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L'arbitrage en droit de la propriété intellectuelle dans l'espace oapi

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par Charles Marcel DONGMO GUIMFAK
Université de Yaoundé I - SOA - Master 2 en Droit de la propriété intellectuelle 2009
  

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Section 2 : L'efficacité de la sentence arbitrale

L'arbitre est chargé d'étudier les faits que chacun reproche à l'autre et de rendre ensuite une décision destinée à vider le contentieux. La sentence est la décision du tribunal arbitral « qui tranche de manière définitive, en tout ou en partie le litige qui a été soumis, que ce soit sur le fond, sur la compétence ou sur un moyen de procédure qui conduit à mettre fin à l'instance ».191(*) Cette décision s'impose aux parties et peut acquérir la même force contraignante qu'un véritable jugement à l'issue d'une procédure judiciaire simplifiée dite « d'exequatur ».

La question se pose essentiellement de savoir si une sentence peut faire l'objet d'un recours. En principe, la sentence arbitrale est définitive. Ce caractère définitif est généralement considéré comme l'un des avantages de l'arbitrage. Une partie peut cependant contester la sentence devant les tribunaux du lieu de l'arbitrage pour obtenir une déclaration d'invalidité ou « d'annulation » de la sentence.

Il faut noter que la plupart des sentences arbitrales sont exécutées volontairement et spontanément, puisqu'en acceptant de se soumettre à l'arbitrage, les parties s'engagent à exécuter la sentence à intervenir192(*). Et, avec l'adaptation de l'arbitrage aux litiges entre professionnels, la sentence est mieux acceptée et exécutée. La situation pathologique des quelques sentences qui ne le sont pas ne devrait pas dominer la réflexion au moment de juger de l'arbitrabilité. Dès lors, on peut dire que l'efficacité de la sentence arbitrale se mesure à la reconnaissance et l'exécution de la sentence (paragraphe 1). Toutefois, se pose la question de l'immunité d'exécution de certaines personnes morales (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La reconnaissance et l'exéquatur des sentences arbitrales

La sentence n'a pas automatiquement la force exécutoire d'un jugement judiciaire. Si la partie condamnée n'exécute pas spontanément les obligations mises à sa charge, l'autre partie devra en appeler à la justice publique pour voir conférer à la sentence la force contraignante nécessaire à la mise en oeuvre des mesures coercitives. Cette complication liée à la mauvaise volonté de la personne condamnée par l'arbitre est l'un des inconvénients du recours à l'arbitrage. La reconnaissance et l'exéquatur des sentences arbitrales d'abord dans l'espace OAPI (A), puis selon la convention de New York (B) seront envisagés.

A - La reconnaissance et l'exéquatur de la sentence dans l'espace OAPI

Les garanties procédurales ci-dessus exposés augurent d'une exécution spontanée des sentences arbitrales. Les statistiques révèlent que 70% des décisions rendues par le Centre d'arbitrage du GICAM sont acceptées et exécutées sans recours et même sans exéquatur par les parties193(*). La sentence arbitrale est assimilable à un jugement, à cela près qu'elle ne bénéficie pas de plein droit et automatiquement de la force exécutoire. Les arbitres, eux, ont bien la balance, mais ils n'ont pas le glaive, l'imperium du juge. Par conséquent, la sentence arbitrale ne sera susceptible d'exécution qu'avec la collaboration des juridictions étatiques. La procédure utilisée s'appelle l'exequatur.

Avant l'exéquatur, des mesures conservatoires peuvent avoir été prises ou l'exécution provisoire ordonnée et doivent être mises en oeuvre. Les mesures conservatoires autorisées par les sentences arbitrales sont des décisions qui ont « pour objet de préserver une situation, des droits ou des preuves » dans l'attente d'une décision finale sur le fond194(*). Elles visent dans des situations d'urgence, à sauvegarder des droits, des choses et à faire face à l'imminence d'un dommage195(*). L'exécution provisoire elle, « permet de poursuivre l'exécution d'une décision qui aurait autrement dû être suspendue par l'exercice des voies de recours à son encontre »196(*). Mais l'exécution provisoire de la sentence risque d'être une source de difficulté pour la partie bénéficiaire lorsque sa mise en oeuvre n'est pas raisonnablement engagée197(*). En effet, l'exécution provisoire créant des droits susceptibles d'être remis en cause à l'issue du recours en annulation. L'article 32 alinéa 2 de l'Acte uniforme OHADA sur les voies d'exécution est éloquent lorsqu'il dispose que l'exécution provisoire est poursuivie aux risques du créancier198(*).

Cette précision faite, il faut relever que l'exequatur est une procédure extrêmement simplifiée dans le cadre de laquelle, de manière non contradictoire dans l'espace OHADA, on demande sur requête au Juge d'ordonner l'exécution de la sentence. Le Juge compétent vérifie la régularité formelle de la sentence, il examine si elle ne contient rien qui paraisse contraire à l'ordre public et en ordonne l'exéquatur.

Le cadre juridique favorable à l'exécution des sentences arbitrales dans l'espace OHADA est institué par l'AUA. Suivant ce texte, le juge de l'exécution ou de l'annulation n'est pas autorisé à réexaminer au fond le litige réglé par les arbitres si la sentence est soumise à l'exequatur ou à l'annulation.199(*) Les griefs de fond prévus à l'article 26 de l'Acte uniforme, qui peuvent entraîner l'annulation de la sentence sont limitatifs et s'apparentent pour une grande part à ceux du droit français.200(*) Enfin, ce que le juge devra examiner principalement, ce sera donc, d'une part, la convention d'arbitrage et, d'autre part, la sentence, non pas dans son exactitude mais dans sa conformité avec le document qui fonde le recours à l'arbitrage. Il y aura lieu à annulation par exemple si l'arbitre a jugé ultra petita.

Le Règlement d'arbitrage de la CCJA institue en son article 30.2 une procédure d'exequatur unique valable dans l'ensemble des Etats membres de l'OHADA201(*). Il convient cependant de relever que la portée de l'exequatur unique de la CCJA est limitée à l'espace OHADA202(*), et seules les procédures arbitrales faisant application du Règlement d'arbitrage de la CCJA peuvent en bénéficier. On peut se demander si la limitation de cette portée n'est pas un moyen d'inciter les Etats tiers à adhérer au traité de l'OHADA pour bénéficier des avantages, ou même une incitation à recourir à l'arbitrage sous le régime du règlement d'arbitrage de la CCJA. Ceci risque d'entraver la prospérité des institutions d'arbitrage crées dans les Etats membres203(*).

Nonobstant le régime favorable à l'exécution des sentences dans l'espace OAPI, des difficultés subsistent. En effet, certaines dispositions de l'AUA semblent renfermer des germes de difficultés susceptibles d'entraver l'efficacité internationale des sentences arbitrales. Ces dispositions source de divergences d'interprétation entre les auteurs figurent essentiellement dans l'article 34 de l'Acte uniforme qui dispose que : « les sentences arbitrales rendues sur le fondement de règles différentes de celles prévues par le présent Acte uniforme, sont reconnues dans les Etats parties, dans les conditions prévues par les conventions internationales éventuellement applicables, et à défaut, dans les mêmes conditions que celles prévues aux dispositions du présent Acte uniforme »204(*).

* 191 C.A. Paris, 25 mars 1994, Rev.arb.1991. 39, note : Jarosson.

* 192 L'article 64 du Règlement d'arbitrage de l'OMPI souligne par exemple qu'en acceptant de se soumettre à l'arbitrage conformément au présent règlement, les parties s'engagent à exécuter la sentence sans délai et renoncent à leur droit d'exercer tout appel ou recours devant un tribunal ou une autre autorité judiciaire, pour autant que cette renonciation puisse être valablement faite en vertu de la loi applicable. Cela ressort aussi dans plusieurs Règlements d'arbitrage.

* 193 Me Sylvain SOUOP, op. cit.

* 194 Ph. FOUCHARD, E.GAILLARD, B. GOLDMAN, Traité de l'arbitrage commercial international, Paris, Litec, 1996, § n°1303.

* 195 Jason FRY, « L'utilisation des mesures provisoires dans les procédures arbitrales », RDAI/IBLJ, N°3, 2006, p.374.

* 196 G. CORNU, Vocabulaire juridique, 3ème éd., Paris, P.U.F., 1998  p. 22 ss. , cité par Dominique HASCHER, « L'exécution provisoire dans l'arbitrage international » in Etudes de procédure et d'arbitrage en l'honneur de J.-F. Poudret, Lausanne 1999, p. 403 et s.

* 197 Sourou Tinê Abdel-Kader FADAZ, Le régime juridique de l'arbitrage commercial international, Université de Lomé (TOGO) - DESS Droit des Affaires et Fiscalité, in http://www.memoireonline.com/06/09/2136/m_Le-regime-juridique-de-larbitrage-commercial-international25.html, (consulté le 28 octobre 2010).

* 198 V. dans le même sens, l'art. 31 de la loi française du 9 Juillet 1991 portant réforme sur les procédures civiles d'exécution.

* 199 Cf. en ce sens, Denis R. SOH FOGNO, Le contentieux de l'annulation des sentences issues de l'arbitrage traditionnel dans l'espace OHADA, Rev. cameroun. de l'arb. n° 23 oct.- déc. 2003 p.7 ; La disposition de l'article 25 de l'Acte uniforme selon laquelle « la sentence n'est pas susceptible d'opposition, d'appel, ni de pourvoi en cassation (...) (mais) peut faire l'objet d'un recours en annulation... » semble s'inscrire dans cette vision.

* 200 Cf. art. 1502 NCPCF. Aux motifs classiques concernant la validité de la convention d'arbitrage, la régularité de la constitution du tribunal arbitral, le respect du contradictoire, le dépassement du cadre de leur compétence ou la non conformité à leur mission par les arbitres, s'ajoutent ceux relatifs à la violation d' « une règle d'ordre public international des Etats signataires du traité » de l'OHADA et à la motivation de la sentence arbitrale.

* 201 Ce texte dispose en son article 31 que « l'exequatur est accordée par une ordonnance du Président de la Cour (la CCJA) ou du juge délégué à cet effet et confère à la sentence un caractère exécutoire dans tous les Etats parties ».

* 202 En ce sens cf. Mayatta Ndiaye MBAYE, L'arbitrage OHADA, réflexions critiques, Mémoire DEA droit privé 2000-2001, Université de Paris X (Nanterre), p. 29, consultab. sur www.ohada.com.

* 203 Sourou Tinê Abdel-Kader FADAZ, op. cit.

* 204 Idem.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius