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Google et le droit d'auteur; "don't be evil"

( Télécharger le fichier original )
par Bastien Beckers
Université de Liège - Master en droit  2009
  

Disponible en mode multipage

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Google et le droit d'auteur

"Don't be evil"

Beckers Bastien

Travail de fin d'études

Droits intellectuels

Année académique 2009-10

Recherche menée sous la direction de

Monsieur Bernard Vanbrabant

Maître de Conférence à l'université de Liège

TABLE DES MATIERES

Introduction....................................................................................................................................6

CHAPITRE I.- GOOGLE ACTUALITÉS 5

A. Introduction 5

B. En Belgique: Copiepresse à l'assaut de Google Actualités 6

a) La liberté d'expression 7

b) Les droits patrimoniaux 7

1. Originalité 7

2. Exception de citation (revue de presse) 8

3. Exception de compte-rendu d'actualité 9

c) Les droits moraux 10

C. En France et aux Etats-Unis 11

D. Quel avenir ? 12

1. Pour les éditeurs de presse 12

2. Pour Google 12

3. Pour le droit d'auteur 13

CHAPITRE II.- GOOGLE "CACHE" 13

A. Introduction 13

B. Une réponse différente en Belgique et aux Etats-Unis 14

1) Copiepresse C. Google 14

2) Blake Field V. Google 15

3) Belgium V. USA (Comparaison des décisions) 15

CHAPITRE III.- GOOGLE IMAGE 17

A. Google image vu par Paris 17

1. Loi applicable 17

2. Application en l'espèce du Copyright Act 18

B. Perfect 10 v. Google 19

C. Conclusion 20

CHAPITRE IV.- GOOGLE BOOKS 20

A. Introduction 20

B. Le Google Books Settlement (GBS) 22

1. Introduction 22

2. Objet du Google Book Settlement 2.0 22

3. L'approbation du Google Book Settlement 23

C. Les Editions du Seuil contre Google Books 23

1. La loi applicable 23

2. L'atteinte possible aux droits d'auteur 24

3. Conclusion 24

D. L'avenir de Google Books 26

CHAPITRE V.- GOOGLE VIDÉO ET YOUTUBE 27

A. Introduction 27

B. Hébergeur ou éditeur de contenu ? 28

a) En France 28

1. La notion d'hébergeur ou de simple intermédiaire 28

2. Zadig Production 29

3. Flash Film 30

b) Aux Etats-Unis 30

C. Conclusion 31

CHAPITRE VI.- CONCLUSION GÉNÉRALE: GOOGLE ET LE DROIT D'AUTEUR 32

BIBLIOGRAPHIE 38

Introduction

Internet fait aujourd'hui partie de notre paysage quotidien. Google aussi. Google est une société créée en 1998 par deux étudiants de l'université du Michigan, Larry Page et Sergey Brin. A ses débuts, Google était un moteur de recherche qui avait développé un moyen efficace de répertorier et de rechercher des informations parmi les innombrables pages qui composent le Web. Google s'est donné pour mission d'organiser l'information et de la rendre universellement accessible. Grâce à sa méthode de recherche efficace par "mots-clés", Google est rapidement devenu un acteur incontournable de la navigation sur internet: par exemple en France, près de 90 % des recherches sur internet se font via Google1(*)

Depuis dix ans, les possibilités offertes par internet n'ont cessé d'évoluer; on parle maintenant du "Web 2.0.". Ce terme désigne la multiplicité des services et des possibilités techniques et économiques qu'offre aujourd'hui internet. Parallèlement, Google a aussi évolué et occupe à présent une place prépondérante sur le marché de ces services en ligne2(*).

Au-delà du moteur de recherche initial, Google propose aujourd'hui aux internautes une multitude de ces services en ligne et notamment une messagerie électronique (GMail), une bibliothèque en ligne (Google Books), un service d'actualité (Google Actualités), une plateforme de partage de vidéos (YouTube) et bien d'autres services encore3(*). Toutes ces fonctionnalités sont proposées gratuitement aux internautes. Google a en effet comme objectif de rendre l'information universelle et accessible, et ce gratuitement. Mais Google possède évidemment des sources de revenus provenant essentiellement de la publicité sur internet dont il possède 97% du marché et de la vente de mots-clés. Début 2008, la société Google était cotée à 210 milliards de dollars à la bourse de Wall Street4(*).

Ce véritable envahissement de Google sur internet va donner à l'entreprise une image de plus en plus négative. Actuellement, le géant américain est souvent le sujet d'articles de journaux peu élogieux et surtout est l'objet de procédures judiciaires constamment relayées par la presse. Ces procès à répétition s'expliquent surtout par le fait que Google n'a de cesse de repousser les limites du droit, qu'il s'agisse du droit de la propriété intellectuelle, du droit au respect de la vie privée ou du droit à l'image; Google en éprouve tous les contours et les juridictions du monde entiers sont confrontées à l'expansion de Google.

Cet exposé va s'attacher à mettre en perspective certaines fonctionnalités proposées par Google avec le droit de la propriété intellectuelle. Ce dernier, se divise deux branches principales: d'une part, le droit de la propriété littéraire et artistique, qui est composé des droits d'auteurs et des droits voisins et, d'autre part, les droits de la propriété industrielle qui sont liés à l'industrie et au commerce. Ces derniers rassemblent les brevets, les dessins et modèles, les marques, les appellations d'origine, les indications de provenance,...

Le droit de la propriété intellectuelle est règlementé non seulement par le droit belge mais aussi par le droit international.

Cet exposé se limitera à confronter les différentes applications de Google au droit d'auteur.

§ 1.- GOOGLE ACTUALITÉS

A. Introduction

Sur ses pages françaises, en mai 2010, Google présente Google Actualités de la manière suivante:

"Google Actualités est un site d'actualités généré par ordinateur qui recueille les grands titres provenant de plus de 500 sources d'actualités en langue française dans le monde entier, regroupe les articles par thème et les affiche en fonction des intérêts de chaque utilisateur.

En règle générale, les lecteurs choisissent d'abord une publication, puis recherchent les titres qui les intéressent. Google Actualités procède de façon légèrement différente. En effet, notre objectif est d'offrir à nos lecteurs un plus grand éventail de choix et des options plus personnalisées. Sur Google Actualités, nous proposons des liens vers plusieurs articles relatifs au même sujet. Vous pouvez donc choisir d'abord le sujet qui vous intéresse, puis sélectionner l'éditeur de votre choix. Cliquez sur le titre qui vous intéresse et vous accéderez directement au site qui a publié l'article correspondant.

Nos articles sont sélectionnés et classés par des ordinateurs qui s'appuient sur divers facteurs, tels que la fréquence de diffusion d'une information en ligne et les sites sur lesquels celle-ci apparaît. Par conséquent, les articles sont triés sans tenir compte de leur orientation politique ou idéologique, et vous pouvez choisir à partir d'une large variété de perspectives. Nous avons l'intention d'améliorer Google Actualités en ajoutant de nouvelles sources, en affinant notre technologie et en proposant Google Actualités à des lecteurs dans un nombre croissant de pays"5(*).

Lorsqu'il se connecte à Google Actualités, l'internaute découvre un panorama d'actualités classées par thèmes. Le service de Google qui, rappelons-le, est gratuit, reprend en fait les titres et les premières lignes (accroches) d'articles publiés par d'autres sites d'actualités en ligne.

En cliquant sur le titre de ces articles, Google renvoie l'internaute directement à la page web du site de l'éditeur qui contient l'information. Il s'agit donc d'un hyperlien "profond"; cela signifie que l'internaute est renvoyé, non pas à la page d'accueil du site, mais directement à la page de ce site qui l'intéresse. Ce mécanisme pourrait notamment poser certains problèmes d'ordre juridique ou économique, mais cette question n'a pas été soulevée à propos de Google Actualités6(*).

Ce module Google Actualités peut susciter certaines critiques au regard du droit d'auteur. En effet, les titres et les accroches qu'il affiche sont susceptibles de bénéficier de la protection accordée par la Convention de Berne et par la Loi belge du 30 juin 19947(*) (ci-après : la Loi), s'il apparait que le titre ou l'accroche sont particulièrement originaux.

Il est évident que le statut de l'écrivain journaliste a été, depuis l'avènement d'internet, profondément modifié. Il n'écrit plus comme par le passé pour un journal papier diffusé à autant d'exemplaires (ce qui limite nécessairement le nombre de lecteurs à l'importance du tirage). Ses écrits sont maintenant voués à se retrouver sur internet et donc à être accessibles dans le monde entier. Chaque éditeur propose maintenant une version électronique de son journal publiée sur le web. Les sites d'actualités sont de plus en plus présents sur internet.

Les articles figurant sur Google Actualités, comme il est précisé dans sa description, sont affichés grâce à un algorithme qui évalue l'importance des nouvelles et les classe en conséquence sur la page de Google Actualités. Il n'y a donc aucune intervention humaine, ni de rédacteur en chef comme dans les autres revues de presse; ce système éloigne donc Google de toute responsabilité éditoriale8(*) quant aux articles qui seraient publiés sur Google Actualités.

B. En Belgique: Copiepresse à l'assaut de Google Actualités

En 2006, une procédure a été engagée contre Google par Copiepresse (une société qui regroupe plusieurs éditeurs de la presse belge), des journalistes et des sociétés de gestion des droits des photographes. Cette procédure a donné lieu à l'ordonnance prononcée le 13 février 20079(*).

Selon Copiepresse et les autres plaignants, le fait pour Google de recopier les titres et les accroches des articles de journaux constitue une atteinte à l'article 1er de la Loi qui énonce notamment que "L'auteur d'une oeuvre littéraire ou artistique a seul le droit de la reproduire ou d'en autoriser la reproduction, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit (qu'elle soit directe ou indirecte, provisoire ou permanente, en tout ou en partie)"

Dans cette décision, deux points importants sont envisagés; le premier concerne Google Actualités et l'utilisation des titres et articles de journaux; le second concerne les copies "cache" que Google fait des pages internet issues des différents sites des éditeurs de presse. Ce second point sera abordé plus loin dans l'exposé, attachons nous d'abord à la partie concernant Google Actualités.

Le tribunal de première instance de Bruxelles fait droit à la demande de Copiepresse et fait une application très stricte de la loi relative au droit d'auteur10(*) comme nous le verrons dans le développement de cette décision.

a) La liberté d'expression

Dans sa décision, le Président du tribunal va écarter le premier moyen de défense de Google fondé sur la liberté d'expression garantie par l'article 10 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, celle-ci pouvant être soumise à certaines exceptions, notamment celle de la protection du droit d'auteur. L'argument de Copiepresse, selon lequel Google Actualités est le fruit d'une indexation automatique et ne relève donc pas de la liberté d'expression est pertinent. En effet, Google utilise des "robots" qui classent et mettent à jour les différentes rubriques de Google Actualités; il n'y a donc pas la moindre intervention d'un rédacteur en chef ou d'autre personne qui classerait ces informations. Dans ce contexte, invoquer le principe de la liberté d'expression ne parait pas relevant.

b) Les droits patrimoniaux
1. Originalité

Comme premier moyen de défense, Google soutenait que les titres et les accroches repris par le site Google Actualités n'étaient pas susceptibles de bénéficier d'une protection par le droit d'auteur à défaut d'originalité au sens de la Loi.

Le tribunal rappelle que "pour bénéficier de la loi sur le droit d'auteur, une création doit être exprimée dans une certaine forme (les idées en tant que telles n'étant pas protégeables) et être originale c'est-à-dire qu'elle doit être marquée par la personnalité, l'empreinte de son auteur"11(*).. Les extraits présents sur Google Actualités sont souvent des phrases dites "d'accroches" c'est-à-dire les premières phrases de l'article qui doivent donner envie au lecteur de poursuivre sa lecture. Le Président du tribunal rappelle qu'il a déjà été jugé que des articles de journaux peuvent revendiquer la protection par le droit d'auteur dans la mesure où ils possèdent la marque de la personnalité de leur auteur12(*).En l'espèce, le tribunal a donc décidé que Google reproduisait sur son site Google Actualités des oeuvres protégées par le droit d'auteur. Cette décision n'est pas critiquable; la doctrine et la jurisprudence paraissent d'ailleurs unanimes pour considérer que certains titres et accroches d'articles de journaux doivent bénéficier de la protection accordée par la loi sur les droits d'auteurs13(*).

2. Exception de citation (revue de presse)

Google se prévalait également de l'exception visée à l'article 21,§1er de la Loi, soit l'exception de citation. Cet article prévoit que "Les citations tirées d'une oeuvre licitement publiée, effectuées dans un but de critique, de polémique, de revue, d'enseignement, ou dans des travaux scientifiques, conformément aux usages honnêtes de la profession et dans la mesure justifiée par le but poursuivi, ne portent pas atteinte au droit d'auteur.".

Les conditions nécessaires pour bénéficier de cette exception sont aux nombre de deux14(*). Il faut d'abord que les citations soient tirées d'oeuvres licitement publiées. Cette condition ne pose pas de problème en l'espèce. En effet, tous les articles repris par Google Actualités sont publiés sur les différents sites des éditeurs.

La deuxième condition est que la citation soit faite dans un but de critique, de polémique, d'enseignement, de revue, ou dans des travaux scientifiques et soit utilisée dans la mesure justifiée par le but poursuivi.

Google prétendait que Google Actualités était une revue de presse et que cette deuxième condition était donc également remplie. Il rappelait aussi que l'indexation des articles de journaux se faisait de manière automatique, sans intervention humaine.

Dans sa décision, le tribunal décide que: "la citation est, en principe, utilisée pour illustrer un propos, défendre une opinion; qu'il ne semble pas que le recensement d'articles effectués par Google Actualités puisse être qualifié de "revue de presse"[...]; qu'en l'espèce Google se limite à recenser les articles et à les classer et ce de façon automatique. Que Google Actualités n'effectue aucun travail d'analyse, de comparaison ou de critique de ces articles qui ne sont nullement commentés; que cette condition n'est par conséquent pas satisfaite en l'espèce"15(*).

Les termes "revue de presse" sont ambigus et ne sous-entendent pas de prime-abord que les articles repris dans celle-ci soient commentés ou critiqués. Mais, selon le tribunal, le logiciel Google Actualités ne répond pas à la qualification de "revue de presse" dans le sens que lui donne la loi du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE16(*). En effet, le Tribunal déclare que les termes "revue de presse" ont été traduits, dans la version néerlandaise de la loi du 22 mai 2005, par le mot "recensie" celui-ci étant défini comme un commentaire d'une oeuvre plutôt que son simple recensement et pourrait être traduit par "recension"17(*) en français. Pour sa "revue de presse" le recensement des articles de Google Actualités se fait de manière automatique et ne fait l'objet d'aucune critique ni commentaires. Le tribunal rejette donc cet argument de Google et lui refuse l'exception de citation prévue à l'article 21§1er de la Loi.

Comme le souligne Cédric O. Lefèvre dans son analyse de la décision, le terme "revue" n'est pas très clair mais le tribunal a pris une décision remarquable. En effet, "Google Actualités n'est constitué que d'emprunts, et ne doit sa substance qu'aux extraits reproduits, ce qui est contraire à l'esprit de l'institution du droit d'auteur"18(*). Néanmoins, on peut alors regretter les termes employés par la loi dans sa version française; une revue de presse est définie comme: "un ensemble d'extraits d'articles qui donnent un aperçu des différentes opinions sur l'actualité"19(*). Si l'on suit cette définition à la lettre, Google Actualités aurait dû bénéficier de cette exception. Par contre, l'utilisation du terme "recension" (mot d'ailleurs utilisé dans la version néerlandaise de la loi) aurait enlevé à la loi toute ambiguïté à l'article 21§1er du texte français de la Loi.

3. Exception de compte-rendu d'actualité

Enfin, Google invoque une dernière exception: l'exception de compte-rendu d'actualité figurant à l'article 22, §1er de la loi du 30 juin 1994 qui énonce que lorsqu'une oeuvre est publiée, l'auteur de celle-ci ne peut en interdire la reproduction de courts fragments à l'occasion d'un compte-rendu de l'actualité. Toutefois, cette reproduction doit être justifiée par un but d'information.

La réponse du tribunal se fait en deux temps; tout d'abord il rappelle que Google a décrit son service Google Actualités comme un moteur de recherches dans ses précédentes conclusions et qu'il se contente donc de recenser les titres et les articles sans en faire de commentaires ni de critiques. Ensuite, le Président du tribunal estime que cette exception qui figure à l'article 22§1er de la loi sur le droit d'auteur a pour but de permettre aux média de réagir rapidement à l'actualité20(*). Google admet lui-même recenser les informations auprès de 500 sources différentes, et dont la démarche consiste à répertorier et à mettre à jour ces informations toutes les 15 minutes. Le tribunal constate donc, très justement, que les informations que Google diffuse ne cadre pas avec cette exception et qu'il se doit "d'obtenir, au préalable, l'accord des éditeurs de sites sur lesquels sont collectées lesdites informations"21(*).

Dans la mesure où aucun travail de fond n'est effectué par Google lors de ce recensement, celui-ci ne peut se prévaloir de l'exception de compte-rendu de l'actualité et doit donc, pour utiliser les articles de presse, demander l'autorisation préalable des éditeurs de sites sur lesquels ces informations sont puisées.

Le tribunal souligne ici un aspect très important: les droits d'auteurs ne sont pas fondés sur une clause "d'opt-out" mais bien sur une clause "d'opt-in". Cela signifie que le titulaire doit donner une autorisation préalable à l'exploitation de son oeuvre (opt-in), et non pas, comme le suggérait Google, notifier son opposition après que son oeuvre a été utilisé (opt-out)22(*) D'après le tribunal, "le droit d'auteur n'est pas un droit d'opposition, mais un droit d'autorisation préalable"23(*). Il rejette l'argument de Google qui soutient que les éditeurs peuvent paramétrer leurs sites afin qu'ils ne soient plus indexés par les "robots de Google" et qu'en ne le faisant pas, ils donnent explicitement, ou du moins implicitement l'autorisation à Google de référencer leurs pages web. Le tribunal contredit cette affirmation et décide que Google ne pouvait soutenir ce raisonnement, a fortiori si il ne se limitait pas à référencer les pages web mais en reproduisait une partie du contenu.

Cette décision est donc importante car tous les sites de référencement seront concernés par cette clause "d'opt-in", et devront veiller, à chaque fois, à obtenir l'autorisation préalable du titulaire de l'oeuvre pour l'exploiter. Google Actualités n'est pas le seul site d'actualités à fonctionner de cette manière. Les autres sites similaires tels que Yahoo! Actualités ou MSN Actualités devront donc à l'avenir respecter cette demande d'autorisation préalable.

c) Les droits moraux

En ce qui concerne les droits moraux des auteurs des articles de journaux, Google y porterait atteinte, au droit de paternité en particulier, dans la mesure où il divulguerait des oeuvres protégées sans autorisation ainsi et omettrait de mentionner le noms des auteurs des textes qu'il exploite.

Examinant la question du droit de divulgation, le tribunal de Bruxelles estime que l'hypothèse est différente de celle de l'arrêt "Central Station"24(*). Cette affaire opposait une société, Central Station, à des écrivains journalistes. La société Central Station avait pris des accords avec différents éditeurs belges afin de diffuser via internet des articles de journaux. Les journalistes ne voyaient pas leur nom figurer sous ces articles et n'étaient pas rémunérés pour cette diffusion supplémentaire. La Cour d'appel de Bruxelles a estimé qu'il existait une violation du droit de paternité des journalistes dont les noms n'apparaissaient pas sous les articles diffusés par la société Central Station.

Dans le cas présent, puisque les articles sont déjà publiés sur le web par les éditeurs, le tribunal estime qu'il n'y a pas d'atteinte au droit de divulgation.

D'autre part, concernant l'atteinte à l'intégrité de l'oeuvre, Google opère une "amputation" des textes et regroupe les différents extraits d'articles selon des thématiques, sans se soucier de la philosophie ou de la ligne éditoriale de la source. Il porte ainsi préjudice à l'intégrité de l'oeuvre. De plus, en omettant de mentionner le nom de l'auteur, Google porte aussi atteinte au droit de paternité de l'oeuvre25(*)

Sur base de l'ensemble de ces éléments, le tribunal condamne Google à retirer de son site Google Actualités tous les articles et les autorisations des éditeurs belges représenté par Copiepresse26(*).

C. En France et aux Etats-Unis

En 2005, l'Agence Française de Presse (AFP) a introduit des procédures tant en France qu'aux Etats-Unis contre Google. L'AFP reprochait à Google de violer la loi française sur le droit d'auteur et la loi américaine sur le Copyright en référençant dans Google Actualités des articles, des dépêches et des images AFP publiées sur les sites d'information qui étaient payants pour les internautes.

Google a immédiatement supprimé le référencement des articles dont était titulaire l'AFP, répondant ainsi aux principales demandes de l'agence27(*). La procédure s'est soldée par une transaction entre les deux parties28(*).

Google est donc maintenant autorisé à utiliser les titres et de courts extraits des articles de journaux29(*) sans doute moyennant une compensation financière mais cette partie de l'accord n'a évidemment pas été dévoilée. L'Associated Press (AP), ainsi que l'agence Reuters qui sont les pendants américain et britannique de l'AFP, ont aussi pris un arrangement financier avec Google pour permettre à celui-ci d'utiliser leurs titres et extraits d'articles de presse.

On peut regretter que les procédures entamées par l'AFP n'ait pas abouti. Il aurait été intéressant, en effet, de voir de quelle manière les juridictions saisies auraient conçu l'application de la loi sur le droit d'auteur et celle sur le copyright à l'égard de l'utilisation que fait Google des titres et accroches des articles de journaux. Et surtout si ces derniers peuvent bénéficier de la protection accordée aux auteurs par la loi française sur le droit d'auteur30(*) et la loi américaine qui règlemente le copyright.

On sait à cet égard que les Etats-Unis sont plus sensibles que les pays européens à la liberté d'expression, et que des éléments comme des titres d'articles de journaux y sont plus difficilement protégeables31(*).

D. Quel avenir ?

1. Pour les éditeurs de presse

Depuis plusieurs années on s'interroge sur la possible disparition des journaux "papier" au profit de leurs pendants électroniques. Le sujet a encore été évoqué récemment lors d'une conférence de l'Association Mondiale des Journaux qui s'est tenue à Barcelone32(*) le 27 mai 2009. Il est avéré que, depuis plusieurs années, les ventes de journaux papiers diminuent. Chaque journal possède à présent sa version électronique, dont les articles sont repris par Google Actualités.

L'arrêt Copiepresse constitue une belle victoire pour les éditeurs de presse: elle leur assure des droits sur tous les articles qu'ils publient et leur permet de négocier avec Google l'exploitation de ceux-ci. En appliquant strictement la loi du 30 juin, le Président du tribunal de première instance de Bruxelles a érigé un véritable rempart à l'expansion de Google, et surtout à son application Google Actualités. Grâce à cette décision, les éditeurs de presse peuvent négocier financièrement le référencement de leurs articles de journaux par Google Actualités.

Il faut toutefois souligner un point très important: si Google a besoin des articles de journaux pour faire fonctionner son site Google Actualités, les éditeurs de presse ont aussi besoin de Google Actualités. Il est certain, en effet, qu'en étant référencé par le site de Google, le nombre de visiteurs des sites des éditeurs augmente de manière significative. L'AFP, l'AP et l'Agence Reuters l'ont bien compris et ont passé des accords financiers avec Google, en permettant à celui-ci d'utiliser les articles de presse moyennant paiement.

2. Pour Google

En créant son logiciel Google Actualités et en référençant des articles de journaux sans demander aucune autorisation aux éditeurs, Google a négligé de se préoccuper des droits d'auteurs dont ils pouvaient être titulaires. Cette décision est un sévère rappel à l'ordre pour Google, condamné à retirer les articles des éditeurs représentés par Copiepresse.

Dans un avenir plus ou moins proche, et avec l'avènement de nouvelles technologies permettant d'avoir accès à internet à tout moment, les journaux "papier" risquent de se vendre de moins en moins, au profit de la consultation de leurs éditions numériques.

3. Pour le droit d'auteur

L'ordonnance Copiepresse montre bien les difficultés auxquelles peuvent être confrontés les juges face à internet. En effet, Google, notamment, à travers Google Actualités, "surfe" à la limite du droit d'auteur avec l'application Google Actualités, et seule une application stricte de la Loi à permis au tribunal de condamner Google.

Un autre élément doit être souligné. Dans cette décision, il est fait application de la loi belge. Il n'y a pas eu à notre connaissance, de décision similaire dans d'autres pays et cet aspect pose problème. En effet, Google est actif dans le monde entier, si une seule décision applicable sur le territoire national le condamne, cela lui pose peu de problème.

Il faut noter par ailleurs que l'article 86 du code de droit international privé33(*) énonce que: "les juridictions belges sont compétentes pour connaître de toute demande concernant la protection de droits de propriété intellectuelle, outre dans les cas prévus par les dispositions générales de la présente loi, si cette demande vise une protection limitée au territoire belge". De plus la Cour de Justice des Communautés Européenne a souligné, dans une décision du 16 mars 1995, que les juridictions de l'Etat saisi étaient "compétentes pour connaître des seuls dommages causés dans l'Etat de la juridiction saisie"34(*).

§ 2.- GOOGLE "CACHE"

A. Introduction

La "mémoire cache", ou le "caching" est un procédé utilisé pour faciliter et fluidifier l'accès à une page web ou à un document se trouvant sur internet. Cette technique est utilisée notamment par Google pour améliorer son moteur de recherche. Des copies sont faites de toutes les pages web. Pour ce faire, Google utilise des "robots" (appelé Googlebots) qui scannent, indexent et stockent toutes ces pages internet visitées sur des serveurs.

Lorsqu'il effectue une recherche via le moteur de recherche Google, l'internaute a accès à ces copies "cache". Il lui suffit pour cela de cliquer sur le lien qui apparait en gris à côté de la recherche intitulé: "en "cache"". En utilisant cet hyperlien, l'internaute n'est pas renvoyé au site d'origine mais sur une copie de la page du site d'origine hébergée par Google35(*).

Ces pages en "cache" peuvent ne plus correspondre au contenu du site d'origine, celui-ci ayant été actualisé ou modifié. Par exemple, les pages d'un journal d'actualité en ligne sont souvent proposées à la lecture gratuitement le jour même, mais sont payantes dès qu'elles deviennent des archives. Grâce aux copies qu'en fait Google, ces pages, devenues payantes sur les sites des éditeurs, reste accessibles gratuitement via Google.

On peut d'emblée affirmer que la technique du "caching" a considérablement amélioré internet en le rendant plus rapide et riche en contenu. Si on devait interdire cette technique le réseau internet serait complètement saturé et ce serait un réel retour en arrière au niveau de l'évolution d'internet.

Deux décisions intéressantes ont été rendue concernant les copies "cache" de Google.

Citons d'abord l'ordonnance Copiepresse évoquée ci-dessus. Le second versant de cette affaire concerne, en effet, les copies "cache" des articles de journaux effectuées par Google. Une seconde décision a été rendue aux Etats-Unis. Il s'agit de l'arrêt Field V. Google36(*). Nous allons voir dans le développement qui suit que les deux décisions sont a priori totalement opposées. Dans l'affaire Copiepresse le tribunal interdit à Google de faire des copies "cache" alors que dans l'affaire Field, celles-ci seront autorisées.

B. Une réponse différente en Belgique et aux Etats-Unis

1) Copiepresse C. Google

Nous abordons ici le deuxième volet de l'affaire Copiepresse. Les éditeurs regroupés au sein de Copiepresse s'opposait encore à la copie "cache" des articles de presse effectuée par les robots de Google et à leur mise à la disposition des internautes. Copiepresse prétendait que Google violait l'article 1er de la loi du 30 juin 1994 en mettant à la disposition des internautes ces copies d'oeuvres protégées, alors que les originaux étaient seulement disponibles moyennant paiement sur les sites des éditeurs. Cet article précise que seul l'auteur d'une oeuvre a le droit de reproduire ou d'autoriser la reproduction de son oeuvre et ce, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit.

Le Président du tribunal de première instance de Bruxelles , à la lumière du rapport déposé par les experts qu'il avait désignés, va constater que Google permet aux internautes de consulter un document qui n'est plus consultable sur le site d'origine (à tout le moins gratuitement) et que Google a enregistré dans sa mémoire dite "cache" des oeuvres protégées. Google ne conteste pas que les articles de presse in extenso sont protégés par le droit d'auteur. Par conséquent, mettre à disposition des internautes des articles de journaux qui sont des oeuvres protégées constitue un acte de reproduction et de communication au public qui sont des droits exclusifs réservé au titulaire des droits d'auteurs sur une oeuvre au sens de l'article 1er de la Loi.

2) Blake Field V. Google

Dans l'affaire soumise à la District Court du Nevada37(*), les faits sont très différents. Monsieur Blake Field est avocat et en même temps auteur. Il a engagé des poursuites contre Google car ce dernier avait, selon Monsieur Field, copié et distribué son oeuvre "Good Tea", (protégée par copyright) et avait été publiée sur le site web personnel de l'avocat et les robots Google en avaient fait une copie "cache".

Dans cette affaire, la Cour va rendre une décision favorable à Google.

La District Court du Nevada va recenser tout d'abord les avantages que peuvent offrir aux internautes les copies "cache". Parmi ces avantages: l'archivage de copies, la comparaison dans le temps des pages web, etc.38(*)

La juridiction américaine rappelle ensuite qu'un webmaster peut donner l'ordre aux robots de Google de ne pas faire de copie de sa page et même de ne pas l'indexer, et que Monsieur Field savait cela parfaitement; au contraire, il avait même donné l'ordre aux robots de Google d'indexer les pages de son site.

Pour sa défense, Google prétendait qu'il disposait d'une licence implicite (Implied license) qui l'autorisait à faire des copies "cache" des oeuvres protégées par un copyright. La cour va donner raison à Google en constatant que Monsieur Field savait comment éviter que son oeuvre fasse l'objet d'une indexation et d'une copie "cache".

D'autre part, la cour observe que l'avocat a "poussé" Google à commettre une infraction, pour ensuite porter plainte contre lui (cet argument s'appelle "l'estoppel" en droit américain).

De plus la cour va accorder à Google l'exception de fair use pour ses copies.

Enfin, la cour estime que le géant américain peut se prévaloir de l'exception prévue pour les fournisseurs de services internet par le Digital Millenium Copyright Act.

La cour repousse tous les arguments invoqués par Blake Field et donne raison à Google sur tous les points de droit disputés dans la décision. Elle est donc différente de celle du Président du tribunal de Bruxelles. Il faut toutefois souligner que les faits à l'origine des deux affaires étaient aussi différents, Monsieur Field ayant demandé aux robots de Google de référencer son site. Par ailleurs, son oeuvre était toujours accessible gratuitement lorsqu'elle a été copiée par Google.

3) Belgium V. USA (Comparaison des décisions)

L'ordonnance Copiepresse et la décision de la District Court du Nevada sont donc opposées puisque le juge belge refuse à Google l'utilisation de ses copies "cache", alors que le juge américain accepte son utilisation en acceptant quatre moyens juridiques différents.

Mais les deux affaires sont assez différentes dans les faits ce qui rend leur comparaison malaisée. Tout d'abord, l'élément marquant dans l'affaire Blake Field est qu'il n'y a pas de préjudice économique évident. En effet, Monsieur Field avait déjà publié son texte sur son site personnel et celui-ci y restait accessible. Pour les éditeurs regroupés au sein de Copiepresse l'enjeu économique était important. En effet, les informations mises en "cache" par Google ne sont plus accessibles gratuitement sur les sites des éditeurs. Ces articles sont devenus des archives qui sont la plupart du temps payantes, or en donnant accès à ces copies aux internautes, Google leurs donne accès à des archives gratuitement.

D'autre part, Monsieur Blake avait "sollicité" les robots de Google afin d'indexer les pages de son site web, alors que les éditeurs belges (à l'exception d'un seul) ne l'avaient pas fait. Cette donnée est importante pour la District Court du Nevada, car elle en déduit que cette sollicitation a donné à Google une licence implicite.

Analysant les deux décisions, Jean-Paul Triaille réalise, dans son article de 2008 déjà cité, un exercice difficile39(*). Il inverse les deux affaires et essaye de déterminer quelle aurait été la décision des juges saisis. Pour lui, si le litige Copiepresse avait été soumis à la juridiction américaine, celle-ci aurait difficilement pu justifier le fair use invoqué dans l'affaire Blake. En effet, les éditeurs peuvent faire valoir que les copies faites en "cache" par Google reprennent des informations qui sont payantes sur le site original. D'après J-P. Triaille, la District Court du Nevada aurait pris la même décision que le tribunal de première instance de Bruxelles.

En sens inverse, si Monsieur Blake Field avait porté son affaire devant un tribunal belge, toujours selon J-P. Triaille, il n'est pas certain que Google aurait obtenu gain de cause. Tout d'abord, et contrairement à la loi américaine, la directive européenne sur le commerce électronique40(*), transposées en droit belge par la loi du 11 mars 200341(*), n'envisagent pas de régime d'exonération pour les copies "cache" effectuées par les moteurs de recherche. D'autre part, l'argument de la licence implicite cédée par Google est difficilement envisageable en droit belge, puisqu'il faudrait normalement une convention expresse de cession de droit d'auteur.

Quoi qu'il en soit, pour les éditeurs de presse en ligne, il y a évidemment un enjeu économique derrière une telle décision., Il faut toutefois nuancer l'impact que peuvent avoir les "caches" de Google. En effet, ils sont très régulièrement renouvelés. L'internaute aura donc accès gratuitement aux actualités de la veille mais ne pourra pas retrouver un contenu datant de 15 jours par exemple. De plus, cette technique du caching est aléatoire; en cliquant sur un lien "en cache" l'internaute ne sait pas quelles pages les robots de Google auront dernièrement scannées. Son utilité s'en trouve donc fortement réduite.

CHAPITRE II.GOOGLE IMAGE

Sur la page d'accueil de Google, il est proposé à l'internaute de faire une recherche d'images. En tapant le nom de l'auteur, d'un titre ou d'un thème, le moteur de recherche propose une série d'images y correspondant. Les résultats sont affichés sous forme de vignettes (thumbnails) qui représentent l'image dans un format plus petit. Sous chacune de ces images sont mentionnés le site sur lequel l'image a été trouvée et un lien permettant d'y accéder.

Cette application doit, elle aussi, être confrontée au droit d'auteur et afin de vérifier si elle s'y conforme. Que ce soit au niveau des droits exclusifs de reproduction, du droit de divulgation ou même du droit au respect de l'intégrité de l'oeuvre, le moteur de recherche d'images de Google n'est pas sans susciter certaines interrogations.

Il n'existe guère de décisions concernant cette application, mais on peut relever un jugement du tribunal de Grande Instance de Paris du 20 mai 200842(*), une affaire opposant la Société des Auteurs des Arts Visuels et de l'Image Fixe à Google. Une autre décision intéressante à été rendue aux Etats-Unis, elle opposait un site proposant des photos érotiques à Google.

C. Google image vu par Paris

Par sa décision du 20 mai 2008 le Tribunal de Grande Instance de Paris a été amené à juger d'une affaire opposant la Société des Auteurs des Arts visuels et de l'image fixe (S.A.I.F.), qui protège des droits les photographes, à Google, et plus particulièrement, à son moteur de recherche d'images.

Dans cette affaire, la S.A.I.F. reprochait à Google de reproduire et de représenter, par l'intermédiaire de ses vignettes, les oeuvres de ses membres sans autorisation préalable, ce qui est contraire au code de propriété intellectuel français. De plus la S.A.I.F. estimait qu'une telle mise à disposition d'oeuvres photographiques aux internautes constitue une contrefaçon.

1. Loi applicable

Dans ses premières conclusions, Google sollicitait l'application, non pas de la loi française, mais de la loi américaine. Le tribunal va d'abord décider que la loi applicable au litige est celle du pays du fait générateur du dommage et non pas celle du pays dans lequel le dommage est subi, et ce, en vertu de l'article 5§2 de la Convention de Berne43(*).

En se référant à une jurisprudence antérieure44(*), le tribunal va dès lors décider que la loi applicable en l'espèce est la loi américaine et donc le Copyright Act de 1976. Elle justifie cette position par le fait que les serveurs de Google se trouvent effectivement aux Etats-Unis.

2. Application en l'espèce du Copyright Act

Google entendait, dans cette affaire, bénéficier de l'exception de fair use prévue à l'article 107 du Copyright Act de 197645(*), qui énonce quatre conditions, cumulatives, nécessaires pour s'en prévaloir:

1)Il faut tout d'abord vérifier "que les buts et les caractéristiques de l'utilisation soient de nature commerciale ou poursuivent des buts d'éducation non lucrative"46(*). Le tribunal de Paris va qualifier l'activité de Google de "non lucrative" et considérer cette première condition remplie. Comme le fait très justement remarquer Jane Ginsburg dans ses observations, cette décision a de quoi surprendre. En effet, Google rend ces informations accessibles gratuitement aux internautes mais il possède des moyens de financement détournés tels que la publicité ou encore la vente de mots clés47(*). Lorsque l'internaute fait une recherche d'images, l'affichage des résultats est accompagné de liens commerciaux.

2)Ensuite il faut s'attacher à "La nature de l'oeuvre protégée". En l'espèce cette condition n'a pas posé de problème car les parties n'en ont pas débattu.

3)Le tribunal doit ensuite s'interroger sur "la quantité et le caractère substantiel de la partie utilisée par rapport à l'ensemble de l'oeuvre protégée". Le tribunal, à cet égard, se réfère à la jurisprudence américaine dont il ressort que la reprise d'images se conforme au but d'information, puis se rallie à cette opinion.

4) Enfin, il faut analyser "l'incidence de l'utilisation sur le marché potentiel ou la valeur de l'oeuvre protégée". Le tribunal décide que l'indexation des images sous forme de vignettes n'empêche pas leur exploitation et que la S.A.I.F. ne démontre pas que les professions qu'elle représente ont vu l'exploitation de leurs images baissé.

Et enfin, le tribunal observe que la S.A.I.F. n'a pas mis en place elle-même une banque de données et n'apporte donc pas la preuve que sa propre activité aurait chuté. La quatrième condition nécessaire au fair use est donc remplie et cette exception est donc applicable en l'espèce.

Selon Jane Ginsburg48(*), le tribunal a fait une mauvaise application de cette quatrième condition. C'est en effet au défendeur qu'il appartient d'apporter la preuve que les critères nécessaires à la reconnaissance de l'exception de fair use sont rencontrés, c'est-à-dire à Google et non à la S.A.I.F. Néanmoins, il faut noter qu'un tribunal américain a commis exactement la même erreur dans l'arrêt Perfect 10 v. Google49(*).

D. Perfect 10 v. Google

Cette affaire qui a donné lieu à l'arrêt du 16 mai 2007, a été portée devant la United States Court of Appeals for the ninth circuit. Perfect 10 est une société éditrice de magazines pour adultes qui propose des photos érotiques de bonne qualité sur son site internet moyennant rémunération. Différents sites internet avaient récupéré ces photos et les proposaient gratuitement. Google les a donc recensées et les a intégrées à son moteur de recherche d'images. Lorsqu'on effectuait une recherche, via Google, des photos appartenant à Perfect 10 apparaissaient donc sous forme de vignettes (thumnails).

La société Perfect 10 reprochait à Google d'avoir reproduit sous forme de vignettes ses photos et de les proposer gratuitement aux internautes.

Le point intéressant de cette affaire est que la Cour a estimé que Google bénéficiait de l'exception de fair use et ce malgré le fait que Perfect 10 invoquait une atteinte potentielle au marché des images pour téléphones portables. En effet, cette société avait développé un système permettant de télécharger des images érotiques sur des téléphones portables. Or, le format des vignettes de Google Image convient tout à fait à cet usage et permettait d'acquérir ces images gratuitement. La Cour a considéré que l'atteinte au marché de Perfect 10 n'était qu'hypothétique ("potential harm to Perfect 10's market remains hypothetical"50(*))

La décision américaine est donc assez similaire à la décision française en ce sens que Google peut bénéficier de l'exception de fair use dans la mesure où il n'y a pas d'atteinte sérieuse à un marché économique.

E. Conclusion

L'exception de fair use permet un assouplissement des droits d'auteur qui favorise l'essor des nouvelles technologies. Dans l'affaire examinée par le tribunal de Grande Instance de Paris, il est évident qu'une autorisation préalable aurait dû être demandée par Google à la S.A.I.F..

Dans son analyse, Jane Ginsburg relève une intéressante étude qui a été menée par le professeur Paul Goldstein51(*). Après avoir fait une synthèse de la jurisprudence, celui-ci suggère que l'exception de fair use trouve à s'appliquer aux nouvelles technologies lorsque trois facteurs sont réunis. Il faut "une utilisation grandissante systématique et très répandue de la technologie par les consommateurs; dans l'ensemble, une valeur sociale croissante; et du moins au départ, des coûts de transactions très élevés en ce qui concerne la négociation de licences pour l'exploitation".

En pratique, recueillir l'autorisation de tous les auteurs dont les images sont recensées par Google Image représenterait un travail colossal et un coût très élevé pour la société américaine.

D'autre part, il faut noter que l'indexation des images par le moteur de recherche de Google permet une diffusion plus large des oeuvres car, rappelons-le, ce moteur de recherche d'image est gratuit et accessible partout dans le monde. En outre, Google ne tire, du moins pas directement, de bénéfices de l'indexation de ces images. La qualité des oeuvres, lorsqu'elles se présentent sous forme de vignettes, est en effet très amoindrie, et leur utilisation s'en trouve limitée.

Chapitre II.- Google Books

A. Introduction

Voici comment Google présente Google Books, son projet de bibliothèque en ligne:52(*).

"We're working with several major libraries to include their collections in Google Books and, like a card catalog, show users information about the book, and in many cases, a few snippets - a few sentences to display the search term in context.

When you click on a search result for a book from the Library Project, you'll see basic bibliographic information about the book, and in many cases, a few snippets - a few sentences showing your search term in context. If the book is out of copyright, you'll be able to view and download the entire book. In all cases, you'll see links directing you to online bookstores where you can buy the book and libraries where you can borrow it.

The Library Project's aim is simple: make it easier for people to find relevant books - specifically, books they wouldn't find any other way such as those that are out of print - while carefully respecting authors' and publishers' copyrights. Our ultimate goal is to work with publishers and libraries to create a comprehensive, searchable, virtual card catalog of all books in all languages that helps users discover new books and publishers discover new readers."

Google Books (ou Google recherche de livres, en français) est une véritable bibliothèque en ligne où il est à présent possible de consulter des livres entiers. En 2004, Google entame son projet de numérisation des livres et conclut, dans ce but, des accords avec de prestigieuses bibliothèques. Aujourd'hui, il s'est associé avec des bibliothèques comme celles de Harvard, de Columbia, d'Oxford ou, plus proche de chez nous, de Gand53(*). Google a donc l'autorisation de scanner, numériser et rendre accessible via internet les ouvrages de ces bibliothèques.

Ce système offre des perspectives très intéressantes, en offrant, aux étudiants, la consultation de livres d'autres universités ou même, plus simplement, l'accès à la culture en général. En effet, Google ne se contente pas de scanner les livres contenus dans ces bibliothèques, mais a aussi l'ambition d'intégrer à Google Books des livres qui ne sont plus édités ou des livres "orphelins" c'est-à-dire des livres dont on ne connait pas le titulaire des droits à qui demander une autorisation de reproduction.

Toutefois, cette numérisation rencontre de nombreux obstacles car, malgré les accords conclus avec les différentes bibliothèques, l'autorisation des éditeurs et des auteurs n'a pas été sollicitée. C'est donc en toute logique qu'en 2005 l'Authors Guild, une association regroupant plus de 8000 auteurs américains et l'Association of Amercian Publishers ont lancé une procédure devant la New-York District Court. Cette class action54(*) se solda par une négociation entre les parties. Cette négociation donna lieu en 2008 au premier Google Book Settlement qui devait être soumis à l'approbation du juge saisi55(*).

Après avoir examiné ce Google Book Settlement nous étudierons une décision opposant les éditions du Seuil, célèbre éditeur français, et le Syndicat National de l'Edition à Google. Contrairement à la procédure américaine, celle-ci ne s'est pas soldée par une transaction puisque le géant américain s'est vu condamné pour contrefaçon et a dû payer 300.000 euros à titre de dommages et intérêts.

B. Le Google Books Settlement (GBS)

1. Introduction

Suite aux nombreux accords passés avec les bibliothèques aux Etats-Unis, mais aussi en Europe, Google devrait numériser plus dix millions d'ouvrages. Bon nombre de ces livres sont toujours protégés par un droit d'auteur et Google les a numérisés sans demander l'accord ni aux éditeurs, ni aux auteurs56(*).

Le 28 novembre 2008 la District Court de New-York a condamné la première version du Google Books Settlement. Cet accord, prévoyait que Google numérise les livres des différentes bibliothèques et soit autorisé à vendre des exemplaires numériques de ces livres ou des abonnements qui donneraient un libre accès à tous les ouvrages scannés. En contrepartie, Google s'engageait à payer 45 millions de dollars US pour la numérisation déjà effectuée57(*). De plus un Registre des droits du livre (Book Right Registry) devait être mis en place pour représenter les droits des auteurs et des éditeurs ainsi qu'à les rémunérer58(*).

Des vives critiques ont été émises par les éditeurs et les auteurs de nombreux pays concernés. En effet, seuls les auteurs et éditeurs américains ont été consultés or la numérisation concerne des auteurs de nombreux autres pays. Ensuite, l'accès à l'entièreté de la collection est réservé aux bibliothèques américaines, les bibliothèques ont donc protesté contre le caractère discriminatoire de cet accord. De plus, un doute planait sur le prix que Google pouvait réclamer pour accorder un abonnement. Toutes ces critiques ont poussé les parties à renégocier le Google Book Settlement et une deuxième version a vu le jour.

Le 13 octobre 2009, une nouvelle version 2.0 du Google Book Settlement a été élaborée:

2. Objet du Google Book Settlement 2.0

Plusieurs catégories de livres sont destinées à être numérisées et ne seront pas toutes disponibles dans leurs intégralité. Il existe trois sortes de livres qui seront scannés par Google59(*): les livres soumis à un droit d'auteur dont seuls de courts extraits seront disponibles, les livres soumis à un droit d'auteur, mais épuisés, ici encore seuls des extraits seront disponibles et enfin les livres "out of copyright" qui seront entièrement accessibles.

Outre ce trois catégories de livres la nouvelle version du Google Book Settlement a pris en compte une partie des objections qui avaient été émises à propos de sa première version; une clause d'opt out a été notamment proposée aux éditeurs et aux auteurs susceptibles d'être concernés60(*).

Ceux-ci sont donc invités à exprimer leurs désaccords sur une possible numérisation de leurs ouvrages. Google a toutefois réduit le champ d'application de son Google Book Settlement. Désormais, seuls les livres enregistrés auprès du Copyright Office américain sont encore concernés. Par contre, beaucoup d'auteurs européens le sont encore61(*).

3. L'approbation du Google Book Settlement

L'approbation du Google Book Settlement doit encore avoir lieu. La décision est maintenant entre les mains du juge Chin, le juge de la District Court de New-York. S'il donne son accord Google pourra alors numériser plus de 12 millions de livres. On peut suivre l'évolution de cet accord sur le site internet mis en place par Google62(*).

C. Les Editions du Seuil contre Google Books

Une décision intéressante a été prononcée le 18 décembre 2009 par le tribunal de Grande Instance de Paris, opposant les Editions du Seuil, d'autres maisons d'éditions appartenant au groupe La Martinière, le Syndicat National de l'Editions (SNE) et la Société des Gens de Lettre de France (SGLF), à Google Books63(*).

Dans ce litige, les Editions du Groupe la Martinère reprochaient (notamment) à Google de commettre des actes de contrefaçon aux droits d'auteur protégées par le Code de la propriété intellectuelle, en reproduisant la couverture des oeuvres leur appartenant ainsi qu'en rendant accessibles aux internautes des extraits des livres sur le site Google Books.

Google a contesté l'application de la loi française en invoquant l'article 5§2 de la Convention de Berne64(*) et réclamé l'application de la loi américaine et du Copyright Act en particulier, au motif que la loi applicable selon la Convention est celle où se produisent les agissements litigieux.

1. La loi applicable

Le tribunal décide en l'espèce, que la loi applicable est bien la loi française car, en matière de délit complexe, la loi applicable est celle du lieu où le fait dommageable s'est produit. Puisque ce sont des livres d'auteurs français qui ont été numérisés, qu'ils sont susceptibles d'être essentiellement consultés par des internautes français, et sur le territoire français, le litige entretient des liens plus étroits avec la France qu'avec les Etats-Unis. Le Code de Propriété Intellectuelle doit dès lors s'appliquer65(*).

2. L'atteinte possible aux droits d'auteur

L'article L.122-4 du Code de Propriété Intellectuelle énonce que " Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque". Le tribunal rappelle que la numérisation effectuée par Google pour son site Google Books est une technique qui consiste à scanner l'intégralité d'un ouvrage pour le transformer en un fichier numérique et qu'il s'agit là d'un acte de reproduction contraire à l'article L.122-4.

Pour sa défense, Google va invoquer l'exception de courte citation prévue à l'article L. 122-5, 3° qui précise que "Lorsque l'oeuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire, [...]sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l'auteur et la source: les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information de l'oeuvre à laquelle elles sont incorporées". Mais le tribunal de Grande Instance de Paris ne retient pas cette exception, car les couvertures des ouvrages sont communiquées au public dans leur intégralité et les extraits donnés au internautes sous forme de morceaux de papiers déchirés le sont de manière aléatoire en fonction de leurs recherches, ce qui dénie tout but d'information. En l'espèce, il y a donc bien contrefaçon des droits patrimoniaux d'auteurs ainsi qu'une atteinte à l'intégrité des oeuvres.

3. Conclusion

C'est une décision salutaire pour les éditeurs français puisque le tribunal y reconnait tout d'abord l'application de la loi française, contrairement à la décision précédemment évoquée (S.A.I.F contre Google66(*)). Dans cet arrêt, le juge avait fait l'application de l'article 5.2 de la Convention de Berne, selon lequel la loi applicable est celle du lieu du fait générateur du dommage (en l'occurrence la loi américaine).

Dans l'affaire Seuil contre Google, le juge a considéré que le litige entretenait plus de liens avec la France qu'avec les Etats-Unis et a donc retenu l'application de la loi française. Google n'a donc pas pu se prévaloir de l'exception de fair use.

Lorsqu'on compare cette décision avec celle prise par le tribunal de Grande Instance de Paris le 20 mai 2008, l'affaire S.A.I.F, il peut paraître étonnant que, dans les deux affaires, la recherche de la loi applicable n'ait pas abouti au même résultat, compte tenu de la similarité de certains critères examinés: dans les deux cas c'est la société Google qui était en cause, le fait générateur du dommage avait été produit par des serveurs situés aux Etats-Unis et, enfin, dans les deux cas, le dommage s'était réalise en France. Pourtant, les décisions sont différentes sur ce point. Cette appréciation divergente des critères déterminant l'application, ou non, de la loi américaine dans un litige qui met en cause la société Google est source d'insécurité juridique. En effet, comme on peut le constater, la décision peut être différente, selon que le tribunal applique la loi française ou la loi américaine.

Il est difficile d'apprécier si, en l'espèce, le tribunal aurait aussi accordé l'exception de fair use mais il serait intéressant d'essayer de le déterminer, malgré tout.

Pour rappel, les conditions, cumulatives, pour bénéficier de cette exception de fair use au sens du Copyright Act de 1976 sont les suivantes:

1)Il faut tout d'abord vérifier si "les buts et les caractéristiques de l'utilisation [sont] de nature commerciale ou poursuivent des buts d'éducation non lucratifs". A première vue, le site Google Books est gratuit pour les internautes qui peuvent librement accéder à la bibliothèque, comme c'est le cas pour Google Image. Dans la décision opposant la S.A.I.F. à Google le tribunal a décidé qu'il n'y avait pas de but de lucre, cette décision était déjà critiquable. Dans le cas présent, on constate que sur Google Books il y a aussi des liens publicitaires qui sont utilisés. Lorsque l'internaute consulte des passages d'un livre protégé par un des droits d'auteur, Google propose des liens commerciaux vers des sites où ces livres peuvent être achetés. En outre, dans le Google Books Settlement, Google annonce qu'il vendra des abonnements aux bibliothèques. Il est donc certain que Google poursuit un but de lucre.

2)Ensuite il faut s'attacher à "La nature de l'oeuvre protégée". En l'espèce cette condition est rencontrée; les livres scannés par Google constituent évidemment des oeuvres protégées.

3)Le troisième critère est "la quantité et le caractère substantiel de la partie utilisée par rapport à l'ensemble de l'oeuvre protégée". En l'espèce, Google ne propose que des "échantillons" des livres scannés qui correspondent aux recherches effectuées par l'internaute. Ces courts passages représentent évidemment une infime partie du livre entier. Il faut par ailleurs signaler que les couvertures des livres sont entièrement reproduites. Néanmoins cette troisième condition parait remplie, la portion lisible d'un livre n'étant pas substantielle.

4) Enfin, il faut analyser "l'incidence de l'utilisation sur le marché potentiel ou la valeur de l'oeuvre protégée". L'impact que peut avoir la publication de fragments de livre par Google Books est évidemment limité sur le marché du livre. Il n'en serait pas de même si Google publiait le livre en entier, mais ce n'est pas le cas. Cette condition est donc, selon nous, également remplie.

Trois conditions sur quatre sont donc réunies, ce qui n'est pas suffisant pour bénéficier de l'exception de fair use. Selon nous, quand bien même la loi applicable aurait été la loi américaine, Google n'aurait donc pas pu bénéficier de l'exception de fair use comme ce fut le cas dans la décision du 20 mai 2008 l'opposant à la S.A.I.F. Néanmoins, il faut noter que dans cette précédente décision le tribunal n'avait étonnament pas reconnu le caractère lucratif de Google Image alors que des liens commerciaux sont aussi présents. Mais il est vrai que leur utilisation est plus flagrante sur le site Google Books.

Quelle que soit la loi applicable dans la décision opposant les éditions du Seuil et le Syndicat National de l'Edition à Google, la décision est défavorable à ce dernier . Le tribunal a reconnu que les actes de reproduction non autorisés constituaient des contrefaçons. L'exception de citation n'a pas été retenue, car le tribunal a qualifié la reproduction de fragments du texte du livre par Google Books "d'aléatoire". Cette qualification n'est pas précise car, à notre sens, l'algorithme utilisé par Google lors d'une recherche effectuée par un internaute n'est pas du tout aléatoire mais, au contraire, très pointu et performant. Quoi qu'il en soit, même sans cette qualification "d'aléatoire", la décision resterait inchangée: il s'agit donc d'une victoire des éditeurs face à Google.

D. L'avenir de Google Books

Dès l'été 2010, Google devrait déjà mettre à disposition des internautes des livres qui seront vendus en format numérique mais les informations à ce sujet restent imprécises à ce jour67(*). L'avenir du site Google Books dépendra surtout de la forme finale du Google Books Settlement. Si il reste inchangé et qu'il est accepté par le juge Chin, douze millions de livres seront scannés. C'est une avancée technologique très importante qui s'opère au niveau de l'accès à l'information. En effet, il s'agira d'une véritable bibliothèque numérique qui sera, du moins en théorie, accessible à tous. De plus les livres qui ne sont plus édités auront une seconde vie et seront à nouveau disponibles. L'ensemble, enfin, constituera une extraordinaire vitrine pour tous les auteurs.

Mais beaucoup de questions restent en suspens. Google n'est pas une bibliothèque publique. Il pourrait décider de vendre son site ou de cesser ses activités si elles ne sont plus rentables, ou même supprimer l'accès à sa collection. Outre le prix de l'accès à cet outil, les modalités de consultation du site pourraient subir une évolution qui justifie une attitude vigilante68(*), Google pourrait être tenté de vendre des espaces publicitaires ou même de collecter les données personnelles des internautes qui consultent les livres, pour les revendre ensuite à des fins commerciales. Google pourrait aussi être tenté de censurer des livres selon ses propres critères, ou au contraire en mettre certains en exergue.

Une autre question importante mérite d'être posée. En Europe, certaines autorités publiques, notamment les autorités françaises et le ministre de la culture et de la communication en particulier, Frédéric Mitterrand, essayent de garder la mainmise sur la numérisation des ouvrages français69(*). Une commission a été instaurée à cet effet. Au niveau européen, la question fait aussi débat et un "comité des sages" a été mis en place en décembre 2009. En outre, il existe déjà une bibliothèque numérique70(*), nommée Europeana, qui se veut publique et prétend pouvoir bénéficier, contrairement à Google qui est une société privée, d'une exception aux droits d'auteur en vertu de l'article 5 paragraphe 2 point c de la directive 2001/2971(*) relative aux droits d'auteur, qui lui permettrait de scanner les livres en toute légalité72(*).

En ce qui concerne les droits d'auteur, la décision du 18 décembre 2009 opposant les Editions du Seuil à Google est rassurante pour les éditeurs. En effet, elle prouve à Google qu'il ne peut scanner impunément les livres faisant l'objet d'une protection par le droit d'auteur et ce, même si un accord existe avec des bibliothèques.

Dans le futur, on peut imaginer que Google va s'appuyer sur la clause d'opt out proposée dans le deuxième Google Books Settlement pour se protéger des futures procédures qui pourraient être engagées contre lui par des auteurs ou des maisons d'éditions73(*). En effet, ce nouvel accord prévoit que les auteurs qui ne désirent pas voir leurs livres scannés par Google doivent le signaler. D'autres maisons d'éditions, encouragées par cette décision, envisagent à leur tour d'agir en justice contre Google pour se plaindre de la numérisation de leurs livres. Ces affaires sont donc à suivre74(*).

Chapitre III.- Google Vidéo et YouTube

A. Introduction

Google Vidéo et YouTube qui est une plate-forme similaire qui a été rachetée par Google en 2006 pour 1,65 milliard de dollars US participent à une même philosophie: permettre aux internautes de mettre en ligne leurs créations vidéos, créer ainsi une banque de données vidéos et permettre un échange aisé de ces informations.

YouTube et Google Vidéo font partie de ces sites dont les contenus sont créés par les utilisateurs (user-generated content)75(*)au même titre que des sites comme Dailymotion et MySpace. Ces sites sont très populaires et accueillent des millions de vidéos postées par des internautes à travers le monde. Ils sont très simples à utiliser et gratuit; il suffit d'insérer un ou plusieurs mots-clefs et pour obtenir une liste de vidéos correspondant à cette recherche.

Les vidéos peuvent être postées sur le site par les utilisateurs qui se sont préalablement enregistrés et s'engagent à respecter certaines conditions d'utilisation76(*). Parmi celles-ci figure notamment l'obligation d'être titulaire des droits d'auteur de la vidéo ou du moins d'en posséder une licence d'exploitation.

B. Hébergeur ou éditeur de contenu ?

La question qui se pose, en droit, est différente de celles qui ont été abordées jusqu'ici. Dans le cas de YouTube et de Google Vidéo, la problématique ne se situe pas vraiment au niveau des droits d'auteur, mais plutôt au niveau de la responsabilité des intermédiaires. En effet, les vidéos litigieuses proposées par site, comme des clips musicaux, des films ou encore des séries télévisées, sont protégées par le droit d'auteur, cela ne fait aucun doute. Par contre, il subsiste une délicate question: Google doit-il être condamné, en tant qu'intermédiaire, pour avoir mis en place une plate-forme permettant à leurs utilisateurs de poster ces vidéos protégées ou ces utilisateurs sont-ils les seuls responsables?

Au niveau normatif, une exonération existe au profit des hébergeurs, c'est-à-dire des sites qui mettent simplement en place un support permettant le stokage des informations, que ce soit dans la loi américaine du Digital Millenium Copyright Act ou dans la directive européenne 2000/31 sur le commerce électronique du 8 juin 200077(*).

A cet égard, la question qui a été soumise à diverses juridictions est la suivante: Google est-il simplement un hébergeur qui peut bénéficier d'une exonération ou est-il un éditeur de contenu, c'est-à-dire un opérateur dont l'activité ne se limite pas à un simple stockage des informations? Nous verrons dans l'analyse de différentes décisions que l'articulation de ces concepts n'est pas aisée.

a) En France
1. La notion d'hébergeur ou de simple intermédiaire

La notion d'intermédiaire ou d'hébergeur découle de la directive 2000/31 qui envisage une exonération lors de la mise en pratique de cette activité de façon à ce que: " en cas de fourniture d'un service de la société de l'information consistant à stocker des informations fournies par un destinataire du service, le prestataire ne soit pas responsable des informations stockées à la demande d'un destinataire du service à condition que:

a) le prestataire n'ait pas effectivement connaissance de l'activité ou de l'information illicites et, en ce qui concerne une demande en dommages et intérêts, n'ait pas connaissance de faits ou de circonstances selon lesquels l'activité ou l'information illicite est apparente

ou

b) le prestataire, dès le moment où il a de telles connaissances, agisse promptement pour retirer les informations ou rendre l'accès à celles-ci impossible"78(*)

En d'autres termes, un hébergeur est seulement un fournisseur de services de stockage qui permettant de gérer les contenus des pages web79(*), mais ne produit pas lui-même le contenu des pages internet.

En France deux décisions concernant la qualité d'hébergeur de Google Vidéo ont été rendues.

2. Zadig Production

La première est une décision du 19 octobre 200780(*) impliquant la société, Zadig Production, laquelle avait produit un documentaire intitulé "Les enfants perdus de Tranquility Bay". La société a été informée que son documentaire était disponible gratuitement sur le site Google Vidéo et a sommé Google de l'en retirer, ce qui fut fait immédiatement. Néanmoins, après quelque temps, la vidéo est réapparue sur le site de Google, et la société Zadig Production a décidé de poursuivre Google en justice pour contrefaçon de ses droits d'auteur et de producteur. Elle affirmait que Google était un éditeur de contenu et ne peut bénéficier d'une exonération. Et même si Google devait être considéré comme un hébergeur, il avait l'obligation de veiller à ce que les vidéos litigieuses ne soient plus postées sur le site après que la société Zadig Production lui ait notifié son refus d'y voir son documentaire81(*).

Pour sa défense, la société Google a prétendu qu'elle était un simple hébergeur. Ce sont les internautes et non elle, qui mettent les vidéos en ligne et, à ce titre, elle peut se prévaloir de l'exonération prévue par l'article 6-I-7 de la loi française n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (qui est la transposition en droit français de la directive 2000/31).

Le tribunal de Grande Instance de Paris a décidé que Google, en offrant aux internautes une architecture et des moyens techniques permettant une classification et une accessibilité plus aisées aux informations, n'était pas un éditeur de contenu, mais est bien un hébergeur au sens de la loi. En effet, un éditeur de contenu doit être personnellement à l'origine de l'information diffusée, ce qui n'est pas le cas de Google.

Toutefois, le tribunal n'exonère pas Google de toute responsabilité et lui rappelle que "informée du caractère illicite du contenu en cause par la première notification, il lui appartenait de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires en vue d'éviter une nouvelle diffusion"82(*), et qu'après la première notification, elle devait tout mettre en oeuvre afin que la vidéo "Les enfants perdus de Tranquility Bay" ne soit pas remise en ligne. Google a donc bien porté atteinte aux droit patrimoniaux de l'oeuvre en l'espèce, en n'empêchant pas son téléchargement sur le site.

3. Flash Film

Les faits examinés par le tribunal de Commerce de Paris dans une autre affaire jugée le 20 février 200883(*) sont très similaires. La société Flash Film avait produit un documentaire intitulé " Le monde selon Bush", qui s'est retrouvé sur le site Google vidéo. Flash Film a sommé Google de supprimer les liens internet permettant de visionner son documentaire et Google s'est exécuté. Quelques jours plus tard, le lien était à nouveau actif et la société Flash film a décidé de porter l'affaire devant le tribunal de Commerce de Paris.

La décision du tribunal est similaire à celle rendue quelques mois plus tôt dans l'affaire Zach Film Production, à savoir que Google n'est pas un éditeur de contenu, mais bien un hébergeur, mais que, néanmoins, elle ne peut bénéficier de l'exonération.

Le tribunal estime en outre que Google est tenu, non pas à une obligation de surveillance générale, mais bien à une obligation de surveillance particulière à partir du moment où des titulaires de droits d'auteurs lui ont signifié une infraction à leurs droits.

De plus, le tribunal souligne, à juste titre, que Google a développé des procédés techniques qui lui permettent "d''identifier les contenus déclarés illicites, que ces moyens sont mis en oeuvre pour éliminer les contenus à caractère pédophile, faisant l'apologie de crime contre l'humanité ou de l'incitation à la haine" et qu'il est donc responsable du fait qu'une vidéo du documentaire "Le monde selon Bush" soit à nouveau postée sur le site Google vidéo après sa première suppression.

b) Aux Etats-Unis

Aux Etats-Unis, YouTube a déjà conclu des accords commerciaux avec des sociétés de médias connus tels que Universal Music Group, HBO, Warner Music Group, Disney Media Networks,...84(*) Tous ces médias ont estimé qu'il était préférable de négocier avec YouTube la diffusion officielle de leur contenu en échange de revenus publicitaires85(*), que de voir des vidéos postées par des internautes et ensuite devoir assigner Google en justice pour sa passivité face à cet atteinte à leurs droits d'auteurs.

Une procédure a toutefois été engagée par Viacom86(*), propriétaire de MTV, Nickelodéon et Comedy Central contre YouTube pour atteinte à ses droits d'auteurs. Google entend bien bénéficier de l'exception accordée aux simples hébergeurs de contenu prévue par le Digital Millenium Copyright Act à la section 512 intitulée "Liability of service providers for online infringement of copyright". La décision est attendue avec impatience, pour savoir si le tribunal américain prendra la même décision que les tribunaux français en n'exonérant pas Google de sa responsabilité, bien que ce dernier ait la qualité d'hébergeur.

On peut noter la décision prise par la Cour de Justice des Communautés Européennes dans l'affaire du 23 mars 2010 qui oppose la S.A. Louis Vuitton Malletier à Google87(*). Dans cette décision la Cour ne se prononce par sur la qualité d'hébergeur de Google et renvoie la question aux juridictions nationales. Toutefois, dans ses conclusions, l'avocat général avait reconnu la qualité d'hébergeur de Google mais ne l'exonérait pas de sa responsabilité88(*). L'analyse de cette décision ne fait pas l'objet de ce travail car elle concerne le droit des marques.

C. Conclusion

Il est clair que la création de plateformes telles que YouTube ou Google Vidéo favorise la diffusion de contenu protégés par un droit d'auteur. De plus, il est certain que Google n'ignore pas que la plupart des vidéos hébergées sur le site méconnaissent les droits des titulaires de ces oeuvres.

Lorsque la directive 2000/31 du 8 juin 2000 et le Digital Millenium Copyright Act ont été adoptés, le web 2.0 n'en était qu'à ses balbutiement. Depuis lors, en 2005, avec Youtube et l'arrivée de tels sites dans l'univers d'internet, la frontière entre les simples hébergeurs de contenus et, d'autre part, les éditeurs de contenu proprement dits, est devenue très floue.

Il est actuellement mal aisé de définir la nature précise de sites hybrides tels que YouTube et Google Vidéo. En effet, ce sont les internautes eux-mêmes qui mettent en ligne les vidéos qui forment le contenu de ces sites mais toutes l'infrastructure est fournie, dans le cas présent, par Google. Ce dernier a néanmoins un contrôle certain des vidéos postées par les utilisateurs de ce site, comme cela est rappelé dans la décision Flash Film. Les vidéos à caractère pornographique, pédophile ou incitant à la haine sont en effet traquées et immédiatement supprimées. Comme le clame Viacom, Google est donc en mesure de supprimer toutes les vidéos portant atteinte aux droits d'auteur89(*).

Il y a toutefois une donnée qui n'a pas échappé a Google. La majorité des vidéos visionnées sur le site Google Vidéo ou sur YouTube sont des vidéos protégées par le droit d'auteur, mais, à n'en point douter, sans ces dernières, la fréquentation des sites diminuerait très fortement. Ces vidéos représentent un élément essentiel du succès de ces sites et il n'est donc pas dans l'intérêt de Google de supprimer automatiquement toutes les vidéos litigieuses.

Par ailleurs, Google tente de faire bonne figure face aux titulaires de droits d'auteur et à mis en place un système de plainte90(*) qui leurs permet de signaler une atteinte à leurs droits mais l'efficacité d'un tel mécanisme reste à prouver si l'on en juge par les deux décisions françaises évoquées ci-dessus.

On peut conclure que les tribunaux ont fait une application nuancée de l'exonération accordée aux hébergeurs de contenus. Ils ont en effet qualifié Google de simple hébergeur mais n'ont pas accordé l'exonération prévue par la loi française et ont soumis Google à une obligation de surveillance particulaire, en ce sens que, si une personne voit ses droit d'auteur bafoués et le notifie à Google, ce dernier doit s'assurer par la suite que la vidéo ne se retrouve plus jamais mise à disposition gratuitement sur son site.

On peut donc affirmer que ces décisions sont plutôt favorables à Google même s'il n'est pas exonéré de toute obligation. En effet, Google n'est pas tenu de surveiller les milliers de vidéos postées (il y aurait actuellement 24 heures de vidéo postées chaque minute)91(*) par les utilisateurs, mais les éliminer lorsque le titulaire d'une vidéo protégée par le droit d'auteur se manifeste pour en exiger le retrait. On est en droit de se demander si une telle solution est judicieuse car, nous le savons, Google possède les moyens techniques de réaliser un contrôle rapide et efficace des vidéos placées sur ses sites.

Les tribunaux français n'ont peut-être pas suffisamment tenu compte de cet élément en prenant des décisions qui sont en demi-teinte. Ils auraient pu condamner Google avec plus de sévérité en le soumettant à une obligation de surveillance générale. Une telle obligation n'aurait sans doute pas réglé entièrement le problème des vidéos postées sans l'autorisation de leurs créateurs, mais aurait incité Google à faire preuve de moins de laxisme face à ce phénomène.

Chapitre IV.- Conclusion générale: Google et le droit d'auteur

UN CONSTAT

Google est maintenant devenu un acteur indispensable du web 2.0. Tout d'abord, grâce à son moteur de recherche performant qui intègre, chaque jour, de nouvelles informations et indexe sans cesse de nouvelles pages web. La société californienne a, au cours de ces dernières années, cherché à multiplier et à diversifier les sources d'informations mises à la dispositions des internautes. Il est désormais possible d'effectuer une recherche d'images, de trouver une information dans l'actualité ou encore, dans une collection riche de millions de livres grâce à chacune des applications de Google.

Le géant américain s'est donné pour mission de rendre l'information universelle et gratuite et remplit, à cet égard, parfaitement son objectif. Cependant, si Google a donné aux internautes l'accès à toutes sortes d'informations, il l'a parfois fait au détriment des droits des titulaires d'oeuvres protégées. On peut même affirmer que Google se soucie peu des droits d'auteur attachés aux différentes oeuvres ou créations qu'il indexe et met gratuitement à la disposition des internautes.

Ces dernières années, les procès auxquels Google à dû faire face se sont multipliés et certaines décisions remettent en cause la manière dont Google fonctionne. Par exemple, dans l'affaire Copiepresse92(*), le tribunal condamne l'utilisation que fait Google de son service Google News ainsi que sa technique du caching qui consiste à scanner les pages web des éditeurs de presse et à les mettre à disposition des internautes. Il a été condamné pour violation des droits d'auteur par le tribunal belge. Néanmoins, cette décision unique n'est appliquée qu'en Belgique. On peut dès lors constater que le poids d'une telle décision est dérisoire et que les autres agences de presse à travers le monde comme, l'Associated Press aux Etats-Unis et l'agence Reuters en Angleterre ont préféré négocier un accord avec Google plutôt que d'engager une procédure judiciaire. Même l'Agence Française de Presse, qui pourtant avait assigné la société californienne en justice, a renoncé à ses prétentions pour conclure un accord qui ne souffre pas de cette restriction territoriale.

Google a aussi été condamné dans l'affaire qui l'opposait aux éditions du Groupe La Martinière93(*). Le tribunal de Grande Instance de Paris a jugé que l'application Google Books, en mettant à la disposition des internautes les couvertures des livres et des extraits de ceux-ci, constituait une contrefaçon des droits patrimoniaux d'auteur ainsi qu'une atteinte à l'intégrité des oeuvres. Cette décision représente donc un vrai frein au projet de bibliothèque de Google et une belle victoire pour les éditeurs qui pourraient être concernés par le Google Books Settlement.

En ce qui concerne les plateformes vidéos Google Vidéo et Youtube, nous avons vu que les décisions françaises Flash Film94(*) et Zadig Production95(*) sont plus nuancées. Google n'a pas pu bénéficier de l'exonération prévue par la législation pour les hébergeurs et se voit condamné à une obligation de surveillance particulière. Il ne doit toutefois exercer un contrôle général et permanent et supprimer automatiquement toutes vidéos susceptibles de porter atteinte aux droits du titulaire d'une oeuvre. Ici encore, on observe que des géants des médias ont préféré négocier des accords financiers avec Google plutôt que d'engager des procédures judiciaires longues et coûteuses.

Si des décisions favorables aux titulaires des droits d'auteur ont été prononcées, toutes les procédures ne tournent pas en défaveur de Google. Prenons l'exemple de son moteur de recherche d'images, qui a fait l'objet de procédures tant en France qu'aux Etats-Unis96(*). Les tribunaux sont arrivés à la même conclusion, à savoir qu'il n'y avait pas de violation des droits d'auteurs. Il en va de même dans l'affaire Blake Field97(*) où le tribunal américain a décidé que les copies "cache" de l'oeuvre de Monsieur Field effectuées par Google ne portaient pas atteinte aux droits d'auteur de ce dernier.

Après analyse de toutes ces décisions, deux remarques s'imposent. La première est que les procédures impliquant Google ne sont pas nombreuses et que les décisions qui en ont résulté jusqu'ici ne lui imposent pas de réelles contraintes. Ce constat s'explique facilement par le fait qu'internet évolue sans cesse et surtout de manière très rapide, et il est frappant de constater à quel point le web a évolué au cours des dernières années. D'un autre côté, les procédures judiciaires sont souvent longues et coûteuses; une décision est parfois attendue pendant plusieurs années et, lorsqu'elle survient, porte sur des services internet déjà dépassés ou qui ont évolué.

La deuxième remarque découle donc de ce constat. La plupart des titulaires de droits d'auteur préfèrent négocier avec Google plutôt que d'entamer des procédures dont l'issue est toujours incertaine. On l'a vu, les bibliothèques, les médias, les agences de presse ou les éditeurs: tous préfèrent nouer des accords leurs assurant un partenariat avec Google, trop fréquenté par les internautes pour que les titulaires de droits s'en détournent. En outre, lorsqu'un accord aboutit, ses modalités s'imposent à Google sans limitations territoriales, ce qui est un avantage indéniable.

LES PERSPECTIVES

Comme on l'a constaté, les décisions qui condamnent Google ont un impact limité. C'est un des problèmes rencontrés par le droit d'auteur actuellement. Une décision, comme celle rendue dans l'affaire Copiepresse, qui condamne l'utilisation par Google des titres et articles de journaux a une portée limitée à la Belgique, et cela inquiète peu Google. Une telle décision n'aurait un réel poids que si elle était prise à un niveau supranational. Pour lutter efficacement contre des acteurs tels que Google, il faudrait une harmonisation du droit d'auteur, à tout le moins au niveau européen. Une telle harmonisation est difficile à mettre en pratique, mais on ne peut que constater l'impuissance des législations nationales en place aujourd'hui face à internet.

Une autre solution serait de regrouper les différents ayants droits au sein de structures à même de faire valoir leurs droits comme le fait la S.A.I.F. en France, qui regroupe des professionnels de l'image ou encore la SABAM en Belgique, qui regroupe les titulaires de droits d'auteur sur des oeuvres musicales. De telles entités serait mieux à même de défendre les intérêts de titulaires de droit d'auteurs. Mais on l'a vu, par exemple dans l'affaire opposant Google à la S.A.I.F., cette solution n'est pas toujours efficace.

Il faut toutefois garder à l'esprit que Google est un outil formidable qui permet un accès gratuit à l'information et à la culture. La société californienne a développé des applications qui ont changé la manière dont internet fonctionne et dont les gens s'échangent les informations. Par ailleurs, la plupart des médias, des auteurs ou encore des éditeurs ont besoin de Google autant que Google a besoin d'eux, pour faire connaître leurs services et leurs oeuvres.

Google représente-t-il vraiment une menace? Ces outils qui ont été a mis en place contribuent à la diffusion des informations et de la culture. Si l'on songe à Google Books, des millions de livres ont déjà été scannés et sont disponibles gratuitement, une bibliothèque entière est mise à disposition de toute personne qui dispose d'une connexion internet. Mentionnons aussi Google Actualités qui, avec son classement par thèmes, donne une information sur les sujets les plus variés, sans pour autant devoir suivre une certaine ligne éditoriale ou une philosophique qui caractérisent certains journaux d'actualités.

Google est donc un outil qui surfe toujours à la limite des droits des titulaires des oeuvres qu'il indexe ou exploite. Partant de ce constat, il faudrait définir un cadre clair ou Google, par exemple annoncerait ses projets pour permettre aux ayants droits de soulever leurs objections et leurs critiques et instaurer un véritable dialogue a priori. C'est le processus qui a été suivi, dans une certaine mesure, avec l'élaboration de Google Books. Outre le Google Books Settlement qui doit encore être entériné, et dans lequel Google annonce la manière dont il va scanner les livres, quels ouvrages seront disponibles, et de quelle manière ils le seront, la société californienne a mis en ligne un formulaire qui peut être complété par les titulaires des droits d'auteurs qui ne souhaitent pas que leurs oeuvres soient référencées dans la bibliothèque numérique. De plus, des conférences ont été organisées avec les différents intervenants de ce projet, afin de récolter toutes les remarques et critiques qui pourront être utiles. La clef réside donc, selon nous, dans un processus de collaboration efficace qui sera mis en place par les autorités publiques et les titulaires de droits d'auteurs d'une part, et Google d'autre part. Car si Google est une société privée qui possède à présent un pouvoir immense, il est concevable d'exploiter efficacement toutes les possibilités qu'offrent les nombreuses applications créées par Google en les encadrant et en espérant que cette société collabore pleinement. On serait tenté de croire aux bonnes intentions de Google dont le slogan, lancé par son fondateur lors d'une conférence de presse98(*) est "Don't Be Evil"!

Remerciements

Je remercie Monsieur Vanbrabant qui m'a donné l'opportunité de réaliser ce travail de fin d'études, ainsi que pour son soutient.

* 1 "France: les outils de recherches", 23 mars 2009 http://www.journaldunet.com/cc/03_internetmonde/interfrance_moteurs.shtml, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 2 A. STROWEL et J.P. TRIAILLE, Avant-Propos, in A. STROWEL et J.P. TRIAILLE (sous la direction de), "Google et les nouveaux services en ligne (impact sur l'économie du contenu et questions de propriété intellectuelle)", Bxl, Larcier, 2008, p.5.

* 3 http://www.google.fr/support/bin/static.py?page=portal_more.cs, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 4 Google, http://fr.wikipedia.org/wiki/Google, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 5 Google, http://Actualités.google.com/intl/fr/about_google_Actualités.html, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 6 A propos de la question des hyperliens voy. not. C. MOLIERE, "Les articles de presse à l'ère du numérique. Le cas de Google Actualités", I.R.D.I., 2004, p.8; A. STROWEL, "La responsabilité des intermédiaires sur Internet: actualité et question des hyperliens", R.I.D.A., octobre 2000, n° 186, p 3.

* 7 Loi du 30 juin 1994 relative au droit d'auteur et aux droits voisins, M.B., 27 juillet 1994.

* 8 A. STROWEL, "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", in "Google et les nouveaux services en ligne" op. cit., p.35.

* 9 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, R.D.T.I. n°28/2007, p.221.

* 10 Voy en ce sens: A. STROWEL, "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?" op. cit.., p.37 et 38.

* 11 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p. 233 et 234, qui cite notamment: A.BERENBOOM, "Le nouveau droit d'auteur et les droits voisins", Bruxelles, Larcier 1997, p.49 et F De VISSCHER et B. MICHAUX, "Précis du droit d'auteur et des droits voisins", Bruxelles, Bruylant 2000, p.15

* 12 Civ. Bruxelles, 16 octobre 1996, A. & M., 1996, p.426.

* 13 En ce sens voy. : A. BERENBOOM, op. cit. p.78 et p.102, C. O. LEFEVRE, note sous Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, R.D.T.I. n°28/2007, p.250; A. STROWEL, "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", op. cit., p.37.

* 14 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p.236.

* 15 Ibidem.

* 16 Loi du 22 mai 2005 transposant en droit belge la Directive européenne 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, M.B., 27 mai 2005

* 17 voy à ce sujet: D. VOORHOOF, "Slecht nieuws voor Google Actualités" A.& M., 2007/1-2, p.121.

* 18 O. C. LEFEVRE, note sous Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p.251.

* 19 Le nouveau Petit Robert, Dictionnaire Le Robert, Paris, 1993, p.1980.

* 20 Civ. Bruxelles (cess.), 13 février 2007, précité, p.237 qui cite: .A.BERENBOOM, op. cit., p.131; T.VERBIEST, "Entre bonnes et mauvaises références, à propos des outils de recherche sur internet", A.&M., 1999, p.42; S.HOEBEKE et B. MOUFFE, "Le droit de la presse",Bruxelles, Bruylant, 2000, p.191.

* 21 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p.238.

* 22 A. STROWEL, "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", op. cit. p.37.

* 23 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p.240.

* 24 Civ. Bruxelles, 16 octobre 1996, précité, p.426.

* 25 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p.239.

* 26 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité, p.242.

* 27 P. JANNET, "Google News : les points de vue divergent selon les agences de presse", 25 mars 2005, http://www.journaldunet.com/0503/050325afp_google.shtml, (dernière visite le 14 mai 2010). ; " Google Actualités retire les dépêches AFP", 24 mars 2005, http://www.liberation.fr/medias/0101523347-google-Actualités-retire-les-depeches-afp, (dernière visite le 14 mai 2010) ; C. McCARTHY,"Agence France Presse, Google settle copyright dispute", 6 avril 2007, http://Actualités.cnet.com/2100-1030_3-6174008.html, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 28 D. SULLIVAN, "Google settle over Google Actualités", 14 avril 2007, http://searchengineland.com/afp-google-settle-over-google-Actualités-copyright-case-10926, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 29 A.STROWEL "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", op. cit. p.40.

* 30 Articles L. 112-1 et L.112-2 du Code de Propriété Intellectuelle.

* 31 A.STROWEL "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", op. cit., p.41.

* 32 "L'avenir de la presse écrite discutée à Barcelone", 26 mai 2009, http://www.lalibre.be/economie/actualite/article/505307/l-avenir-de-la-presse-ecrite-discutee-a-barcelone.html, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 33 Loi du 16 juillet 2004 portant le Code de droit international privé, M.B., 27 juillet 2004.

* 34 C.J.C.E., arrêt SHEVILL, aff. n° C-68/93, du 7 mars 1995, Rec. 1995, I-415.

* 35 C. COLIN et A De FRANQUEN: "Droits intellectuels", R.D.T.I., n° 35,février 2009, p.41., A. STROWEL "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", op. cit., p.38.

* 36 Cité et analysé par J.P. TRIAILLE: "La question des copies "cache" et la responsabilité des intermédiaires, Copipresse C. Google, Field V. Google" in A. STROWEL et J.P. TRIAILLE, "Google et les nouveaux services en ligne", Larcier, 2008, p.251.

* 37 District Court Of Nevada, Blake Field v. Google, http://fairuse.stanford.edu/primary_materials/cases/fieldgoogle.pdf

* 38 District Court of Nevada, p.5, point 13

* 39 J.P. TRIAILLE, op. cit., p.265

* 40 Directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur («directive sur le commerce électronique»), J.O.C.E L.178/1, 17 juillet 2000.

* 41 Loi du 11 mars 2003 sur certains aspects juridiques des services de la société de l'information, M.B., 17 mars 2003.

* 42 Tribunal de Grande Instance de Paris, 20 mai 2008, R.D.T.I., n° 33/4, 2008, p. 501.

* 43 Article 5: (1) Les auteurs jouissent, en ce qui concerne les oeuvres pour lesquelles ils sont protégés en vertu de la présente Convention, dans les pays de l'Union autres que le pays d'origine de l'oeuvre, des droits que les lois respectives accordent actuellement ou accorderont par la suite aux nationaux, ainsi que des droits spécialement accordés par la présente Convention.

(2) La jouissance et l'exercice de ces droits ne sont subordonnés à aucune formalité; cette jouissance et cet exercice sont indépendants de l'existence de la protection dans le pays d'origine de l'oeuvre. Par suite, en dehors des stipulations de la présente Convention, l'étendue de la protection ainsi que les moyens de recours garantis à l'auteur pour sauvegarder ses droits se règlent exclusivement d'après la législation du pays où la protection est réclamée.

(3) La protection dans le pays d'origine est réglée par la législation nationale. Toutefois, lorsque l'auteur ne ressortit pas au pays d'origine de l'oeuvre pour laquelle il est protégé par la présente Convention, il aura, dans ce pays, les mêmes droits que les auteurs nationaux.

* 44 Cass fr., Ch. Civ., 30 janvier 2007, Arrêt Lamore, disponible sur http://www.legifrance.gouv.fr/

* 45 In determining whether the use made of a work in any particular case is a fair use the factors to be considered shall include:

(1) the purpose and character of the use, including whether such use is of a commercial nature or is for nonprofit educational purposes;

(2) the nature of the copyrighted work;

(3) the amount and substantiality of the portion used in relation to the copyrighted work as a whole; and

(4) the effect of the use upon the potential market for or value of the copyrighted work.

* 46 J.GINSBURG, note sous Tribunal de Grande Instance de Paris, 20 mai 2008 , R.D.T.I., n° 33/4, 2008, p. 518.

* 47 Voy notamment: X. WAUTHY: "La gratuité c'est le vol payant! Google, le web 2.0 et le modèle économique du gratuit: une industrie à réguler?" in A. STROWEL et J.P. TRIAILLE (sous la direction de)"Google et les nouveaux services en ligne", Larcier, 2008, p.51; S. PIRLOT DE CORBION: "Référencement et droit des marques: quand les mots clés suscitent toutes les convoitises",. in A. STROWEL et J.P. TRIAILLE "Google et les nouveaux services en ligne", Larcier, 2008, p.123; A. DE FRANCQUEN, "La nature de l'usage d'une marque en tant qu'AdWord", RDTI n° 37, avril 2009,p.134.

* 48 J.GINSBURG, op. cit., p. 520.

* 49 Perfect 10, Inc. v. Amazon.com, Inc., 508 F.3d 1146 (9th Cir. 2007); http://www.ca9.uscourts.gov/datastore/opinions/2007/12/03/0655405.pdf

* 50 Perfect 10, Inc. v. Amazon.com, Inc., 508 F.3d 1146 (9th Cir. 2007), ch.II, point 15.

* 51 P.GOLDSTEIN, "Fair use in context", 31 Colum. J. L.& the Arts, 433, 438 (2008) cité par J.GINSBURG, op. cit., p. 520.

* 52 Google, http://books.google.com/googlebooks/library.html,, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 53 Google, http://www.google.fr/googlebooks/partners.html, (dernière visite le 14 mai 2010)

* 54 Il s'agit d'une action en justice intentée par un large groupe de personnes ayant un intérêt commun.

* 55 A. STROWEL, "Google Books: quel avenir pour l'accès aux livres ? Une bibliothèque universelle en devenir ou une future galerie commerciale?" A. & M. 2010/1, Larcier, p.130 et 131.

* 56 Ibidem.

* 57 Ibidem; http://static.googleusercontent.com/external_content/untrusted_dlcp/www.googlebooksettlement.com/fr//05CV8136_20091119.pdf

* 58 Google s'engageait à reverser 63% des revenus au Registre.

* 59 Google, http://books.google.com/intl/fr/googlebooks/agreement/, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 60 Google, http://www.googlebooksettlement.com/r/home?hl=fr&cfe_set_lang=1, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 61 A. STROWEL, "Google Books: quel avenir pour l'accès aux livres ? Une bibliothèque universelle en devenir ou une future galerie commerciale?", op. cit. p.133.

* 62 Google, http://www.googlebooksettlement.com/, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 63 TGI Paris, 19 décembre 2009, Seuil c/ Google France et Google, http://www.juriscom.net/documents/tgiparis20091218.pdf

* 64 voir supra, note 43

* 65 TGI Paris, 19 décembre 2009, précité, p.15

* 66 Tribunal de Grande Instance de Paris, 20 mai 2008, précité, p. 501.

* 67 D. CAVIGNIOLI, "Google édition, Naissance d'une librairie géante", 5 mai 2010, http://bibliobs.nouvelobs.com/20100505/19341/google-edition-naissance-dune-librairie-geante, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 68 A. STROWEL, "Google Books: quel avenir pour l'accès aux livres ? Une bibliothèque universelle en devenir ou une future galerie commerciale?", op. cit., p.134.

* 69 J. L., "Google books: Mitterrand se rendra à Montain View, 25 novembre 2009, http://www.numerama.com/magazine/14581-google-books-mitterrand-se-rendra-a-mountain-view-en-2010.html, (dernière visite le 14 mai 2010).; N.L.B., "Mitterrand: " trouver un consensus européen contre Google"", 27 novembre 2009, http://www.lejdd.fr/Culture/Livres/Actualite/Mitterrand-Trouver-un-consensus-europeen-contre-Google-153788/, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 70 http://europeana.eu/portal/, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 71 Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, J.O.C.E, L 167, 22 juin 2001, p.10-19.

* 72 http://ec.europa.eu/internal_market/copyright/docs/copyright-infso/greenpaper_fr.pdf

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* 74 BIBLIOBS.COM, 30 mars 2010, http://bibliobs.nouvelobs.com/20100330/18572/gallimard-va-attaquer-google, (dernière visite le 14 mai 2010); D. DENUIT, "Gallimard attaque Google à son tour", 31 mars 2010, http://www.lefigaro.fr/medias/2010/03/31/04002-20100331ARTFIG00328-gallimard-attaque-google-a-son-tour-.php, (dernière visite le 14 mai 2010); N. SILBERT, "Gallimard et Albin Michel prêts à attaquer", 31 mars 2010, http://www.lesechos.fr/info/comm/020448747915.htm, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 75 E. VALGAEREN et N. ROLAND: "YouTube and social networking sites - new kids on the block?" in A. STROWEL et J.P. TRIAILLE (sous la direction de)"Google et les nouveaux services en ligne", Larcier, 2008, p.207.

* 76 Youtube, http://www.YouTube.com/t/terms?hl=fr, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 77 A. STROWEL "Google et les nouveaux services en ligne: quels effets sur l'économie des contenus, quels défis pour la propriété intellectuelle?", op. cit., p.38; J.C. GINSBURG: "Whose tube? Liability risks and limitations of copyright-dependent technology entrepreneurs" in A. STROWEL et J.P. TRIAILLE (sous la direction de) "Google et les nouveaux services en ligne", Larcier, 2008, p.227.

* 78 Article 14 de la directive 2000/31 du 8 juin 2000.

* 79 E. MONTERO: "Les responsabilités liées au web 2.0", R.D.T.I. n° 32/2008,p.368.

* 80 T.G.I. Paris, 3e ch., 19 octobre 2007, Zadig Productions et autres c. Google Inc, http://www.legalis.net/jurisprudence-decision.php3?id_article=2072

* 81 J.C. GINSBURG: "Whose tube? Liability risks and limitations of copyright-dependent technology entrepreneurs" in "Google et les nouveaux services en ligne", op. cit., p.247

* 82 T.G.I. Paris, 3e ch., 19 octobre 2007, Zadig Productions et autres c. Google Inc, précité.

* 83 Comm. Paris, 20 février 2008, Flach Film c. Google, http://www.legalis.net/jurisprudence-decision.php3?id_article=2223

* 84 Youtube, http://www.YouTube.com/press_room_entry?entry=Ir-31H4pFCQ, (dernière visite le 14 mai 2010); Youtube, http://www.YouTube.com/press_room_entry?entry=Ae9WmtO6LF4, (dernière visite le 14 mai 2010); Youtube, http://www.YouTube.com/press_room_entry?entry=MW8YnmlDy-8, (dernière visite le 14 mai 2010).; Youtube, http://www.YouTube.com/press_room_entry?entry=tVJDkkQT37w, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 85 E. VALGAEREN et N. ROLAND: op. cit., p.207.

* 86 Viacom, http://www.viacom.com/Actualités/Pages/Actualitéstext.aspx?RID=1009865, 13 mars 2007, (dernière visite le 14 mai 2010);

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* 87 C.J.C.E, C 236/08 à 238/08, 23 mars 2010, disponible sur: http://curia.europa.eu

* 88 Conclusions de l'avocat général M. M. POIARES MADURO dans les affaires C 236/08 à C 238/08, 22 septembre 2009, disponibles sur: http://curia.europa.eu

* 89 Viacom, http://Actualités.viacom.com/Actualités/Pages/summaryjudgmentstatement.aspx, 18 mars 2010, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 90 Youtube, http://www.YouTube.com/t/dmca_policy, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 91 J.G. " La plus célèbre plateforme vidéo du Web annonce un record : la mise en ligne de 24 heures de vidéos chaque minute", 18 mars 2010, http://www.generation-nt.com/YouTube-videos-chiffres-heures-upload-actualite-981701.html, (dernière visite le 14 mai 2010).

* 92 Civ. Bruxelles (cess), 13 février 2007, précité., p.221.

* 93 TGI Paris, 19 décembre 2009, Seuil c/ Google France et Google, précité.

* 94 Comm. Paris, 20 février 2008, Flach Film c. Google Inc, précité.

* 95 T.G.I. Paris, 3e ch., 19 octobre 2007, Zadig Productions et autres c. Google Inc, précité.

* 96 S.A.I.F c. Google: Tribunal de grande instance de Paris, 20 mai 2000, précité, p. 501

Perfect 10 v. Google : Perfect 10, Inc. v. Amazon.com, Inc., 508 F.3d 1146 (9th Cir. 2007), précité

* 97 District Court Of Nevada, Blake Field v. Google, précité.

* 98 Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Google, (dernière visite le 14 mai 2010); Wikipédia, http://en.wikipedia.org/wiki/Don't_be_evil, (dernière visite le 14 mai 2010)

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Dictionnaire

Le nouveau Petit Robert, Dictionnaire Le Robert, Paris, 1993.






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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams