b. Compétitivité et cohésion
sociale
La compétitivité au sens large est la
capacité d'une économie à assurer de façon durable
à sa population un taux d'emploi et un niveau de vie en progression,
tout en satisfaisant à des ambitions sociales, environnementales et
internationales3. L'arbitrage entre compétitivité et
cohésion sociale s'appuie sur le fait que le coût de la protection
sociale réduit la compétitivité d'un pays. Les
critères en faveur de l'amélioration de la
compétitivité relèvent de la
déréglementation du marché du travail, de l'accroissement
des inégalités, de la réduction des dépenses
publiques et donc des services collectifs.
Cette conception est fondée sur une vision du
contrat social toute particulière : la montée du chômage
résulte d'un affaiblissement de la cohésion sociale et le
creusement du fossé inégalitaire est dû à la faible
marge de manoeuvre de l'Etat. Il en ressort que les dépenses publiques
portant sur des projets d'éducation et de santé, seraient
à l'origine d'externalités positives (équité et
égalité des chances), de même que la redistribution
permettrait d'augmenter le degré de cohésion sociale, ce qui est
favorable à la productivité et améliore la
compétitivité. C'est en cela que les critères liés
à la qualification, l'éducation et la culture sont essentiels au
système de représentation (Borner et al.
[2004]).
3 La compétitivité ne se limite pas
à la capacité d'un pays à vendre ses biens.
Rappelons que les inégalités peuvent
être en termes de revenu et liées à la distribution des
ressources disponibles des ménages. Elles sont alors mesurées par
le rapport entre la
part du PIB des 20% les plus riches et des 20% les
moins riches ou par l'indice de Gini(courbe de
Lorenz). Les inégalités peuvent être aussi en
termes d'emploi et liées aux
disparités salariales. Elles sont alors
mesurées par le rapport entre le salaire cumulé des 90% des
employés et celui des 10% des employés. Il reste à savoir
si la croissance engendre plus ou moins d'inégalités, ce qui
revient à se poser la question du rapport entre justice sociale et
inégalités.
Dans un tout autre registre, les questions
liées à l'environnement et au développement durable
suscitent beaucoup d'intérêt. Les dérèglements
climatiques ont relancé le débat sur la relation entre
l'environnement et la croissance : le modèle économique,
après avoir su créer des richesses, sera-t-il capable de
préserver l'avenir ? Depuis 1992, l'ONU a organisé une
série de conférences dans le but de sensibiliser l'opinion
internationale face aux externalités (la pollution est un exemple
d'effet externe négatif). Dans ce sens, la notion de
développement << durable » ou << soutenable » a
été introduite en 1987 par la Commission Mondiale sur
l'Environnement. Elle caractérise toute activité
économique permettant de satisfaire les besoins présents, sans
compromettre la capacité des générations futures à
combler les leurs.
Concrètement, la nature de la relation entre
développement économique et développement durable
dépend de la gestion des externalités. Deux principes sont alors
radicalement opposés : l'approche interventionniste du pollueur-payeur
selon Pigou (1932) et l'approche libérale du coût de transaction
selon Coase (1960). Ce dernier raisonnement sous-entend que l'intervention de
l'Etat, même si elle contribue au développement durable et
à la croissance, est considérée comme un coût
supplémentaire. A ce sujet, les agences de notation, qui sont dans une
pure logique financière comme Moody's, estiment que le
développement durable ne fait pas partie des critères
d'évaluation de la valeur boursière des entreprises. C'est
d'ailleurs la raison pour laquelle les groupes industriels considèrent
l'investissement environnemental comme un surcoût.
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