PARAGRAPHE II : LA CRISE DU DARFOUR : UNE CONSEQUENCE
DE LA FRAGILITE DU SYSTEME POLITIQUE SOUDANAIS.
La crise qui secoue actuellement le Darfour illustre de
l'inefficacité du système politique adoptait par le Soudan depuis
son indépendance. Aujourd'hui beaucoup de provinces ne se retrouvant pas
dans ce système, se sentent marginalisées. C'est à l'image
de celle du Darfour qui a déclenché une guerre civile contre le
régime en place. Dans cette partie nous mettrons l'accent sur le
fondement du système politique soudanais adopté en faveur des
provinces (A) mais aussi sur l'inadaptation de ce
système par rapport aux réalités du pays
(B).
A/ le fondement du système politique
soudanais
L'ampleur de la crise qui se déroule actuellement au
Darfour est la conséquence d'un système politique soudanais
toujours en construction. En effet au lendemain de son indépendance, le
Soudan a voulu adopter un système politique basé sur un
gouvernement fédéral qui visait l'unité du pays et la
direction de la politique générale. Cependant cette aspiration va
rencontrer l'opposition des
22 P F Gonidec, Les Relations Internationales
Africaines, .. .Op. , Cit., p. 148
régions périphériques dont le Sud et le
Darfour qui souhaitèrent le maintien de leur spécificité
culturelle et religieuse et au partage des ressources
économiques23. Malgré tout l'Etat soudanais a
entrepris des initiatives pour une meilleure administration du pays.
La première initiative fut l'autonomie qui a
été accordé à la Province du Sud. En effet c'est la
Province du Sud sous le régime du Général NIMEIRI qui fut
la première à bénéficier d'une autonomie obtenue
suite à l'Accord d'Addis-Abeba de 1972. Cette année marqua le
point de départ de l'expérience de l`autonomie régionale
du pays, par la loi sur l'autonomie régionale des provinces du Sud. Par
la suite une autre région, celle du Kordofan (centre du pays) va
bénéficier d'une dévolution du pouvoir. Cependant la
reprise de la guerre en 1983 par les populations du Sud poussera les
autorités de l'époque à abroger cette loi portant sur
l'autonomie.
La deuxième initiative correspond à la prise du
pouvoir le 30 juin 1989 par le Président Omar Al BECHIR. En effet une
fois arrivé au pouvoir, ce nouveau régime qui se veut consensuel,
global et cohérent va activer le projet fédéraliste qui a
été abandonné par l'ancien régime. Par ailleurs le
régime de 1989 fait le règlement de la question du Sud l'objet de
sa prise du pouvoir. Le nouveau projet fédéral que le
Président BECHIIR instaure, se veut l'expression du désengagement
de l'Etat bien que les organes du gouvernement soient nommés par le
pouvoir et pas élus par le peuple. L'objectif affiché est une
meilleure répartition du pouvoir et des richesses, d'impulser le
développement et de résoudre la question des rapports entre la
religion et l'Etat. Ainsi le nouveau système politique adopta des
décisions salutaires qui reposent sur trois piliers : la charia au Nord,
la démocratie participative et le système fédéral.
Tout ceci sera concrétisé par le décret constitutionnel du
04 Février 1991 qui va diviser le pays en 9 Etats
fédérés, Darfour en trois sous - Etats et le Sud en neuf
avec la dotation de chaque Etat d'un budget et d'une personnalité
propre, l'engagement
23 Cf. Pierre-Paul Dika, La crise du Darfour..., op.
Cit. p. 2
de l'Etat central à reverser 20% de ses ressources pour
assurer le fonctionnement de la décentralisation et le retour de
l'administration indigène.
Mais des difficultés vont survenir au niveau de
l'application de ce décret. D'un coté l'Etat n'a pas
respecté ses engagements puisque constatant que le Sud est une
région riche en pétrole il a voulu dissocier le
fédéralisme politique et le fédéralisme
économique. D'un autre coté, le Sud a vu dans ce décret
une façon de mettre en compétition leurs valeurs locales et
régionales aux valeurs universelles. Conséquence ils ont
opté pour la continuation de la guerre et ce n'est qu'en 2002 qu'ils ont
accepté de négocier avec le régime de Khartoum. Cependant
en obtenant de grandes concessions pour leur Province, ils venaient de montrer
« la voix à suivre » pour se faire reconnaître dans cet
immense Etat, à la Province du Darfour.
Démontrant ainsi de l'inefficacité du
système politique soudanais dans ses rapports avec les provinces
périphériques.
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