Fiscalité, finances publiques et croissance au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Madaniou Dieme - 0000 |
2. Analyse empirique de l'évolution des recettes fiscales2.1. Etude de l'évolution des recettes fiscalesTableau 10 : pression fiscale dans les pays de l'UEMOA entre 2004 et 2008
Source : fr.allafrica.com Tableau 11 : croissance des recettes fiscales et du PIB du Sénégal
Source : calculs de l'auteur Exception sénégalaise en termes de pression fiscale La pression fiscale est le rapport entre les recettes fiscales et la PIB. Son augmentation peut être due à plusieurs raisons parmi lesquelles - une augmentation des recettes, toutes choses égales par ailleurs - une baisse du PIB, toutes choses égales par ailleurs - une augmentation des recettes combinée à une baisse du PIB. L'analyse du tableau 11 montre que sur la période 1989-1999, les recettes ont augmenté avec un taux de croissance de 9,95%, alors que le PIB nominal a augmenté avec un taux de 7,29%. Durant la période 2000-2004, le taux de croissance des recettes fiscales s'est fixé à 11,63% contre 5,95% pour le PIB. 20 L'augmentation plus rapide des recettes par rapport au PIB au cours de la période 2000-2004, explique l'exception sénégalaise en termes de pression fiscale. Cette efficacité peut être imputable aux réformes fiscales entreprises au Sénégal. D'une part, il conviendra d'analyser l'évolution des composantes des recettes fiscales durant ces périodes afin de déterminer laquelle de ses composantes explique l'augmentation rapide des recettes. D'autre part, la baisse non négligeable du taux de croissance du PIB durant la période 2000-2004, peut expliquer en partie cette exception sénégalaise. Tableau 12 : ressources et emplois de 1980 à 2008 en moyenne annuelle à prix constants de 1999
Source : DPEE et calculs de l'auteur Tableau 12 : croissance des ressources et des emplois de 1980 à 2008 en moyenne annuelle à prix constants de 1999
Source : DPEE et calculs de l'auteur 22 L'analyse du tableau 11 montre une évolution croissante du PIB à partir de la période 1989- 1993. Le taux de croissance du PIB est de 3,37% entre 1980 et 2008. Durant la même période, le PIB moyen annuel est de 4691,5 milliards de F CFA, soit 77,33% des ressources. La période 1989-1993 se remarque par un faible taux de croissance du PIB (0,80%) et des importations (1,78%). Cette tendance a été retournée juste après la période qui a suivi la dévaluation du F CFA, avec de hauts taux de croissance. Malheureusement, ces acquis n'ont pas été confortés les périodes suivant la dévaluation. Le pic observé durant la période 1996-2000 s'explique par la dévaluation de F CFA de 1994. Cependant, l'Etat n'a pas pu maintenir ces performances en adoptant des politiques de suivi appropriées. Ainsi, le taux de croissance des ressources a chuté et est passé de 5,20% à 3,50% de la période 1996-2000 à la période 2006-2008 ; entre ces deux périodes, le PIB est passé de 4,87% à 4,00%, les taxes nettes sont passées de 7,28% à 1,67% et les importations sont passées de 4,01% à 3,50%. Essentiellement, deux phases peuvent être décelées : - 1980-1993 : elle est caractérisée par une croissance lente des ressources (2,53%). Le PIB, les taxes et les importations ont cru avec un taux de 2,40%, de 2,80% et de 3,49% respectivement. - 1996-2008 : cette phase est marquée par une évolution plus rapide des ressources avec un taux de 4,54%. Respectivement, le PIB, les taxes et les importations ont connu un taux de croissance de 4,44%, de 5,08% et de 4,50%. Il convient de remarquer durant cette phase, la croissance rapide des taxes nettes, croissance imputable essentiellement aux bonnes pratiques fiscales mises en oeuvre par l'Etat. Du côté des emplois, deux phases sont remarquables : - 1980-1993 : l'évolution est faible et lente pratiquement pour la consommation finale, les consommations intermédiaires, la formation brute de capital fixe et les exportations avec des taux respectifs de 2,71%, de 2,60%, de 4,58% et de 1,83%. En ce qui concerne les variations de stocks, le taux de variation est élevé en valeur absolue et est de l'ordre de 198,91%. - 1996-2008 : une amélioration est notée avec un redressement des taux de croissance qui passent respectivement 4,33%, à 4,64%, à 7,26%, 1,34% et à 1,70% pour la consommation finale, les consommations intermédiaires, la formation brute de capital fixe, les variations de stocks et les exportations. Seules les exportations ont connu un taux plus faible par rapport à la première période (1,70% contre 1,83%). Tableau 14 : évolution des composantes des recettes de 1980 à 2008 en moyenne annuelle
Source : DPEE et calculs de l'auteur Tableau 15 : croissance des composantes des recettes de 1980 à 2008 en moyenne annuelle
Source : DPEE et calculs de l'auteur Les mêmes caractéristiques des différentes périodes restent visibles dans les tableaux 12 et 13. La tendance de l'évolution des recettes est identique à celle du PIB. En sus de cette similitude, l'évolution des recettes fiscales suivant les différentes périodes, suit la même tendance que celle du PIB. La série des impôts directs et indirects n'est disponible qu'à partir de 1997, ce qui limite l'étude de la contribution de ces deux postes en termes de recettes fiscales. Néanmoins, les données disponibles permettent de dire qu'entre la période 2001-2005 et la période 2006- 2008, la tendance a été renversée : les impôts directs qui avaient atteint un taux de croissance de 13,19% durant la même période, se sont stabilisés alors que les impôts indirects ont connu un taux de croissance de 9,28% la première période et de 15,73% la période suivante. Au-delà de ces variations relatives, il est à noter que les impôts directs ont augmenté, entre 1997 et 2008, de 187,55 milliards de F CFA et dans le même temps, les impôts indirects sont passés de 307,95 à 941,29 milliards de F CFA, soit une augmentation de 633,34 milliards de F CFA.
L'évolution des recettes fiscales, entre 1980 et 2008, a connu trois phases : - 1980-1993 : durant cette phase, l'évolution a été lente et s'est faite avec un taux de 4,90%. - 1996-2005 : un taux de croissance de 9,72% a été observé durant cette phase. L'accroissement rapide des rentrées fiscales est dû aux principales mesures fiscales prises par les autorités au cours des années 90. - 2006-2008 : une plus forte croissance est décelée durant cette phase avec un taux de 15,13%. Cet état de fait n'est pas sans conséquence sur l'économie. A long terme, cette situation pourrait être à l'origine de pertes fiscales, essentiellement dues à la fraude et à l'évasion fiscales, mais aussi au repli des investisseurs. Suite à la lecture des résultats ci-dessus, une attention particulière mérite d'être faite : l'augmentation plus rapide des recettes par rapport au PIB. Cette situation entraine à long terme une forte pression fiscale, donc une lourdeur de la fiscalité, aussi bien sur les ménages que sur les entreprises. Il en résultera des conséquences néfastes sur l'économie comme la fraude et l'évasion fiscales, la perte de compétitivité des entreprises locales, l'augmentation du chômage, etc. Afin d'éviter cette situation, les autorités devraient chercher des politiques permettant d'élargir la base fiscale, maintenir les taux à un niveau relativement bas. |
|