II- LES STRUCTURES D'AUDIT INTERNE, D'INSPECTION ET/OU
D'EVALUATION DE LA
PERFORMANCE DANS LES STRUCTURES TERRITORIALES LOCALES :
Comme nous l'avons montré auparavant, les
collectivités territoriales et les structures intercommunales font face
à de nouveaux enjeux, portés par le renouvellement des modes de
gestion publique, la volonté de modernisation des administrations et
l'exigence croissante des citoyens (et plus largement des parties prenantes) en
termes de transparence et d'efficacité.
La notion de performance est donc au coeur des
problématiques pour l'administration territoriale locale. Rappelons
à cet effet que la performance peut être définie comme
« la capacité à atteindre des objectifs préalablement
fixés, exprimés en termes d'efficacité
socioéconomique, de qualité de service ou d'efficience de la
gestion ». Par conséquent, la démarche de performance est un
« dispositif de pilotage des administrations ayant pour objectif
d'améliorer l'efficacité de la dépense publique en
orientant la gestion vers l'atteinte des résultats dans le cadre de
moyens prédéterminés ».
L'objectif de cette partie est donc d'examiner les structures
qui exercent des missions d'audit interne, d'inspection ou encore
d'évaluation de la conformité et/ou de la performance (et ce au
niveau de l'activité ou des financements) dans les collectivités
territoriales et les structures intercommunales. A noter que ces missions
peuvent porter sur l'organisation en tant que telle ou sur des structures
financées par les organisations territoriales.
Ici, nous nous intéresserons donc à l'audit interne
(au sens large) au sein des collectivités territoriales. En effet, au
sein de certaines organisations territoriales, les services apparentés
à l'audit interne exercent des fonctions proches de l'audit interne
(contrôle de gestion, évaluation des politiques publiques,
maîtrise des risques...). Ces services rentreront pour partie dans notre
analyse, et ce afin d'établir un diagnostic le plus complet possible.
Par ailleurs, cette démarche nous semble cohérente
avec la définition de l'audit interne établie par l'IFACI qui est
la suivante : « l'audit interne est une activité
indépendante et objective qui donne à une organisation une
assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations, lui
apporte des conseils pour les améiorer et contribue à
créer de la valeur ajoutée. Il aide cette organisation à
atteindre ses objectifs en évaluant, par une approche
systématique et méthodique, ses processus de management des
risques, de contrôle, et de gouvernement d'entreprise et en faisant des
propositions pour renforcer leur efficacité. » Cette section
sera donc articulée en sept parties, qui traitent de trois grandes
thématiques. Dans un premier thème, nous établirons un
état des lieux sur les pratiques de l'audit interne, afin de voir dans
quelle mesure l'audit interne et l'évaluation sont présents dans
les collectivités territoriales. A cet effet, les démarches de
contrôle interne et de gestion de risques seront aussi
examinées.
Une fois cette description effectuée, nous nous pencherons
plus en détail sur l'audit interne - que nous tenterons de distinguer de
l'évaluation -, afin de voir quels sont ses fondements, quelles sont les
pratiques effectives des organisations territoriales (en termes de
contrôle interne puis d'audit interne, et ce au niveau des missions et de
l'organisation des services), et les enjeux de ce type de service. Cette
deuxième grande thématique va de la deuxième à la
sixième sous-partie.
Enfin, dans le troisième thème, nous
présenterons les bonnes pratiques relevées, en matière de
contrôle interne et d'audit interne.
Cette deuxième section devrait donc répondre
à l'objectif de présenter l'état des lieux, les pratiques
et les enjeux de l'audit interne au sein des structures territoriales.
1. L'évaluation des politiques publiques :
Evaluer une politique publique, c'est d'abord en mesurer
l'efficacité à l'aide d'indicateurs de performance pour, dans un
second temps, en apprécier la pertinence. Des évaluations sont
conduites dans de nombreux domaines, comme la politique de la ville ou la
politique éducative (évaluation annuelle des lycées).
Outil privilégié de la réforme de l'Etat,
elle est amenée à jouer un rôle plus important dans le
cadre de la réforme budgétaire et de la
décentralisation.
L'évaluation des politiques publiques, à ne pas
confondre avec l'évaluation et la notation des agents publics,
présente une double dimension :
- Quantitative : elle mesure les effets de l'action
publique en comparant ses résultats aux objectifs assignés et aux
moyens mis en oeuvre, notamment à l'aide d'indicateurs de performance
;
- Qualitative : elle porte un jugement sur la pertinence
des objectifs et donc, éventuellement, peut conduire à en
réviser le choix.
En pointe dans les pays anglo-saxons, notamment aux Etats-Unis
où le Congrès dispose depuis les années vingt de moyens
importants pour évaluer les programmes
gouvernementaux, l'évaluation de l'action publique peine
à faire reconnaître sa spécificité en France et
connaît un développement plus lent.
Des progrès ont cependant été accomplis
depuis une dizaine d'années : le Conseil national de l'évaluation
et le Commissariat général du Plan, avant la redéfinition
de ses missions en 2003 autour de l'Etat stratège et de la prospective,
ont piloté un programme important d'évaluations
interministérielles ; les travaux des directions des études ou de
la statistique de nombreux ministères, des inspections
générales, ou de la Cour des comptes, notamment dans les domaines
de l'éducation (évaluation des lycées), de la santé
(évaluation de la politique de lutte contre le sida) ou de la politique
de la ville, ont également contribué à la diffusion d'une
culture de l'évaluation en France.
Il existe aujourd'hui un contexte favorable à un
rôle accru de l'évaluation. A cet égard, des
réformes en cours devraient intégrer davantage
d'évaluation dans le processus de la décision publique : au
niveau national, la réforme budgétaire prévue par la loi
organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF) ; dans le
cadre de la décentralisation, la reconnaissance du droit
l'expérimentation (loi du 1er août 2003 relative à
l'expérimentation par les collectivités territoriales).
Les acteurs de l'évaluation
L'évaluation est en France une pratique fortement
institutionnalisée.
- Au niveau central, il existe un dispositif
interministériel (Conseil national de l'évaluation et
Commissariat général du Plan) aujourd'hui en cours de
réforme ; certains ministères ont développé un
dispositif d'évaluation de grande ampleur (Education nationale,
Equipement, Travail, Affaires sociales).
Il convient également de souligner le rôle de la
Cour des comptes dont une partie des contrôles s'apparente à
l'évaluation.
L'action du Parlement se développe progressivement, mais
il est encore loin de disposer des moyens de certains de ses homologues
étrangers, le Congrès américain par exemple.
- Au niveau territorial, l'évaluation des politiques
structurelles européennes et des contrats de plan Etat-région a
joué un rôle important dans la diffusion d'une culture de
l'évaluation en France.
- A côté des administrations, on soulignera la
tendance, depuis une vingtaine d'années, à la multiplication des
organismes indépendants dédiés à
l'évaluation d'un domaine précis, notamment des agences et
autorités administratives indépendantes (AAI). A signaler
également l'apparition d'organismes privés comme la
Société française d'évaluation qui militent en
faveur du développement de toutes les formes d'évaluation
(évaluation managériale, mais aussi de évaluation
participative incluant le point de vue de l'usager).
Les champs de l'évaluation : exemples
Les études d'évaluation peuvent différer par
l'origine (commanditaire), la démarche adoptée et la
finalité poursuivie, comme l'illustrent les exemples suivants.
- L'évaluation annuelle des lycées résulte
d'une grande enquête menée régulièrement par le
ministère de l'Education nationale. Elle tend à chaque
établissement un véritable miroir de son activité. Elle a
une finalité formative ou d'apprentissage en voulant éclairer les
acteurs sur la mise en oeuvre et les conséquences de leurs pratiques.
- L'évaluation de la politique de la ville, politique qui
met en relation de multiples acteurs, résulte de la décision
d'une institution de contrôle (Cour des comptes). Son rapport a
bénéficié d'une publicité importante. Il mêle
contrôle des procédures administratives et financières et
évaluation. S'il poursuit une finalité gestionnaire
(appréciation sur le bon emploi de fonds publics), il interroge
également la pertinence des objectifs poursuivis à la
lumière des résultats obtenus.
- L'évaluation des contrats de plan Etat-région
résulte d'une obligation réglementaire (évaluation
obligatoire d'une politique contractuelle pluriannuelle). Des crédits
spécifiques sont identifiés dans les contrats de plan pour
financer les évaluations.
Un outil privilégié de la réforme de
l'Etat
Au moment où l'Etat est confronté à la
nécessité de faire évoluer ses structures et son
organisation, l'évaluation est appelée à jouer un
rôle plus important dans deux domaines clés de la réforme
de l'Etat :
- la réforme de la décentralisation, avec la
reconnaissance du droit l'expérimentation (loi du 1er août 2003
relative à l'expérimentation par les collectivités
territoriales) pour tester de nouveaux transferts de compétence de
l'Etat vers les collectivités territoriales, relance la
nécessité d'une démarche d'évaluation,
déjà appliquée pour les contrats de plan
Etat-région ;
- la réforme budgétaire, prévue par la loi
organique relative aux lois de finance du 1er août 2001 (LOLF), en
faisant évoluer le pilotage de l'action administrative vers une logique
de programmes (définition d'objectifs assortis d'indicateurs de
performance), devrait inciter à une meilleure évaluation de
l'efficacité de la dépense publique.
2.Le contrôle interne :
Les normes d'application précisent que « L'auditeur,
lorsqu'il détermine jusqu'où pousser la vérification et
sur quel(s) domaine(s) elle doit porter, doit veiller à évaluer
la fiabilité du contrôle interne ».
L'examen et l'évaluation du contrôle interne doivent
être adaptés au type d'audit entrepris. S'il s'agit d'un audit
financier, l'examen et l'évaluation portent principalement sur les
contrôles destinés à protéger les actifs et les
ressources et permettent de s'assurer que les documents comptables sont exacts
et complets. S'il s'agit d'un contrôle de la régularité,
l'examen et l'évaluation portent principalement sur les contrôles
qui aident les administrateurs à respecter les lois et les
réglementations. S'il s'agit d'un audit des résultats, ils
portent sur les contrôles qui permettent à l'unité de
gérer ses activités d'une façon économique,
rentable et efficace, de suivre les directives de la hiérarchie et de
fournir dans les délais des informations financières et
comptables fiables.
Compte tenu des objectifs de l'audit et du degré de
fiabilité souhaité, l'examen et l'évaluation du
contrôle interne sont plus ou moins poussés.
Lorsque les systèmes de comptabilité ou
d'information sont informatisés, l'auditeur doit déterminer si
les contrôles internes fonctionnent bien de façon à ne
traiter que des données parfaitement justes, fiables et
complètes.
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