I.4. Le rôle des forêts dans
l'atténuation des changements climatiques
On connaît depuis longtemps l'importance des
forêts pour la production de biens et de services comme les produits
ligneux, les combustibles, la conservation des ressources en sols et en eaux,
les loisirs et la diversité biologique. A présent, on
connaît aussi le rôle important des forêts dans les cycles
biogéochimiques globaux, en particulier le cycle du carbone (MEA, 2005).
Le cycle du carbone est essentiel pour son rôle de régularisation
de la concentration de gaz carbonique (CO2) - qui est un gaz à effet de
serre important - dans l'atmosphère. L'augmentation de la concentration
en CO2 dans l'atmosphère contribue au réchauffement de la
planète, et par conséquent au changement climatique. Les
principaux réservoirs de carbone sont l'atmosphère, les
combustibles fossiles, les océans, la biosphère terrestre et les
sols (voir figure 1, plus haut). Le carbone est échangé entre ces
réservoirs et l'atmosphère sous forme de gaz carbonique (CO2) par
: la combustion des combustibles fossiles, la production primaire nette et la
respiration des plantes, des sols et des autres formes de matière
organique morte, le déboisement, le boisement et le reboisement et la
repousse de la végétation après un bouleversement, et au
travers les échanges avec les océans.
Les forêts sont importantes dans le cycle global du
carbone car elles stockent de grandes quantités de carbone dans la
végétation et le sol. Elles échangent du carbone avec
l'atmosphère par la photosynthèse et la respiration et elles sont
des sources de carbone atmosphérique quant elles sont perturbées
par des causes humaines ou naturelles (feux de brousse, abattage selon de
mauvaises procédures d'exploitation, débroussaillement et brOlis
pour la conversion de la forêt à d'autres usages) et elles
deviennent des puits de carbone atmosphérique (absorption nette de CO2
de l'atmosphère) lorsqu'elles repoussent après ces
bouleversements. Les hommes peuvent, par l'aménagement des forêts,
changer la taille des réservoirs de carbone et modifier le flux de
carbone entre eux et par conséquent modifier leur rôle dans le
cycle du carbone et la façon dont ils influent sur le climat.
Les perturbations qui entraînent une libération
du carbone peuvent être d'origine naturelle ou être
provoquées par l'homme; ce sont notamment des processus qui
entraînent la conversion des forêts ou la dégradation des
terres. Parmi ces processus, on peut citer l'agriculture, le pâturage,
l'exploitation du bois, les feux de brousse, et les infestations par les
ravageurs et les maladies. Par contre, lorsqu'on reconstitue des terres
dégradées, on reconstitue la fonction de puits de carbone des
formations végétales. C'est la tendance générale
observée dans beaucoup de forêts des zones tempérées
et boréales qui ont été exploitées (abattage ou
exploitation sélective) ou déboisées dans le passé
(Brown, 2002).
Selon Brown et Gaston (1995), les forêts peuvent influer
sur le réchauffement climatique de plusieurs façons, notamment
par la production d'autres gaz à effet de serre comme l'oxyde de
carbone, l'ozone et les oxydes nitreux, et par des changements de
l'albédo, c'est-à-dire du pouvoir de réflexion de la terre
quand les forêts sont remplacées par d'autres types de couvertures
terrestres. Cependant, la principale influence des forêts réside
sur la régulation du CO2 dans l'atmosphère et, par
conséquent, sur le cycle global du carbone. Les
forêts3 couvrent environ 3,4 Gha (1 Gha =
109 ha ou 1 milliard d'hectares) (FAO, 1996). La plupart sont
situées :
- dans les zones de faible latitude (0 à 25 °N et S)
ou zone tropicale (52%),
- dans les zones de latitude élevée (50 à 75
°N et S) ou zone boréale (30%),
- dans les zones de latitude moyenne (25 à 50 °N et
S) ou zone tempérée (18%).
Il y a dans le monde quelques 1,7 Gha d'autres terres
boisées qui incluent d'autres formations comme des formations claires,
les broussailles et les jachères forestières résultant des
cultures itinérantes (FAO, 1995) qu'on ne comptabilise pas directement
dans les formations forestières au sens de la définition de la
FAO. Une partie de ces autres zones non forestières, offre des
possibilités considérables d'atténuation des
émissions de CO2 par l'aménagement forestier (par exemple, en
évitant les incendies dans la savane).
Par contre, les forêts tropicales subissent des pertes
importantes, estimées actuellement à environ 15,4 millions
d'hectares par an pour la période 1980-1990 ; mais il s'agit là
de données estimées (Brown, 2002). De 1986 à 1990, FAO
(1996) estime que 5,9 millions d'hectares par an de forêts tropicales ont
été abattues pour des besoins commerciales ou de consommation
locale. Pour la plupart, les zones déboisées sont converties en
terres agricoles, pâturages ou cultures itinérantes. Outre le
déboisement, de vastes étendues de forêts sont
exploitées à titre commercial. L'abattage diminue les stocks de
carbone sur ces
3 Les pays du Sud doivent définir la notion de
forêt dans le cadre des MDP. Trois valeurs sont requises pour
définir une forêt (critères définis par les accords
de Marrakech et par la FAO) : taux de couverture minimum de 10-30 %, surface
minimum de 0,05-1 ha, taille minimum des arbres de 2-5 m.
terres, mais les forêts peuvent se
régénérer et accumuler du carbone
(généralement davantage qu'avant l'abattage) si elles ne sont pas
gravement endommagées durant les opérations d'exploitation. Cette
reconstitution peut être plus effective si les zones forestières
font l'objet de bonnes méthodes d'aménagement et sont
protégées des forces naturelles et humaines qui pourraient nuire
à la végétation et au sol (Brown, 2002). Il faut noter
toutefois que la plupart des formations forestières tropicales subissent
plusieurs formes de dégradation insidieuses ou apparentes, diminuant
ainsi le rythme ou la capacité de séquestration du carbone.
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