union Européenne
avant l'entrée des dix nouveaux candidats de l'Est.
19 Algérie, Chypre, Egypte, Israël, Jordanie,
Liban, Malte, Maroc, Palestine, Syrie, Tunisie et Turquie.
La concrétisation de l'alliance
euro-méditerranéenne présente une opportunité
à double sens. En premier lieu, elle permet à la rive Sud de
bénéficier des transferts de technologie et d'épargne
européens. En second lieu, elle profite à la rive Nord par les
transferts de ressources naturelles et humaines méditerranéennes.
Soulignons que les accords d'association ont été freinés
durant les quatre premières années du processus de
négociation par des difficultés d'ordre politique et juridique.
Aujourd'hui, d'autres problèmes surgissent dans les domaines de
l'agriculture, des services et des migrations. Certains pays sont
confrontés à des carences au niveau de leurs mécanismes de
marché, alors que d'autres souffrent encore de pauvreté
prononcée et de monopoles étatiques rigides. Le tout,
ponctué d'une instabilité politique au Proche-Orient et d'un
processus de paix de plus en plus menacé.
Les progrès que les PM réalisent pour
pallier leurs déséquilibres macro-économiques en faveur
d'une intégration régionale restent lents. Les programmes
d'ajustement structurel mis en place par le FMI et la BM, en échange de
l'adoption de réformes d'ouverture, s'échelonnent sur un
intervalle de vingt ans. Ces faits semblent a priori indiquer qu'un
long chemin reste à parcourir pour que la Méditerranée
atteigne un niveau de convergence concluant. C'est pourquoi il est utile
d'évaluer les performances politiques, économiques et sociales
des pays de la zone puis de les situer par rapport au reste du monde. Dans
cette optique, nous avons envisagé de réaliser un benchmarking
global de la région et de le compléter par un rating
détaillé des pays. L'objectif final est de retracer leur
évolution entre le début et la fin de la décennie
90.
La construction des critères
d'évaluation nous a été inspirée des
thématiques traitées durant les accords d'association
euro-méditerranéens. Précisons que cinq conférences
se sont succédées depuis la signature de la Déclaration de
Barcelone, incitant les PM à prendre part au processus (Barcelone I, II,
III, IV et V)20. Il s'agit de promouvoir une démarche de
régionalisation en vue d'intégrer une Méditerranée
unique. Cette démarche a pour perspective de dépasser les
tensions issues du climat d'instabilité politique (conflit
israélo-palestinien), d'insécurité (Algérie) et de
crise (Turquie).
Concrètement, notre étude de cas permet
de faire le point sur les performances de onze pays des rives Sud et Est de la
Méditerranée, sur les trois volets de la Déclaration de
Barcelone. Nous avons donc réuni les critères au sein de trois
grandes familles faisant référence aux préoccupations du
partenariat. Nous avons ensuite constitué des sousespaces de
critères au niveau de chaque famille, en vue de disposer d'une liste
exhaustive traduisant la logique avec laquelle l'étude a
été réalisée. Au final, nous avons obtenu un total
de 44 critères, répartis en treize sous-espaces (cf.
annexes 9 et 10).
La première famille de critères,
intitulée « volet politique et de sécurité »,
contient dix indicateurs répartis en quatre sous-espaces (cf.
encadré 25). La seconde famille, intitulée « volet
économique et financier », contient dix-neuf critères
répartis en cinq sousespaces (cf. encadré 26). Enfin, la
dernière famille, intitulée « volet social, culturel et
humain », contient quinze critères répartis en quatre
sous-espaces.
20 L'étude a été effectuée en
2003 et ne tient pas compte de la dernière conférence de
Barcelone qui a eu lieu en novembre 2006.
Il reste a déterminer le système de
pondérations (cf. encadré 27). L'échelle des
poids varie de 1 a 5 et permet d'accentuer les effets d'un critère de
façon spécifique mais aussi ceux d'un sous-espace de façon
globale.
Dans la première famille de critères,
l'accent a été mis sur les sous-espaces << risque pays et
liberté de la presse » et << secteur militaire et armement
» qui traduisent le degré de stabilité du contexte
politique. Pour la seconde famille de critères, les sous-espaces
<< investissements et mouvements de capitaux » et << situation
macroéconomique » ont été mis en avant. Le premier
comprend l'indice de liberté économique et le second est
composé de fondamentaux intervenant dans les ajustements réel et
nominal. Enfin, la dernière famille de critères a favorisé
l'espace << développement humain et qualité de vie »
qui englobe la majeure partie des paramètres sociaux, notamment a
travers l'indice de développement humain.
Encadré 25 : Critères du volet politique
et de sécurité en Méditerranée
Risque pays et liberté de la presse
- Rating risque-pays : note sur une
échelle a 7 niveaux émise par la COFACE pour évaluer les
risques politique et économique. A1 << situation très
stable », A2 << situation stable », A3 << situation
moyennement stable », A4 << situation a peu près stable
», B << situation incertaine », C << situation
très incertaine », D << situation grave ». Ces notes
alphabétiques ont été traduites en notes numériques
(1 pour D a 7 pour A1).
- Indice de liberté de la presse : note
sur une échelle de 1 a 5 émise par RSF pour évaluer la
situation de la liberté de la presse dans le monde. 1 << situation
très grave », 2 << situation difficile », 3 <<
problèmes sensibles », 4 << situation plutôt favorable
», 5 << situation favorable ».
- Portée des médias : pourcentage
de journaux achetés quotidiennement par les citoyens. Cet indicateur
traduit la diffusion et le libre accès a l'information.
Participation des femmes dans la vie
politique
- Sièges attribués aux femmes dans le
Parlement : indique la participation des femmes aux décisions
politiques. - Implication des femmes dans le gouvernement : indique
le nombre de titres ministériels attribués aux
femmes.
Sécurité et mouvements des
réfugiés
- Personnel de sécurité par rapport a
la population totale : effectifs de l'armée de terre, de l'air et
des forces navales, ainsi que les effectifs du personnel paramilitaire comme la
gendarmerie, la douane et la police des frontières. Cet indicateur
traduit le niveau de sécurité d'un pays et sa capacité a
faire face aux conflits.
- Réfugiés par pays d'asile :
nombre d'individus venus se réfugier dans le pays en raison de
persécutions liées a leur origine, nationalité, ethnie ou
opinion politique. Cet indicateur joue en faveur du pays
concerné.
- Réfugiés par pays d'origine :
nombre d'individus fuyant le pays en raison de problèmes liés a
leur origine, nationalité, appartenance ethnique ou opinion
politique. Cet indicateur joue en défaveur du pays
concerné.
Secteur militaire et armement
- Dépenses militaires par rapport au PIB
: montant des dépenses du Ministère de la Défense
relatives au recrutement et a l'entraînement des soldats, a l'acquisition
et la mise en place des équipements militaires. Cet indicateur traduit
l'éventualité que le pays concerné soit exposé a un
risque de guerre ou de conflit.
- Importations d'armes conventionnelles :
montant des importations d'armes et équipements destinés a des
fins militaires (navires, avions de chasse, véhicules d'assaut,
missiles, artillerie, systèmes de détection et radars). Cet
indicateur traduit l'éventualité que le pays concerné soit
exposé a un risque de guerre ou de conflit.
Source : Guessoum [2003a], annexe
1.
Encadré 26 : Critères du volet
économique et financier en Méditerranée
Internationalisation et échanges
commerciaux
- Indice d'ouverture : rapport entre les flux du
commerce extérieur et le PIB (imports + exports / PIB). Cet indicateur
traduit la densité du commerce international comparé à la
taille de l'économie.
- Termes de l'échange : rapport entre les
montants en dollar des échanges (exports en valeur / imports en valeur).
Une valeur inférieure à 1 signifie qu'il y a déficit de la
balance commerciale.
- Secteur du tourisme : recettes du tourisme par
rapport aux exports. C'est une forme d'exportation qui s'effectue
au
niveau local. Cet indicateur permet d'évaluer
les échanges avec l'étranger qui se passent à
l'intérieur du territoire. - Trafic aérien : nombre
d'avions quotidiens annoncés au départ. Cet indicateur traduit la
densité du trafic aérien et
donc la fluidité des mouvements de personnes, du
courrier et de certaines marchandises.
Situation macroéconomique (indicateurs
d'ajustement réel)
- Taux de croissance annuelle du PIB : mesure la
progression ou le recul de l'économie, d'une année à
l'autre.
- FBCF par rapport au PIB : proportion de
l'investissement global par rapport à la taille de l'économie.
Ceci mesure
l'importance accordée à l'accumulation du
capital en équipements de production, terrains,
immobiliers...
- Solde budgétaire par rapport au PIB :
montant des revenus courants, des capitaux et des aides financières
reçues,
duquel est déduit le montant des
dépenses.
- Solde courant par rapport au PIB : montant net
des flux issus du commerce extérieur (exports - imports) et des
transferts courants.
Situation macroéconomique (indicateurs
d'ajustement nominal)
- Taux d'inflation : mesure la progression du
niveau général des prix.
- Service de la dette par rapport au PIB :
coût des emprunts accordés au pays concerné. Il s'agit du
montant des intérêts payés sur les dettes de long terme, de
court terme et issus des prêts accordés par le FMI.
- Aide au développement reçue par
rapport au PIB : montant des prêts ou dons octroyés par le
Comité d'Aide au Développement. Il s'agit d'une ressource
financière qui n'engendre pas de coûts.
Investissements et mouvements de capitaux
- Investissement privé par rapport à la
FBCF : évalue l'importance du processus de
privatisation.
- Flux nets d'IDE par rapport au PIB : mouvements
de capitaux étrangers sous forme d'investissements directs.
- Capitalisation boursière par rapport au
PIB : valeur totale des titres proposés sur le marché
boursier. Cet indicateur
évalue l'importance du marché financier et
mesure une partie des investissements de portefeuilles.
- Indice de liberté économique :
note sur une échelle de 1 à 5 émise par Heritage
Foundation pour estimer les
contraintes de l'Etat sur l'activité
économique (interventionnisme, régulation, politique commerciale,
politiques
fiscale et monétaire, marché de capitaux,
systèmes bancaire et financier, droits de propriété,
marché parallèle).
Diffusion de la technologie dans les domaines de
l'information et de la communication
- Lignes téléphoniques pour 1000
personnes : accessibilité et densité des
télécoms d'ancienne génération. -
Téléphones mobiles pour 1000 personnes : accessibilité
et densité des télécoms de nouvelle
génération. - Nombre d'internautes : accessibilité
des moyens de communication de nouvelle génération favorisant la
diffusion de
l'information et de la technologie.
- PC pour 1000 personnes : diffusion des
technologies et des procédés modernes de traitement de
l'information.
Source : Guessoum [2003 a], annexe
1.
|
Sur le plan méthodologique, nous avons
procédé à une analyse multicritère afin de
déterminer la position relative des pays méditerranéens.
Notre évaluation se décline en deux étapes : la
première consiste à appliquer Electre Tri de manière
globale sur l'ensemble de l'échantillon sélectionné
(benchmarking) et la seconde vise à appliquer Electre III de
manière partielle sur les sous-échantillons issus du
tri.
Les deux méthodes ont en commun les
performances des actions et les pondérations des critères, tandis
que les seuils d'indifférence et de préférence sont
propres à chaque procédure. En effet, Electre III opère
sur des sous-ensembles de pays qui sont comparés entre eux (rating),
alors qu'Electre Tri opère sur l'échantillon complet par rapport
à des profils (benchmarking). Par conséquent, cette
dernière méthode introduit des paramètres
supplémentaires qui sont les performances des normes de
référence.
Encadré 27 : Critères du volet social,
culturel et humain en Méditerranée
Développement humain et qualité de
vie
- Indice de développement humain :
indicateur compris entre 0 et 1 mesurant le niveau d'accomplissement des
individus sur trois catégories (longévité et santé,
niveau d'instruction, qualité de la vie).
- PIB par tête : part de chaque individu
dans l'économie. C'est un indicateur du niveau de vie moyen.
- Taux de mortalité infantile : proportion
de décès chez les enfants par rapport à la population
totale. Cet indicateur permet d'évaluer la qualité de
l'environnement dans lequel évoluent les individus.
- Accès à l'eau potable : proportion
de la population ayant accès à une source d'eau potable. Cet
indicateur évalue la qualité de vie des individus.
Engagements dans le domaine de la santé
(dépenses, ressources et accessibilité)
- Dépenses de santé par rapport au
PIB : montants attribués aux secteurs public et privé de la
santé.
- Médecins pour 100 000 personnes : nombre
de médecins généralistes et spécialistes, y compris
les diplômés, enseignants et chercheurs au sein des
facultés de médecine.
- Accès aux médicaments de base :
proportion de la population ayant accès aux premiers soins et
aux
médicaments essentiels. Ces médicaments
sont recensés sur une liste établie par les services de
l'OMS.
- Accès aux commodités sanitaires
essentielles : disponibilité d'installations sanitaires satisfaisant
aux normes
(systèmes d'évacuation, fosses septiques,
canalisations...).
Engagements dans le domaine de l'éducation
(dépenses, alphabétisation et scolarisation)
- Dépenses d'éducation par rapport au
PIB : montants attribués au secteur de l'éducation publique
et privé
(primaire, secondaire, universitaire), y compris les
subventions et les dépenses des administrations.
- Indice du niveau d'éducation : c'est l'un
des indicateurs de développement humain. Il est calculé à
partir du
taux d'alphabétisation des adultes et du taux de
scolarisation primaire, secondaire et universitaire.
- Taux d'alphabétisation des adultes :
pourcentage des personnes de 15 ans et plus, ayant la capacité
d'écrire et
de lire des phrases courtes et simples.
Situation du marché du travail et des
employés
- Taux de chômage global : proportion de la
population active n'ayant pas d'emploi.
- Niveau d'activité : proportion de la
population en âge de travailler.
- Compétences des ressources humaines :
proportion de la population ayant fait des études à
l'université. Cet indicateur permet de distinguer le niveau de
qualification de la population active.
- Femmes exerçant une activité
économique : proportion des femmes travaillant dans un secteur hors
agriculture par rapport aux hommes. Cet indicateur estime le niveau
d'inégalité hommes / femmes concernant la répartition des
emplois.
Source : Guessoum [2003a], annexe 1.
|
a. Déroulement du benchmarking par Electre
Tri
Le benchmarking que nous avons élaboré
par Electre Tri répertorie les PM en trois catégories :
meilleures performances (30%), performances moyennes (40%) et mauvaises
performances (30%). Celles-ci sont délimitées par deux profils :
70ème centile (profil 1) et le 30ème
centile (profil 2) de la distribution mondiale. Ainsi, un PM qui surclasse le
profil 1 réalise de meilleures performances que 70% des pays du monde.
De même, un PM qui surclasse le profil 2 et qui est surclassé par
le profil 1 réalise de meilleures performances que 30% des
économies dans le monde. Par contre, si un pays est surclassé par
le profil 2, il fait partie des économies qui sont surclassées
par 70% de la distribution mondiale.
Catégorie 3
Graphique 3 : Evolution du classement des pays
méditerranéens par région
Graphique 1 : Evolution de la position relative
des pays méditerranéens
Graphique2 : Evolution de la position absolue des
pays méditerranéens
Catégorie 2
Catégorie 1
Source : Guessoum [2003a], p. 10.
Source : Guessoum [2003a], p. 11.
Source : Guessoum [2003a], p. 10.
Catégorie
3
Catégorie 2
Catégorie 1
Catégorie 3
Catégorie 2
Catégorie 1
L'introduction de seuils de préférences
faible et forte permet de comparer les performances des actions potentielles et
celles des deux profils de références. C'est pourquoi la
méthodologie utilisée suppose l'existence de deux seuils de
préférence faible et de deux seuils de préférence
forte. Ils peuvent varier d'une période à l'autre, en fonction de
l'évolution des performances relatives aux actions et aux
profils.
Afin de fixer les seuils de façon
méthodique, nous avons eu recours à des fonctions statistiques
telles que la moyenne, l'écart-type, le maximum et le minimum. Sur
chaque critère, le seuil de préférence faible a
été défini à partir de l'écart (en valeur
absolue) entre les performances du profil 2 et le maximum des performances des
actions potentielles. Parallèlement, le seuil de
préférence forte a été calculé à
partir de l'écart (en valeur absolue) entre les performances du profil 1
et le minimum des performances des actions potentielles. Nous avons tenu compte
des écarts moyens entre les performances des actions et celles des
profils, puis procédé à un recoupement pour
déterminer les seuils définitifs21.
Il est à noter que les seuils de veto n'ont pas
été introduits étant donné le nombre
considérable de critères et la restriction de l'échelle
des poids (l'écart entre les pondérations des critères est
faible). Une action dont seule une performance sur un critère en
particulier domine le reste de l'échantillon ne doit pas être
prioritaire, puisqu'elle réalise des performances peu concluantes sur le
reste des critères.
Nous avons opté pour des niveaux de coupe
ë spécifiques aux familles de
critères et fixes dans le temps. Rappelons que
ë est la valeur minimale de l'indice de
crédibilité ó(ai ,
bh) concordant avec l'affirmation (ai S
bh). Concrètement, ë =
0,65 pour le volet politique, ë = 0,73 pour le
volet économique et ë = 0,76 pour le
volet social. Une fois les algorithmes de tri exécutés, nous
avons obtenu une répartition des PM sur les trois catégories
prédéfinies. Cette classification ne donne pas de détails
concernant l'ordre des éléments appartenant à une
même catégorie (cf. encadré 28).
Nous constatons que les PM appartiennent
majoritairement à la catégorie 2, quels que soient le volet et la
période considérés. Ceci signifie qu'ils font partie des
pays qui réalisent de meilleures performances que 30% du reste du monde
mais se font devancer par 30% des pays. Ils font donc partie de la classe
moyenne et leur position est stable à travers le temps. Nos
résultats montrent que cette distribution est plus
équilibrée entre les catégories et moins stable dans le
temps au niveau du volet social. Les PM ont des situations politiques et
économiques assez proches mais restent hétérogènes
dans le domaine social.
21 Ce mode de calcul est expérimental et a
été pensé à l'issue de l'un de nos articles
(Guessoum [2003]). Il a ensuite servi de support à la création de
l'option « seuils facultatifs » de notre logiciel (chapitre
III).
Encadré 28 : Comparaison des PM aux benchmarks
mondiaux
|
Période
|
1990
|
2000
|
Volet
|
Catégorie 1
|
Catégorie 2
|
Catégorie 3
|
Catégorie 1
|
Catégorie 2
|
Catégorie 3
|
Politique
et de sécurité
|
Chypre Malte
|
Algérie Egypte Jordanie Liban
Maroc Syrie
Tunisie Turquie
|
Israël
|
Malte
|
Algérie Chypre Egypte Jordanie
Liban
Maroc Syrie
Tunisie Turquie
|
Israël
|
Economique et financier
|
Chypre
|
Algérie Egypte Israël Jordanie
Liban
Malte
Maroc Tunisie Turquie
|
Syrie
|
Israël
|
Algérie Chypre Egypte Jordanie
Liban
Malte
Maroc Syrie
Tunisie Turquie
|
|
Social, culturel et humain
|
Israël
|
Chypre Jordanie Liban
Malte Turquie
|
Algérie Egypte Maroc Syrie Tunisie
|
Chypre Israël Malte
|
Algérie Egypte Jordanie Liban
Syrie
Tunisie Turquie
|
Maroc
|
|
Source : Guessoum [2003a],
|
p. 6.
|
|
L'évolution des profils, liée au
développement du contexte socio-économique mondial, suscite un
intérêt particulier pour l'évolution des positions relative
et absolue des pays entre le début et la fin de la décennie 90.
L'approche relative décrit l'évolution des PM en même temps
que celle de leur environnement (cf. encadré 29, graphique 1),
alors que l'approche absolue traduit leur comportement en faisant abstraction
des changements de contexte (cf. encadré 29, graphique 2).
C'est une sorte d'analyse dynamique dont l'arrière-plan reste
fixe.
Concrètement, nous avons cherché
à observer le comportement dynamique des PM et celui des
références. Il s'agit de comparer les données de 1990 par
rapport aux profils de 1990, puis les données de 2000 par rapport aux
profils de 2000 (c'est l'approche relative). Il s'agit ensuite de comparer les
performances de 2000 en utilisant les références de 1990 (c'est
l'approche absolue). A partir des graphiques 1 et 2 (cf.
encadré 29), nous avons superposé, deux à deux, les
cadres relatifs à un même volet et conclu à une convergence
des PM.
Sur le volet politique, les pays de la
catégorie 1 régressent et ceux de la catégorie 2
progressent avec la même intensité en termes relatif et absolu.
Ces pays sont en phase avec l'évolution mondiale des économies de
la même tranche. Les pays de la catégorie 3 régressent en
position relative et progressent en position absolue. Ils évoluent moins
vite que le contexte politique mondial (sécurité,
démocratie, droits de l'homme...).
Encadré 29 : Evolution du contenu des
catégories en Méditerranée
Sur le volet économique, les PM de la
catégorie 1, régressent en position relative de manière
plus prononcée qu'en position absolue. Les standards internationaux sont
plus exigeants. Les PM des catégories 2 et 3 progressent avec la
même intensité en positions relative et absolue. Ces pays sont en
phase avec leur environnement économique.
Sur le volet social, les trois catégories ont
les mêmes niveaux d'évolution en termes relatif et absolu. Les PM
sont en phase avec les normes sociales de la distribution mondiale. Il s'agit
d'une régression pour les pays de la classe 1, d'une progression pour
les pays de la classe 2 et d'une très forte amélioration pour les
pays de la classe 3.
Pour finir, nous avons étudié le
comportement dynamique par région (cf. encadré 29,
graphique 3). Les résultats liés aux critères politiques
montrent que la moyenne méditerranéenne se situe au centre de la
catégorie 2, en début et en fin de période. On observe,
toutefois, une légère dégradation à la fin de
décennie 90. Celle-ci est influencée par le déclin des
pays du Maghreb dont les performances restent nettement supérieures
à celles du Machrek22 (notons que le conflit
israélo-palestinien s'est traduit par une baisse des notes risque-pays
attribuées au Proche-Orient).
Sur les critères économiques, les PM se
situent en moyenne au centre de la classe 2, en début de période,
avec une tendance à se rapprocher du sommet de la catégorie en
fin de période. Cette amélioration revient aux progrès
réalisés par la Méditerranée dans son ensemble et
par le Machrek en particulier.
La situation sociale de la moyenne
méditerranéenne évolue vers des standards de meilleure
qualité. Ceci est dû aux progrès remarquables qui ont
été réalisés par le Maghreb tout autant que par le
Machrek. Une amélioration qui a permis aux pays des deux régions
de se hisser vers le sommet de la catégorie 2.
|