II.2.4. Les modèles allométriques
existants
Pour estimer la biomasse ligneuse sur pied, plusieurs
modèles allométriques ont été utilisés dans
la zone tropicale. Récemment, Lufafa et al., (2008), ont
développé des régressions pour estimer la biomasse d'une
espèce buissonnante (Guiera senegalensis). Les formules
utilisées par ces auteurs sont les suivantes :
· pour la biomasse sur pied à partir du
diamètre moyen de la couronne - log y = 5,12 + [0,012*uDC] (y est la
biomasse, uDC le diamètre moyen de la couronne du
sujet)6 ;
· pour la biomasse racinaire à partir du
diamètre du tronc à la base - log y = 7,52 + [0,015*uDT] (y est
la biomasse, uDT le diamètre du tronc à la base du sujet).
La difficulté avec cette méthode est l'obtention
de mesures précises du diamètre des couronnes de cette
espèce très grégaire et largement étalée sur
le sol. Le diamètre de la base des sujets est tout aussi difficile
à estimer car cette espèce est le plus souvent multicaule avec de
tout-petits troncs en grand nombre, souvent exploités pour leur bois ;
ce qui fait que les branches résiduelles ne sont que des repousses.
Pour une extrapolation des stocks de carbone, des applications
se développent de plus en plus à partir de la modélisation
spatiale, mais aussi par la recherche de corrélations entre
paramètres biophysiques mesurés sur le terrain et estimateurs de
ces paramètres avec des données spatiales. La conversion de
signatures spectrales des images Haute ou Moyenne Résolution en taux de
couverture du sol et la reconversion du taux de couverture en biomasse est une
possibilité testée par St-Onge et al. (2004); Brown
et al. (2005); Lufafa et al. (2008). Cette approche
présente des inconvénients liés aux erreurs additionnelles
issues des biais des indices utilisés : erreurs de conversion en taux de
couverture ou densité de la végétation, et erreurs
liées aux corrélations avec la biomasse. Pour minimiser ces
erreurs, il est possible de passer par une bonne caractérisation
(cartographie) des types de végétation homogène, un taux
d'échantillonnage représentatif lors des inventaires de ces types
de végétation et l'utilisation de modèles
allométriques pour convertir les données d'inventaire en
biomasse.
6 Lufafa et al., (2008) passe la diamètre
moyen de la couronne des individus de Guiera senegalensis, car cette
espèces est buissonnantes. Mais l'estimation du diamètre de la
couronne dans ce cas d'espèce présente des risques en termes de
confusion entre les individus.
Les estimations de biomasse à partir des
régressions statistiques proposées par Brown (1997)
présentent des limites au niveau de la validation ; celle-ci
étant faite sur les écosystèmes de savane de
l'Amérique du Sud, ou des forêts sèches d'Inde. Toutefois,
en relativisant les choses, on peut considérer que la mise en ~uvre de
ces équations se fonde sur des données de base collectées
dans des écosystèmes dont la répartition est fonction de
la pluviométrie (tableaux 4). Ainsi pour rester dans les conditions
climatiques proches de celles de zones considérées, l'application
de ces équations sur le Sénégal intègre les
modèles développés pour des précipitations
annuelles comprises entre 300 et 1500 mm/an.
Tableau 4. Régressions
allométriques proposées par Brown (1997)
Modèle allométri que
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Zone climatique
|
Equation
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Intervall e 0 en
cm
|
r2
ajusté
|
FAO 1
|
Forêts sèches Indes (pmm non indiquée)
|
Y = exp(- 1,996+2,32*ln(D))
|
5-40
|
0.89
|
FAO 2
|
Forêts sèche Mexique,
pmm> 900 mm
|
Y = 42.69- 12.800(D)+1.242(D2)
|
5-148
|
0.84
|
FAO 3
|
Forêts sèche Mexique,
pmm< 900 mm
|
Y = exp(- 2.134+2.530*ln(D))
|
Non indiqué
|
0.97
|
FAO 4
|
Forêts sèche Mexique,
pmm< 900 mm
|
Y = 21.297- 6.953(D)+0.740(D2)
|
4-112
|
0.92
|
T= biomasse par sujet en kg, D = dbh en cm.
Aucune équation ne doit être utilisée pour
estimer la biomasse si le diamètre des sujets dépasse
l'intervalle indiqué. C'est ainsi que ces modèles ont
été testés sur des diamètres de moins de 80 cm
(l'essentiel des individus sont dans cette catégorie au niveau des
savanes). Cependant on note une forte divergence sur les résultats de
ces modèles allométriques quand on l'applique aux données
de savanes du Sénégal. La figure 20 montre que ces modèles
ne présentent pas les mêmes performances.
Figure 20. Tests des méthodes
allométriques utilisés dans les écosystèmes
tropicaux
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Modèles FAO (Brown, 1997)
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Code Excel
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Y = exp(-1,996+2,32*ln(D))
|
FAO1 : =EXP((-1,996)+2,32*LN(DBH))
|
Y = 42.69-12.800(D)+1.242(D2)
|
FAO2 : =42,69-12,8*DBH+1,24*PUISSANCE(DBH;2)
|
Y = exp(-2.134+2.530*ln(D))
|
FAO3 : =EXP((-2,134)+2,53*LN(DBH))
|
Y = 21.297-6.953(D)+0.740(D2)
|
FAO4 : =21,297-6,953*DBH+0,74*PUISSANCE(DBH;2)
|
Les tests réalisés sur ces équations
montrent une grande divergence sur la biomasse estimée à partir
de 15 cm de DBH (figure 20). Ainsi l'estimation de la biomasse des gros
diamètres constitue le principal problème de ces
régressions. Entre le modèle FAO 1 (Y = exp(- 1,996+2,32*ln(DBH))
et le modèle FAO 3 (Y = exp(-2.134+2.530*ln(DBH)), la biomasse
estimée pour les gros diamètres passe du simple au double. Ainsi,
l'utilisation de ces modèles pose le problème de surestimation ou
de sous estimation de la biomasse ce qui pourrait avoir un impact important sur
les calculs d'additionalité des projets MDP forêt.
FAO 1 (EXP((19)+23*LN(DBH))
Cependant, il n'existe pas d'approche standard pour estimer la
biomasse sur pied des zones
(P(-23)2,5(BH))
FA 0ISS
de savane basée sur des données d'inventaire du
fait du manque de données consistantes. Les méthodes
développées pour les forêts denses ou pour les savanes
d'Amérique Latine sont difficilement transposables aux formations de
savane du Sénégal qui présentent des taxons
caractéristiques (multicaules, bas branchus).
En somme, on a noté que plusieurs modèles
allométriques existent, mais il est rare d'en trouver sur les
écosystèmes arides et subhumides d'Afrique de l'Ouest (Brown,
1997). A
6 1 6 21 26 3 36 4 46 51 56 61 6 71 76
défaut de mieux, plusieurs recherches antérieures
utilisent les modèles existants (Woomer,
DBH
2003; Woomer et al., 2004; Mbow, 2005)
développés dans des écosystèmes aux climats
similaires (mais pas identiques) à ceux des savanes
d'Afrique de l'Ouest. Les différences entre les sites d'études
entraînent des erreurs méconnues quand on applique les
modèles `exogènes'. C'est pour cette raison qu'un effort est
consenti dans chaque pays pour développer des approches adaptées
et opérationnelles. Cette volonté de développement de
méthode est sous-tendue par les problèmes méthodologiques
rencontrés lors des inventaires nationaux des gaz à effet de
serre, par le manque ou la faible fiabilité des données et par la
grande incertitude sur la précision des résultats (CGE, 2005). Il
convient dès lors de baser l'estimation de la biomasse des
écosystèmes sur des régressions allométriques
natives (endogènes), se fondant sur une collecte de données par
méthode d'abattage-pesage comme cela a été fait dans
d'autres les écosystèmes d'Amérique ou d'Europe.
Développer des équations allométriques
pour l'estimation de la biomasse est un exercice coOteux et dont la
réalisation reste complexe. Dans la perspective de l'évaluation
des stocks de carbone dans les formations forestières, les mesures
dendrométriques classiques sont de plus en plus renforcées par
des mesures de phytomasse. Dans la méthode proposée ici, il est
question d'évaluer la biomasse ligneuse sur pied. L'information sur la
biomasse sur pied des arbres et arbustes doit être recueillie sur les
parties les plus complètes possibles des individus
échantillonnés en considérant les grands et petits arbres.
La base de la collecte de biomasse pour cette thèse est
détaillée au point suivant.
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