O. INTRODUCTION
0.1 Position du problème
L'amputation est une intervention chirurgicale majeure et
mutilante pouvant se pratiquer à n'importe quel age de la vie du
patient. Elle est pratiquée partout dans le monde du fait que ses causes
ne se limitent pas à un niveau quelconque.
L'amputation est vécue comme un drame humain, quel que
soit son niveau. Elle touche douloureusement le malade dans son
intégrité physique, psychologique et sociale ; elle bouleverse sa
manière de vivre : son activité quotidienne, ses études,
son métier ou ses loisirs. Elle n'épargne pas davantage le
médecin et son équipe, a fortiori si le sujet est jeune.
Pour PARRATTE B., ARNOLD C. et CALMELSP. «l'amputation
crée elle-même un nouvel état pathologique pour lequel
aucune guérison n'est à espérer. Le traitement ne peut
alors être que palliatif, ne satisfaisant jamais complètement le
patient, le laissant souvent dans un état douloureux, face auquel le
médecin peut être impuissant.»1
DUFOUR J. : souligne que l'image de soi est reliée
à l'image corporelle. La modification de l'une modifie l'autre, le tout
étant vécu par rapport à soi-même et par rapport aux
autres avec lesquels on est en relation humaine,
affective.»2
L'amputation d'un membre inférieur va modifier la
marche et les aptitudes physiques du sujet, ce qui peut l'obliger à
changer de métier, à reconsidérer ses relations affectives
avec ce corps mutilé. Cela pose le problème de la remise en
question de l'identité à travers la modification corporelle et
l'acceptation d'une nouvelle identité habitant ce corps et se remettant
en relation, à partir de là, avec l'environnement affectif et
professionnel. Selon BERNARD M. (1995:140) ; « Nous appellerons image
du corps; la configuration globale que forme l'ensemble des
représentations, perceptions, sentiments, attitudes, que l'individu a
élaboré vis-à-vis de son corps au cours de son existence
et ceci à travers diverses expériences ce corps perçu est
fréquemment référé à des normes (de
beauté, de rôle) et l'image du corps est le plus souvent une
représentation évaluative».
Avec les idées de ces auteurs, nous constatons qu'ils
convergent sur le vécu de la personne qui a subit des modifications dans
l'intégrité de son corps.
Il est important de souligner aussi que les amputations d'un
membre inférieur occupent une partie non négligeable parmi les
interventions chirurgicales et mutilantes pratiquées dans les
hôpitaux. A titre exemplatif, selon les différents rapports
d'activités de l'Hôpital Kibungo, les amputations
s'élèvent à un nombre considérable parmi les
interventions qui intéressent le système osseux. Le tableau
ci-dessous nous donne l'idée générale sur les amputations
d'un membre inférieur faites au cours de l'année 2007 soit dans
la période de 12 mois.
Tableau n° 1 : Statistiques des
patients amputés d'un membre inférieur à l'Hôpital
Kibungo (Janvier-Décembre 2007)
Mois
|
Nombre des patients enregistrés pour
l'opération intéressant le syst~me
osseux
|
Nombre des patients amputés d'un membre
inférieur
|
Janvier
|
32
|
2
|
Février
|
21
|
1
|
Mars
|
21
|
2
|
Avril
|
30
|
4
|
Mai
|
30
|
6
|
Juin
|
26
|
3
|
Juillet
|
17
|
1
|
Août
|
15
|
1
|
Septembre
|
21
|
3
|
Octobre
|
9
|
1
|
Novembre
|
23
|
3
|
Décembre
|
24
|
2
|
TOTAL
|
269
|
29
|
Source : Rapports mensuels SIS Hôpital Kibungo,
année 2007
D'après le tableau sus mentionné, un taux non
négligeable de patients ont subi une intervention chirurgicale
aboutissant à une amputation d'un membre, cela ne va pas épargner
ces patients les conséquences physiques que psychologiques en
postopératoire.
Lors de situations professionnelles, un patient nous a
confié, après une semaine d'hospitalisation, qu'il se sentait
étranger dans son nouveaux corps, « je suis
déformé, et incapable de faire comme avant». Il
était également hypervigilant et vérifiait
fréquemment son moignon d'amputation qu'il n'y a pas de problèmes
comme hémorragie.
Quelques jours après son opération, une autre
patiente nous a livré, qu'elle se sentait mal dans ce nouveau corps,
malgré qu'elle se fCit préparée psychologiquement pour cet
important changement à venir. Lors des soins, elle disait se sentir
« inquiète » et angoissée, refusant de
regarder son moignon d'amputation. Elle nous a expliqué qu'elle refusait
de parler de ses soucis à ses proches et avait choisi de les
éloigner de tout ça.
Partant de ces données, nous nous sommes donc
demandés comment aider ces patients en période de crise, comment
améliorer leur qualité de vie, leur apprendre à
gérer leur stress, et à se prendre en charge. L'essentiel de
notre travail sera donc de comprendre dans quel cadre et quel état
d'esprit se situent les patients récemment amputés. Cela nous
permettra de cibler les différents stress et ses facteurs freinant la
progression vers l'autonomie et le bien être psychologique, puis de
proposer des interventions psychologiques répondant à leurs
besoins.
Selon le décret de compétences du domaine de la
psychologie clinique, il est de notre rôle propre d'entretenir une
relation d'aide efficace qui permet au patient d'avancer dans son nouvel
état tant physique que psychologique. Nous nous sommes alors
proposé de mener une recherche dont la formulation est : « Le
vécu psychologique des patients récemment opérés.
Cas des amputés d'un membre inférieur à l'Hôpital
Kibungo.».Qui rentre donc tout à fait dans le cadre
demandé.
A partir de ces considérations nous nous sommes
posé plusieurs questions en rapport avec le vécu psychologique de
ces patients ; ces questions sont subsidiaires à la question
principale.
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