Conclusion
En fin de ce travail nous confirmons que cette recherche
n'est qu'une introduction à un champ plus vaste et à un univers
immense vu l'ouverture du sujet sur plusieurs approches. En effet, le discours
publicitaire des affiches peut être étudié selon des points
de vue différents. Pour notre part, nous avons essayé
d'étudier les affiches publicitaires au niveau linguistique en mettant
l'accent sur l'aspect phonologique, l'aspect morphosyntaxique, l'aspect
lexical. Quant au niveau sociolinguistique, nous avons mis en question la
distribution des affiches dans les trois types de quartiers en fonction de leur
niveau socioéconomique. Nous avons étudié ensuite la
plurivocalité de l'affiche publicitaire, nous avons examiné
également les différents enjeux de la sélection des
langues dans le discours publicitaire des affiches, comme nous avons mis en
question finalement l'émergence de l'arabe marocain dans la
publicité en particulier et dans les médias en
général.
D'après cette recherche, nous avons conclu au niveau
linguistique la caractérisation du discours publicitaire par un ensemble
de particularités phonologiques, morphosyntaxiques et lexicales. Au
niveau phonologique, le discours publicitaire est marqué par des jeux
sur la sonorité comme la répétition des syllabes initiales
et finales dans plusieurs mots du même texte, les assonances, les
allitérations, le calembour, la paronomase, etc. ; il est
caractérisé également par l'emprunt de certains
phonèmes des langues étrangères vers l'arabe marocain,
celui-ci subit les influences des autres langues comme l'arabe standard, le
français, l'anglais et l'espagnol. Nous avons vu que ces figures de
répétition phonique remplissent une fonction esthétique et
relèvent d'une stratégie mise en place par l'artisan publicitaire
dans une perspective de séduire, d'émouvoir et d'attirer
l'attention du public au message publicitaire ; ces jeux sur les sons ont comme
autre fonction la facilitation de la mémorisation des annonces par le
consommateur.
Au niveau morphosyntaxique, nous avons relevé la
présence de toutes les modalités mais avec prédominance de
la modalité impérative, car celle-ci invite l'interlocuteur
à l'action (consommer le produit annoncé). Le discours
publicitaire est caractérisé aussi par les structures
paratactiques et d'autres détachées, celles-ci connotent la mise
en valeur de certains éléments de l'énoncé qui sont
généralement les noms des produits ou des groupes de mots
désignant les qualités de ceux-ci. Quant aux pronoms personnels,
il y a prévalence des pronoms de la deuxième personne (singulier
et pluriel), cette prévalence se présente comme résultat
de la prédominance de la modalité impérative. Tous ces
procédés morphosyntaxiques sont pris en charge dans une
perspective pragmatique pour faire agir, faire réagir le consommateur et
changer son comportement d'achat.
Au niveau lexical, le discours publicitaire est
marqué par deux types de répétition : une
répétition d'ordre lexicale met en jeu la reprise des
lexèmes dans le même énoncé et une
répétition d'ordre sémantique, reprise du même
signifié par des signifiants différents en utilisant les
procédés de synonymie, d'hyperonymie et d'hyponymie. La
répétition concerne généralement soit les noms des
produits ou leurs marques, soit des lexèmes désignant les atouts
de ces derniers.
Quant à l'étude sociolinguistique, nous avons
noté l'existence des corrélations entre la distribution des
affiches et le niveau socioéconomique du public visé. Seules les
affiches des produits relevant des besoins du premier degré (immobilier,
télécommunication) prédominent dans le quartier populaire.
Dans le quartier moyen, apparaissent les affiches des produits appartenant
à ce que nous avons appelé besoins de deuxième
degré (voitures, ameublements, institutions bancaires, loisirs (lecture
de magazines), cuisine, la technologie (ordinateurs), etc.) . Enfin, dans le
quartier prospère surgissent les affiches des produits qui
relèvent des besoins de troisième degré,
c'est-à-dire tout ce qui appartient à la vie de luxe (voiture de
luxe, logement de luxe, produits cosmétiques, etc.) .
En ce qui concerne les langues utilisées dans le
discours publicitaire dans le contexte marocain (exemple de Tanger), nous avons
souligné l'emploi de trois codes : l'arabe standard, l'arabe marocain et
le français. Leur emploi est corrélé relativement au type
du public visé et au produit annoncé. En outre, il y a le
bilinguisme et ce qu'on appelle une langue mixte qui caractérisent le
discours publicitaire des affiches au Maroc. Cette plurivocalité se
présente comme le résultat de la situation plurilingue du pays.
Enfin, nous avons relevé l'émergence de
l'arabe marocain, code de la communication ordinaire pour les locuteurs
marocains, dans le contexte publicitaire et dans le champ médiatique de
manière générale. En effet, l'émergence de la
dârija constitue une nouvelle tendance s'inscrivant dans une perspective
de la valorisation d'un code communément pratiqué par un nombre
plus large de locuteurs et de son émergence dans des écrits de
types différents (poésie, théâtre, conte, presse,
etc.). Or, la forte apparition de l'arabe marocain dans les médias ne
constitue pas les premiers indices de la dégradation de l'arabe
standard? Peut-on prévoir le futur de ces deux langues qui constituent
une situation diglossique? Ou bien cette émergence n'est qu'une
expression de la diversité linguistique qui caractérise le Maroc?
Ces questions restent en perspective.
En somme, nous soulignons que l'étude du discours
publicitaire ne peut être achevée dans une centaine de pages, mais
elle mérite des milliers car il s'agit d'un thème très
riche. C'est un sujet qui offre l'avantage d'être abordé selon des
approches différentes. Avantage qui nous encourage à investiguer
prochainement au niveau d'autres aspects et d'étudier ce discours dans
autres médias.
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