I-3-2 Fondement théorique de l'étude.
Les ancrages théoriques qui soutiennent les
Partenariats Public-Privé sont fondés sur le rôle et
l'efficacité de l'intervention de l'Etat dans la sphère
économique.
D'une manière générale, l'Etat a toujours
été présent dans l'esprit des penseurs tant classiques que
modernes, et des théoriciens, qu'ils soient philosophes, sociologues ou
économistes.
Les questions touchant le rôle et la place de l'Etat
continuent d'alimenter les débats, tout comme les thématiques
liées à la pertinence des politiques publiques et des programmes
gouvernementaux de même qu' à l'efficacité des
administrations publiques.
Les PPP s'insèrent dans une dynamique de recul de
l'Etat providentiel et opérateur et semblent déboucher sur une
configuration de gouvernance novatrice. Alors, de quelles approches
théoriques répondent ces partenariats?
Les principales théories qui fondent les PPP peuvent
être résumées dans les approches suivantes : la
théorie de l'efficience-x, la théorie du New Public Management,
la théorie des coûts de transaction, la théorie de l'agence
et la théorie des choix publics.
Selon la théorie de l'efficience-x
développée en 1966 par Leibenstein, certaines
inefficacités organisationnelles ne résultent pas d'un
défaut d'allocation des facteurs de production mais plutôt des
facteurs non mesurables voire non identifiables (facteurs-x) tels que
motivation, savoir faire, culture d'entreprise etc.
Les réflexions primaires de Leibenstein (1966) sur la
théorie de l'efficience-x étaient appliquées à
l'analyse du sous développement et n'établissaient pas de lien
formel entre l'inefficience-x et les organisations publiques. Ce lien sera
établi dans son article publié en 1978, où il
dégage un certain nombre de facteurs qui seraient source
d'inefficience-x tels que l'absence de pressions externes qui favoriserait une
`vie tranquille' dans l'administration publique, l'immortalité de
l'administration publique et la multiplicité des objectifs qui lui sont
assignés. Selon Leibenstein, les sources d'inefficience dans
l'administration publique se trouvent justifiées par les comportements
inadaptés de l'Etat et de ses agents, d'une part et par la structure
organisationnelle fortement bureaucratisée de celle-ci, d'autre part.
C'est pourquoi
les théoriciens de l'efficience-x soutiennent que les
PPP pourraient contribuer à réduire de manière
substantielle les sources d'inefficience-x dans les organisations publiques,
permettant ainsi à celle-ci de renouer avec la performance et la
compétitivité.
Quant à la théorie du New Public Management
(NPM) née en Grande Bretagne au début des années 80, elle
vise à introduire dans l'administration publique les valeurs et les
modes de fonctionnement de la firme privée. Le NPM apparaît comme
l'une des reformes ayant précédé et
précipité de façon implicite les PPP. Cette théorie
va de l'idée que la modernisation de l'administration publique et
l'amélioration de sa gestion sont des processus qu'il faut engager afin
de donner aux services publics leur lettre de noblesse et surtout de renouer
avec l'efficience et l'élimination des énormes déficits
accumulés au cours de ces dernières années. Le NPM peut
être perçu comme une sorte de réponse à la crise des
finances publiques. Il faut préciser que cette nouvelle approche, dans
ses principes, a grandement favorisé l'émergence des PPP qui
posent l'efficience comme dogme dans la gestion des affaires publiques.
Une autre approche est celle des coûts de transaction,
développée par Coase (1937) et reprise par Williamson (1985). La
théorie des coûts de transaction considère que si les
administrations publiques sont inefficaces, c'est parce qu'elles ne sont pas
capables de minimiser leurs coûts de transaction (coût
d'information, de négociation, d'exécution des contrats)
contrairement aux firmes privées. L'une des argumentations de cette
théorie est qu'au sein des organisations publiques, la rigidité
des structures, le processus de prise de décision et les cercles vicieux
bureaucratiques imposent une délégation de pouvoirs; ce qui
engendre, en raison, notamment de l'imperfection de l'information et des
comportements opportunistes1 des agents, des structures
onéreuses et des mesures coûteuses de surveillance. Ces
comportements opportunistes dans un contexte d'asymétrie de
l'information font que les transactions dans la sphère publique se font
sur les produits de mauvaise qualité (Akerlof,1970). Cette même
idée est soutenue par la théorie de l'agence qui prétend
que l'entreprise est un noeud de contrats entre un mandant (le principal,
l'Etat) et un mandataire (l'agent, le gestionnaire). Pour s'assurer de la
qualité de l'effort de son agent, le principal doit instaurer un
système incitatif. Ce système
1 L'opportunisme consiste, dans un contexte
d'information incomplète, à rechercher son intérêt
personnel, en ayant recours à la ruse et à diverse forme de
tricheries.
incitatif est trop coûteux dans les entreprises
publiques. Selon cette théorie, le PPP constitue une approche qui permet
à l'Etat de minimiser ses coûts d'agence.
Dans le même sens, Buchanan (1972), dans sa
théorie des choix publics, postule que l'inefficience des entreprises
publiques est due notamment aux groupes d'intérêt et aux jeux
politiques qui caractérisent l'administration publique. L'argumentation
de l'école des choix publics est que les personnes qui sont
supposées pendre des décisions publiques notamment les
administrateurs d'entreprise, les politiciens et les bureaucrates, le font, non
pas en privilégiant les intérêts de la
société dans son ensemble, comme l'affirment les discours
officiels étatiques, mais plutôt leurs intérêts
propres comme c'est le cas pour tout autre individu dans d'autres contextes de
la vie privée (Hodge, 2000).
Ce courant oppose l'Etat et le marché en
considérant le marché comme le mécanisme d'allocation
efficiente par excellence des ressources. La préoccupation de ces
théoriciens s'oriente vers la manière de rendre minimale
l'intervention de l'Etat dans l'économie. Cette théorie
considère donc qu'en raison de l'inefficacité de l'Etat, pour des
considérations partisanes et bureaucratiques, il est impérieux de
soumettre à la sanction du marché, le plus grand nombre
d'activités gouvernementales.
Notons pour conclure cette revue de littérature que,
ces différentes approches ne font pas l'unanimité au sein des
économistes. Les débats sur l'intervention de l'Etat dans la
sphère économique continuent.
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