CONCLUSION GENERALE
La ville de Lubumbashi comme d'ailleurs les autres villes de
la République Démocratique du Congo connaît un
sérieux problème de survie des ménages à cause de
l'ampleur de la crise que traverse son économie nationale. La
présente étude a porté sur « Genre et lutte contre la
pauvreté à Lubumbashi. Une contribution à l'analyse de
l'autonomisation de la femme à travers le microcrédit ». En
réalisant cette étude, nos préoccupations ont
tourné autour des questions suivantes :
1. Est-ce que l'approche genre peut réellement contribuer
à la lutte contre la pauvreté?
2. Quels sont les changements importants intervenus chez la
femme lushoise par suite de mutations historico- culturelles, plus
précisément de son autonomisation à travers le
microcrédit ? En d'autres termes, quel est l'apport du
microcrédit dans la mise en oeuvre des programmes d'autonomisation de la
femme lushoise ?
Pour répondre a priori à ces interrogations,
nous avions pensé que la quête légitime
d'égalité entre les hommes et les femmes tout comme de
l'autonomie de la femme a enregistré certes des résultats
positifs dans le domaine de l'égalité des droits. Mais que
l'approche genre dans la lutte contre la pauvreté ne peut être
atteinte que lorsque les différences entre les sexes seront reconnues et
considérées comme complémentaires et que
l'élément culturel du genre sera compris dans son contexte
spécifique. L'autonomisation de la femme a été
envisagée comme l'accroissement de sa force sociale, politique,
économique et spirituelle, tant sur le plan individuel que collectif,
ainsi que l'élimination des obstacles qui pénalisent la femme,
l'empêchant d'être pleinement intégrée dans les
divers secteurs de la société. Concrètement, cela signifie
qu'il faut affronter les pratiques discriminatoires qui excluent la femme dans
des processus de prise des décisions et du développement. Donc
l'autonomisation de la femme lushoise à travers le microcrédit
s'inscrit donc dans le cadre des programmes d'amélioration de la
condition de la femme. Ces programmes devraient viser le respect de la femme de
la part des hommes et sa reconnaissance en tant que membre apportant une
contribution importante à la société et une plus grande
estime envers celle-ci dans son rôle prédominant dans la
réduction de la pauvreté. Le microcrédit
encourage les microprojets au niveau local et induit des
mutations à la base. Ces effets positifs et multiplicateurs de
l'autonomisation de la femme montrent que le microcrédit doit être
vigoureusement soutenu en faveur de la femme lushoise en particulier et
Congolaise en général.
Les bénéfices de l'autonomisation produits par
le microcrédit doivent aller de pair avec le besoin d'éducation
et de prise de conscience, en particulier au niveau des communautés
locales. L'éducation des femmes demeure particulièrement
l'instrument le plus important dans la promotion de l'égalité
entre les hommes et les femmes et dans l'autonomisation des femmes en vue de
pleinement contribuer à la lutte contre la pauvreté. Surtout
lorsqu'on sait que les femmes ont été éduquées de
façon à croire à tout moment que leur position de
subordination par rapport aux hommes est normale et naturelle, qu'elle
procède de l'ordre social, voire divin.
Outre l'introduction générale et la conclusion
générale, ce mémoire a été subdivisé
en cinq chapitres. Dans l'introduction générale, nous avons, en
premier lieu, présenté l'objet de notre étude et
justifié les raisons qui nous ont motivé pour le choix de ce
sujet. Par la suite, nous avons indiqué la délimitation de
l'étude. Après, nous avons fait la révision des
études antérieures pour bien dégager l'originalité
de notre étude. Nous avons ainsi posé notre problématique
et formulé nos hypothèses opératoires. Nous avons
également indiqué notre méthode ainsi que les techniques
de la recherche. Enfin nous avons présenté les difficultés
rencontrées au cours de la recherche.
Le premier chapitre a porté sur les
généralités concepto-théoriques. Dans ce chapitre,
nous avons précisé le contour sémantique et
théorique des concepts de notre étude, notamment le genre, la
pauvreté et la lutte. Par la suite nous avons revu la
modélisation du genre et lutte contre la pauvreté. Le second
chapitre a consisté à dégager l'importance
socio-économique du microcrédit et de la microfinance. Ce
chapitre nous a permis de fixer les contours du microcrédit et de la
microfinance avant d'en aborder la typologie et la méthodologie. Enfin
nous avons dégagé le rôle socioéconomique du
microcrédit et présenté son expérimentation
à travers le monde. Le
troisième chapitre a été consacré
aux manifestations de la pauvreté de la femme lushoise. Ce chapitre nous
a conduit à montrer comment la pauvreté est vue par les pauvres
eux-mêmes et aussi à montrer la répartition
sexo-spécifique du travail à Lubumbashi. Ce qui a justifié
l'importance des lignes accordées au travail des femmes et à la
survie des ménages. Ce chapitre a été d'un apport non
négligeable dans la mesure où nous nous sommes donné comme
tâche de cerner le concept même de « pauvre » et de
pénétrer les modalités de calcul de pauvreté. Se
basant sur les déclarations des pauvres, la banque Mondiale (2000) a
proposé la définition synthétique suivante : « la
pauvreté est un profond dénuement, un manque aigu de
bien-être. Etre pauvre, c`est avoir faim, ne pas avoir un toit, ne pas
avoir des vêtements décents, être malade et ne pas pouvoir
se faire soigner ; c`est être illettré et sans instruction. Les
personnes démunies sont particulièrement exposées à
des événements extérieurs qui échappent à
leur contrôle : maltraitées par les institutions et la
société, n`ont les moyens de se faire entendre, ni d`exercer une
influence quelconque »
Malgré ses immenses ressources naturelles, la
République Démocratique du Congo est l'un des pays les plus
pauvres du Monde. Les populations vivent dans des conditions économiques
et sanitaires déplorables. Près de 80% de la population
congolaise survivent à la limite de la dignité humaine, avec
moins de 1$ par personne par jour, moins de 20% ont accès
régulier à l'électricité. La pauvreté se
manifeste par la malnutrition qui touche entre 30 et 50% des femmes et des
enfants. Au total, 1,6 millions de personnes sont en situation
d'insécurité alimentaire. Sur le marché du travail, la
situation de chômage ou d'emploi précaire touchait la
majorité de la population active en 2004. La part du travail informel
est en constante augmentation et les salaires sont dérisoires. C`est
donc dans ces conditions que vit la femme lushoise. Cette pauvre qui tente de
sortir avec peine de la situation de précarité dans laquelle elle
se trouve.
Ensuite, le quatrième chapitre a analysé la
politique de l'autonomisation de la femme à Lubumbashi. A cette
occasion, nous avons d'abord montré l'approche conceptuelle et
théorique de l'autonomisation de la femme. Nous avons ensuite
présenté l'évolution des politiques
d'autonomisation de la femme à Lubumbashi avant de terminer par la
modélisation de la femme Lushoise.
Enfin, le cinquième chapitre a été
consacré à l'autonomisation de la femme lushoise par le
microcrédit. Ce chapitre a été subdivisé en deux
sections. La première section nous a permis de présenter le
milieu d'enquete qui est la ville de Lubumbashi. La deuxième section a
présenté les données d'enquete, leur
interprétation.
Pour atteindre les objectifs de cette recherche et
vérifier nos hypothèses opératoires, notre méthode
a été fondamentalement dialectique. Cette méthode a
été appuyée par les techniques d'analyse documentaire,
d'observation directe et d'interview.
Au terme des nos analyses et interprétations
sociologiques enrichies par des débats avec nos enquetés, nous
sommes parvenu à constater l'importance de la question du genre dans la
lutte contre la pauvreté. En effet, parmi les obstacles qui
empêchent la femme de participer au développement de sa
société figurent les pratiques socio culturelles et
économiques discriminatoires qui l'excluent dans le processus de prise
des décisions et du développement. Se trouvant dans un contexte
de crise prolongée touchant l'ensemble des couches moyennes et
inférieures, - où l'expérience la plus commune est
l'insuffisance de revenus monétaires et la cherté de la vie, - la
femme lushoise adopte une démarche nouvelle pour l'amélioration
de ses conditions socioculturelles. Pour pallier à tous ces
problèmes, nous avons proposé l'autonomisation de la femme
à travers le microcrédit.
Cependant, la survalorisation de la microfinance risque de
défavoriser les autres outils de réduction de la pauvreté.
La récupération politique de cette stratégie de lutte
contre la pauvreté peut donner des prétextes pour réduire
encore plus d'autres programmes sociaux comme l'alphabétisation, la
nutrition, l'éducation ou la santé. Pourtant
l'intérêt accordé à la microfinance comme faisant
partie de stratégies de lutte contre la pauvreté ne doit faire
oublier d'autres programmes complémentaires des
secteurs d'éducation, de santé, ou encore de
l'infrastructure. Disons seulement que si le microcrédit permet un
certain développement, cela ne signifie pas qu'il faille ainsi oublier
l'importance des autres acteurs. Encore l'autonomisation de la femme à
travers le microcrédit dépend aussi de l'accompagnement et du
soutien des institutions de la microfinance avec la collaboration d'autres
intervenants.
Nous n'avons aucune prétention à une
étude exhaustive. Certains aspects socio-ontologiques ( la culture, le
développement technologique et économique) ne sont pas
approfondis ici, alors qu'ils interfèrent sur la lutte contre la
pauvreté et sur la question du genre. Nous avons néanmoins
élaboré une ébauche sue laquelle porteraient des
études à venir pour saisir les différents aspects de la
lutte contre la pauvreté et partant, de l'amélioration des
conditions de vie de la femme lushoise.
Nous pensons à juste titre que notre modestie dans la
présentation des données ne cache pas cependant la portée
réelle de notre contribution à la théorie du genre et
développement.
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