Médias et pouvoir politique en rdc. (de la deuxième république à la transition)( Télécharger le fichier original )par Michel Kifinda-Ngoy Université de Kinshasa, RDC - Licence en sciences de l'information et de la communication 2009 |
§2. Rapports d'émancipation et de contre pouvoir des médias vis-à-vis du pouvoir politique (1988-1997).1. Ouverture démocratique de l'espace politique et émancipation des médias.La situation médiatique en République démocratique du Congo varie toujours avec la situation politique du pays. En effet lors qu'il n'existait pas de liberté politique en RDC, il n'existait pas non plus la liberté de la presse ; acteurs politique comme professionnels des médias, tous étaient mêlés dans un même sac, celui de défendre l'idéologie du MPR. Les médias et le pouvoir politique ont donc continué à établir permanemment leurs rapports c'est pourquoi la situation de l'un influençait toujours sur l'autre. Ainsi donc, pendant toute la période de la deuxième république les privés étaient interdits d'investir dans les médias. Mais dès l'annonce du dégel du pouvoir dictatorial en 1990, les langues se délient, la presse se libère, et la presse écrite en tout premier lieu. Journaux, hebdomadaire et mensuels, bulletins et périodiques sont créés par centaines, presque chaque mois, au même rythme que la naissance foisonnante des partis politiques. En 1997, on estime à 500 le nombre d'organes de presse créés ou ressuscités à partir du discours de démocratisation du 24 avril 1990. Plus coûteux, les médias audiovisuels suivront jusqu'à donner à ce jour, à Kinshasa, quatre radio privées (Elikya, Sango Malamu, Raga et RTKM) et cinq chaînes de télévision. Désormais, aux côté de la voix du peuple, télévision nationale, fonctionnent Télé Kin Malebo, Canal Kin 1, Canal Kin 2, Antenne A et Raga.161(*) La presse, essentiellement la presse écrite, a servi d'auxiliaire efficace la lutte pour la démocratisation menée aussi bien par les acteurs politiques à partir des partis politiques que les acteurs religieux et sociaux, à partir de leurs chaires d'églises, principalement l'Eglise catholique et à partir des organisations syndicales. Les médias ont établi des véritables rapports à la fois avec les partis politiques, les confessions religieuses, les organisations syndicales, qui étaient soit leur patron ou leur partenaire qui leur permis de s'émanciper aussi rapidement. En bref, l'émancipation des médias a dépendu d'abord de l'attention particulière que les acteurs politiques et religieux leur ont accordée dans la lutte pour la démocratisation du pouvoir politique. 2. La presse rouge dans la lutte pour la démocratisation du pouvoir politiqueAprès trente deux ans de dictature, la RDC devrait connaître, évidemment, une lutte, longue, douloureuse et néanmoins courageuse qui a conduit au changement de régime politique au pays. Dans cette lutte, les médias essentiellement la presse écrite, a servi d'auxiliaire efficace à la lutte pour la démocratisation menée aussi bien par les acteurs politiques que sociaux. Affirmons avec le professeur Ngoma-Binda162(*) que la contribution des médias est incommensurable dans la lutte pour le changement politique qui est intervenu dans le Congo. Les médias ont joué un rôle politique incontestable, sous la forme d'information, de conscientisation, de prévention, de dénonciation, et d'orientation de l'opinion publique. Il s'agit d'une contribution à la fois de la société civile et autonome dans le cadre, en général, des éditoriaux énonçant des opinions personnels des responsables des journaux. Corroborons cette affirmation avec Marie Soleil Frère163(*) qui nous renseigne qu'à partir de 1990, la libération de la vie politique entraîne l'apparition d'une multitude de nouveaux titres, alors que les anciens journaux progouvernementaux rejoignent massivement l'opposition. Ces publications sont marquées par une double caractéristique : d'une part, elles sont avant tout des organes de dénonciation s'attachant à mettre au jour « les scandales, les collusions de la deuxième République ». La plupart des organes de presse s'en prennent constamment, avec une extrême virulence à tous les organes du pouvoir, y compris au Président. D'autre part, ce sont aussi des organes qui naissent dans le sillage des hommes politiques à un moment où se positionnent les grandes figures qui sont supposées représenter une alternative à Mobutu (Etienne Tshisekedi, Nguz A`Karli Bond...) et où les partis connaissent un développement exponentiel. L'implication de la presse dans la dite lutte a été totale. Même la presse confessionnelle n'est pas restée indifférente. Elle a contribué à une éducation politique en profondeur. La presse religieuse la plus spectaculaire, par son ton direct et dur, est celle de l'initiative d'un converti du clan Mobutu, M. Sakombi Inongo, devenu évangéliste en 1991 il crée la voie de Dieu, un organe d'expression qui, dans un courage extraordinaire soutenu par la foi en la parole évangélique, dénonce le machiavélisme, voire le satanisme du Régime politique instauré par Mobutu et pour lequel lui-même aura été l'un des acteurs propagandistes les plus aveuglément convaincus et les plus efficaces.164(*) Bref, les médias ont véritablement contribué à la lutte pour le changement politique. Si certains soutenaient encore MOBUTU, la plupart s'y opposaient avec un courage politique défiant la prison et les plasticages. * 161 Ngoma-Binda, « Les médias et la lutte pour le changement politique au Congo » ; tiré de Mutamba M. (Dir.), Plaidoyer pour un journalisme civique et de développement, Kinshasa, Ifep, 1998, p. 80. * 162 Ngoma-Binda, « Les médias et la lutte pour le changement politique au Congo » ; tiré de Mutamba M. (Dir.), Plaidoyer pour un journalisme civique et de développement, Kinshasa, Ifep, 1998, p. 80 - 81. * 163 Marie Soleil Frère (Dir.), Afrique centrale, médias et conflits, vecteur de guerre ou acteur de paix, Paris, éd. GRIP, Institut Panos Paris 2005, p. 99. * 164 Ngoma-Binda, op. cit., p. 82 - 83. |
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